Jurisprudence : CE 1/4 ch.-r., 28-04-2023, n° 454797, mentionné aux tables du recueil Lebon

CE 1/4 ch.-r., 28-04-2023, n° 454797, mentionné aux tables du recueil Lebon

A69899SN

Référence

CE 1/4 ch.-r., 28-04-2023, n° 454797, mentionné aux tables du recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/95733165-ce-14-chr-28042023-n-454797-mentionne-aux-tables-du-recueil-lebon
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Abstract

54-05-05-01 Requérant bénéficiant de contrats à durée déterminée (CDD) auprès d’établissements publics et ayant demandé l’annulation pour excès de pouvoir de décisions prises en 2017 l’informant de ce qu’il n’était pas éligible à l’accès à la fonction publique de l’Etat prévu par la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012....La loi du 12 mars 2012 a créé un dispositif dérogatoire d’accès aux corps de fonctionnaires de l'Etat pour les agents contractuels à temps incomplet recrutés sur le fondement de l’article 6 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, se traduisant, sauf pour les corps de catégorie C, par l’organisation d’examens professionnalisés réservés ou de concours réservés. ...La circonstance que l’article 41 de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 a limité la période d’ouverture des examens professionnalisés réservés et des concours réservés jusqu’au 12 mars 2018, date au-delà de laquelle les agents concernés n’étaient plus éligibles à ce dispositif dérogatoire, ne rend pas sans objet les demandes d’annulation du requérant. ...En effet, l’effet utile de l’annulation pour excès de pouvoir des décisions contestées lui refusant l’accès à ce dispositif conduirait l’administration à réexaminer si l’intéressé remplissait les conditions pour un tel accès dérogatoire à la fonction publique sur le fondement des dispositions en vigueur à la date de ces décisions.



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

N° 454797

Séance du 07 avril 2023

Lecture du 28 avril 2023

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 4ème et 1ère chambres réunies)


Vu la procédure suivante :

Par deux requêtes distinctes, Mme A B a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler les décisions des 5 et 12 septembre 2017 par lesquelles le secrétaire général adjoint de l'Ecole nationale supérieure des beaux-arts de Paris et le directeur de l'Ecole nationale supérieure d'architecture de Paris-Belleville l'ont déclarée inéligible à l'accès à l'emploi titulaire prévu par l'article 1er de la loi du 12 mars 2012🏛 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique et, d'autre part, d'enjoindre au ministre de la culture et de la communication et aux directeurs de ces écoles de la déclarer éligible à l'accès à l'emploi titulaire et de l'autoriser à se présenter aux concours réservés à cet effet. Par un jugement nos 1717465, 1717466 du

27 mars 2019, le tribunal administratif a rejeté ses demandes.

Par un arrêt n° 19PA01732 du 27 mai 2021, la cour administrative d'appel de Paris⚖️ a annulé ce jugement ainsi que les décisions des 5 et 12 septembre 2017 et a enjoint à la ministre de la culture de réexaminer l'éligibilité de Mme B à l'accès à l'emploi titulaire par les concours réservés.

Par un pourvoi, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 juillet et 19 octobre 2021 et le 11 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre de la culture demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête de Mme B.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012🏛 ;

- la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016🏛 ;

- le décret n° 2012-631 du 3 mai 2012🏛 ;

- le décret n° 2013-419 du 22 mai 2013🏛 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Sylvain Monteillet, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme B ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que

Mme A B bénéficiait simultanément, à la date du 31 mars 2013, de deux contrats à durée déterminée à temps incomplet auprès de l'Ecole nationale supérieure des beaux-arts de Paris (ENSBA), d'une part, et de l'Ecole nationale supérieure d'architecture de Paris-Belleville (ENSA-PB), d'autre part, afin de dispenser des enseignements en anglais. Par deux décisions, respectivement des 5 et 12 septembre 2017, le secrétaire général adjoint de l'ENSBA et le directeur de l'ENSA-PB l'ont informée de ce qu'elle n'était pas éligible à l'accès à la fonction publique de l'Etat prévu par l'article 1er de la loi du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, au motif qu'elle ne remplissait pas, pour chacun de ses deux contrats, les conditions de quotité de travail requises par cette loi. Par un jugement du 27 mars 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté les deux demandes de Mme B tendant à l'annulation de ces deux décisions. La ministre de la culture se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 27 mai 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé ce jugement ainsi que les décisions des 5 et 12 septembre 2017 et lui a enjoint de réexaminer l'éligibilité de Mme B à l'accès à l'emploi titulaire par les concours réservés.

2. Aux termes de l'article 6 de la loi du 11 janvier 1984🏛 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa version applicable au litige : " Les fonctions qui, correspondant à un besoin permanent, impliquent un service à temps incomplet d'une durée n'excédant pas 70 % d'un service à temps complet, sont assurées par des agents contractuels () ".

