Jurisprudence : TA Rennes, du 18-07-2023, n° 2101565

TA Rennes, du 18-07-2023, n° 2101565

A68311BM

Référence

TA Rennes, du 18-07-2023, n° 2101565. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/97987762-ta-rennes-du-18072023-n-2101565
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Abstract

► L'État est condamné à mettre en œuvre des mesures de réparation en nature des atteintes portées à la biodiversité de la réserve naturelle de la baie de Saint-Brieuc.


Références

Tribunal Administratif de Rennes

N° 2101565

3ème Chambre
lecture du 18 juillet 2023
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 24 mars 2021, le 1er août 2022 et le

20 février 2023, l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre, représentée par Me Andréa Rigal-Casta, avocat du cabinet Géo Avocats, demande au tribunal :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet des Côtes-d'Armor a refusé de faire droit à sa demande formulée par courrier du 23 novembre 2020 d'adopter toute mesure administrative contraignante applicable aux installations agricoles à la source des flux azotés responsables des algues vertes en Baie de Saint-Brieuc ;

2°) de condamner le préfet des Côtes-d'Armor, d'une part, à réparer en nature le préjudice écologique résultant de sa carence fautive dans l'exercice de son pouvoir de conservation de la biodiversité présente dans la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc et, d'autre part, à lui verser une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral résultant de ces mêmes carences fautives ;

3°) de condamner l'État aux entiers dépens.

Elle soutient que :

- les premières marées vertes, soit la prolifération d'algues de type ulves au large, puis sur les côtes, sont apparues en Bretagne dans les années 1970 ;

- alors que la directive n°91/676/CEE du 12 décembre 1991 concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles accordait un délai de quatre ans aux Etats membres pour élaborer et mettre en œuvre des programmes de reconquête des milieux eutrophisés, la France s'est contentée de classer, par décret n°93-1038 du

27 août 1993, l'intégralité de la Bretagne en zone vulnérable ;

- la Baie de Saint-Brieuc se révèle comme étant l'estuaire le plus touché de Bretagne, voire de France, par les marées vertes, bien qu'ayant été classée comme réserve naturelle nationale par un décret n°98-324 du 28 avril 1998🏛 ;

- elle a pleinement intérêt à agir, dans le cadre de la présence instance, au regard de ses statuts, tant dans leur version antérieure que dans leur version modifiée en 2020 ;

- la carence du préfet, dans l'exercice des pouvoirs de police qui lui sont dévolus, à assurer la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement🏛, par la mise en œuvre d'actions permettant de lutter efficacement contre la prolifération des algues vertes sur le littoral du département et donc d'empêcher les dommages subis par la biodiversité présente dans la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc, engage la responsabilité de l'Etat ;

- le lien de causalité direct entre l'ampleur des flux azotés à la mer et la prolifération des ulves est démontré et reconnu de longue date, notamment par des institutions scientifiques telles que l'IFREMER ou le conseil scientifique de l'Environnement de Bretagne ;

- les études scientifiques menées sur le sujet permettent d'établir que le taux d'azote à la mer dû aux activités agricoles terrestres est un paramètre central à l'origine de la prolifération des algues vertes et constitue le seul critère contrôlable afin de mettre un terme aux marées vertes ;

- le préfet des Côtes-d'Armor, qui préside notamment le comité consultatif de la Baie de Saint-Brieuc et qui dispose de pouvoirs spéciaux de police pour la conservation de la biodiversité de la réserve, ne pouvait ignorer les dommages subis par la biodiversité de la Baie de Saint-Brieuc du fait de la prolifération d'algues vertes ;

- les observations aériennes effectuées ont permis de confirmer l'existence de développements algaux de types I et II sur la Baie de Saint-Brieuc, ce qui démontre directement l'importance de l'eutrophisation qu'elle subit ;

- les données de l'Observatoire de l'environnement en Bretagne (OEB) indiquent que la faune benthique de la Baie de Saint-Brieuc se trouve en " mauvais état " en raison, principalement, des rejets azotés à l'origine d'une forte eutrophisation ;

- les dernières données scientifiques relatives aux impacts des marées vertes sur la biodiversité font état de conséquences dévastatrices, tant s'agissant des perturbations physiques (hydrodynamique) que chimiques (anoxie, rejet de sulfures), pour les espèces marines ;

