La lettre juridique n°415 du 4 novembre 2010 : Droit comptable

[Textes] La proposition de l'Autorité des normes comptables relative à la comptabilité des micro-entreprises

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par Robert Obert, Professeur agrégé honoraire, Diplômé d'expertise comptable, Docteur en sciences de gestion

le 04 Janvier 2011

Dans le plan stratégique qu'elle a présenté le 26 juillet 2010, l'Autorité des normes comptables (ANC) formule un projet de simplification des obligations comptables en Europe et, notamment, de celles concernant les micro-entreprises. Ce projet est à rapprocher des règles françaises actuellement applicables relatives aux comptes annuels simplifiés, aux entités soumises au régime simplifié d'imposition et aux micro-entreprises. Le projet de l'ANC présente, notamment, une définition de la micro-entreprise, trois axes essentiels de réforme et une simplification du cadre comptable général en Europe. Il est accompagné d'un modèle simplifié d'états financiers en une seule page pour les micro-entreprises.


  • La présentation de comptes annuels simplifiés

Cette présentation est autorisée par l'article L. 123-16 du Code de commerce (N° Lexbase : L6028ICA) qui permet aux commerçants, personnes physiques ou morales, d'adopter, une présentation simplifiée de leurs comptes individuels lorsqu'ils ne dépassent pas à la clôture de l'exercice, des chiffres fixés par l'article R. 123-200 du Code de commerce (N° Lexbase : L9953HYB), pour deux des trois des critères suivants :

Total du bilan Montant net du chiffre d'affaires Nombre moyen de salariés
Pour le bilan et le compte de résultat 267 000 euros 534 000 euros 10
Pour l'annexe 3 650 000 euros 534 000 euros 50

Ils perdent cette faculté lorsque cette condition n'est pas remplie pendant deux exercices successifs.

Le bilan simplifié et le compte de résultat simplifiés se présentent sous forme de grandes rubriques (décrites par les articles R. 123-201 N° Lexbase : L9954HYC et R. 123-202 N° Lexbase : L9955HYD du Code de commerce). Pour l'actif (par exemple) : les immobilisations incorporelles en distinguant le fonds commercial, les immobilisations corporelles, les immobilisations financières, les stocks et en-cours, les avances et acomptes versés sur commandes, les créances en distinguant les clients, les valeurs mobilières de placement, les disponibilités et les charges constatées d'avance. L'annexe simplifiée ne comprend que les informations prévues par les articles R. 123-196 (N° Lexbase : L9949HY7) et R. 123-197 (N° Lexbase : L9957ICR) du Code de commerce.

  • Le régime simplifié d'imposition

Ce régime est régi par les articles 302 septies A bis (N° Lexbase : L0121IKP) et 302 septies A ter A (N° Lexbase : L1176IEB) du CGI, et par les articles L. 123-25 (N° Lexbase : L5583AIM) à L. 123-27 du Code de commerce. Il est ouvert aux personnes physiques et morales (en matière fiscale) ou uniquement aux personnes physiques (en matière comptable) dont le chiffre d'affaires hors taxes n'excède pas 763 000 euros, lorsqu'elles réalisent des opérations de vente ou de fourniture de logement, ou 230 000 euros dans les autres cas.

Ces entités peuvent tenir une comptabilité dite "super-simplifiée". Cette comptabilité n'enregistre journellement que le détail des encaissements et des paiements (comptabilité de trésorerie). Les créances et les dettes sont constatées à la clôture de l'exercice sauf en ce qui concerne les dépenses relatives aux frais généraux qui sont payées à échéances régulières et dont la périodicité n'excède pas un an ; les stocks et les travaux en cours peuvent être évalués selon une méthode simplifiée (pour les biens en stock, en pratiquant sur le prix de vente de ces biens un abattement correspondant à la marge pratiquée par l'entreprise sur chaque catégorie ; pour les travaux en cours, en retenant le montant des acomptes réclamés avant facturation). Les frais relatifs aux carburants consommés lors des déplacements professionnels de l'exploitant peuvent être enregistrés forfaitairement d'après un barème qui est publié chaque année par l'administration fiscale.

