Jurisprudence : TA Nîmes, du 02-01-2024, n° 2300008

TA Nîmes, du 02-01-2024, n° 2300008

A11882DD

Référence

TA Nîmes, du 02-01-2024, n° 2300008. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/104002727-ta-nimes-du-02012024-n-2300008
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Références

Tribunal Administratif de Nîmes

N° 2300008

1ère Chambre
lecture du 02 janvier 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 janvier et 2 juin 2023, M. N K, Mme L O, M. H I et M. G F, représentés par la SCP CGCB et Associés, demandent au tribunal, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler, d'une part, l'arrêté du 11 juillet 2022 par lequel le maire de Nîmes a délivré à la société Cogedim Languedoc Roussillon un permis de construire en vue de l'édification d'un ensemble immobilier comportant cent-quinze logements sur un terrain situé chemin des Limites, ainsi que la décision du 3 novembre 2022 rejetant les recours gracieux dirigés contre cet arrêté, et, d'autre part, l'arrêté du 7 octobre 2022 portant permis de construire modificatif ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Nîmes et de la société Cogedim Languedoc Roussillon la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Ils soutiennent que :

- ils justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir ;

- le permis en litige n'a pas été précédé de l'avis conforme de l'architecte des Bâtiments de France, lequel était requis en application de l'article R. 425-1 du code de l'urbanisme🏛 ;

- la prescription relative au traitement des eaux pluviales dont est assorti le permis de construire en litige est illégale et est de nature à entraîner l'annulation totale du permis de construire en litige ;

- le maire de Nîmes a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme🏛 compte tenu des différents risques identifiés dans le secteur en cause et de leur effet cumulé ;

- il a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme🏛 ;

- le projet litigieux, qui ne pouvait bénéficier de l'application simultanée des deux " exceptions " aux règles générales fixées par l'article UD 10 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes, méconnaît cet article UD 10 et le maire de Nîmes a commis une erreur de droit ainsi qu'une erreur manifeste d'appréciation à cet égard ;

- le projet litigieux méconnaît le 6 de l'article UD 11 du même règlement ;

- les dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme🏛 ont été méconnues ;

- le dossier de demande de permis est incomplet dès lors qu'il ne comporte pas la pièce prévue par le k) de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme🏛 alors que le projet litigieux rend nécessaire une dérogation au titre du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement🏛 ;

- le projet litigieux ne respecte pas l'article UD 9 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes et le permis litigieux a été obtenu par fraude.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 14 mars 2023, Mme B E et M. A M demandent au tribunal d'admettre leur intervention volontaire au soutien de la requête visée ci-dessus, d'annuler l'arrêté du maire de Nîmes du 11 juillet 2022 ainsi que sa décision du 3 novembre 2022 et de mettre à la charge de la commune de Nîmes et de la société Cogedim Languedoc Roussillon la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent qu'ils justifient d'un intérêt à intervenir et invoquent les mêmes moyens que ceux, analysés ci-dessus, soulevés dans la requête introductive d'instance.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 14 mars 2023, Mme C J et M. D J demandent au tribunal d'admettre leur intervention volontaire au soutien de la requête visée ci-dessus, d'annuler l'arrêté du maire de Nîmes du 11 juillet 2022 ainsi que sa décision du 3 novembre 2022 et de mettre à la charge de la commune de Nîmes et de la société Cogedim Languedoc Roussillon la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent qu'ils justifient d'un intérêt à intervenir et invoquent les mêmes moyens que ceux, analysés ci-dessus, soulevés dans la requête introductive d'instance.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 avril 2023, la société en nom collectif Cogedim Languedoc Roussillon, représentée par la SCP SVA, conclut au rejet de la requête ou, subsidiairement, à ce qu'il soit fait application des articles L. 600-5 ou L. 600-5-1 du code de l'urbanisme🏛, à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à ce que ces derniers lui remboursent le montant du droit de plaidoirie.

Elle soutient que les moyens invoqués par les requérants ne sont pas fondés.

Par trois mémoires en défense enregistrés le 12 mai 2023 et un mémoire en défense enregistré le 9 juin 2023, la commune de Nîmes, représentée par la SELARL Maillot Avocats et Associés, conclut, d'une part, au rejet des deux interventions volontaires et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge des intervenants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, d'autre part, au rejet de la requête ou, subsidiairement, à ce qu'il soit fait application des articles L. 600-5-1 ou L. 600-5 du code de l'urbanisme🏛, et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par les requérants et intervenants ne sont pas fondés.

La clôture de l'instruction à effet immédiat a été prononcée le 29 juin 2023.

Un mémoire présenté pour la société Cogedim Languedoc Roussillon a été enregistré le 30 juin 2023, postérieurement à la clôture de l'instruction.

Un mémoire présenté pour la commune de Nîmes a été enregistré le 5 juillet 2023, postérieurement à la clôture de l'instruction.

Par lettres du 8 novembre 2023, les parties ont été informées de ce que le tribunal était susceptible de mettre en œuvre la procédure prévue par l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et invitées à présenter leurs observations sur ce point.

Les observations présentées en réponse à cette invitation par les requérants, ainsi que celles présentées par la société Cogedim Languedoc Roussillon, ont été enregistrées et communiquées le 13 novembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code du patrimoine ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016🏛 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mouret,

- les conclusions de Mme Bourjade, rapporteure publique,

- les observations de Me Pechon, représentant les requérants et intervenants, celles de Me Bard, représentant la commune de Nîmes, et celles de Me Monflier, représentant la société Cogedim Languedoc Roussillon.

