La lettre juridique n°315 du 31 juillet 2008 : Droit social européen

[Textes] Les dispositions à caractère social de la loi du 3 juillet 2008, portant diverses dispositions d'adaptation du droit des sociétés au droit communautaire

Réf. : Loi n° 2008-649 du 3 juillet 2008, portant diverses dispositions d'adaptation du droit des sociétés au droit communautaire (N° Lexbase : L7047H77)

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N7055BGE

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[Textes] Les dispositions à caractère social de la loi du 3 juillet 2008, portant diverses dispositions d'adaptation du droit des sociétés au droit communautaire. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/3210460-textes-les-dispositions-a-caractere-social-de-la-loi-du-3-juillet-2008-portant-diverses-dispositions
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par Gilles Auzero, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV

le 07 Octobre 2010

Ainsi que son intitulé l'indique, la loi n° 2008-649 du 3 juillet 2008, portant diverses dispositions d'adaptation du droit des sociétés au droit communautaire (N° Lexbase : L7047H77), vise à conformer notre droit interne des sociétés à plusieurs prescriptions du droit communautaire. A ce titre, le texte en cause transpose deux Directives (1), apporte les aménagements nécessaires à la pleine effectivité du Règlement relatif au statut de la société coopérative européenne (2) et comporte des dispositions relatives à la société européenne. Pour intéresser, au premier chef, le droit des sociétés (3), la loi du 3 juillet 2008 n'en comporte pas moins un important volet social qui, seul, nous retiendra ici. Transposant les dispositions de la Directive (CE) 2005/56 du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005, sur les fusions transfrontalières des sociétés de capitaux, la loi comporte, de ce point de vue, deux aspects : le premier a trait à l'information et à la consultation des représentants du personnel ou des salariés eux-mêmes sur les projets de fusions transfrontalières, tandis que le second intéresse la participation des salariés dans les sociétés issues de ces mêmes fusions. I - Information et consultation des représentants du personnel et des salariés sur les projets de fusions transfrontalières
  • Renforcement des prérogatives des représentants du personnel

Il convient, tout d'abord, de relever qu'il n'était nullement nécessaire que le législateur intervienne afin de prévoir l'information et la consultation du comité d'entreprise préalablement à une fusion transfrontalière. Une telle obligation pèse déjà, en effet, sur le chef d'entreprise, en application des dispositions générales de l'article L. 2323-19 du Code du travail . Rappelons que, en son alinéa 1er, cette disposition précise que "le comité d'entreprise est informé et consulté sur les modifications de l'organisation économique ou juridique de l'entreprise, notamment, en cas de fusion, de cession, de modification important des structures de production de l'entreprise, ainsi que lors de l'acquisition ou de la cession de filiales au sens de l'article L. 233-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L6304AIC)".

Toutefois, et ainsi que n'a pas manqué de le relever l'un des rapporteurs du projet de loi, "la règle posée par notre droit du travail comporte, néanmoins, une limite non négligeable, puisqu'elle ne s'applique qu'aux sociétés disposant d'un comité d'entreprise ; or, seules celles employant plus de cinquante salariés sont tenues à la mise en place d'une telle instance" (4).

Afin de combler cette lacune, dont on doit, d'ailleurs, relever qu'elle n'est pas propre aux fusions transfrontalières, la loi prévoit, en des termes quelque peu sibyllins, l'information et la consultation des délégués du personnel. Il résulte, en effet, du dernier alinéa de l'article L. 236-27 du Code de commerce que, "sans préjudice du dernier alinéa de l'article L. 225-105 (N° Lexbase : L5976AI8), l'avis du comité d'entreprise, consulté en application de l'article L. 2323-19 du Code du travail ou, à défaut, l'avis des délégués du personnel est, s'il transmis dans des délais prévus par décret en Conseil d'Etat, annexé au rapport mentionné au premier alinéa du présent article". Il aurait, sans doute, été souhaitable que le législateur dise plus clairement que, dans les entreprises de moins de cinquante salariés (5), les délégués du personnel sont informés et consultés sur le projet de fusion.