  • Le régime des micro-entreprises

Depuis le 1er janvier 1999, le régime du forfait ayant été supprimé, les exploitants individuels dont le chiffre d'affaires ne dépasse pas 80 000 euros, s'ils exercent une activité d'achat-revente, ou de 32 000 euros, s'ils effectuent des prestations de services, peuvent se placer sous un régime spécial d'imposition, dit régime des micro-entreprises, régi par l'article 50-0 du CGI (N° Lexbase : L0052IK7), qui leur permet d'être exonéré de la TVA et d'être imposé sur un bénéfice calculé au prorata de leur chiffre d'affaires.

L'article L. 123-28 du Code de commerce (N° Lexbase : L2339IBA) (complété par l'article R. 123-205-1 N° Lexbase : L3705IC9) permet à ces entreprises, qui sont dispensées d'établir des comptes individuels, de tenir simplement un livre mentionnant chronologiquement le montant et l'origine des recettes qu'elles perçoivent au titre de leur activité professionnelle (en distinguant les règlements en espèces des autres règlements et en indiquant les références des pièces justificatives) et pour celles dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place, ou de fournir le logement, un registre récapitulé par année, présentant chronologiquement le détail de leurs achats, en distinguant les règlements en espèces et en indiquant les références des pièces justificatives.

  • Une nouvelle définition, pour l'ANC, de la micro-entreprise

Il est proposé de définir les "micro-entreprises" comme celles dont le chiffre d'affaires est inférieur à 500 000 euros et qui ne dépassent pas les limites d'un des deux critères suivants, dont en tous cas celui qui porte sur le chiffre d'affaires : total du bilan inférieur à 250 000 euros ; effectif inférieur à 5 salariés.

  • Trois axes de réformes au profit des "micro-entreprises"

L'ANC présente les axes de réforme suivants.

A) Des documents comptables "super-simplifiés" : le bilan, le compte de résultat et l'annexe "super-simplifiés" pourraient tenir en une page unique (cf. annexe).

B) Des règles comptables "super-simplifiées" : les propositions suivantes permettraient d'alléger substantiellement l'élaboration des comptes par les micro-entités, en simplifiant les règles applicables aux postes les plus fréquemment utilisés par les micro-entités, tout en conservant une information financière de qualité.

Il s'agit, dès lors, de :

1. simplifier l'évaluation initiale des immobilisations ; tous les frais accessoires liés à l'acquisition d'une immobilisation seraient comptabilisés en charges. Ainsi, pour les micro-entités, la valeur d'entrée d'une immobilisation correspondrait à son prix d'achat ;

2. simplifier les règles d'amortissement des immobilisations ; la valeur résiduelle ne serait pas déduite de la base amortissable des biens détenus par les micro-entités b ;

3. simplifier les règles de comptabilisation des frais d'établissement ; les frais d'établissement constitueraient une charge de l'exercice sur lequel ils sont engagés, au lieu d'être enregistrés et conservés durant 5 années à l'actif des micro-entités ;

4. simplifier les règles de comptabilisation stocks et alléger les travaux d'inventaire ; ainsi, pour les stocks de marchandises et de produits détenus par les micro-entités, un abattement forfaitaire correspondant à la marge sur le prix de vente serait effectué (pour les travaux en cours : le montant des acomptes reçus serait retenu) ;

5. simplifier, de façon générale pour tous les postes comptables, les règles d'évaluation ; les micro-entités ne procèderaient à aucune évaluation selon le principe de la juste valeur, toutes les évaluations seraient effectuées au coût amorti.

Ces différentes simplifications pourraient, par exception, ne pas être appliquées par les Etats-membres.

C) Une simplification supplémentaire des obligations liées à la production des comptes mais non strictement comptables : le rapport de gestion pourrait être supprimé.