Considérant ce qui suit :

1. La société Cogedim Languedoc Roussillon a déposé, le 19 novembre 2021, une demande de permis de construire, ultérieurement complétée, en vue de l'édification d'un ensemble immobilier comportant cent-quinze logements, deux-cent-trente places de stationnement ainsi qu'une piscine sur un terrain situé 77 chemin des Limites, sur le territoire de la commune de Nîmes, et classé en zone UD du plan local d'urbanisme communal. Par un arrêté du 11 juillet 2022, le maire de Nîmes a délivré le permis de construire ainsi sollicité. Il a ensuite accordé à la société pétitionnaire un permis de construire modificatif par un arrêté du 7 octobre 2022. Les recours gracieux formés à l'encontre du permis de construire initial, respectivement par M. et Mme K et plusieurs autres personnes physiques ainsi que par M. F et plusieurs autres personnes physiques, ont été expressément rejetés par cette autorité le 3 novembre 2022. M. K et autres demandent au tribunal d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés des 11 juillet et 7 octobre 2022 ainsi que la décision du 3 novembre 2022.

Sur les interventions volontaires :

2. Mme E, M. M, Mme J et M. J, qui sont propriétaires de maisons d'habitation situées à proximité immédiate du terrain d'assiette du projet, justifient d'un intérêt suffisant leur donnant qualité pour intervenir au soutien des conclusions de M. K et autres tendant à l'annulation du permis de construire délivré à la société Cogedim Languedoc Roussillon. Par suite, les deux interventions volontaires visées ci-dessus doivent être admises.

Sur la légalité des décisions en litige :

3. En premier lieu, aux termes du II de l'article L. 621-30 du code du patrimoine🏛 : " La protection au titre des abords s'applique à tout immeuble, bâti ou non bâti, situé dans un périmètre délimité par l'autorité administrative dans les conditions fixées à l'article L. 621-31. Ce périmètre peut être commun à plusieurs monuments historiques. / En l'absence de périmètre délimité, la protection au titre des abords s'applique à tout immeuble, bâti ou non bâti, visible du monument historique ou visible en même temps que lui et situé à moins de cinq cents mètres de celui-ci () ". Selon l'article L. 621-32 du même code : " Les travaux susceptibles de modifier l'aspect extérieur d'un immeuble, bâti ou non bâti, protégé au titre des abords sont soumis à une autorisation préalable. / L'autorisation peut être refusée ou assortie de prescriptions lorsque les travaux sont susceptibles de porter atteinte à la conservation ou à la mise en valeur d'un monument historique ou des abords () ". Par ailleurs, l'article R. 425-1 du code de l'urbanisme dispose que : " Lorsque le projet est situé dans les abords des monuments historiques, le permis de construire () tient lieu de l'autorisation prévue à l'article L. 621-32 du code du patrimoine🏛 si l'architecte des Bâtiments de France a donné son accord, le cas échéant assorti de prescriptions motivées () ".

4. Il résulte de la combinaison des articles L. 621-30, L. 621-32, du I de l'article

L. 632-2 du code du patrimoine et de l'article R. 425-1 du code de l'urbanisme que ne peuvent être délivrés qu'avec l'accord de l'architecte des Bâtiments de France les permis de construire portant sur des immeubles situés, en l'absence de périmètre délimité, à moins de cinq cents mètres d'un édifice classé ou inscrit au titre des monuments historiques, s'ils sont visibles à l'œil nu de cet édifice ou en même temps que lui depuis un lieu normalement accessible au public, y compris lorsque ce lieu est situé en dehors du périmètre de cinq cents mètres entourant l'édifice en cause.

5. Il ressort des pièces du dossier que l'architecte des Bâtiments de France a été consulté dans le cadre de l'instruction de la demande de permis de construire de la société pétitionnaire et qu'il a estimé, dans son avis émis le 10 juin 2022, que, le projet litigieux n'étant pas situé dans le champ de visibilité d'un monument historique, son accord n'était pas requis. D'une part, les requérants n'établissent ni même n'allèguent qu'un périmètre délimité des abords aurait été créé dans les conditions fixées à l'article L. 621-31 du code du patrimoine🏛, ni qu'un périmètre de protection modifié avait été institué avant l'entrée en vigueur de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine. D'autre part, si les requérants se prévalent de la circonstance que le terrain d'assiette du projet est inclus dans le périmètre de la servitude de protection des monuments historiques de type AC 1 et font état de la présence, dans un rayon de cinq cents mètres autour de ce terrain, de quatre édifices protégés au titre des monuments historiques, ils n'établissent pas, par les seules pièces qu'ils versent aux débats, l'existence d'une situation de visibilité ou de covisibilité entre le projet et l'un au moins de ces édifices depuis un lieu normalement accessible au public. Enfin, l'allégation selon laquelle tant le projet litigieux que les quatre édifices protégés en cause seraient visibles simultanément depuis la Tour Magne n'est, en tout état de cause, pas assortie de précisions suffisantes permettant d'en apprécier tant la portée que le bien-fondé. Il suit de là que le moyen tiré du non-respect de l'article R. 425-1 du code de l'urbanisme ne peut qu'être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-15 du code de l'urbanisme🏛 : " Lorsque le projet porte sur des travaux devant faire l'objet d'une dérogation au titre du 4° du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, le permis ou la décision de non-opposition à déclaration préalable ne peut pas être mis en œuvre avant la délivrance de cette dérogation ". L'article R. 431-5 du même code dispose que : " La demande de permis de construire précise : () / k) S'il y a lieu, que les travaux doivent faire l'objet d'une dérogation au titre du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement ".

