TA Paris, du 03-01-2023, n° 2100006
A13249AB
Référence
I. Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 1er et 31 janvier, 3 février, 29 avril, 4, 6 et 7 mai et 6 septembre 2021, Mme C, représentée par Me Leon Aguirre, demande au tribunal :
1°) d'annuler la délibération du 1er décembre 2020 du jury d'admission à l'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle d'avocats (CRFPA) présidé par le directeur de l'institut d'études judiciaires de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne en tant que son nom ne figure pas sur la liste des admis ;
2°) d'annuler, par voie de conséquence, les épreuves orales d'admission auxquelles elle a été soumise dans le cadre de l'examen d'accès au CRFPA au cours du mois de novembre 2020 ;
3°) d'enjoindre à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne d'organiser une nouvelle session d'épreuves d'admission au CRFPA à son bénéfice, sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter de la notification du présent jugement ;
4°) de mettre à la charge de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.
Elle soutient que :
- sa requête est recevable ;
- la délibération attaquée a été prise au terme d'une procédure irrégulière l'ayant privée d'une garantie, dès lors que l'épreuve orale d'exposé-discussion à laquelle elle a été soumise ne s'est pas déroulée en séance publique, en méconnaissance des dispositions de l'article 7 de l'arrêté du 17 octobre 2016🏛 ;
- elle est irrégulière car l'un des signataires n'est pas identifiable ;
- elle méconnaît les dispositions des articles 7 et 9 et de l'arrêté du 17 octobre 2016🏛🏛 ;
- la circulaire du 30 octobre 2020 adressée aux directeurs d'instituts d'études judiciaires par le sous-directeur des formations et de l'insertion professionnelle de la direction générale de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle du ministère de l'enseignement supérieur est entachée d'une incompétence manifeste de son auteur ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 27 du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire.
Par un mémoire en défense et des mémoires complémentaires, enregistrés les 30 avril, 4 mai et 12 mai 2021 et le 15 novembre 2022, la présidente de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable ;
- les moyens soulevés par Mme C ne sont pas fondés.
II. Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 3 février, 29 avril, 12 mai et 6 septembre 2021 et le 28 octobre 2022, M. G, représenté par Me Leon Aguirre, demande au tribunal :
1°) d'annuler la délibération du 1er décembre 2020 du jury d'admission à l'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle d'avocats (CRFPA) présidé par le directeur de l'institut d'études judiciaires de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne en tant que son nom ne figure pas sur la liste des admis ;
2°) d'annuler, par voie de conséquence, les épreuves orales d'admission auxquelles il a été soumis dans le cadre de l'examen d'accès au CRFPA au cours du mois de novembre 2020 ;
3°) d'enjoindre à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne d'organiser une nouvelle session d'épreuves d'admission au CRFPA à son bénéfice, sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter de la notification du présent jugement ;
4°) de mettre à la charge de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.
Il soutient que :
- sa requête est recevable ;
- la délibération attaquée a été prise au terme d'une procédure irrégulière l'ayant privé d'une garantie, dès lors l'épreuve orale d'exposé-discussion à laquelle il a été soumis ne s'est pas déroulée en séance publique, en méconnaissance des dispositions de l'article 7 de l'arrêté du 17 octobre 2016🏛 ;
- elle est irrégulière car l'un des signataires n'est pas identifiable ;
- elle méconnaît les dispositions des articles 7 et 9 et de l'arrêté du 17 octobre 2016🏛🏛 ;
- la circulaire du 30 octobre 2020 adressée aux directeurs d'instituts d'études judiciaires par le sous-directeur des formations et de l'insertion professionnelle de la direction générale de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle du ministère de l'enseignement supérieur est entachée d'une incompétence manifeste de son auteur ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 27 du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire.
Par un mémoire en défense et des mémoires complémentaires, enregistrés les 30 avril, 4 mai et 25 mai 2021 et le 15 novembre 2022, la présidente de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. G ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire ;
- l'arrêté du 17 octobre 2016 fixant le programme et les modalités de l'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle d'avocats ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. F,
- et les conclusions de M. Charzat, rapporteur public.
Une note en délibéré, présentée par Me Leon Aguirre pour M. G, a été enregistrée le 19 décembre 2022.
1. Mme C et M. G, candidats à l'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle d'avocats et inscrits à l'institut d'études judiciaires de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ont été déclarés ajournés par une délibération du 1er décembre 2020 du jury d'admission à cet examen. Par les présentes requêtes, ils demandent l'annulation de cette délibération en tant que leurs noms ne figurent pas sur la liste des admis.
