La lettre juridique n°315 du 31 juillet 2008 : Libertés publiques

[Jurisprudence] Quelle libre circulation pour les conducteurs ?

Réf. : CJCE, 26 juin 2008, aff. C-334/06, Matthias Zerche c/ Landkreis Mittweida (N° Lexbase : A3213D9U), et aff. C-329/06, Arthur Wiedemann c/ Land Baden-Württemberg (N° Lexbase : A3212D9T)

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par Olivier Dubos, Professeur de droit public à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV

le 07 Octobre 2010

Les implications de la réalisation du marché intérieur sont évidemment multiples et ne revêtent pas seulement un caractère économique, puisque les travailleurs salariés et indépendants sont d'abord des personnes. Le droit communautaire s'intéresse donc à tous les obstacles susceptibles d'entraver la libre circulation des citoyens sur le territoire de l'Union européenne. Le cas du permis de conduire apparaît tout à fait topique. Avant que ne soit adoptée une législation européenne en ce domaine, la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) avait estimé que n'était pas incompatible avec le droit communautaire le fait qu'un Etat membre exige des ressortissants des autres Etats membres résidants sur son territoire, pour la conduite des automobiles, l'obtention d'un permis de conduire national, même si ces derniers sont d'ores et déjà titulaires d'un permis de leur Etat d'origine (CJCE, 28 novembre 1978, aff. C-16/78, Procédure pénale c/ Michel Choquet N° Lexbase : A5704AUS, Rec., p. 2293). Pour justifier une telle solution, la Cour de justice avait souligné que ce domaine relevait de la sécurité publique et qu'il existait une grande disparité des législations. Dans un premier temps, un dispositif normatif d'harmonisation et de reconnaissance mutuelle a été élaboré dans le cadre de la politique des transports . A, ainsi, été adoptée une première Directive (Directive 80/1263/CE du Conseil, du 4 décembre 1980, relative à l'instauration d'un permis de conduire communautaire N° Lexbase : L7328IAN, JO, n° L 375 du 31 décembre 1980, p. 1) qui procédait à une harmonisation des systèmes nationaux de délivrance des permis de conduire et des conditions de leur validité, mais aussi des catégories de véhicules. Cette Directive avait, également, établi un modèle communautaire de permis et institué un système de reconnaissance mutuelle par les Etats membres des permis de conduire et d'échange de ces derniers, lorsque les titulaires transféraient leur résidence ou leur lieu de travail d'un Etat membre à un autre.

Dans le cadre de cette législation, la Cour de justice avait estimé qu'il était possible pour un Etat membre d'exiger que le titulaire d'un permis de conduire délivré par un autre Etat membre échange ce permis contre un permis de l'Etat d'accueil, dans un délai d'un an à compter de l'établissement de sa résidence habituelle sur le territoire de cet Etat (CJCE, 29 février 1996, aff. C-193/94, Procédures pénales c/ Sofia Skanavi et Konstantin Chryssanthakopoulos N° Lexbase : A0073AWM, Rec., p. I-929).

Dans un deuxième temps, a été élaborée la Directive 91/439/CE du Conseil, du 29 juillet 1991, relative au permis de conduire (N° Lexbase : L7606AUA) (JO n° L 237 du 24 août 1991) qui a perfectionné l'harmonisation des législations nationales, afin que puisse être pleinement reconnu le principe de la reconnaissance mutuelle. Les acquis des Directives 80/1263/CE et 91/439/CE ont d'ores et déjà fait l'objet d'une transposition en droit français aux articles R. 222-1 (N° Lexbase : L5391AWL) et suivants du Code de la route, qui distinguent différentes catégories de véhicules auxquelles correspondent des permis différents.

Dans un troisième temps, le dispositif communautaire a fait l'objet d'une refonte relativement récente qui a essentiellement consisté à réviser le dispositif relatif à la délivrance des permis (Directive 2006/126/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006, relative au permis de conduire N° Lexbase : L0183HUC, JO n° L 403 du 30 décembre 2006, p. 18). Les Etats membres ont jusqu'au 11 janvier 2011 pour transposer cette Directive et appliqueront ces dispositions à compter du 19 janvier 2013. La Directive 2006/126/CE a ajouté deux nouvelles sous-catégories pour les cyclomoteurs (article 4, paragraphes 2 et 3), et les différents types d'automobiles (article 4, paragraphe 4, b) à k)). Elle perfectionne, également, le système de progressivité et d'équivalences entre catégories (article 6). Sa principale innovation est de fixer une durée de validité des permis de conduire. Cette durée est de dix ans minimum, et peut aller jusqu'à quinze ans pour les véhicules courants comme les voitures de tourisme. Signalons que pour les véhicules plus lourds, cette durée est fixée à cinq ans.