7. En se bornant à faire état de la circonstance que la présence de trois espèces protégées - un Faucon crécerelle, une Huppe fasciée et un Crave à bec rouge - aurait été observée sur le terrain d'assiette du projet ou à proximité de celui-ci, et à produire une attestation, insuffisamment circonstanciée, établie le 2 juin 2023 par M. K, les requérants n'établissent pas, par les seuls éléments qu'ils versent aux débats, que le projet porterait, ainsi qu'ils le soutiennent, sur des travaux devant faire l'objet d'une dérogation au titre du 4° du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. La commune de Nîmes fait valoir, sans être contredite sur ce point, que l'Atlas de la biodiversité de Nîmes Métropole n'identifie aucune espèce protégée sur le terrain en cause. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que les travaux de construction en litige auraient dû faire l'objet d'une telle dérogation à l'interdiction de la destruction d'espèces protégées. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le dossier de demande de permis de construire est incomplet au regard des dispositions citées ci-dessus du k) de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire () ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés () ".

9. Ces dispositions poursuivent notamment le but d'intérêt général d'éviter à la collectivité publique ou au concessionnaire d'être contraints, par le seul effet d'une initiative privée, de réaliser des travaux d'extension ou de renforcement des réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou d'électricité et de garantir leur cohérence et leur bon fonctionnement, en prenant en compte les perspectives d'urbanisation et de développement de la collectivité. Il en résulte qu'un permis de construire ne peut être délivré lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics sont nécessaires à la desserte de la construction projetée et, d'autre part, l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation.

10. Par ailleurs, si les dispositions citées ci-dessus de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme n'imposent pas que l'autorité délivrant le permis de construire soit en mesure de fixer la date précise d'achèvement des travaux, l'intention de les réaliser doit pouvoir être établie. Tel peut être le cas si les procédures nécessaires à leur réalisation ont été engagées à la date de délivrance du permis de construire en litige.

11. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier de l'avis émis le 20 janvier 2022 par la société Enedis, que le projet litigieux, qui exige une puissance électrique de 980 kilovoltampères triphasé, rend nécessaire une extension du réseau public de distribution d'électricité, d'une longueur de " 2 x 240 m sur le domaine public ", ainsi que la création de deux postes de distribution sur le terrain d'assiette, la contribution financière à la charge de la collectivité étant évaluée à la somme de 53 422,91 euros hors taxes. Il n'est pas contesté que les travaux ainsi requis entrent, au moins en tant qu'ils portent sur l'extension de ce réseau public, dans le champ de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme. Alors que les requérants soutiennent que l'intention de réaliser ces travaux d'extension n'est pas établie, la commune de Nîmes ne produit aucun élément probant sur ce point. A cet égard, la délivrance du permis de construire en litige, lequel n'est d'ailleurs assorti d'aucune prescription renvoyant à l'avis émis par la société Enedis, ne saurait suffire, à elle seule, à établir l'intention de réaliser les travaux d'extension en cause. Dans ces conditions, et eu égard à ce qui a été dit au point précédent, les requérants sont fondés à soutenir qu'en délivrant le permis de construire en litige, le maire de Nîmes a méconnu les dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme.

12. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme🏛 : " Le permis de construire () ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique () ". L'administration ne peut assortir une autorisation d'urbanisme de prescriptions qu'à la condition que celles-ci, entraînant des modifications sur des points précis et limités et ne nécessitant pas la présentation d'un nouveau projet, aient pour effet d'assurer la conformité des travaux projetés aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect.

13. L'article UD 4 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes prévoit, à son 4 intitulé " Eaux pluviales ", que : " Les règles relatives au traitement des eaux pluviales sont détaillées dans le préambule du règlement () ". Le 9.2 du préambule de ce règlement fixe les règles relatives aux projets imperméabilisant le sol. Selon le 9.2.1, intitulé " Compensation de l'imperméabilisation des sols - Règle générale ", de ce 9.2 : " Tout projet créant une surface imperméabilisée devra être accompagné de mesures visant à compenser l'imperméabilisation du sol et donc comporter un ouvrage de rétention pérenne. / () Toutes les eaux de ruissellement doivent être collectées et dirigées vers le dispositif de rétention ".

14. L'arrêté contesté indique notamment, au titre des prescriptions relatives à la gestion des eaux pluviales dont il est assorti, que, " compte tenu des résultats, très hétérogènes, des mesures de perméabilité menées sur site(,) il conviendra de réaliser de nouveaux tests d'infiltration au droit de chaque bassin de rétention à ciel ouvert et à infiltration afin de justifier de la capacité des ouvrages de rétention à infiltrer les eaux pluviales en moins de 48 heures ", avant de préciser que, " (d)ans la mesure où les nouvelles investigations à mener concluent à des difficultés d'infiltration du terrain(,) une demande de rejet au réseau public d'eaux pluviales devra être faite par courrier auprès de la Direction de l'Eau afin de pouvoir y prétendre " et que ce " raccordement éventuel (en cas d'acceptation) permettra l'exutoire des ouvrages de rétention de l'opération sous réserves de fournir l'ensemble des autorisations nécessaires ".