Après avoir indiqué que l'organe de gestion, d'administration ou de direction de chacune des sociétés participant à l'opération de fusion établit un rapport écrit qui est mis à la disposition des associés, l'article L. 236-27 du Code de commerce précise que, "en complément du respect des obligations prévues à l'article L. 2323-19 du Code du travail, le rapport [...] est mis à la disposition des délégués du personnel ou, à défaut, des salariés eux-mêmes, dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat". Bien que le texte ne l'affirme pas de manière expresse, il paraît légitime de considérer que le comité d'entreprise doit, lorsqu'il existe, être destinataire du rapport en cause.

Le décret aura, sans doute, à préciser le contenu de ce rapport (6) et les délais dans lesquels il doit être remis. En outre, ce même décret devrait entourer "de quelques précautions cet accès à des informations économiques essentielles, voire sensibles, sur l'activité et la situation des sociétés concernées, à un stade où le processus de fusion demeure encore à l'état de projet soumis aux actionnaires" (7). Relevons, enfin, que le rapport ne sera mis à la disposition des salariés eux-mêmes qu'en l'absence de représentants du personnel.

Pour le reste, la loi ne comporte aucune autre précision sur la consultation des représentants du personnel lors d'une opération de fusion transfrontalière. Sans doute, faudra-t-il se référer aux règles du droit commun pour combler ces lacunes. Certains problèmes, que la loi n'envisage pas, ne manqueront, cependant, pas de se poser. On pense, notamment, à l'articulation des consultations des institutions représentatives nationales et du comité d'entreprise européen existant éventuellement dans l'entreprise.

  • La participation des salariés comme condition à la fusion

L'article L. 236-28 du Code du commerce dispose, en son alinéa 1er, que "les associés qui décident la fusion peuvent subordonner la réalisation de celle-ci à leur approbation des modalités décidées pour la participation des salariés, au sens de l'article L. 2371-1 du Code du travail (N° Lexbase : L1198HI9), dans la société issue de la fusion transfrontalière".

Selon Madame Grosskost (rapport précité), cette disposition "permet aux associés français, non familiarisés au concept de participation des personnels à la gestion des sociétés, de subordonner le sort d'une fusion transfrontalière avec une société étrangère où une telle participation a cours, à leur approbation, dans le détail, des modalités de cette participation dans la société issue de la fusion. Ce faisant, les associés d'une société française fusionnant, par exemple, avec une société de droit allemand, seront fondés à assujettir leur accord définitif sur le rapprochement à leur acceptation du champ et de la nature de l'implication des salariés dans le fonctionnement de la nouvelle entité. Il s'agit là d'une précaution de bon sens, mais qui aura nécessairement des effets sur les délais de réalisation de la fusion".

Au-delà, le texte cité précédemment laisse, également, entendre qu'en l'absence de toute manifestation de volonté des associés, la fusion n'est pas subordonnée à l'adoption du dispositif relatif à la participation des salariés. Une telle assertion doit, cependant, être écartée, ne serait-ce que parce que le notaire ou le greffier du tribunal dans le ressort duquel la société issue de la formation sera immatriculée contrôle, notamment, que les modalités relatives à la participation des salariés ont été fixées conformément aux exigences légales (C. com., art. L. 236-30) (8).

Notons, enfin, qu'en vertu de l'article L. 236-32 du Code de commerce, "lorsque l'une des sociétés participant à l'opération mentionnée à l'article L. 236-25 est soumise à un régime de participation des salariés, et que tel est également le cas de la société issue de la fusion, cette dernière adopte une forme juridique permettant l'exercice de cette participation". Ainsi, et à titre d'exemple, toute SARL fusionnant avec une société de droit étranger associant les salariés à sa gestion et devant maintenir un tel mécanisme devra, lors de la définition des statuts de la nouvelle entité issue de la fusion, opter pour une forme sociale différente.