L'intérêt pratique de cette législation communautaire et de toutes les difficultés qu'elle peut susciter est évident. Il s'agit d'un cas tout à fait topique de réalisation du marché intérieur. Le principe de la reconnaissance mutuelle ne peut être effectif que s'il a pour préalable une harmonisation des législations nationales. On est donc fort loin de la mythologie du principe du pays d'origine tel qu'il avait été mis en avant dans la première proposition de Directive relative à la réalisation du marché des services (COM [2004] 2, 13 janvier 2004). Ce principe de reconnaissance mutuelle est, par ailleurs, une petite révolution puisqu'il permet de faire produire des effets extra-territoriaux à un acte administratif unilatéral (le permis de conduire). La reconnaissance mutuelle des permis de conduire pose, également, la question des effets des sanctions qui peuvent être infligées à leur titulaire, sauf à imaginer que le dispositif communautaire conduise surtout à assurer la libre circulation des chauffards.

C'est la raison pour laquelle, dans le cadre de la coopération policière et judiciaire en matière pénale, les Etats ont adopté le 17 juin 1998 une convention relative aux décisions de déchéance du droit de conduire (JO n° C 216 du 10 juillet 1998, p. 2 ; voir dans le cadre du Conseil de l'Europe, la Convention européenne sur les effets internationaux de la déchéance du droit de conduire un véhicule à moteur du 3 juin 1976, qui n'a pas été ratifiée par la France) qui n'est, toutefois, toujours pas entrée en vigueur. Dès lors, ces deux dimensions de la reconnaissance mutuelle mettent à mal le principe de territorialité qui caractérise le droit administratif et le droit pénal.

Pour assurer en toute sécurité la libre circulation des conducteurs dans l'Union européenne, il convient d'assurer la reconnaissance mutuelle des permis de conduire (I), et la reconnaissance mutuelle des déchéances du droit de conduire (II).

I - La reconnaissance mutuelle des permis de conduire

Selon l'article 2, paragraphe 1 de la Directive 2006/126/CE, "les permis de conduire délivrés par les Etats membres sont mutuellement reconnus". Ce principe avait, d'ores et déjà, été posé par la Directive 91/439/CE. La Cour de justice a donc eu l'occasion d'en préciser les implications et, notamment, son caractère inconditionnel (A). Il existe, toutefois, certaines limites (B).

A - Un principe inconditionnel

La Cour de justice a, ainsi, estimé que cette reconnaissance doit être assurée sans aucune formalité. Les Etats membres ne disposent d'aucune marge d'appréciation quant aux modalités à adopter pour s'y conformer. S'ils imposent l'enregistrement d'un permis de conduire délivré par un autre Etat membre et sanctionnent la violation d'une telle obligation, ils méconnaissent alors le principe de reconnaissance mutuelle tel qu'il résulte de la Directive (CJCE, 10 juillet 2003, aff. C-246/00, Commission des Communautés européennes c/ Royaume des Pays-Bas N° Lexbase : A0662C9E, Rec., p. I-7485 ; CJCE, 9 septembre 2004, aff. C-195/02, Commission des Communautés européennes c/ Royaume d'Espagne N° Lexbase : A3355DDM, Rec., p. I-7857).

Par ailleurs, les autorités d'un Etat membre ne peuvent pas s'opposer à la reconnaissance de la validité d'un permis délivré par les autorités d'un Etat membre au motif qu'à la date de la délivrance du permis le demandeur ne remplissait pas les conditions prévues par la Directive. Le dispositif de la Directive donne entière compétence aux autorités de l'Etat membre de délivrance pour s'assurer que le demandeur remplit bien les conditions posées par la Directive. En cas de fraude, la Cour de justice a estimé que le seul moyen pour l'Etat était d'utiliser le mécanisme d'assistance mutuelle et d'échange d'informations prévu par la Directive. Eventuellement, si l'Etat en cause ne prenait pas les mesures appropriées, il est toujours possible d'introduire un recours en constatation en manquement (CJCE, 26 juin 2008, aff. C-334/06, Matthias Zerche c/ Landkreis Mittweida N° Lexbase : A3213D9U). Lorsque l'on connaît le peu d'empressement des Etats pour intenter des actions en manquement les uns contre les autres, ce moyen de lutte contre les fraudes paraît plutôt virtuel. Dès lors, il ne peut y avoir reconnaissance mutuelle que s'il y a confiance mutuelle.