15. Il ressort des pièces du dossier que la prescription mentionnée au point précédent a été édictée au vu de la note hydraulique jointe à la demande de permis de construire, laquelle retient l'hypothèse d'une bonne capacité d'infiltration générale du terrain d'assiette, avant de prévoir la réalisation de tests de perméabilité complémentaires lors de la phase d'exécution des travaux et d'envisager, " en cas de perméabilité inadaptée uniquement ", la création d'un dispositif supplémentaire " raccordé au réseau unitaire du chemin des Limites ". Contrairement à ce que soutiennent les requérants, en édictant cette prescription précise, au vu des éléments joints au dossier de demande de permis de construire, le maire de Nîmes ne s'est nullement abstenu de prendre parti sur les modalités de gestion des eaux pluviales et n'a pas davantage exigé la réalisation d'une instruction complémentaire de la demande de permis de construire de la société pétitionnaire. Il suit de là que, sans qu'ait à cet égard d'incidence la circonstance alléguée que le terrain d'assiette du projet est inclus dans le périmètre du plan de prévention des risques d'inondation applicable sur le territoire de la commune de Nîmes, le moyen tiré de ce que la prescription en cause présenterait un caractère illégal ne saurait être accueilli.

16. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". Il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement de ces dispositions, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent.

17. D'une part, en vertu de ces dispositions, lorsqu'un projet de construction est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, le permis de construire ne peut être refusé que si l'autorité compétente estime, sous le contrôle du juge, qu'il n'est pas légalement possible, au vu du dossier et de l'instruction de la demande de permis, d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modifications substantielles nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, permettraient d'assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect.

18. D'autre part, les prescriptions d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles, destinées notamment à assurer la sécurité des personnes et des biens exposés aux risques en cause et valant servitude d'utilité publique, s'imposent directement aux autorisations de construire, sans que l'autorité administrative soit tenue de reprendre ces prescriptions dans le cadre de la délivrance du permis de construire. Il incombe à l'autorité compétente pour délivrer une autorisation d'urbanisme de vérifier que le projet respecte les prescriptions édictées par le plan de prévention et, le cas échéant, de préciser dans l'autorisation les conditions de leur application. Si les particularités de la situation l'exigent et sans apporter au projet de modifications substantielles nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, il peut subordonner la délivrance du permis de construire sollicité à des prescriptions spéciales, s'ajoutant aux prescriptions édictées par le plan de prévention dans cette zone, si elles lui apparaissent nécessaires pour assurer la conformité de la construction aux dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. Ce n'est que dans le cas où l'autorité compétente estime, au vu d'une appréciation concrète de l'ensemble des caractéristiques de la situation d'espèce qui lui est soumise et du projet pour lequel l'autorisation de construire est sollicitée, y compris d'éléments déjà connus lors de l'élaboration du plan de prévention des risques naturels, qu'il n'est pas légalement possible d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions permettant d'assurer la conformité de la construction aux dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, qu'elle peut refuser, pour ce motif, de délivrer le permis.

19. Enfin, eu égard à l'objet et à la portée des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, pour apprécier si les atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique sont de nature à justifier un refus de permis de construire, l'autorité compétente doit tenir compte, le cas échéant, de l'effet cumulé des différents risques et nuisances auxquels serait exposée la construction projetée, même s'ils ne sont pas directement liés entre eux. Cette exigence s'impose particulièrement dans le cas où la construction est destinée à l'habitation. L'autorité compétente est, sous réserve de ce qui a été dit aux deux points précédents, fondée à refuser le permis sollicité dès lors que l'addition de ces risques ou nuisances serait de nature à compromettre gravement les conditions et le cadre de vie des futurs occupants quand bien même aucun d'entre eux ne serait de nature, à lui seul, à justifier ce refus.

20. Ainsi que le relèvent les requérants, le plan de prévention des risques d'inondation applicable sur le territoire de la commune de Nîmes identifie différents aléas d'inondation sur le terrain d'assiette du projet. Il n'est toutefois ni établi ni même allégué que le projet litigieux ne respecterait pas les prescriptions de ce plan de prévention des risques naturels prévisibles dont les permis de construire initial et modificatif en litige imposent d'ailleurs le respect. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la délivrance du permis de construire sollicité aurait dû être subordonnée à des prescriptions spéciales s'ajoutant aux prescriptions édictées par ce plan de prévention. En outre, si les requérants soutiennent que le terrain d'assiette du projet est inclus dans une zone faiblement à moyennement exposée au phénomène de " retrait-gonflement des argiles " et rappellent que ce terrain est situé dans une ancienne carrière, les intéressés, qui ne se prévalent au demeurant d'aucune disposition du code de l'urbanisme imposant la réalisation de l'étude géotechnique dont ils déplorent l'absence de réalisation par la société pétitionnaire, ne produisent aucun élément technique de nature à établir l'existence et l'intensité du risque allégué pour la sécurité publique lié à la présence d'une falaise dans le secteur en cause. A cet égard, les requérants ne versent aux débats aucune pièce permettant d'apprécier tant la localisation que l'ampleur des éboulements dont ils font état et ne précisent au demeurant pas les dates auxquelles ils se seraient produits. Enfin, si les requérants soutiennent que le terrain d'assiette du projet, qui est desservi par le chemin des Limites, est situé à proximité d'un croisement d'ores et déjà saturé et fortement accidentogène, les conditions générales de la circulation dans le secteur concerné ne peuvent, par elles-mêmes, être utilement invoquées pour établir la dangerosité des conditions d'accès et de desserte de l'ensemble immobilier projeté. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le trafic supplémentaire engendré par le projet litigieux sur le chemin des Limites ne pourrait être absorbé dans des conditions de sécurité suffisantes, ni que l'accès projeté présenterait une dangerosité particulière en raison de sa localisation sur cette voie fréquentée et à double sens.

21. Eu égard à ce qui a été dit au point précédent, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'addition des risques et nuisances dont se prévalent les requérants serait de nature à compromettre gravement les conditions et le cadre de vie des futurs occupants de l'ensemble immobilier projeté ou des riverains de celui-ci, il n'apparaît pas que le maire de Nîmes aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en délivrant le permis de construire en litige.

