Jurisprudence : TA Lyon, du 06-07-2022, n° 1909914


Références

Tribunal Administratif de Lyon

N° 1909914

JU 5ème chambre
lecture du 06 juillet 2022
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2019, Mme B A, représentée par Me Bapcérès (Selarl DBKM avocats), demande au tribunal :

1°) d'annuler l'avis des sommes à payer valant titre exécutoire émis le 3 décembre 2019 par le président de la métropole de Lyon d'un montant de 4 515,44 euros en vue de la récupération d'un indu de revenu de solidarité active constitué sur la période du 1er août 2013 au 31 mars 2016 ;

2°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer ledit indu ;

3°) de mettre à la charge de la métropole de Lyon la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Elle soutient que :

- le bordereau de titre de recettes relatif à l'avis des sommes à payer ne comporte pas de signature ;

- les mentions portées sur le titre ne permettent pas de connaître les bases de liquidation de la créance ;

- l'indu n'est pas fondé dans son principe ni dans son montant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2020, la métropole de Lyon, représentée par Me Prouvez (SCP Carnot avocats), conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un courrier du 15 décembre 2021, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative🏛, de ce que le jugement du tribunal est susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant à la contestation du bien-fondé de l'indu mis à la charge de Mme A pour la période du 1er août 2013 au 31 mars 2016, dès lors que l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du tribunal du 24 septembre 2019 fait obstacle à ce que le tribunal se prononce à nouveau.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté du 27 juin 2007🏛 portant application de l'article D. 1617-23 du code général des collectivités territoriales🏛 relatif à la dématérialisation des opérations en comptabilité publique ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012🏛 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991🏛 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

La présidente du tribunal a désigné Mme Schmerber, vice-présidente, pour statuer sur les litiges mentionnés à l'article R. 222-13 du code de justice administrative🏛.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Schmerber, vice-présidente,

-et les observations de Me Rey, substituant Me Prouvez, représentant la métropole de Lyon.

La clôture de l'instruction a été prononcée à l'issue de l'audience.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A a été bénéficiaire du revenu de solidarité active dans le département du Rhône à compter du 1er août 2013. Suite à un contrôle d'un agent assermenté de la caisse d'allocations familiales du Rhône réalisé le 29 décembre 2015 à son domicile, le directeur de cet organisme lui a, par un courrier du 21 juillet 2016, réclamé le remboursement d'une somme globale de 15 315,78 euros comprenant notamment un indu de revenu de solidarité active " socle " de 4 515,44 euros constitué pour la période du 1er août 2013 au 31 mars 2016. Par un recours administratif préalable obligatoire adressé au président de la métropole de Lyon le 6 septembre 2016, Mme A a contesté le bien-fondé de cet indu et, subsidiairement, sollicité une remise de dette. Par une décision du 6 décembre 2016, le président de la métropole de Lyon a rejeté cette réclamation. Le 16 mars 2017, la métropole de Lyon a émis un avis des sommes à payer pour le recouvrement de la somme de 4 515,44 euros correspondant à l'indu de revenu de solidarité active " socle " mis à sa charge par la décision du 21 juillet 2016. Par un recours adressé au président de la métropole de Lyon le 22 novembre 2017, Mme A a contesté pour la seconde fois le bien-fondé de cet indu de revenu de solidarité active ainsi que la régularité de l'avis des sommes à payer du 16 mars 2017. Cette réclamation a été rejetée par une décision du président de la métropole de Lyon en date du 4 décembre 2017.

2. Par un jugement du 24 septembre 2019, le tribunal a annulé l'avis des sommes à payer émis le 16 mars 2017 par la métropole de Lyon d'un montant de 4 515,44 euros pour un motif de régularité en la forme, ainsi que, par voie de conséquence, la décision du 4 décembre 2017 en tant que le président de la métropole de Lyon a rejeté le recours administratif formé par Mme A contre ce titre.

3. Le 3 décembre 2019, le président de la métropole de Lyon a émis un nouvel avis des sommes à payer pour le recouvrement de la somme de 4 515,44 euros correspondant à l'indu de revenu de solidarité active " socle " mis à la charge de l'intéressée par la décision précitée du 21 juillet 2016. Par la présente requête, Mme A demande au tribunal d'annuler le titre exécutoire émis le 3 décembre 2019 et de prononcer la décharge de l'obligation de payer l'indu.