II - Participation des salariés dans la société issue d'une fusion transfrontalière

  • Dispositions générales

Tandis que les dispositions nouvelles relatives à l'information et à la consultation des représentants du personnel sur le projet de fusion transfrontalière figurent dans le Code de commerce (9), celles qui ont trait à l'organisation de la participation des salariés dans la société issue d'une telle fusion prennent place, classiquement, dans le Code du travail. A cette fin, le titre VII du livre III de la deuxième partie devient le titre VIII du même livre et les articles L. 2371-1 et L. 2371-2 deviennent respectivement les articles L. 2381-1 et L. 2381-2. La loi du 3 juillet 2008 rétablit, ensuite, le titre VII qui est, désormais, intitulé "Participation des salariés dans les sociétés issues de fusions transfrontalières" (10).

Le titre en cause s'applique :

- aux sociétés ayant leur siège en France issues d'une fusion transfrontalière mentionnée à l'article L. 236-25 du Code de commerce ;

- aux sociétés participant à une fusion transfrontalière et ayant leur siège en France ;

- aux filiales et établissements situés en France d'une société issue d'une fusion transfrontalière situe dans un autre Etat membre de la Communauté européenne (C. trav., art. L. 2371-1).

Le nouvel article L. 2371-2 du Code du travail dispose que la société issue d'une fusion transfrontalière n'est pas tenue d'instituer des règles relatives à la participation des salariés si, à la date de son immatriculation, aucune société participant à la fusion n'est régie par ces règles. On retrouve, ici, en quelque sorte, le fameux principe "avant-après", qui régit le dispositif d'implication des salariés dans la société européenne. De même, la participation dont il est, ici, question doit être entendue "au sens de l'article L. 2351-6 ", qui concerne, lui-même, la société européenne (C. trav., art. L. 2371-3, nouv.). Aux termes de cette disposition, "on entend par participation l'influence exercée par l'organe représentant les salariés ou par les représentants des salariés sur les affaires d'une société sous les formes suivantes :

- soit en exerçant leur droit d'élire ou de désigner certains membres de l'organe de surveillance ou d'administration de la société ;

- soit en exerçant leur droit de recommander la désignation d'une partie ou de l'ensemble des membres de l'organe de surveillance ou d'administration de la société ou de s'y opposer" (11).

La loi n'envisage que la participation des salariés au sens qui vient d'être décrit. Nulle référence n'est donc faite à l'information et à la consultation, telles qu'elles sont définies, à propos de la société européenne, par les articles L. 2351-4 et L. 2351-5 du Code du travail (12). En revanche, et s'agissant de la détermination des modalités concrètes de cette participation, on retrouve un schéma classique. Renvoi est, d'abord, fait à un accord conclu entre les dirigeants de sociétés participant à la fusion transfrontalière et les représentants des salariés. A défaut d'accord, des dispositions supplétives sont prévues par la loi (C. trav., art. L. 2371-3, nouv.). Une particularité importante doit, cependant, être relevée. En effet, en application du dernier alinéa de cette même disposition, les dirigeants participant à la fusion transfrontalière peuvent choisir de mettre en place, sans négociation préalable, les modalités de participation des salariés conformément aux dispositions supplétives de la loi. Une telle décision n'est donc nullement dépendante de l'échec des négociations, mais peut intervenir dès le début du processus de fusion. Il ne s'agit là que d'une reprise des dispositions de la Directive de 2005 (13).

Relevons, enfin, pour en terminer avec les dispositions générales, que le décompte des effectifs des sociétés participantes, filiales ou établissements concernés situés en France est effectué conformément à l'article L. 1111-2 du Code du travail (14).

  • Mise en place du groupe spécial de négociation

La mise en place d'un groupe spécial de négociation (GSN) n'est pas inéluctable. Tout d'abord, et nous l'avons vu, la participation des salariés peut être directement décidée par les représentants des sociétés parties à la fusion. Ensuite, il résulte de la loi que l'installation d'un GSN dépend de conditions précises. Partant, la participation des salariés dans la société issue de la fusion est, à titre de principe, mise en oeuvre "conformément aux dispositions des articles L. 225-28 à L. 225-56 (N° Lexbase : L5899AIC) et L. 225-79 à L. 225-93 (N° Lexbase : L5950AI9) du Code de commerce" (C. trav., art. L. 2372-1, al. 1er, nouv.), c'est-à-dire conformément au droit commun de la société anonyme, qui autorise les statuts à prévoir des membres du conseil d'administration ou du conseil de surveillance élus soit par le personnel de la société, soit par le personnel de la société et celui de ses filiales directes ou indirectes ayant leur siège en France.