- les déséquilibres provoqués par l'apport d'azote conduisent à la prolifération d'ulves, ce qui induit une modification significative et durable des échanges biologiques en faveur d'une simplification des écosystèmes, dominés progressivement par des espèces opportunistes ;

- les dommages constatés se ressentent particulièrement sur les populations benthiques de la Baie de Saint-Brieuc, lesquelles offrent des services écosystémiques uniques au monde, dont celui de permettre la croissance de larves et autres juvéniles de nombreuses espèces aquatiques ;

- il ressort tant des mesures du taux de nitrate à la mer que du suivi permanent de l'ampleur des marées vertes qu'aucune mesure efficace n'a été adoptée afin de lutter efficacement contre la prolifération des ulves ;

- les plans de lutte contre les algues vertes instaurés ont échoué à mettre en œuvre des mesures permettant de lutter contre les marées vertes, mais ont également révélé les insuffisances des autorités à mener les contrôles nécessaires, ainsi qu'il résulte notamment de la lecture du rapport de la Cour des Comptes relatif à l'évaluation de la politique publique de lutte contre la prolifération des algues vertes en Bretagne pour la période 2010-2019 ;

- les mesures réalisées par l'OEB s'agissant de l'évolution interannuelle des surfaces couvertes par les algues vertes sur la station d'Yffiniac, au cœur de la Baie de Saint-Brieuc, conduisent au constat que les marées vertes sont de plus en plus importantes ;

- une telle situation est expliquée par l'évolution des taux de nitrates à la mer en Bretagne, le Commissariat général du développement durable (CGDD) classant, dans son rapport " Environnement et Agriculture, les chiffres clés - Edition 2018 ", la Bretagne en tant que première région de France en matière d'excédents d'azote dans le sol des cultures, avec un taux dépassant les 100 kilogrammes de surplus azoté par hectare cultivé ;

- l'analyse des taux de nitrate dans les cours d'eau de la Baie de Saint-Brieuc confirme cet important surplus ;

- le contrôle des taux de nitrate rejetés et épandus dans les cultures relève de la police des installations classées pour la protection de l'environnement, lesquelles, lorsqu'elles sont émettrices de nitrates, ont l'obligation de respecter la règlementation applicable en matière de rejets de nitrate ;

- l'absence de toute mesure efficace permettant de lutter concrètement contre les dommages subis par la biodiversité de la Baie de Saint-Brieuc, notamment du fait de la prolifération des algues vertes, ne peut être attribuée qu'à une carence du préfet des

Côtes-d'Armor tant dans l'exercice des pouvoirs que lui confèrent les articles L. 511-1 et

R. 514-1 du code de l'environnement que dans l'exercice de la responsabilité qui lui a été confiée au sein de la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc ;

- le préfet ne saurait se féliciter des contrôles menés au cours des années 2019 et 2020, dès lors qu'ils révèlent une importante carence et alors que peu de suites sont données à ces contrôles ;

- les seuils d'azote que les services de l'Etat cherchent à atteindre ne permettent en rien de lutter contre les marées vertes ;

- la méthode de mesure des taux de nitrates dans les effluents n'est pas appropriée et empêche toute action curative cohérente ;

- l'action de l'Etat dans les Côtes-d'Armor souffre d'insuffisances de fond mais également de défaillances méthodologiques ;

- l'interprétation faite par le préfet de son rôle au titre de la protection de la diversité de la Baie de Saint-Brieuc relève du déni de responsabilité ;

- la carence fautive du préfet des Côtes-d'Armor dans sa protection de la biodiversité de la réserve de la Baie de Saint-Brieuc porte une atteinte directe aux intérêts qu'elle entend protéger depuis sa création, en 1976, et au soutien desquels elle a mené de nombreuses actions ;

- l'Etat devra être condamné à lui verser une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral direct et personnel résultant de l'absence de mesures efficaces prises pour protéger les écosystèmes remarquables de la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc ;

- la carence du préfet des Côtes-d'Armor dans l'exercice de ses pouvoirs de police est à l'origine d'un dommage écologique, au sens des dispositions des articles 1246 et suivants du code civil🏛 ;