3. Aux termes de l'article 1er de la loi du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique : " Par dérogation à l'article 19 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984🏛 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, l'accès aux corps de fonctionnaires de l'Etat dont les statuts particuliers prévoient un recrutement par la voie externe peut être ouvert par la voie de modes de recrutement réservés valorisant les acquis professionnels, dans les conditions définies par le présent chapitre () ". Aux termes de l'article 2 de cette loi : " I. - L'accès à la fonction publique de l'Etat prévu à l'article 1er est réservé aux agents occupant, à la date du 31 mars 2013, en qualité d'agent contractuel de droit public et pour répondre à un besoin permanent de l'Etat, de l'un de ses établissements publics ou d'un établissement public local d'enseignement : / () 2° Un emploi impliquant un service à temps incomplet conformément au premier alinéa de l'article 6 de la même loi, à la condition que la quotité de temps de travail soit au moins égale à 70 % d'un temps complet () ". Aux termes de l'article 5 de cette loi : " L'accès à la fonction publique de l'Etat prévu à l'article 1er est organisé selon : / 1° Des examens professionnalisés réservés ; / 2° Des concours réservés ; / 3° Des recrutements réservés sans concours pour l'accès au premier grade des corps de catégorie C accessibles sans concours () ".

4. Aux termes du III de l'article 41 de la loi du 20 avril 2016🏛 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires : " Les agents remplissant les conditions d'éligibilité prévues par la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, demeurent éligibles à l'accès à la fonction publique prévu aux articles 1er, 13 ou 24 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012🏛🏛 précitée jusqu'au 12 mars 2018 () ".

5. Aux termes de l'article 2 du décret du 3 mai 2012🏛 relatif aux conditions d'éligibilité des candidats aux recrutements réservés pour l'accès aux corps de fonctionnaires de l'Etat des catégories A, B et C et fixant les conditions générales d'organisation de ces recrutements en application de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique : " () III.- () Les agents employés en contrat à durée déterminée au

31 mars 2013 ne peuvent se présenter qu'aux recrutements réservés qui sont ouverts au sein du département ministériel ou de l'établissement public ou de l'autorité publique dont ils relevaient au 31 mars 2013 () V.- Sans préjudice des établissements et institutions mentionnés à l'article 3 de la loi du 12 mars 2012🏛 susvisée, lorsque le département ministériel, l'établissement public ou l'autorité publique ne disposent pas de corps de fonctionnaires, les agents peuvent se présenter aux recrutements qui leur sont ouverts par le département ministériel de tutelle ou de rattachement ou par le département ministériel qui assure la gestion des fonctionnaires affectés dans ce département ministériel, cet établissement ou cette autorité ".

6. Il résulte des dispositions citées ci-dessus que la loi du 12 mars 2012 a créé un dispositif dérogatoire d'accès aux corps de fonctionnaires de l'Etat pour les agents contractuels à temps incomplet recrutés sur le fondement de l'article 6 de la loi du

11 janvier 1984, se traduisant, sauf pour les corps de catégorie C, par l'organisation d'examens professionnalisés réservés ou de concours réservés.

7. En premier lieu, la circonstance que l'article 41 de la loi du 20 avril 2016, cité au point 4, a limité la période d'ouverture des examens professionnalisés réservés et des concours réservés jusqu'au 12 mars 2018, date au-delà de laquelle les agents concernés n'étaient plus éligibles à ce dispositif dérogatoire, ne rendait pas sans objet les demandes d'annulation de Mme B. En effet, l'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir des décisions contestées lui refusant l'accès à ce dispositif conduirait l'administration à réexaminer si l'intéressée remplissait les conditions pour un tel accès dérogatoire à la fonction publique sur le fondement des dispositions en vigueur à la date de ces décisions.

8. En second lieu, il résulte des dispositions citées ci-dessus que le bénéfice de ce dispositif dérogatoire est réservé aux agents effectuant, à la date du 31 mars 2013, une quotité de travail au moins égal à 70 % d'un emploi permanent et que cette quotité est calculée pour chaque emploi lorsque l'agent intéressé a conclu plusieurs contrats auprès d'employeurs différents. Or il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les fonctions occupées par Mme B à la date du 31 mars 2013 relevaient de deux contrats distincts auprès de deux employeurs, l'ENSBA et l'ENSA-PB, et qu'elles doivent ainsi être regardées comme relatives à deux emplois distincts pour l'application de l'article 2 de la loi du 12 mars 2012🏛. Par suite, en jugeant que les quotités de travail correspondant à ces deux contrats de travail devaient être additionnées, pour apprécier si la condition posée au 2° de l'article 2 de la loi du

12 mars 2012 était remplie, la cour a commis une erreur de droit.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛 font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 27 mai 2021 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme B au titre de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la ministre de la culture et à Mme A B.

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