La constitution d'un GSN, doté de la personnalité juridique, doit, en revanche, intervenir lorsque l'une des conditions suivantes est satisfaite :

- au moins une des sociétés participant à la fusion transfrontalière applique des règles relatives à la participation et emploie, pendant la période de six mois qui précède la publication du projet de fusion, au moins cinq cents salariés ;

- en application des articles L. 225-27 (N° Lexbase : L5898AIB) et L. 225-79 (N° Lexbase : L5950AI9) du Code de commerce, la société issue de la fusion transfrontalière ne garantit pas au moins le même niveau de participation des salariés, apprécié en fonction de la proportion de représentants parmi les membres du conseil d'administration, du conseil de surveillance ou du comité mentionné à l'article L. 2373-1 du présent code (N° Lexbase : L1200HIB), que le niveau de participation des salariés qui s'applique aux sociétés participant à la fusion transfrontalière (C. trav., art. L. 2372-1, nouv.) (15).

En tout état de cause, le GSN devra être institué "dès que possible" après la publication du projet de fusion. On peut regretter le caractère imprécis de cette disposition. On retrouve, cependant, la même exigence à propos du GSN de la société européenne .

La mission du GSN est définie par l'article L. 2372-2, nouveau. Celui-ci "détermine avec les dirigeants des sociétés participant à la fusion transfrontalière ou leur représentants, par un accord écrit, les modalités de la participation des salariés au sein de la société issue de la fusion".

  • Désignation, élection, statuts des membres et fonctionnement du GSN

La loi n'envisage pas de manière précise la désignation, l'élection et le statut des membres du GSN. Elle se contente de renvoyer sur ce point aux dispositions intéressant la société européenne (C. trav., art. L. 2372-3, nouv.).

S'agissant du fonctionnement du GSN, l'article L. 2372-4, nouveau, définit les conditions de majorité dans lesquelles doivent être prises les décisions au sein du GSN. Il prévoit que ce dernier prend ses décisions à la majorité absolue de ses membres, laquelle doit représenter, également, la majorité absolue des salariés des sociétés participantes, des filiales et établissements concernés (16).

Dans deux situations dérogatoires, les décisions du groupe spécial de négociation doivent, cependant, être prises à une majorité renforcée. Est, ainsi, requise la majorité des deux tiers des membres du groupe spécial de négociation, issus d'au moins deux Etats membres, représentant au moins les deux tiers des salariés des sociétés participantes, des filiales et établissements concernés :

- pour décider de ne pas engager les négociations ou de clore les négociations déjà engagées et de se fonder sur la réglementation relative à la participation en vigueur dans l'Etat membre où la société issue de la fusion transfrontalière aura son siège. Une telle décision aura, alors, pour effet de rendre inapplicables à la société issue de la fusion les dispositions du chapitre III du présent titre VII ;

- pour décider, lorsque la participation concerne au moins 25 % du nombre total de salariés des sociétés participantes, de fixer un nombre ou une proportion des membres de l'organe de surveillance ou d'administration par lequel les salariés exercent leurs droits à participation à un niveau inférieur à celui qui était le plus élevé au sein de l'une des sociétés participantes.

Ces dispositions ne sont pas sans rappeler celles qui régissent le fonctionnement du GSN de la société européenne. D'ailleurs, l'article L. 2372-5, alinéa 2, nouveau, renvoie, pour les autres modalités de fonctionnement du GSN, aux articles L. 2352-9 à L. 2352-12 et L. 2352-15 du Code du travail. Relevons, enfin, que l'alinéa 1er de l'article L. 2372-5 dispose qu'aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié en raison de sa participation à la prise d'une décision en application de l'article L. 2372-4 et que toute décision ou tout acte contraire à cette interdiction est nul de plein droit. On peut se demander si cette disposition était vraiment nécessaire dans la mesure où, ainsi que nous le verrons plus avant, les membres du GSN ont le statut de salarié protégé.