- la perturbation de la biodiversité présente dans la Baie de Saint-Brieuc constitue un préjudice écologique d'ampleur, les dommages causés par les marées vertes affectant les services écosystémiques de ce milieu unique au monde et atteignant toute la biodiversité marine locale ;

- le préfet des Côtes-d'Armor ne démontrant pas que les écosystèmes locaux ne seraient pas affectés par l'eutrophisation, le principe de précaution, prévu par l'article 5 de la Charte de l'environnement, l'oblige à prendre des mesures afin de parer la survenue de ces dommages ;

- la réparation en nature du préjudice écologique subi suppose la mise en œuvre de travaux de restauration ;

- seul un contrôle strict des rejets azotés dans les effluents côtiers constituerait une action efficace de remise en état du milieu endommagé par l'eutrophisation ;

- le préfet des Côtes-d'Armor devra, pour réparer le préjudice écologique dénoncé, imposer des prescriptions aux installations agricoles à l'origine des flux d'azote à la mer, afin de tendre à une réduction du phénomène d'eutrophisation, contrôler régulièrement et, si nécessaire, sanctionner les installations qui ne respecteraient pas les prescriptions précitées en application des articles L. 171-6 du code de l'environnement🏛, et faire procéder à la mise en œuvre de mesures de remédiation de la biodiversité de la Baie de Saint-Brieuc, telles que la réintroduction d'espèces originelles (herbiers, faune benthique).

Par des mémoires en défense, enregistrés le 11 mars 2022, le 16 janvier 2023 et le

17 février 2023, le préfet des Côtes-d'Armor conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la requête est irrecevable, l'association requérante n'ayant pas été créée depuis au moins cinq ans, n'ayant pas un champ d'action territorial couvrant la Baie de Saint-Brieuc et ne remplissant donc pas les conditions pour engager une action en réparation du préjudice écologique tel que prévu par l'article 1248 du code civil🏛 ;

- l'intervention volontaire de l'association Glaz Natur, qui existe depuis moins de cinq ans et ne dispose pas d'un agrément, est irrecevable ;

- l'Etat et ses partenaires ont entrepris, en application de la directive européenne du

12 décembre 1991, de nombreuses démarches visant à limiter le développement des algues vertes dans les baies concernées de Bretagne, dont la Baie de Saint-Brieuc, où se situe une réserve naturelle, notamment par la déclinaison du programme d'actions national en un programme d'actions régional tendant à atteindre les objectifs de reconquête de la qualité des eaux vis-à-vis de la pollution par les nitrates d'origine agricole ;

- les plans de lutte contre les algues vertes instaurés démontrent la mobilisation de l'Etat pour mettre en œuvre des projets de territoires, soutenir les exploitants, financer la recherche et amplifier le volet curatif ;

- conformément à la recommandation de la mission ministérielle de 2015, les membres participants au Plan de lutte contre les algues vertes ont fait le choix de renforcer les moyens de suivi et d'évaluation pour rendre le dispositif de contrôle plus efficient ;

- la Baie de Saint-Brieuc a fait l'objet d'actions de reconquête de la qualité des eaux depuis les années 1990, en bénéficiant notamment du programme Prolittoral dès les années 2000 et alors que certains bassins versants ont été intégrés dans le programme Bretagne Eau Pure ;

- les flux d'azote printemps/été ont diminué de 53 % pour la période 2015-2017, par rapport à la période de référence 1999-2003, l'objectif étant d'atteindre 130 tonnes par an

(NO3 +NH4) en 2027 ;

- une zone soumise à contrainte environnementale (ZSCE) doit être mise en place en Baie de Saint-Brieuc, s'articulant avec le programme d'actions régional (PAR) modifié signé le 18 novembre 2021, ce qui doit permettre la mise en œuvre d'actions visant à réduire les risques de fuites d'azote à la parcelle et à améliorer l'efficacité épuratoire des milieux ;

- l'article 8.3 du PAR signé le 2 août 2018 prévoit la mise en œuvre de contrôles ciblés, ce qui contribue indirectement à la réduction des flux azotés ;

- des instructions ont été données afin de renforcer les règles applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement afin de garantir le respect de la balance globale azotée (25 kg d'azote par hectare pour les installations en baie algues vertes contre 50 kg d'azote par hectare pour le reste des exploitations) ;