22. En sixième lieu, aux termes de l'article UD 9 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes, dans sa rédaction applicable au projet litigieux, antérieure à la modification n° 1 de ce plan : " Pour l'ensemble de la zone, à l'exception du secteur UDa : / L'emprise au sol des constructions, y compris les annexes de toutes natures, ne peut excéder 40 % de la surface totale de l'unité foncière. () / Pour l'ensemble de la zone, à l'exception du secteur UDp : / L'emprise au sol pourra être augmentée dans la limite de 30 % à l'exception du secteur UDp dans le cadre des constructions pour lesquelles le pétitionnaire est en mesure de justifier une exemplarité énergétique ou environnementale ou que son bâtiment sera à énergie positive (décret n° 2016-856 du 28/06/2016). / Ce dépassement des règles d'emprise au sol pourra être refusé dans le cadre d'une construction qui ne respecterait pas le caractère de la zone ou les principes de bonne intégration architecturale, urbaine et paysagère, dans son environnement immédiat et global ".

23. Premièrement, l'autorité administrative saisie d'une demande de permis de construire peut relever les inexactitudes entachant les éléments du dossier de demande relatifs au terrain d'assiette du projet, notamment sa surface ou l'emplacement de ses limites séparatives, et, de façon plus générale, relatifs à l'environnement du projet de construction, pour apprécier si ce dernier respecte les règles d'urbanisme qui s'imposent à lui. En revanche, le permis de construire n'ayant d'autre objet que d'autoriser la construction conforme aux plans et indications fournis par le pétitionnaire, elle n'a à vérifier ni l'exactitude des déclarations du demandeur relatives à la consistance du projet à moins qu'elles ne soient contredites par les autres éléments du dossier joint à la demande tels que limitativement définis par les articles R. 431-4 et suivants du code de l'urbanisme🏛, ni l'intention du demandeur de les respecter, sauf en présence d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date à laquelle l'administration se prononce sur la demande d'autorisation. Une information erronée ne peut, à elle seule, faire regarder le pétitionnaire comme s'étant livré à l'occasion du dépôt de sa demande à des manœuvres destinées à tromper l'administration.

24. Il ressort de l'encadré n° 3 du formulaire normalisé de demande de permis de construire ainsi que de la notice descriptive que le terrain d'assiette du projet présente une surface cadastrale totale de 10 352 mètres carrés. Cette notice précise qu'un relevé de géomètre fait apparaître une superficie réelle de 10 380 mètres carrés, laquelle est également mentionnée sur le plan de masse ou encore dans la note hydraulique jointe au dossier de demande. Si les indications portées sur la fiche complémentaire figurant à la page 10 de ce formulaire normalisé font apparaître, ainsi que le soutiennent les requérants, une superficie cadastrale des parcelles d'assiette du projet inférieure à celle mentionnée dans l'encadré n° 3 du même formulaire, cette circonstance ne saurait suffire, alors que les requérants ne contestent pas les indications du dossier de demande de permis relatives à la superficie réelle du terrain d'assiette, à faire regarder la société pétitionnaire comme s'étant livrée à l'occasion du dépôt de sa demande à des manœuvres destinées à tromper l'administration.

25. Secondement, le projet litigieux, qui concerne des constructions faisant preuve d'exemplarité énergétique ou environnementale, prévoit la création d'une emprise au sol totale de 4 242 mètres carrés, laquelle représente plus de 40 % de la superficie du terrain d'assiette. Les requérants soutiennent que le dépassement ainsi envisagé du coefficient d'emprise au sol fixé par l'article UD 9 ne pouvait être autorisé dès lors que l'ensemble immobilier projeté ne respecte pas les exigences des dispositions alors en vigueur du dernier alinéa de l'article UD 9 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes.

26. D'une part, aux termes de l'article L. 151-28 du code de l'urbanisme🏛, dans sa rédaction alors applicable : " Le règlement du plan local d'urbanisme ou du document d'urbanisme en tenant lieu peut prévoir, dans le respect des autres règles établies par le document et notamment les servitudes d'utilité publique visées à l'article L. 151-43 et sous réserve des dispositions de l'article L. 151-29 : () / 3° Dans les zones urbaines ou à urbaniser, un dépassement des règles relatives au gabarit qui peut être modulé mais ne peut excéder 30 %, pour les constructions faisant preuve d'exemplarité énergétique ou environnementale ou qui sont à énergie positive. Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application de la majoration () ". Selon l'article R. 151-42 du même code🏛 : " Afin d'assurer l'insertion et la qualité environnementale des constructions, le règlement peut : () / 3° Identifier les secteurs dans les zones urbaines ou à urbaniser où, en application du 3° de l'article L. 151-28, les constructions faisant preuve d'exemplarité énergétique ou environnementale ou qui sont à énergie positive bénéficient d'une majoration de volume constructible qu'il détermine en référence à l'emprise au sol et la hauteur ". Ces dispositions, qui confèrent aux auteurs d'un plan local d'urbanisme la simple faculté de prévoir, dans les conditions qu'elles fixent, un dépassement des règles relatives au gabarit pour les constructions situées dans les zones urbaines ou à urbaniser et faisant preuve d'exemplarité énergétique ou environnementale ou qui sont à énergie positive, ne s'opposent pas à ce que ces derniers subordonnent l'application d'un tel dépassement à d'autres exigences fixées dans le règlement de ce document d'urbanisme.