Telle est bien la philosophie de la reconnaissance mutuelle : la confiance entre les Etats membres. Lorsque le droit communautaire entend encadrer les mécanismes de reconnaissance mutuelle, il donne, alors, explicitement compétence aux Etats pour vérifier, non pas si l'acte émis par l'autre Etat est juridiquement valide, mais pour procéder lui-même, en quelque sorte, à une contre-expertise. Les règles relatives à la reconnaissance mutuelle des diplômes à des fins professionnelles sont de ce point de vue tout à fait significatives (v. L. Dubouis et C. Blumann, Droit matériel de l'Union européenne, Paris, Montchrestien, 4ème éd. 2006, p. 99 et s.). Or, en matière de reconnaissance de permis de conduire, de telles mesures ne sont pas prévues par les Directives 91/439/CEE et 2006/126/CE.

Outre l'atteinte à l'esprit même de la construction communautaire et à son intégration horizontale, on ne saurait ignorer que le contrôle de la validité juridique par les autorités d'un Etat des actes émis par un autre Etat membre ne va pas sans difficultés théoriques et pratiques. Sur le plan théorique, c'est une remise en cause du principe de la territorialité du droit public. Certes, la reconnaissance mutuelle constitue elle-même une remise en cause de la territorialité du droit public puisqu'elle implique qu'un acte administratif produise des effets de droit hors de l'ordre juridique dont relève son auteur. Mais là, un nouveau pas serait franchi puisqu'il s'agirait, pour les organes d'un ordre juridique donné, de contrôler la validité des actes émanant d'un autre ordre juridique. On pourrait objecter que le droit international privé, à travers les conflits de lois et les conflits de juridictions, a toujours connu un tel contrôle au travers de la réserve de l'ordre public. Reste qu'il s'agit de conflits de droit privé et que l'examen de la compatibilité de la loi étrangère ou d'une décision étrangère au regard de l'ordre public ne remet pas en cause la validité juridique de l'acte, mais son applicabilité dans un ordre juridique autre que celui dont il émane.

On se souviendra, en revanche, que dans le cadre du contentieux "Schengen", le Conseil d'Etat a jugé de manière tout à fait révolutionnaire "qu'il appartient au juge administratif, saisi de conclusions dirigées contre une décision administrative fondée sur le signalement d'une personne aux fins de non-admission, de se prononcer sur le bien-fondé du moyen tiré du caractère injustifié de ce signalement, alors même qu'il a été prononcé par une autorité administrative étrangère" (CE, 9 juin 1999, n° 190384, M. et Mme Forabosco N° Lexbase : A3343AX4, Rec. p. 170).

B - Les limites de la reconnaissance mutuelle

Parmi les conditions que doit vérifier l'Etat membre de délivrance, il y a la condition de résidence. Normalement, cette condition ne devrait pas faire l'objet d'un traitement particulier puisque rien dans la Directive ne la distingue des autres. La Cour a estimé qu'un Etat membre ne pouvait instaurer une procédure visant à contrôler que l'intéressé remplissait effectivement la condition de résidence dans l'Etat de délivrance (CJCE, 10 juillet 2003, Commission des Communautés européennes c/ Royaume des Pays-Bas, précité).

Dans l'hypothèse où une personne a fait l'objet d'une décision de retrait de permis et, postérieurement à la période d'interdiction de passer le permis, s'est rendue dans un autre Etat membre que son Etat de résidence afin de passer de nouveau le permis, la Cour de justice a, dans un premier temps, estimé que l'Etat de résidence ne pouvait vérifier si la condition de résidence était satisfaite dans l'Etat de délivrance (CJCE, 29 avril 2004, aff. C-476/01, Procédures pénale c/ Félix Kapper N° Lexbase : A0424DCP, Rec., p. I-5205). La Cour a abandonné cette solution afin d'éviter "le tourisme du permis de conduire" et au nom de la sécurité routière. Le contrôle par l'Etat membre de la condition de résidence dans l'Etat de délivrance du permis ne peut, toutefois, se faire qu'à partir des mentions figurant sur le permis de conduire lui-même (CJCE, 26 juin 2008, aff. C-334/06, Matthias Zerche c/ Landkreis Mittweida, précité). On est donc assez loin du contrôle de la validité de l'acte administratif émanant d'un Etat par un autre Etat.