Sur la jonction :
2. Les requêtes n° 2100006 et n° 2102230, présentées par Me Leon Aguirre pour Mme C et M. G, présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 4 du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire : " I. - Tout déplacement de personne hors de son lieu de résidence est interdit à l'exception des déplacements pour les motifs suivants en évitant tout regroupement de personnes : / 1° Déplacements à destination ou en provenance : () / c) Du lieu d'organisation d'un examen ou d'un concours ; () ". Aux termes de l'article 7 de l'arrêté du 17 octobre 2016🏛 fixant le programme et les modalités de l'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle d'avocats : " Nul ne peut se présenter aux épreuves d'admission s'il n'a été déclaré admissible par le jury. / Les épreuves orales d'admission comprennent : / 1° Un exposé de quinze minutes, après une préparation d'une heure, suivi d'un entretien de trente minutes avec le jury, sur un sujet relatif à la protection des libertés et des droits fondamentaux permettant d'apprécier les connaissances du candidat, la culture juridique, son aptitude à l'argumentation et à l'expression orale. / Cette épreuve se déroule en séance publique. / La note est affectée d'un coefficient 4. / 2° Une interrogation d'une durée de quinze minutes, après une préparation de quinze minutes en langue anglaise. / La note est affectée d'un coefficient 1. / Les épreuves d'admission sont notées de 0 à 20 ".
4. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
5. Il ressort des pièces du dossier que l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne a décidé de limiter l'accès du public aux salles dans lesquelles se sont déroulés les oraux d'admission au centre régional de formation professionnelle d'avocats qu'elle a organisés pour la session 2020 afin d'éviter tout regroupement de personnes, conformément aux dispositions de l'article 4 du décret du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales pour faire face à l'épidémie de covid-19, dérogeant ainsi aux dispositions du quatrième alinéa de l'article 7 de l'arrêté du 17 octobre 2016🏛 précité. Les requérants, qui se contentent de développements généraux sur le lien entre les principes de publicité et d'impartialité, sans alléguer que des personnes ayant émis le souhait d'assister à l'épreuve d'exposé-discussion à laquelle ils ont été soumis auraient été empêchées de le faire, ni que le jury aurait fait preuve de partialité à leur égard, n'apportent aucun élément de nature à établir que l'absence de public au cours de l'épreuve d'exposé-discussion les auraient privés d'une garantie. En outre, le courriel du 30 octobre 2020 adressé aux directeurs d'instituts d'études judiciaires par M. D B, sous-directeur au ministère de l'enseignement supérieur, se borne à répondre à des questions pratiques que les directeurs étaient susceptibles de se poser, dans une logique de coordination des services de l'État, pour limiter la propagation de l'épidémie de covid-19 et sans jamais indiquer que l'épreuve d'exposé-discussion devait se dérouler à huis clos. Par suite, le moyen doit être écarté.
6. En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration🏛 : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ". S'agissant d'une autorité administrative de caractère collégial, il est satisfait aux exigences découlant de ces dispositions dès lors que la décision que prend cette autorité porte la signature de son président, accompagnée des mentions, en caractères lisibles, prévues par cet article. Il ressort des pièces du dossier que la délibération attaquée, qui comporte la signature de M. François-Xavier Lucas, président du jury, ainsi que les mentions de son prénom, de son nom et de sa qualité, répond à ces exigences. Par suite, le moyen doit être écarté.
7. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles 7 et 9 de l'arrêté du 17 octobre 2016🏛🏛 fixant le programme et les modalités de l'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle d'avocats n'est assorti d'aucun élément permettant d'en apprécier le bien-fondé. Par suite, il ne peut qu'être écarté.
8. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que le courriel du 30 octobre 2020 susmentionné ne constitue ni une interprétation du droit par une autorité administrative s'adressant aux services placés sous son autorité hiérarchique ni une interprétation du droit à destination des usagers du service public. Ainsi qu'il a été dit au point 5, le message électronique de M. B, qui s'inscrit dans le cadre d'échanges entre les directeurs d'instituts d'études judiciaires et le ministère de l'enseignement supérieur, se borne à répondre à des questions pratiques que les directeurs étaient susceptibles de se poser, dans une logique de coordination des services de l'État, pour limiter la propagation de l'épidémie de covid-19 et sans jamais indiquer que l'épreuve d'exposé-discussion devait se dérouler à huis clos. Par suite, et dès lors que le courriel du 30 octobre 2020 ne présente pas le caractère d'une circulaire, les moyens tirés de l'incompétence de son auteur et de la méconnaissance par ce message de la réglementation relative à l'état d'urgence sanitaire doivent être écartés comme inopérants.
9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense dans la requête n° 2100006, que les requêtes de Mme C et de M. G doivent être rejetées en toutes leurs conclusions.
D E C I D E
Article 1er : Les requêtes de Mme C et de M. G sont rejetées.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme E C, à M. A G et à la présidente de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
Délibéré après l'audience du 12 décembre 2022, à laquelle siégeaient :
M. Bachoffer, président,
Mme Dousset, première conseillère,
M. Khansari, conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 janvier 2023.
Le rapporteur,
A. F
Le président,
B. BACHOFFER
La greffière,
L. REGNIER
La République mande et ordonne à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2, 2102230/1-
Décret, 2020-1310, 29-10-2020 Article, 7, arrêté, 17-10-2016 Article, 9, arrêté, 17-10-2016 Circulaire, 30-10-2020 Article, 27, décret, 2020-1310, 29-10-2020 Délibération du jury Centres régionaux de formation professionnelle Centre de formation professionnelle des avocats Directeur Épreuve orale d'admission Procédure irrégulière Enseignement supérieur Entretien Droits fondamentaux Acte administratif Procédure administrative préalable Procédure administrative suivie Exercice d'une influence Limitation de l'accès Principes de publicité Services de l'etat