- une démarche de territorialisation des contrôles a été instaurée dans les bassins versants rencontrant une problématique liée aux algues vertes ;

- le pouvoir de police du préfet au titre de la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc porte uniquement sur la règlementation des activités dans le périmètre de la réserve ;

- la gestion de la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc est déléguée par convention à Saint-Brieuc Armor Agglomération et à une association de protection de l'environnement, Vivarmor Nature ;

- la réserve procède à des suivis réguliers, permettant de s'assurer notamment de la préservation de la biodiversité sur l'ensemble du site, lesquels n'ont pas conduit à constater une diminution importante de la biodiversité en lien avec la présence d'algues dans la réserve de la Baie de Saint-Brieuc ;

- l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre ne fournit aucune donnée probante et chiffrée concernant l'identification des espèces qui seraient victimes du préjudice allégué en lien avec un phénomène d'eutrophisation ;

- la preuve de l'existence d'un lien de causalité spécifique, direct et certain, entre une carence supposée de l'Etat en raison d'une illégalité fautive et le préjudice allégué n'est pas établie ;

- les travaux mis en avant par l'association requérante, s'agissant du préjudice écologique invoqué, sont le plus souvent antérieurs à 2016 et comportent des conclusions très générales ne permettant pas de valider les hypothèses alléguées s'agissant de la Baie de Saint-Brieuc ;

- les prétentions de l'association requérante à fin d'indemnisation de son préjudice moral ainsi qu'à fin de réparation du préjudice écologique invoqué ne peuvent qu'être rejetées.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 17 janvier 2023, l'association Glaz Nature, représentée par Me Andréa Rigal-Casta, avocat du cabinet Géo Avocats, demande au tribunal de faire droit aux conclusions de l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre.

Elle soutient que :

- alors que l'année 2019 a été marquée par une couverture d'algues particulièrement vaste en Baie de Saint-Brieuc, et ce, quasiment tout au long de l'année, l'invasion chronique de la baie s'est confirmée en 2021 et en 2022, conduisant à la fermeture des plages pendant plusieurs mois ;

- le refus implicite opposé par le préfet des Côtes-d'Armor aux demandes formulées par l'association requérante revient à accepter que la Baie de Saint-Brieuc demeure l'un des estuaires les plus envahis par les algues vertes chaque année ;

- la présence chronique de marées vertes constitue un risque pour la biodiversité de la Baie et les couvertures d'ulves dénaturent le littoral de la baie, en interdisant, en raison du gaz toxique qu'elles produisent, de les fréquenter ;

- en tant qu'association agréée pour la protection de l'environnement au niveau de la région Bretagne, elle justifie d'un intérêt à agir dans le cadre de la présente instance dès lors que la carence du préfet des Côtes-d'Armor dans l'exercice de son pouvoir de protection de la qualité écologique de la Baie de Saint-Brieuc porte atteinte aux intérêts qu'elle défend ;

- les derniers rapports publiés par le Centre d'étude et de valorisation des algues (CEVA) démontrent que la couverture algale de la Baie de Saint-Brieuc ne présente, depuis 2010, aucun signe de décroissance ;

- les mesures engagées par les services de la préfecture des Côtes-d'Armor n'ayant occasionné aucune réduction de la surface couverte chaque année par les algues vertes, cette absence de résultat suffit à établir la carence du représentant de l'Etat ;

- les émissions d'hydrogène sulfuré par la putréfaction des ulves sont nuisibles à la faune benthique, notamment lorsque ce gaz est dissout dans les eaux peu profondes ;

- plusieurs études démontrent que la méiofaune, soit la faune de taille comprise entre la macrofaune et la microfaune, est sévèrement touchée par la présence de marées vertes, que ce soit dans sa structure ou dans sa diversité ;

- l'eutrophisation permise par les carences du préfet des Côtes-d'Armor dans son contrôle des flux de nitrate vers la Baie de Saint-Brieuc cause un important préjudice écologique à cet espace remarquable.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Charte de l'environnement ;

- le code civil ;

- le code de l'environnement ;

- le décret n°98-324 du 28 avril 1998 portant création de la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc (Côtes-d'Armor) ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Thalabard,

- les conclusions de M. Rémy, rapporteur public,

- et les observations de Me Rigal-Casta, représentant l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre.