27. Il résulte des dispositions alors en vigueur de l'article UD 9 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes que, si elle ne peut en principe excéder 40 % de la surface totale de l'unité foncière, l'emprise au sol des constructions projetées dans la zone UD peut - sauf dans le secteur UDp - être augmentée dans la limite de 30 % lorsque le pétitionnaire " est en mesure de justifier une exemplarité énergétique ou environnementale ou que son bâtiment sera à énergie positive ". Le dernier alinéa de cet article UD 9 prévoit néanmoins que : " Ce dépassement des règles d'emprise au sol pourra être refusé dans le cadre d'une construction qui ne respecterait pas le caractère de la zone ou les principes de bonne intégration architecturale, urbaine et paysagère, dans son environnement immédiat et global ". Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que les auteurs du plan local d'urbanisme de Nîmes ont pu subordonner l'application du dépassement des règles d'emprise au sol au respect des exigences fixées par ces dernières dispositions qui laissent une marge d'appréciation à l'autorité administrative pour déterminer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si un projet de construction peut bénéficier d'un tel dépassement. Contrairement à ce que soutient la société Cogedim Languedoc Roussillon, la circonstance que les conditions fixées au dernier alinéa de l'article UD 9 soient en partie exprimées sous une forme " qualitative " ne suffit pas à considérer que ces dispositions seraient illégales faute d'être suffisamment précises et encadrées. La société défenderesse n'est, dès lors, pas fondée à exciper de l'illégalité de ces dispositions qui sont donc opposables au projet litigieux.

28. D'autre part, pour l'application du dernier alinéa de l'article UD 9 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes, le " caractère de la zone " correspond au caractère de la zone de ce plan à laquelle appartient le terrain d'assiette du projet considéré. Le tome 3 du rapport de présentation du même plan expose, à son III.2.1.2, relatif à la justification de la délimitation des zones, que " les zones urbaines sont structurées selon leur densité : / - Les zones IIUA et UB sont des zones denses dont VUB à un objectif d'intensification particulière, / - La zone UC est une zone de densité modérée, / - La zone UD est une zone de densité douce ". Il identifie également, parmi les " zones urbaines présentant des enjeux forts dans cette révision ", notamment " la zone UD de densité douce avec une partie des garrigues habitées reclassée dans le secteur UDp ". Le tableau récapitulatif inséré dans cette partie du rapport de présentation indique que la zone UD a pour " vocation principale " l'" habitat individuel de densité douce ", en précisant que cette zone peut " accueillir des collectifs ". Le préambule du règlement de ce plan local d'urbanisme définit la zone UD comme une " zone d'habitat individuel qui peut accueillir des collectifs ", avant de préciser qu'elle est " caractérisée par une urbanisation douce s'accompagnant d'espaces verts privatifs importants ".

29. Le terrain d'assiette du projet, d'une superficie réelle de 10 380 mètres carrés ainsi qu'il a été dit, est situé au sein d'une vaste zone UD comprenant pour l'essentiel des maisons individuelles ainsi que plusieurs immeubles collectifs. Il s'inscrit dans un compartiment de la partie est de cette zone caractérisé par la topographie particulière du site d'une ancienne carrière ainsi que par une urbanisation peu dense. Ce compartiment, dépourvu d'immeuble collectifs, composé principalement de maisons individuelles en R+1 implantées sur des parcelles disposant de jardins privatifs largement arborés, est situé en limite d'une zone UC à la densité plus élevée, laquelle le sépare des quelques immeubles collectifs situés plus à l'ouest. Le projet litigieux, qui développe une surface de plancher totale de 7 010 mètres carrés, consiste en l'édification, sur ce terrain sur lequel sont implantées quatre maisons individuelles ainsi que différentes constructions annexes qui doivent être démolies avant sa réalisation, de quatre imposants immeubles collectifs d'habitation en R+3 présentant des hauteurs au faîtage comprises entre 10,95 et 15,05 mètres par rapport au niveau du terrain naturel au vu du plan de masse. Cet ensemble immobilier implique, outre la conservation d'un mazet existant, la création de cent-quinze logements répartis dans ces quatre immeubles, de deux-cent-trente places de stationnement - dont cent-soixante-quinze en sous-sol et cinquante-cinq en surface selon le formulaire de demande -, d'une rampe d'accès au parc de stationnement souterrain - lequel présente une surface de 5 437 mètres carrés -, d'un local réservé aux deux roues, d'un local à ordures ménagères et d'une piscine découverte entourée d'un espace imperméabilisé dénommé " agora ", pour une emprise au sol totale de 4 242 mètres carrés comme indiqué précédemment. La surface de 2 547 mètres carrés déclarée comme étant réservée aux espaces verts de pleine terre apparaît relativement limitée au regard de la superficie du terrain d'assiette et correspondra pour l'essentiel, tel que le révèle le plan de masse, à l'emprise des bassins de rétention ainsi qu'aux accotements des voies et cheminements internes à ce terrain. En outre, il ressort de ce plan de masse que les quatre immeubles collectifs en cause doivent être implantés à proximité les uns des autres, les distances de 10 mètres entre les bâtiments A et B, 10,97 mètres entre les bâtiments C et D et 17,40 mètres entre les bâtiments A et C étant réduites au regard de leur gabarit. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, et notamment des dimensions imposantes des immeubles litigieux, de l'importante densification que le projet entraînera au cœur d'une zone résidentielle pavillonnaire et de son emprise au sol qui ne permettra le maintien que d'une faible part d'espaces verts communs, sans création de jardin privatif, ce projet ne saurait être regardé comme respectant le " caractère de la zone " à laquelle il appartient, au sens et pour l'application du dernier alinéa de l'article UD 9 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes. Dans ces conditions, le maire de Nîmes n'a pu, sans commettre une erreur manifeste d'appréciation, estimer que le projet litigieux respectait l'exigence ainsi fixée par ces dispositions. Par suite, en ne refusant pas, sur le fondement du dernier alinéa de l'article UD 9, le dépassement sollicité des règles d'emprise au sol, cette autorité a entaché sa décision d'illégalité.