Ensuite, selon l'article 8, paragraphe 4, premier alinéa, de la Directive 91/439, "sous réserve du respect du principe de territorialité des lois pénales et de police, l'Etat membre de résidence normale peut appliquer au titulaire d'un permis de conduire délivré par un autre Etat membre ses dispositions nationales concernant la restriction, la suspension, le retrait ou l'annulation du droit de conduire et, si nécessaire, procéder à ces fins à l'échange de ce permis". Cette disposition est évidemment tout à fait logique, et il ne s'agit pas d'une véritable exception au principe de reconnaissance mutuelle.

Elle ne peut, en effet, être opposée à une personne qui a fait l'objet d'une décision de retrait de permis et, postérieurement à la période d'interdiction de passer le permis, s'est rendue dans un autre Etat membre afin de passer de nouveau le permis (CJCE, 29 avril 2004, aff. C-476/01, Procédures pénale c/ Félix Kapper, précité ; CJCE, 26 juin 2008, aff. C-334/06, Matthias Zerche c/ Landkreis Mittweida, précité). La même solution s'applique si une personne a fait l'objet d'un retrait de permis, mais n'a pas fait l'objet d'une interdiction de repasser le permis (CJCE, 26 juin 2008, aff. C-329/06, Arthur Wiedemann c/ Land Baden-Württemberg N° Lexbase : A3212D9T). Toute autre interprétation conduirait, alors, à considérer que cette disposition permette aux autorités d'un Etat membre de refuser, sans aucune limitation de durée, de reconnaître la validité du permis de conduire d'une personne qui aurait auparavant fait l'objet d'une des mesures visées à l'article 8, paragraphe 4, premier alinéa de la Directive 91/439. Cette interprétation s'applique également si l'Etat qui avait prononcé l'interdiction subordonne l'octroi d'un nouveau permis à des conditions plus strictes (CJCE, 26 juin 2008, aff. C-329/06, Arthur Wiedemann c/ Land Baden-Württemberg, précité).

Un Etat ne pourrait refuser de reconnaître un permis que si celui-ci avait été délivré par un autre Etat membre pendant une période pendant laquelle l'intéressé était frappé d'une interdiction de passer le permis. Toutes ces difficultés témoignent de l'importance d'un dispositif relatif à la reconnaissance mutuelle des déchéances du droit de conduire.

II - La reconnaissance mutuelle des déchéances du droit de conduire

La convention sur la déchéance du droit de conduire a un champ d'application relativement précis (A), mais prévoit des mécanismes originaux permettant d'assurer l'efficacité des sanctions prononcées contre les conducteurs (B), tout en assurant le respect de leurs droits de la défense (C).

A - Le champ d'application de la convention sur la déchéance du droit de conduire

La convention s'applique à la fois aux sanctions prononcées par une autorité administrative et à celles prononcées par une autorité judiciaire, qui présentent un caractère définitif. Son champ d'application est, toutefois, strictement limité puisqu'il ne s'applique qu'aux déchéances prononcées à l'encontre d'un conducteur dans un Etat membre autre que son Etat de résidence. Les décisions prises dans cet Etat ne bénéficient donc pas du dispositif conventionnel. L'article 12 de la convention prévoit simplement que "chaque Etat membre adopte les mesures nécessaires l'habilitant à sanctionner la conduite d'un véhicule à moteur sur son territoire lorsque le conducteur est déchu par l'Etat de résidence du droit de conduire, en application de la présente convention". Il n'est toutefois pas précisé si une personne, qui aurait été privée de son droit de conduire dans son Etat de résidence, pourrait utiliser un véhicule à moteur dans un autre Etat membre.