  • Contenu de l'accord

L'article L. 2372-6 définit le contenu minimum de l'accord conclu entre les dirigeants des sociétés participant à la fusion et le GSN. Celui-ci doit envisager :

- les sociétés participantes, les établissements et les filiales concernés par l'accord ;

- les modalités de participation ;

- la date d'entrée en vigueur de l'accord et sa durée ;

- les cas dans lesquels l'accord est renégocié et la procédure suivie pour sa renégociation.

Il est important de souligner qu'en application de l'article L. 2372-7, nouveau, du Code du travail, lorsqu'il existe plusieurs formes de participation au sein des sociétés participant à la fusion, seul le groupe spécial de négociation a compétence pour déterminer la forme de la participation qui s'appliquera dans la société issue de la fusion, les établissements et les filiales concernées. Il faut donc comprendre que la négociation entre les membres du GSN et les dirigeants des sociétés participant à la fusion ne portera que sur les modalités pratiques de mise en oeuvre de cette forme de participation (17).

  • Comité de la société issue de la fusion transfrontalière et participation des salariés en l'absence d'accord

Il convient, tout d'abord, de relever que, en vertu de l'article L. 2372-8, nouveau, du Code du travail, les dirigeants des sociétés participantes et le groupe spécial de négociation peuvent, d'un commun accord, décider d'appliquer les dispositions de référence prévues par la loi. Ces dispositions supplétives sont, également, applicables :

- lorsque, en application du second alinéa de l'article L. 2371-2, les dirigeants des sociétés qui fusionnent auront décidé de l'application de celle-ci, sans ouvrir les négociations ;

- lorsque, à l'issue de la période de négociation prévue à l'article L. 2352-9, aucun accord n'a été conclu et que le GSN n'a pas pris la décision prévue au deuxième alinéa de l'article L. 2372-4.

L'article L. 2373-2 du Code du travail conditionne l'immatriculation de la société issue de la fusion dans laquelle est institué le comité prévu par l'article L. 2373-1, à deux conditions alternatives :

- les parties ont décidé de rendre applicables à la société les dispositions du présent chapitre III, ainsi que du chapitre IV ;

- ou les dirigeants des sociétés participantes s'engagent à en faire application.

Ainsi que nous l'avons relevé précédemment, cette disposition répond au souci exprimé par les auteurs de la Directive 2005/56/CE, que la société issue d'une fusion transfrontalière ne puisse être définitivement instituée sans que les mécanismes de participation des salariés aient été effectivement déterminés.

L'article L. 2373-3, nouveau, du Code du travail définit les attributions, la composition et le fonctionnement du comité créé au sein de la société issue de la fusion transfrontalière, par renvoi aux dispositions relatives au comité de la société européenne, pour ce qui concerne "la mise en oeuvre des modalités de la participation des salariés telle que définie à l'article L. 2351-6".

  • Participation des salariés au conseil d'administration et de surveillance

Le régime "légal" de la participation des salariés au conseil d'administration et de surveillance est déterminé par les articles L. 2373-4 et suivants du Code du travail. Ce dernier texte rend obligatoire un examen comparatif des différents systèmes nationaux de participation des salariés appliqués dans les différentes sociétés qui fusionnent.

Cette exigence devra être suivie dans deux hypothèses. Tout d'abord, lorsque la participation des salariés au sein des sociétés participant à la constitution de la société issue d'une fusion transfrontalière concerne une proportion du nombre total des salariés employés par les sociétés participantes au moins égale à un tiers d'entre eux. Ensuite, lorsque ce seuil n'est pas atteint et que le groupe spécial de négociation en a, ainsi, décidé.

