COUR DE CASSATION
Première chambre civile
Audience publique du 6 juin 2001
Pourvoi n° 98-19.023
M. Ali Z ¢
Mutuelle générale d'Assurances (MGA)
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par
1°/ M. Ali Z,
2°/ Mme Aziza ZX, épouse ZX,
demeurant Saint-Maurice, agissant tant en leur nom qu'au nom de leurs enfants mineurs Imen Z, Sami Z, Ama Z,
3°/ Mlle Moufida Z,
4°/ M. Lofti Z,
5°/ Mme Samia Z,
tous trois demeurant Saint-Maurice,
en cassation d'un arrêt rendu le 8 avril 1998 par la cour d'appel de Paris (7e chambre, section A), au profit
1°/ de la Mutuelle générale d'Assurances (MGA), dont le siège est Blois,
2°/ de M. Didier W, demeurant Paris Charenton le Pont,
défendeurs à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 2 mai 2001, où étaient présents M. Sargos, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Verdun, conseiller référendaire rapporteur, MM. Aubert, Bouscharain, Bargue, Pluyette, Croze, conseillers, Mmes Cassuto-Teytaud, Girard, conseillers référendaires, Mme Petit, avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Verdun, conseiller référendaire, les observations de la SCP Vier et Barthélémy, avocat des consorts Z, de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de la Mutuelle générale d'assurances, les conclusions de Mme Petit, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que Rhida Z est décédé au cours d'un accident de la circulation alors qu'il était transporté dans son propre véhicule par M. W, qui n'était pas titulaire du permis de conduire ; que ses ayants-droit ont fait assigner en réparation de leurs préjudices moraux et économiques, outre le conducteur, pénalement condamné pour homicide involontaire par conducteur sous l'empire d'un état alcoolique, la Mutuelle générale d'assurances (MGA), assureur du véhicule ; que celle-ci, soutenant que Rhida Z, souscripteur du contrat, savait que M. W n'était pas titulaire du permis de conduire, a opposé la clause d'exclusion de garantie reprise de l'article R. 211-10, 1°, du Code des assurances figurant dans la police ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche
Vu l'article R. 211-13 du Code des assurances ;
Attendu que, pour accueillir l'exception de non garantie invoquée par la MGA, l'arrêt attaqué retient que la victime, souscriptrice du contrat, a confié la conduite de son véhicule à M. W sans se préoccuper de savoir si ce dernier était titulaire du permis de conduire ;
Attendu, qu'il résulte de l'article R. 211-13 du Code des assurances que l'exclusion de garantie prise du défaut de permis de conduire du conducteur n'est pas opposable à la victime ou à ses ayants-droit ; qu'il en va, cependant, autrement lorsque l'assureur fait la preuve que la victime, souscripteur du contrat, s'est volontairement placée dans la situation exclusive de garantie ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans relever que Rhida Z savait que M. W n'était pas titulaire du permis de conduire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte précité ;
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche
Vu l'article L. 211-6 du Code des assurances ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, est réputée non écrite toute clause stipulant la déchéance de la garantie de l'assuré en cas de condamnation pour conduite en état d'ivresse ou sous l'empire d'un état alcoolique ;
Attendu que l'arrêt attaqué retient encore Rhida Z a violé une seconde clause d'exclusion de garantie en confiant la conduite de son véhicule à un conducteur en état d'ivresse, circonstance exclue de la garantie par l'article 9-2b des conditions générales du contrat ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que cette clause d'exclusion devait être réputée non écrite, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 avril 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la Mutuelle générale d'assurances et M. W aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la Mutuelle générale d'assurances ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six juin deux mille un.