Sur la régularité de l'avis des sommes à payer n° 22769 émis le 3 décembre 2019 :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 100-3 du code des relations entre le public et l'administration🏛 : " Au sens du présent code et sauf disposition contraire de celui-ci, on entend par : / 1° Administration : () les collectivités () ". Aux termes de l'article L. 111-2 dudit code : " Toute personne a le droit de connaître le prénom, le nom, la qualité et l'adresse administratives de l'agent chargé d'instruire sa demande ou de traiter l'affaire qui la concerne ; ces éléments figurent sur les correspondances qui lui sont adressées () ". Aux termes de l'article L. 212-1 de ce même code🏛 : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ". Aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales🏛 : " () 4° Quelle que soit sa forme, une ampliation du titre de recettes individuel ou de l'extrait du titre de recettes collectif est adressée au redevable. L'envoi sous pli simple ou par voie électronique au redevable de cette ampliation à l'adresse qu'il a lui-même fait connaître à la collectivité territoriale, à l'établissement public local ou au comptable public compétent vaut notification de ladite ampliation. Lorsque le redevable n'a pas effectué le versement qui lui était demandé à la date limite de paiement, le comptable public compétent lui adresse une mise en demeure de payer avant la notification du premier acte d'exécution forcée devant donner lieu à des frais. En application de l'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration🏛, le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif mentionne les nom, prénoms et qualité de la personne qui l'a émis ainsi que les voies et délais de recours. Seul le bordereau de titres de recettes est signé pour être produit en cas de contestation ".

5. Aux termes de l'article D. 1617-23 du code général des collectivités territoriales🏛 : " Les ordonnateurs des organismes publics, visés à l'article D. 1617-19, lorsqu'ils choisissent de transmettre aux comptables publics, par voie ou sur support électronique, les pièces nécessaires à l'exécution de leurs dépenses ou de leurs recettes, recourent à une procédure de transmission de données et de documents électroniques, dans les conditions fixées par un arrêté du ministre en charge du budget pris après avis de la Cour des comptes, garantissant la fiabilité de l'identification de l'ordonnateur émetteur, l'intégrité des flux de données et de documents relatifs aux actes mentionnés en annexe I du présent code et aux deux alinéas suivants du présent article, la sécurité et la confidentialité des échanges ainsi que la justification des transmissions opérées (). / La signature manuscrite, ou électronique conformément aux modalités fixées par arrêté du ministre en charge du budget, du bordereau récapitulant les titres de recettes emporte attestation du caractère exécutoire des pièces justifiant les recettes concernées et rend exécutoires les titres de recettes qui y sont joints conformément aux dispositions des articles L. 252 A du livre des procédures fiscales🏛 et des articles R. 2342-4, R. 3342-8-1 et R. 4341-4 du présent code. ". Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 27 juin 2007🏛 portant application de l'article D. 1617-23 du code général des collectivités territoriales🏛 relatif à la dématérialisation des opérations en comptabilité publique : " I. - En application de l'article D. 1617-23 du code général des collectivités territoriales🏛, la signature électronique des fichiers de données et de documents électroniques transmis au comptable est effectuée par l'ordonnateur ou son délégataire au moyen : / - soit d'un certificat garantissant notamment son identification et appartenant à l'une des catégories de certificats visées par l'arrêté du ministre de l'économie et des finances en date du 15 juin 2012 relatif à la signature électronique dans les marchés publics (NOR : EFIM1222915A) ; / - soit du certificat de signature "DGFIP" délivré gratuitement par la direction générale des finances publiques aux ordonnateurs des organismes publics visés à l'article 1er du présent arrêté ou à leurs délégataires qui lui en font la demande. / II. - Chaque organisme mentionné à l'article 1er du présent arrêté choisit de recourir à l'un ou l'autre de ces certificats énumérés au I du présent article. ". Aux termes de l'article 5 du même arrêté : " La signature électronique de l'ordonnateur est portée, selon les modalités prévues à l'article 4 du présent arrêté, soit sur chaque bordereau de mandats de dépenses et chaque bordereau de titres de recettes, soit sur le fichier contenant de tels bordereaux transmis au comptable public conformément au protocole d'échange standard dans sa version 2 ou dans une version ultérieure. La signature électronique emporte signature de tous les bordereaux de mandats, de tous les bordereaux de titres et les effets mentionnés par les alinéas 2 et 3 de l'article D. 1617-23 du code général des collectivités territoriales🏛. ".