Si une seule forme de participation des salariés existe au sein des sociétés participantes, ce système sera appliqué à la société issue de la fusion transfrontalière en retenant, pour sa mise en place, la proportion ou, selon le cas, le nombre le plus élevé de membres concernés par les droits à participation au sein de l'organe d'administration ou de surveillance. Si plusieurs formes de participation des salariés existent au sein des sociétés participantes, le GSN détermine laquelle de ces formes est instaurée dans la société issue de la fusion transfrontalière (C. trav., art. L. 2373-5). Si le GSN ne parvient pas à se décider, il appartient aux seuls dirigeants des sociétés participant à la fusion transfrontalière de déterminer la forme de participation applicable (18). En tout état de cause, il est toujours retenu, pour la mise en place du système applicable, la proportion ou le nombre le plus élevé de membres de l'organe d'administration ou de surveillance concernés par les droits à participation des salariés (C. trav., art. L. 2373-6, al. 2, nouv.)

L'article L. 2373-7, nouveau, du Code du travail détermine les modalités selon lesquelles sera mise en oeuvre la forme de participation des salariés retenue dans le cadre de la société issue de la fusion transfrontalière. Celles-ci varient selon la forme choisie.

  • Dispositions applicables postérieurement à l'immatriculation de la société issue de la fusion transfrontalière

Compte tenu de la création de nouvelles instances de représentation du personnel dans la société issue d'une fusion transfrontalière et afin d'éviter une superposition des institutions, l'article L. 2374-1, nouveau, du Code du travail prévoit que postérieurement à l'immatriculation de la société, il pourra être revenu sur les institutions représentatives existant antérieurement à l'immatriculation soit par accord collectif, soit par accord avec le GSN.

Il convient, par ailleurs, de faire mention des articles L. 2374-3, obligeant les salariés siégeant au sein de l'organe de gestion de la société issue de la fusion au secret professionnel et à l'obligation de discrétion et L. 2374-4, étendant, à ces mêmes salariés, le bénéfice de la protection instituée par l'article L. 225-33 du Code de commerce (N° Lexbase : L5904AII) (19).

  • Dispositions finales

Afin d'assurer le respect des dispositions contraignantes de la loi, le législateur a classiquement recours au délit d'entrave. Plus précisément, l'article L. 2375-1 dispose que "le fait d'apporter une entrave soit à la consultation d'un groupe spécial de négociation ou d'un comité de la société issue de la fusion transfrontalière mis en place ou non par accord, soit à la libre désignation de leurs membres, soit à leur fonctionnement régulier est puni d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 3 750 euros".

De même, et sans entrer dans le détail, les articles 4, 5 et 6 de la loi apporte, de manière très classique, des modifications à plusieurs articles du Code du travail, afin d'assurer une protection effective des salariés membres du groupe spécial de négociation ou du comité de la société issue d'une fusion transfrontalière ou de la société coopérative européenne.

Il convient, enfin, de relever que, en application de l'article 7 de la loi sous examen, les dispositions qui viennent d'être décrites sont applicables aux opérations de fusion dont le traité est signé après la publication de la loi.