Une note en délibéré, présentée par l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre a été enregistrée le 23 juin 2023.

Une note en délibéré, présentée par le préfet des Côtes-d'Armor, a été enregistrée le 12 juillet 2023.

Considérant ce qui suit :

1. L'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre a, par courrier du 23 novembre 2020, alerté le préfet des Côtes-d'Armor des conséquences délétères des marées vertes pour la biodiversité de la Baie de Saint-Brieuc, après avoir relevé que l'année 2019 avait été particulièrement catastrophique en raison d'une apparition précoce du phénomène et de l'accroissement de la surface couverte par les ulves pour la période d'août à septembre, par rapport à la moyenne enregistrée entre 2002 et 2018. Faisant valoir que la présence persistante d'algues vertes sur le littoral, et notamment dans la Baie de Saint-Brieuc, génère un dommage environnemental qui résulte de la carence du préfet des Côtes-d'Armor dans l'exercice de ses pouvoirs de police, l'association lui a demandé, en conséquence, d'adopter toute mesure administrative contraignante propre à mettre un terme au préjudice dénoncé, de procéder à la réparation du préjudice écologique subi par les écosystèmes de la Baie de Saint-Brieuc et de l'indemniser du préjudice moral subi. En l'absence de réponse du préfet des Côtes-d'Armor, l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre entend, par la présente requête, rechercher la responsabilité de l'Etat au titre de la carence fautive du préfet dans l'exercice de son pouvoir de conservation de la biodiversité présente dans la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc et demande au tribunal de condamner l'Etat à réparer en nature le préjudice écologique qui en résulte et à lui verser une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi. En cours d'instance, l'association Glaz Natur est volontairement intervenue pour présenter des conclusions au soutien de celles de l'association requérante.

Sur la recevabilité de la requête :

2. Aux termes de l'article L. 142-1 du code de l'environnement🏛 : " Toute association ayant pour objet la protection de la nature et de l'environnement peut engager des instances devant les juridictions administratives pour tout grief se rapportant à celle-ci. () ".

3. L'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre, anciennement dénommée association Sauvegarde du Trégor, a pour objet " la protection et la préservation du patrimoine naturel et paysager ainsi que des ressources naturelles présents sur son champ d'action géographique " en veillant, notamment " à la protection de la biodiversité et à la préservation des espaces naturels, notamment les zones humides, qu'ils soient terrestres, littoraux ou marins " et en incitant et participant " à la lutte contre toutes les formes de pollutions et nuisances présentes dans l'eau, l'air, les sols et sous-sols ". L'article 2 de ses statuts, dont il est constant qu'ils ont été modifiés et déposés en dernier lieu auprès des services préfectoraux le 8 juin 2020, précise que le champ d'action géographique de l'association comprend le département des Côtes-d'Armor, ainsi que certaines communes du département du Finistère incluses dans l'ancienne division administrative du Trégor. En vertu des dispositions précitées de l'article L. 142-1 du code de l'environnement, l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre a, dès lors, intérêt à engager un recours contre l'Etat au titre des défaillances, qu'elle invoque, dans la préservation de la biodiversité de la Baie de Saint-Brieuc, située dans le département des Côtes-d'Armor. Par suite, et contrairement à ce que soutient le préfet des Côtes-d'Armor, la requête de l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre est recevable.

Sur l'intervention volontaire de l'association Glaz Natur :

4. Dans les litiges de plein contentieux, sont seules recevables à former une intervention les personnes physiques ou morales qui se prévalent d'un droit auquel la décision à rendre est susceptible de préjudicier.

5. Aux termes de ses statuts, l'association Glaz Natur a pour objet social de contribuer, en Bretagne, par son rôle de fédération des associations adhérentes, notamment " à la protection, la conservation, la restauration des espaces, des ressources, milieux et habitats naturels, des espèces végétales et animales, de la diversité et des équilibres fondamentaux écologiques, de l'eau, de l'air, des sols, des sites, des paysages, du patrimoine et du cadre de vie ". Eu égard aux missions qu'elle s'est fixées, qui concourent aux intérêts que l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre entreprend de défendre, et à la nature du préjudice invoqué dans le cadre du présent litige, l'association Glaz Nature justifie d'un intérêt suffisant pour intervenir au soutien des conclusions présentées par l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre. La circonstance, ainsi que le fait valoir le préfet des Côtes-d'Armor, qu'issue de l'association COBEN (Confédération Bretonne pour l'Environnement et la Nature), elle ne justifie que de statuts qui seraient entrés en vigueur le 18 juin 2022, ne saurait suffire à lui dénier tout intérêt à intervenir dans le cadre de la présente instance. Son intervention est donc recevable et doit être admise.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