30. En septième lieu, aux termes de l'article UD 10 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes, dans sa rédaction applicable au projet litigieux, antérieure à la modification n° 1 de ce plan : " Les hauteurs maximales définies correspondent aux distances comprises entre le terrain naturel et l'égout de la toiture ou le bas de l'acrotère à l'aplomb du bâtiment. Le toit, les ouvrages techniques, les cheminées et autres superstructures en sont exclus. () / Exception applicable sur l'ensemble de la zone en ce qui concerne les sites d'anciennes carrières : / La hauteur maximale des constructions est fixée à 10 m (dix mètres) à l'égout des couvertures (R + 2) ou au bas de l'acrotère. Néanmoins, en aucun cas la hauteur au faitage de la construction ne pourra dépasser le niveau moyen du front de taille au droit de la construction. / Pour l'ensemble de la zone à l'exception des secteurs UDa et UDp : / La hauteur pourra être augmentée dans la limite de 30 % dans le cadre des constructions pour lesquelles le pétitionnaire est en mesure de justifier une exemplarité énergétique ou environnementale ou que son bâtiment sera à énergie positive (décret n° 2016-856 du 28/06/2016) () ".

31. Premièrement, contrairement à ce qui est soutenu, aucune disposition législative ou réglementaire ni aucun principe ne fait obstacle à ce qu'un projet soumis, à l'instar de celui en litige, aux dispositions de l'article UD 10 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes spécifiquement applicables dans les " sites d'anciennes carrières " bénéficie de la majoration prévue à l'avant-dernier alinéa de cet article UD 10 et sollicitée par la société pétitionaire. Le projet litigieux, qui porte sur l'édification de constructions faisant preuve d'exemplarité énergétique ou environnementale ainsi qu'il a été dit, était susceptible de bénéficier, alors même qu'il est localisé sur le site d'une ancienne carrière, de la majoration des règles de hauteur prévue par ces dispositions. Par suite, en délivrant le permis de construire en litige, le maire de Nîmes n'a commis aucune erreur de droit à cet égard.

32. Secondement, il résulte des dispositions citées ci-dessus de l'article UD 10 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes que la hauteur maximale des constructions, y compris celles à édifier sur les sites d'anciennes carrières, peut - sauf dans les secteurs UDa et UDp - être augmentée dans la limite de 30 % lorsque le pétitionnaire " est en mesure de justifier une exemplarité énergétique ou environnementale ou que son bâtiment sera à énergie positive ". Le dernier alinéa de cet article UD 10 dispose néanmoins que : " Ce dépassement des règles de hauteur pourra être refusé dans le cadre d'une construction qui ne respecterait pas le caractère de la zone ou les principes de bonne intégration architecturale, urbaine et paysagère, dans son environnement immédiat et global ".

33. D'une part, pour les mêmes raisons que celles exposées aux points 26 et 27 à propos de l'opposabilité des dispositions du dernier alinéa de l'article UD 9 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes, la société Cogedim Languedoc Roussillon n'est pas fondée à exciper de l'illégalité des dispositions du dernier alinéa de l'article UD 10 de ce règlement.

34. D'autre part, ainsi que le soutiennent les requérants, les bâtiments A, C et D dont le projet prévoit l'édification présentent une hauteur de plus de douze mètres à l'égout du toit. Pour les mêmes raisons que celles exposées au point 29, le maire de Nîmes n'a pu, sans commettre une erreur manifeste d'appréciation, estimer que le projet litigieux respectait le " caractère de la zone " au sens et pour l'application du dernier alinéa de l'article UD 10 cité ci-dessus. Dans ces conditions, en ne refusant pas, sur le fondement de ces dispositions, le dépassement sollicité de la hauteur maximale - de dix mètres - applicable au projet litigieux, le maire de Nîmes a entaché sa décision d'illégalité.

35. En huitième lieu, l'article UD 11 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes prévoit, à son 6 intitulé " Les carrières ", que : " Les opérations sur terrains situés dans des anciennes carrières doivent comporter tout le long du front de taille, autant à son sommet que sa base, une bande de terrain inconstructible d'une largeur égale à 0,5 fois la hauteur du front, par mesure de sécurité. Cette largeur est mesurée depuis la verticale passant par le sommet du front ".

36. Ainsi qu'il a été dit précédemment, le terrain d'assiette de l'ensemble immobilier projeté est situé dans une ancienne carrière. Les requérants soutiennent que les bâtiments projetés à proximité du front de taille empiètent sur la " bande de terrain inconstructible " définie en application des dispositions citées au point précédent. Il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas des indications du plan de masse relatives aux cotes altimétriques du seul sommet de ce front de taille, que le projet litigieux respecterait, en tout point, les exigences des dispositions du 6 de l'article UD 11 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes. Par suite, en l'absence de tout élément précis produit en défense sur ce point et alors que le permis de construire en litige n'est assorti d'aucune prescription relative à l'implantation des constructions projetées par rapport au front de taille concerné, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être accueilli.