La convention prévoit que l'Etat de l'infraction doit notifier "sans tarder à l'Etat de résidence toute décision de déchéance du droit de conduire prononcée pour une infraction commise dans les circonstances décrites en annexe" (1. Conduite imprudente ou dangereuse [entraînant ou non la mort ou des blessures ou créant des risques graves]. 2. Violation des obligations incombant aux conducteurs à la suite d'un accident de la circulation [délit de fuite]. 3. Conduite d'un véhicule sous l'influence de l'alcool ou d'autres substances susceptibles d'altérer ou de diminuer les facultés psychiques et physiques du conducteur. Refus de se soumettre aux tests d'alcoolémie ou de détection de produits stupéfiants. 4. Conduite d'un véhicule à une vitesse supérieure à la vitesse autorisée. 5. Conduite d'un véhicule par une personne déchue du droit de conduire. 6. Toute autre circonstance constituant une infraction ayant donné lieu à une décision de déchéance du droit de conduire prononcée par l'Etat de l'infraction : - d'une durée égale ou supérieure à six mois, - d'une durée inférieure à six mois dans la mesure où cela a été convenu bilatéralement entre les Etats membres concernés).

B - Les mécanismes de la convention sur la déchéance du droit de conduire

Après la notification opérée par l'Etat d'infraction, l'Etat de résidence peut alors directement exécuter la décision de la juridiction de l'Etat requérant. La convention laisse, néanmoins, aux Etats la possibilité d'exécuter cette décision par l'intermédiaire d'une nouvelle décision administrative ou judiciaire qui, soit ne vise qu'à "recevoir" la décision d'origine, soit peut opérer une véritable "transformation". Il appartient à chaque Etat membre d'indiquer, dans une déclaration, quelle procédure, en tant qu'Etat de résidence, il compte alors adopter.

Ces trois modalités d'exécution sont de nature différente. La première modalité constitue une exécution automatique, alors que la deuxième s'apparente, d'une certaine manière, à une procédure d'exequatur. L'Etat de résidence a, en effet, la possibilité de réduire "la durée de la déchéance, mais seulement pour la ramener à la durée maximale que son droit national prévoit pour des faits de même nature" (article 4, paragraphe 2, b)). La troisième modalité ne confère, en revanche, qu'une efficacité indirecte au jugement étranger.

Les autorités de l'Etat de résidence disposent, en effet, d'un certain pouvoir de révision. L'Etat requis est lié par les constatations de faits opérées dans la décision de l'Etat d'origine. Il peut, en revanche, "réduire la durée de la déchéance pour la ramener à la durée qui aurait été fixée pour le cas en question en application de son droit national" (article 4, paragraphe 3 c)). Les autorités de l'Etat requis ont, ainsi, un pouvoir de révision sur le quantum de la peine. Cette modalité demeure, toutefois, en pratique finalement très proche de la deuxième hypothèse. Il convient, par ailleurs, de noter que dans les trois procédures, l'Etat de résidence doit tenir compte de la partie de la période de déchéance déjà accomplie dans l'Etat d'infraction.

C - Les droits de la défense de la convention sur la déchéance du droit de conduire

Pour la mise en oeuvre de cette convention, chaque Etat membre doit désigner les autorités qui seront chargées de notifier les demandes d'exécution et les autorités qui devront traiter les demandes. Il est possible de regretter que la convention ne précise nullement quelles sont les voies de recours dont disposent les auteurs d'une infraction à l'encontre, tant, dans l'Etat requérant, des demandes d'exécution que, dans l'Etat de résidence, des décisions d'exécution. L'Etat de l'infraction n'est, par ailleurs, même pas tenu de notifier à l'intéressé qu'il a procédé à une demande d'exécution dans son Etat d'origine. Les droits de la défense ne sont pas pour autant totalement ignorés.

La notification opérée par l'Etat requérant doit, en effet, être accompagnée de différentes pièces et il doit, notamment, pouvoir être prouvé, en cas de défaut de comparution de l'auteur de l'infraction, que la procédure ouverte à son encontre lui a été "dûment notifiée conformément à la loi de l'Etat de l'infraction" (article 8, paragraphe 2). On trouve ici un souci de protection des droits du défendeur défaillant. L'Etat de résidence doit refuser l'exécution s'il estime que "la personne concernée n'a pas eu des possibilités suffisantes pour mener sa défense" (article 6, paragraphe 1, e)). La convention garantit par ailleurs pleinement le principe ne bis in idem.

Il est, certes, possible de déplorer que cette convention mette en place un dispositif à géométrie variable. Elle permet, toutefois, d'assurer que les décisions de déchéance du droit de conduire rendues par les juridictions d'un Etat, à l'encontre d'une personne qui ne résiderait pas dans cet Etat, puissent être exécutées dans l'Etat de résidence de l'intéressé. La libre circulation des conducteurs ne peut, en effet, devenir la libre circulation des chauffards.

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