  • Une simplification du cadre comptable global applicable en Europe

Toutes propositions en faveur des micro-entreprises affectent nécessairement l'équilibre de la Directive 2009/49 (N° Lexbase : L4495IE9), dont il faut cependant garder la cohérence d'ensemble. C'est pourquoi il est proposé de simplifier le cadre comptable global applicable en Europe de la façon suivante.

a) Au-delà des "micro-entité", existeraient deux catégories d'entreprises :

- les entités "moyennes", qui ne dépassent pas les limites de deux des trois critères suivants dont, en tous cas, celle qui concerne le chiffre d'affaires (chiffre d'affaires total inférieur à 15 000 000 d'euros ; total du bilan inférieur à 7 500 000 euros ; effectif inférieur à 100 salariés) ;

- toutes les autres entités de taille supérieure, qui ne sont pas soumises à l'obligation d'appliquer les IFRS et doivent donc rester libres d'utiliser un cadre européen harmonisé.

b) Il est essentiel que ce cadre comptable européen reste fondé sur des principes simples répondant aux besoins de ces entreprises qui ne sont pas soumises aux IFRS. Toutefois, de nouvelles simplifications pourraient être offertes aux entreprises moyennes, notamment pour la présentation de leurs comptes. Enfin, des simplifications pourraient être décidées pour moderniser le texte actuel des directives européennes, en s'inspirant le cas échéant des normes IFRS, mais en se limitant strictement à un cadre comptable européen pour ces entreprises.

c) Une telle rationalisation du cadre général, ainsi durablement stabilisé, constituera en soi une simplification pour les entreprises européennes.

Ces propositions, tout en maintenant la sécurité du système juridique européen, prennent en compte l'ensemble des débats fructueux qui ont eu lieu sur ce sujet en Europe et les résultats de nombreuses études et consultations.

Pour les micro-entités, ils permettront un allègement de charges considérable, d'au moins 1 000 à 1 200 euros par entreprise.


Annexe - Les états financiers en une seule page

Ces états financiers permettent aux "micro-entreprises" d'avoir une vision sur leur activité et leur patrimoine et de répondre aux besoins d'information internes et externes, tout en diminuant les coûts administratifs liés à leur élaboration.

A ce titre, l'annexe ne se limite donc qu'à présenter les engagements hors bilan nécessaires à la bonne lecture de la situation de l'entité.

On trouve dans ce projet les états financiers suivants :

BILAN

ACTIF Brut  |Amortissements et dépréciations  | Net PASSIF
Actif immobilisé Capitaux propres (dont capital social)
Stocks et en cours
Créances clients et autres créances Provisions pour risques et charges
Disponibilités et valeurs mobilières de placement Dettes financières
Fournisseurs et autres dettes
Total général Total général

COMPTE DE RESULTAT

Charges (hors taxes) Produits (hors taxes)
Achats consommés Chiffre d'affaires
Charges de personnel Reprise des amortissements et provisions
Dotations aux amortissements et aux provisions Autres produits
Autres charges
Impôt sur les bénéfices
Bénéfice (solde) Perte (solde)
Total général Total général

Annexe/opérations hors bilan (crédit-bail / garanties / autres)

Nature de l'engagement (a) Montant de l'engagement à la clôture
Contrat(s) de crédit-bail
Sûretés reçues (b)
Sûretés données (b)
Effets escomptés non échus

(a) à développer si nécessaire
(b) notamment hypothèques, nantissement, cautions, aval, etc.

De plus toute information significative nécessaire à la bonne compréhension des comptes devra être détaillée dans l'annexe.

Références

- C. com, art. L. 123-16, L. 123-25 à L.123-28, R. 123-200 à R. 123-205.
- Plan comptable général, art. 322-4 § 5.
- CGI, art. 50-0, 302 septies A bis et 302 septies A ter A, Annexe III, art. 38 sexdecies -00 B (N° Lexbase : L6570HLW) et Annexe IV, art. 4 LA (N° Lexbase : L8548HKS).
- Robert Obert, La simplification des obligations comptables, Revue française de comptabilité, n° 430, mars 2010, p. 4.
- ANC, Plan stratégique 2010-2011

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