La lettre juridique n°168 du 19 mai 2005 : Fiscalité des particuliers

[Jurisprudence] Le passif déductible de l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune

Réf. : Cass. com., 19 avril 2005, n° 03-12.458, M. André Bogdan c/ Directeur général des impôts, FS-P+B (N° Lexbase : A9571DHX)

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par Daniel Faucher, Consultant au CRIDON de Paris

le 07 Octobre 2010

Alors que la date de dépôt de la déclaration relative à l'année 2005 se rapproche, une décision en date du 19 avril 2005 de la Haute juridiction nous permet de faire le point sur le passif déductible de l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune. Les dettes déductibles sont celles qui ont date certaine au 1er janvier de l'année d'imposition (1), qui sont à la charge du redevable de l'impôt (2) et sont justifiées (3). 1. Notion de date certaine

1.1. Principe

Cette condition de date certaine s'oppose à la déduction des dettes qui prennent naissance après le fait générateur de l'impôt, soit le 1er janvier de l'année d'imposition. Cependant, il n'est pas nécessaire que les dettes soient liquides pour être déductibles. Il suffit qu'elles existent dans leur principe encore que leur montant ne soit pas arrêté, mais la déduction ne peut être opérée que lorsque le montant est connu (Doc. adm. 7 S 361, du 1er octobre 1999, n° 2). De même, les dettes dont l'existence est incertaine ne sont pas déductibles. Il en est, ainsi, des dettes sous conditions suspensives ou litigieuses.

2.2. Applications

  • Les impôts

Il est admis que les dettes de cette nature, dont le fait générateur se situe au plus tard au 1er janvier de l'année d'imposition, soient déduites même si, pour celles qui donnent lieu à émission d'un rôle d'imposition, l'avis parvient au redevable après la date limite de dépôt de la déclaration d'ISF. En pratique, le redevable déduit un montant équivalent, sous réserve de régularisation, à celui acquitté l'année précédente pour le même impôt. Cette règle est écartée lorsque le redevable est susceptible de calculer lui même le montant réellement dû, ce qui est le cas de l'impôt sur le revenu. Lorsque le fait générateur est constitué, comme, par exemple, pour la taxe additionnelle au droit de bail perçue sur les loyers (précisons que celle-ci a été remplacée à compter de 1998 par la contribution sur les revenus locatifs, elle même supprimée à partir de 2001), par la mutation de jouissance, la dette déductible ne peut être limitée aux seuls loyers courus avant le 1er janvier (Cass. com., 19 avril 2005, n° 03-12.458, M. André Bogdan c/ Directeur général des impôts, ici commenté).

  • Dettes litigieuses

La dette, qu'elle soit fiscale ou autre, n'est pas déductible tant qu'elle est litigieuse, au motif que sa réalité est contestée par voie de réclamation auprès du service des impôts ou devant un tribunal. Tel est le cas de rappels en matière d'impôt sur le revenu (Cass. com., 13 janvier 1998, n° 96-10.352, Directeur général des impôts c/ M. Picoty N° Lexbase : A3412CS8). En effet, la dette contestée n'est pas certaine, de sorte qu'elle ne peut figurer au passif de la déclaration. Cette solution n'est pas spécifique à l'impôt de solidarité sur la fortune. La non déduction des rappels contestés est, également, un principe établi s'agissant des droits de succession. Or, les règles applicables dans ce domaine le sont, aussi, en matière d'ISF. Ainsi, l'analyse ne diffère pas quand bien même le redevable aurait acquitté les rappels d'impôts, au lieu d'accompagner sa réclamation d'une demande de sursis de paiement (Cass. com., 15 janvier 2002, n° 98-21.330, F-D N° Lexbase : A7974AXM). La solution est identique en cas de garantie d'un passif fiscal, si la dette fiscale elle même est contestée par le redevable (Cass. com., 3 juillet 2001, n° 98-15.971, M. Philippe Durreche c/ Directeur des Services Fiscaux des Yvelines N° Lexbase : A1183AUD). En revanche, la dette fiscale devient déductible lorsqu'elle n'est plus contestée, soit parce que le contribuable a accepté les redressements, soit parce que la procédure a abouti à une décision juridictionnelle définitive. Dans cette hypothèse, le rappel devient rétroactivement déductible depuis l'année au cours de laquelle il aurait normalement dû être acquitté. Une déclaration complémentaire doit être déposée dans le délai imparti pour les réclamations, c'est-à-dire, en l'espèce, au plus tard le 31 décembre de la deuxième année qui suit la décision définitive (en ce sens, instruction du 9 août 1999, BOI n° 7 S-10-99 N° Lexbase : X8017ABK).