6. Il ressort de la présentation de sa requête introductive d'instance, qui a pour intitulé " recours indemnitaire " et qui ne comporte que des moyens tendant à démontrer la responsabilité de l'Etat dans l'atteinte à la biodiversité de la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc, que l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthiève a entendu saisir le tribunal d'un recours de plein contentieux. Au regard de l'objet de la demande de l'association requérante, qui conduit le juge à se prononcer sur son droit à obtenir réparation des préjudices qu'elle invoque, les conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision implicite par laquelle le préfet des Côtes-d'Armor a refusé de réserver une suite favorable au courrier qu'elle lui a adressé le 23 novembre 2020, qui a eu pour seul effet de lier le contentieux, sont irrecevables, y compris en ce qu'elles portent sur le refus de mettre en œuvre des mesures à l'attention des installations classées pour la protection de l'environnement de nature à réduire les émissions de flux azoté. Ces conclusions à fin d'annulation doivent donc être rejetées.

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat :

7. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport remis en mars 2012 par le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), qui dresse un bilan des connaissances scientifiques sur les causes de prolifération de macro-algues vertes et propose une application à la situation de la Bretagne, que l'origine des échouages massifs sur certaines plages du littoral breton d'algues vertes, dans des situations de courantologie faible propre aux baies fermées, avec une faible hauteur d'eau et une absence de turbidité, fait l'objet d'un consensus scientifique. Ce rapport rappelle notamment que la production de la biomasse algale en cause est liée à une eutrophisation du milieu marin côtier et que les proliférations algales se limitent aux zones littorales qui réunissent simultanément les trois caractéristiques particulières que sont la présence de macronutriments (azote et phosphore), à un niveau suffisant, des eaux peu profondes et sans turbidité, ce qui permet une hausse de la température et une luminosité favorisant la photosynthèse. Ce rapport précise que les nutriments disponibles et limitants pour cette croissance végétative sont en particulier l'azote, principalement, et le phosphore, dans certains cas, et que les apports d'azote dans les baies sont principalement d'origine agricole, en masse totale comme de façon saisonnière, le lessivage consécutif aux pluies d'hiver expliquant l'efflorescence (bloom) du printemps et le ralentissement de croissance de l'été.

8. Dans un communiqué publié en septembre 2009, le conseil scientifique de l'environnement de Bretagne (CSEB) indiquait que les études menées sur les sites de développement des algues vertes avaient permis de confirmer que l'azote était le facteur de contrôle de la production printanière de biomasse. Le suivi scientifique pluriannuel de la Baie de Saint-Brieuc a ainsi permis de constater que la prolifération d'ulves était directement corrélée à l'intensité de la pluviométrie printanière, le lessivage important des terres agricoles, ajouté à l'apport des nappes phréatiques, conduisant à une arrivée sur l'estran de flux importants de nitrate, à la période où la croissance des ulves est maximale. Il s'en déduit que le nitrate d'origine agricole est l'élément nutritif qui détermine l'intensité des marées vertes en Bretagne.