37. En neuvième et dernier lieu, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ".

38. Il résulte de ces dispositions que, si les constructions projetées portent atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ou encore à la conservation des perspectives monumentales, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site. Pour apprécier aussi bien la qualité du site que l'impact de la construction projetée sur ce site, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, de prendre en compte l'ensemble des éléments pertinents et notamment, le cas échéant, la covisibilité du projet avec des bâtiments remarquables, quelle que soit la protection dont ils bénéficient par ailleurs au titre d'autres législations.

39. Le terrain d'assiette du projet, sur lequel sont implantées des maisons individuelles ainsi que des constructions annexes devant être démolies avant la réalisation du projet, est localisé dans un secteur déjà urbanisé de la commune de Nîmes caractérisé notamment par la présence de maisons individuelles implantées sur des parcelles arborées, en limite de la zone UC où l'urbanisation est plus dense et ne présente pas de caractère ou d'intérêt particulier au sens de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme. Il ressort des pièces du dossier que les quatre immeubles collectifs dont les toitures seront recouvertes de tuiles vieillies et les enduits de façade présenteront des tons neutres, conformes aux canons esthétiques locaux, seront implantés en fond de carrière afin de limiter l'impact visuel de leur gabarit. Le parti architectural retenu prévoit notamment la plantation d'arbres et autres éléments de végétation. En considérant que le projet litigieux, alors même qu'il ne respecte ni le " caractère de la zone " au sens des dispositions des articles UD 9 et UD 10 du règlement du plan local d'urbanisme, ni l'échelle du bâti de son environnement immédiat, n'était pas, compte tenu de son lieu d'implantation et de ses caractéristiques, de nature à porter atteinte à l'intérêt ou au caractère du site et des lieux avoisinants, le maire de Nîmes n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.

40. Il résulte de tout ce qui précède que M. K et autres sont seulement fondés à soutenir que les dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme ont été méconnues et que le projet litigieux ne respecte pas les dispositions citées ci-dessus des articles UD 9, UD 10 et UD 11 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes.

Sur l'application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

41. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux () ".

42. Il résulte de ces dispositions que lorsque le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme dont l'annulation est demandée sont susceptibles d'être régularisés, le juge doit surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation. Un vice entachant le bien-fondé de l'autorisation d'urbanisme est susceptible d'être régularisé, même si cette régularisation implique de revoir l'économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n'implique pas d'apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.

43. Les vices relevés ci-dessus, tirés de la méconnaissance de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme ainsi que des articles UD 9, UD 10 et UD 11 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes, sont susceptibles d'être régularisés par une mesure de régularisation dont la délivrance n'implique pas d'apporter au projet d'ensemble immobilier en litige un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même. Dans ces conditions, il y a lieu de surseoir à statuer, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et d'impartir à la société Cogedim Languedoc Roussillon un délai de quatre mois à compter de la notification du présent jugement afin de produire la mesure de régularisation nécessaire.

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de Mme E et M. M et celle de Mme J et M. J sont admises.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de M. K et autres, jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois, afin de permettre la régularisation des vices mentionnés au point 43 du présent jugement.

Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent jugement sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. N K, premier dénommé pour l'ensemble des requérants, à la commune de Nîmes, à la société en nom collectif Cogedim Languedoc Roussillon, à Mme B E et M. A M ainsi qu'à Mme C J et M. D J.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Roux, président,

M. Mouret, premier conseiller,

Mme Lahmar, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 janvier 2024.

Le rapporteur,

R. MOURETLe président,

G. ROUX

La greffière,

A. OLSZEWSKI

La République mande et ordonne au préfet du Gard en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Article, L421-6, C. urb. Loi, 2016-925, 07-07-2016 Article, R111-2, C. urb. Article, R431-4, C. urb. Article, L411-2, C. envir. Article, R425-1, C. urb. Article, R431-5, C. urb. Article, L111-11, C. urb. Article, L600-5, C. urb. Article, L600-5-1, C. urb. Article, R111-27, C. urb. Article, L151-28, C. urb. Décret, 2016-856, 28-06-2016 Article, L425-15, C. urb. Arrêté, 11-07-2022 Arrêté, 07-10-2022 Permis de construire Édification d'un ensemble Projet litigieux Exception aux règles Erreur d'appréciation Dossier de la demande de permis Permis litigieux Intérêt à intervenir Société en nom collectif (snc) Places de stationnement Urbanisme communal Société pétitionnaire Personne physique Maison d'habitation Autorité dans les conditions Autorisation préalable Autorisations refusées Instruction d'une demande de permis de construire Périmètre de protection Décision de non-opposition à une déclaration Attestation établie Espèce protégée Dossier incomplet Réseau de distribution Service public But d'intérêt général Initiative privée Travaux d'extension Réseau public de distribution d'électricité Extension du réseau Travaux Travaux projetés Dimension Déclaration d'utilité publique Nouveau projet Réseau d'eau Refus de permis Réalisation d'un risque Projet de modification Prescriptions du plan Risques naturels Utilité publique Délivrance des autorisations Permis sollicité Ancienne carrière Réalisation d'études Établissement de l'existence Localisation Conditions de sécurité Emprise au sol Unité foncière Environnement immédiat Autorisation d'une construction Dossier joint à la demande Existence d'une fraude Demande d'autorisation d'urbanisme Plan de masse Document d'urbanisme Zones urbaines Majoration Plan local Plans d'urbanisme Simple faculté Marge d'appréciation Zone d'habitat Espaces verts Surface de plancher Immeuble d'habitation Parc de stationnement souterrain Hauteur maximale Projet soumis Construction Égout du toit Bande de terrain Terrain inconstructible Mesure de sécurité Paysages urbains Existence d'une atteinte Fondement du refus Expiration du délai Économie générale du projet Mesure de régularisation

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