CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 68543
MORELLE
Lecture du 05 Juin 1991
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 11 mai 1985, présentée par M. Michel MORELLE, demeurant 51, rue du Marais à Breuil-le-Vert (60600) et ayant exploité jusqu'au 31 janvier 1979 un fonds de commerce de débit de boissons sis Place de la Gare à Chauny (département de l'Aisne) ; M. MORELLE demande que le Conseil d'Etat : 1°) annule le jugement en date du 5 mars 1985 par lequel le tribunal administratif d' Amiens a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1975 à 1978 ainsi que de la majoration exceptionnelle pour l'année 1975 par rôles mis en recouvrement le 31 août 1981 et des compléments de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1975 au 31 décembre 1978 par avis de mise en recouvrement du 3 juillet 1981 ; 2°) prononce la décharge des impositions litigieuses ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu : - le rapport de M. Zémor, Conseiller d'Etat, - les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 302 ter du code général des impôts alors en vigueur : "10. Lorsque la détermination du forfait est la conséquence d'une inexactitude constatée dans les renseignements ou documents dont la production est exigée par la loi, le forfait arrêté pour la période à laquelle se rapportent ces renseignements ou documents devient caduc et il est procédé à l'établissement d'un nouveau forfait si l'entreprise remplit encore les conditions prévues au 1 pour bénéficier du régime forfaitaire" ;
Considérant que les forfaits primitivement assignés, en matière de chiffres d'affaires et de bénéfices imposables, à M. MORELLE, qui exploitait un fonds de commerce de débit de boissons, l'ont été, pour l'année 1975, par tacite reconduction de ceux de la période biennale 1973/1974 et, pour les périodes biennales 1976/1977 et 1978/1979, par acceptation des propositions du service ; que, comme il le reconnaît dans sa lettre du 18 juin 1979, M. MORELLE avait procédé depuis six ans et de manière régulière à des achats sans factures dans des proportions importantes ; qu'il a omis de mentionner ces achats dans ses déclarations ; que par la transaction signée le 25 août 1980 avec la direction générale de la concurrence et de la consommation en matière d'infraction à la législation économique, M. MORELLE a reconnu la réalité de ces dissimulations ; qu'il n'apporte pas la preuve que ces achats étaient destinés à sa consommation personnelle, dès lors qu'il déduisait par ailleurs des prélèvements personnels sur les achats régulièrement facturés ; qu'ainsi l'administration établit que les forfaits des années 1975, 1976, 1977 et 1978 avaient été déterminés sur la base de renseignements inexacts fournis par le contribuable ; que c'est, dès lors, à bon droit qu'elle a regardé ces forfaits comme caducs et procédé à l'établissement de nouveaux forfaits ;
Considérant que les notifications adressées à M. MORELLE indiquaient que les forfaits relatifs aux années litigieuses étaient regardés comme caducs à la suite de la constatation d'achats sans factures non comptabilisés et étaient accompagnées de nouvelles propositions de forfaits de bénéfices industriels et commerciaux et de taxe sur les chiffres d'affaires ; que ces notifications étaient suffisamment motivées ;
Considérant qu'il est constant que M. MORELLE a négligé, quoique régulièrement invité à le faire, de prendre connaissance du rapport détaillé par lequel l'administration a soumis le différend à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, au demeurant régulièrement saisie par l'administration dès lors que le contribuable avait fait part de son désaccord sur les nouveaux forfaits ainsi notifiés ; qu'il suit de là qu'il n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas eu communication des éléments que ladite commission a retenus pour arrêter les nouveaux forfaits ; qu'en précisant qu'elle adoptait les conclusions contenues dans ledit rapport et qu'elle jugeait que les achats sans factures effectués par M. MORELLE au cours de la période litigieuse étaient destinés à une revente commerciale au sein de l'entreprise exploitée par l'intéressé et non à la consommation personnelle de celui-ci, compte tenu des sommes et des quantités importantes en cause, elle avait, contrairement à ce que soutient le requérant, suffisamment motivé son avis ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. MORELLE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d' Amiens a rejeté sa requête ;
Article 1er : La requête de M. MORELLE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. MORELLE et au ministre délégué au budget.