6. Il résulte de ces dispositions, d'une part, que le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif adressé au redevable doit mentionner les nom, prénom et qualité de la personne qui l'a émis et, d'autre part, qu'il appartient à l'autorité administrative de justifier en cas de contestation que le bordereau de titre de recettes comporte la signature de l'émetteur. Celle-ci peut être manuscrite ou électronique.

7. La métropole de Lyon produit le bordereau journal n° 3554 du 3 décembre 2019 comprenant le titre exécutoire litigieux n° 22769. Ce bordereau comporte les nom, prénom et qualité ainsi que la signature électronique de la personne qui l'a émis, conformément aux dispositions de l'article D. 1617-23 précité du code général des collectivités territoriales🏛. Par suite, le moyen tiré de ce que le bordereau de titre de recettes serait entaché d'irrégularité doit être écarté.

8. En deuxième lieu, aux termes de de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012🏛 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " () Toute créance liquidée faisant l'objet () d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation () ". Ainsi, tout état exécutoire doit indiquer les bases de liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur.

9. En l'espèce, l'avis des sommes à payer en litige se borne à mentionner en objet " INDU RSA - INK - 01/08/2013 AU 31/03/2016 Réémis - 03/12/2019 " et un montant de 4 515,44 euros et ne comporte ainsi pas une précision suffisante de ses bases de liquidation. Cependant, il résulte de l'instruction que, préalablement à l'émission de ce titre, et après avoir été rendue destinataire d'une décision de la caisse d'allocations familiales du 21 juillet 2016 lui notifiant notamment l'indu de revenu de solidarité active, Mme A a été destinataire de la décision du président de la métropole de Lyon du 6 décembre 2016 portant rejet de son recours administratif formé à l'encontre de la décision du 21 juillet 2016, qui comportait les précisions relatives au montant de l'indu, à sa période et à son motif. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'aurait pas été régulièrement informée des bases de liquidation de la dette dont le règlement est réclamé.

Sur les conclusions relatives au bien-fondé de l'indu de revenu de solidarité active :

10. Aux termes de l'article 1355 du code civil🏛 : " L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même créance ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formées par elles et contre elles en la même qualité ". L'autorité de la chose jugée s'attache tant au dispositif qu'aux motifs qui en constituent le support nécessaire.

11. Par un jugement n° 1801265-1802051 en date du 24 septembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté les conclusions de Mme A à fin d'annulation de la décision du président de la métropole de Lyon du 6 décembre 2016, dont les termes ont été réitérés le 4 décembre 2017, confirmant la mise à la charge de Mme A d'un indu de revenu de solidarité active d'un montant de 4 515,44 euros au titre de la période du 1er août 2013 au 31 mars 2016, au motif que son recours contre cette décision, devenue définitive, était tardif. Dans ces conditions, l'autorité de la chose jugée qui s'attache tant au dispositif qu'aux motifs du jugement définitif du 24 septembre 2019 fait obstacle à l'examen par le tribunal des conclusions relatives au bien-fondé de l'indu, en raison de la triple identité de cause, d'objet et de parties de la demande.

12. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à demander l'annulation de l'avis des sommes à payer valant titre exécutoire émis le 3 décembre 2019 en vue de la récupération de la somme de 4 515,44 euros correspondant à un indu de revenu de solidarité active constitué sur la période du 1er août 2013 au 31 mars 2016. Les conclusions présentées par l'intéressée tendant à la décharge de l'obligation de payer cette somme ne peuvent, par conséquent, qu'être rejetées.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛 :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛 font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la métropole de Lyon, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

Article 1er : La requête n° 1909914 de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme B A et à la métropole de Lyon.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2022.

La magistrate désignée,

C. SchmerberLa greffière,

C. Touja

La République mande et ordonne au ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Un greffier,

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