  • Paiement fractionné en droits de succession

Lorsqu'un redevable s'est engagé à acquitter les droits de succession dus par lui dans le cadre du paiement fractionné, le passif déductible est fixé à hauteur du capital restant dû au 1er janvier, des intérêts échus et non payés, ainsi que des intérêts courus à la même date (CA Pau, 29 octobre 2001, n° 00PA00169, confirmant TGI Dax, 7 février 2001, n° 99-1242).

  • Dettes éventuelles

La caution d'une société n'est pas en droit de déduire le solde débiteur du compte bancaire de la société dont il s'est porté caution tant que son engagement reste éventuel, c'est-à-dire tant qu'il ne justifie pas d'une mise en jeu de son engagement. Autrement dit, la caution n'est pas fondée à déduire le montant de l'engagement tant que la dette est contestée et qu'il n'a pas acquitté l'obligation principale à la place du débiteur défaillant (Cass. com., 24 mai 1994, n° 92-14.838, M. Le Pen c/ Directeur général des impôts et autres N° Lexbase : A6982AB9).

2. Dettes à la charge du redevable

Seules les dettes qui sont à la charge personnelle du redevable de l'ISF, ou des enfants mineurs dont il a l'administration légale des biens, sont déductibles. Ainsi, la pension qu'un époux condamné a dû payer de son vivant à son conjoint divorcé lui survit, en raison de son caractère d'indemnité, et constitue, à ce titre, une dette de son patrimoine qui passe telle quelle à ses héritiers. La valeur de capitalisation de cette pension est, donc, déductible. En revanche, les droits dus par un héritier ayant reçu la nue-propriété de biens, droits pour lesquels il a sollicité le bénéfice du paiement différé, ne peuvent être déduits par l'usufruitier, quand bien même ce dernier, en vertu de la loi, serait imposable sur la totalité des biens (QE n° 40580 de M. Doligé Éric, JOANQ, 24 janvier 2000, p. 410, min. Eco., réponse publ. 3 avril 2000, p. 2186, 11ème législature N° Lexbase : L9295BBU). La situation est différente lorsque l'usufruitier, au moment où il s'est dépossédé de la nue-propriété par donation, a pris, conformément aux dispositions de l'article 1712 du CGI , à sa charge le paiement des droits de donation normalement dus par le donataire. Dans cette hypothèse, l'administration admet que l'usufruitier puisse déduire de son patrimoine imposable le montant des droits de donation dont le paiement a été différé puis fractionné concernant les transmissions d'entreprises), sous réserve, lorsque le donataire a la qualité d'héritier de l'usufruitier, que la convention par laquelle le donateur prend à sa charge les droits de mutation à titre gratuit ait acquis date certaine avant le 1er janvier de l'année d'imposition (QE n° 69111 de M. Dubernard Jean-Michel, JOANQ, 19 novembre 2001, p. 6560, min. Eco., réponse publ. 4 mars 2002, p. 1254, 11ème législature N° Lexbase : L5262BEM).

3. Justification du passif

L'existence de la dette doit être prouvée par les moyens de preuve compatibles avec la procédure écrite, c'est-à-dire par des actes ou écrits ou, encore, par des présomptions suffisamment graves, précises et concordantes (Doc. adm. 7 S 361, du 1er octobre 1999, n° 13). Ainsi, la production de relevés de compte bancaires débiteurs et d'une copie de plainte assortie de constitution de partie civile suffit à établir l'existence des dettes du redevable de l'ISF (Cass. com., 10 décembre 2003, n° 01-14.735, F-D N° Lexbase : A4244DAG). En revanche, l'engagement verbal de prendre en charge un solde débiteur ouvert dans les livres d'une société au nom d'une autre ne permet pas au dirigeant de déduire le montant correspondant (Cass. com.4 février 1997, n° 95-13.131, M. Patrick Bindschedeler c/ M. le Directeur général des impôts, inédit, rejet N° Lexbase : A2289CMQ). Il convient de signaler que, comme en matière de succession, l'administration a la faculté d'exiger du créancier une attestation certifiant de l'existence de la dette.

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