(1) Il s'agit de la Directive (CE) 2005/56 du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005, sur les fusions transfrontalières des sociétés de capitaux (N° Lexbase : L3532HD8) et de la Directive (CE) 2006/46 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2006, modifiant les Directives du Conseil 78/660/CEE, concernant les comptes annuels de certaines formes de sociétés, 83/349/CEE concernant les comptes consolidés, et 86/635/CEE, concernant les comptes annuels et les comptes consolidés des banques (N° Lexbase : L5114HKM).
(2) Le volet social du dispositif a fait l'objet de la loi n° 2008-89 du 30 janvier 2008, relative à la mise en oeuvre des dispositions communautaires concernant le statut de la société coopérative européenne et la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur (N° Lexbase : L7902H33). V. nos obs., Précisions sur le statut de la société coopérative européenne et la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur, Lexbase Hebdo n° 291 du 7 février 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N8741BD4). On reste dubitatif quant à la dissociation de ces deux textes.
(3) Voir les obs. de V. Téchené, Présentation de la loi portant diverses dispositions d'adaptation du droit des sociétés au droit communautaire, Lexbase Hebdo n° 312 du 9 juillet 2008 - édition privée (N° Lexbase : N5221BGH).
(4) A. Grosskost, Rapport fait au nom de la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'Administration générale de la République.
(5) Rappelons que, dans les entreprises de plus de cinquante salariés dépourvues de comité d'entreprise, ses prérogatives économique sont de droit exercées par les délégués du personnel . L'article L. 236-27 du Code de commerce pourrait être interprété comme renvoyant à cette disposition, ce qui, il est vrai, serait redondant.
(6) L'article 7 de la Directive prévoit que le rapport établi par les organes de direction et d'administration de chacune des parties explique et justifie les aspects juridiques et économiques de la fusion et en expose les conséquences pour les salariés.
(7) A. Grosskost, rapp. préc..
(8) On retrouve, ici, un mécanisme en vigueur dans la société européenne, qui ne peut être immatriculé que si un dispositif de participation des salariés a été arrêté. V. aussi, infra.
(9) Ce qui peut apparaître quelque peu surprenant.
(10) Article 3 de la loi du 3 juillet 2008. Cet article vise à transposer les prescriptions de l'article 16 de la Directive du 26 octobre 2005, relatives à la participation des salariés de la société absorbante ou issue de la fusion transfrontalière aux travaux des organes sociaux de celle-ci. La Directive 2005/56/CE prévoit que les salariés bénéficiant d'un régime de participation avant la fusion transfrontalière doivent pouvoir continuer à en jouir après l'achèvement de l'opération, au moins lorsque leur nombre dépasse 500 pendant les six mois précédant l'élaboration du projet de fusion. Elle prescrit, notamment, que le niveau de participation ne saurait être inférieur dans la société absorbante ou issue de la fusion à ce qu'il était dans l'une des parties à la fusion ; de même, cette participation doit être élargie aux travailleurs des établissements situés dans d'autres Etats membres que celui du siège statutaire.
(11) Se voulant, sans doute, rassurante à l'égard de certains, Madame Grosskost relève qu'"une telle définition ne remet nullement en cause le principe selon lequel, en droit français, les décisions économiques concernant les sociétés sont prises par leur direction. On se trouve donc loin de l'introduction subreptice d'une cogestion à l'allemande, même si une attention particulière est apportée au respect du rôle et de l'avis des représentants des salariés".
(12) Cela est, à dire vrai, logique dans la mesure où l'information et la consultation des représentants du personnel résulteront de l'application des dispositions nationales.
(13) L'article 16 de la Directive 2005/56/CE, lequel prévoit que, "lorsqu'ils réglementent les principes et les procédures visés au paragraphe 3, les Etats membres [...] accordent aux organes compétents des sociétés participant à la fusion le droit de choisir, sans négociation préalable, d'être directement soumis aux dispositions de référence relatives à la participation [...], telles que fixées par la législation de l'Etat membre dans lequel le siège statutaire de la société issue de la fusion transfrontalière sera établi, et de respecter ces dispositions à compter de la date d'immatriculation".
(14) L'article L. 2371-5 précise que "les dispositions d'application du présent titre relatives à la procédure applicable aux litiges et aux informations transmises à l'inspection du travail en cas de constitution de la société issue de la fusion transfrontalière sont déterminées par décret en Conseil d'Etat".
(15) Cette disposition est, évidemment, très importante en ce qu'elle garantit que l'absence de négociation ne doit pas nuire aux droits "acquis" des salariés en matière de participation antérieurement à la fusion.
(16) Cette exigence tend à assurer que la majorité des salariés aura accepté les modalités de participation devant s'appliquer dans la société issue de la fusion, ainsi que dans ses filiales et établissements. Chaque membre dispose d'une voix.
(17) V., dans le même sens, à propos de la société européenne, l'article L. 2352-19 du Code du travail .
(18) C. trav., art. L. 2373-6, al. 1er, nouv. Cet alinéa vise "l'accord" du GSN, ce qui est trompeur, dans la mesure où, rappelons-le, la décision appartient au seul GSN, à l'exclusion de toute négociation avec les représentants des sociétés employeurs.
(19) Notons, encore, que l'article L. 2374-2 établit une règle destinée à protéger, pendant trois ans, le régime de participation institué dans le cadre de la fusion transfrontalière.

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