9. A cet égard, l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre soutient que les marées vertes ont des effets dévastateurs sur les écosystèmes marins, particulièrement sur ceux présents en eaux peu profondes. Selon le rapport collectif, émanant du CNRS, de l'INRA, de l'IRSTEA et de l'IFREMER, publié en décembre 2017 et ayant pour thème " l'Eutrophisation - Manifestations, causes, conséquences et prédictibilité ", le mécanisme de réponse des écosystèmes aux changements d'apports de nutriments, résultant de l'eutrophisation, qui conduit à une augmentation de la biomasse végétale, générant progressivement une diminution de la pénétration de la lumière dans la colonne d'eau, induit une cascade de réactions en chaîne, avec notamment une modification de la structure des communautés biologiques et des réseaux trophiques, ainsi que des changements dans les cycles biogéochimiques. Il est ajouté que " les effets les plus notables de l'eutrophisation sont les proliférations végétales, parfois toxiques, la perte de biodiversité et les anoxies qui peuvent se traduire par la mort massive d'organismes aquatiques ". Il résulte également des pièces du dossier que les marées vertes sont à l'origine de nuisances olfactives et visuelles pour les usagers du littoral, perturbant l'accès aux sites touchés et aux activités tant récréatives que professionnelles, qui se traduisent, selon les économistes, par des pertes de bien-être ayant elles-mêmes des incidences sur le secteur marchand, notamment immobilier et touristique. Enfin, le suivi des échouages d'algues vertes, réalisé notamment par le Centre d'étude et de valorisation des algues (CEVA), montre qu'en cas d'accumulation, leur décomposition produit en quelques jours de l'hydrogène sulfuré (H2S), qui est un gaz toxique présentant un risque sanitaire pour l'homme comme pour les animaux.

10. Ainsi que l'expose le préfet des Côtes-d'Armor en défense, les services de l'Etat, ainsi que leurs partenaires, ont progressivement pris conscience de la nécessité de limiter le développement des algues vertes en Bretagne, et notamment en baie de Saint-Brieuc où se situe une réserve naturelle, en agissant pour prévenir et réduire la pollution aquatique résultant des substances contribuant à l'eutrophisation. A partir de 2011, un programme d'actions national (PAN) a été mis en œuvre pour définir le socle commun applicable à l'ensemble des zones vulnérables du territoire national, lequel a été décliné sous la forme de programmes d'actions régionaux (PAR) ayant vocation à fixer, pour chaque territoire, les mesures complémentaires et les renforcements nécessaires pour atteindre les objectifs de meilleure qualité des eaux et de diminution de la pollution issue des nitrates d'origine agricole. De même, l'Etat a mis en place des plans de luttes contre les algues vertes (PLAV), pour la période 2010-2015 puis 2017-2021, afin de mieux répondre aux enjeux sanitaires, environnementaux et économiques résultant de la prolifération d'ulves. Pour autant, il résulte de l'instruction que les marées vertes persistent sur le littoral breton et qu'en Baie de Saint-Brieuc, les surfaces couvertes par les ulves ont augmenté en volume et en durée au cours des années 2019 et 2020. Les données relevées en 2021 et 2022 ne montrent pas davantage d'amélioration. La consultation de l'évolution interannuelle des surfaces couvertes par les algues vertes de la station d'Yffiniac ou de la station de Morieux témoigne de cette évolution défavorable. Dans son cahier territorial consacré à la Baie de Saint-Brieuc, joint au rapport d'évaluation de la politique publique de lutte contre la prolifération des algues vertes en Bretagne (2010-2019), et dont l'association requérante entend se prévaloir, la Cour des Comptes relève que la Baie de Saint-Brieuc est la baie bretonne la plus touchée par le phénomène d'échouage algal, avec une moyenne de 629 hectares par an et constate que " si la baie a connu une baisse des surfaces d'échouages d'algues vertes sur la période 2008-2013, celles-ci n'ont cessé de progresser depuis 2013 avec des pics en 2017 et 2019 ". De même, la Cour des Comptes souligne que si la concentration moyenne en nitrates dans les différents cours d'eau de la baie a diminué de 34,6 % depuis 1995, cette diminution se stabilise depuis 2015, la concentration de nitrates relevée dans les cours d'eau de la baie demeurant, quant à elle, supérieure de 8,5 % à la moyenne régionale.

S'agissant du contrôle de l'activité agricole :

11. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis

aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. () ". Selon la nature et l'importance de leur activité, définie dans la nomenclature des installations classées figurant à l'article R. 511-9 de ce code🏛, les installations sont soumises au régime de l'autorisation, de l'enregistrement ou de la déclaration, suivant la gravité des dangers ou des inconvénients que peut présenter leur exploitation. En vertu des articles L. 512-5, L. 512-7 et L. 512-10 du code de l'environnement🏛🏛🏛, il appartient, le cas échéant, au ministre chargé des installations classées de fixer, par arrêté, les règles et prescriptions techniques applicables à ces installations, propres à prévenir et à réduire les risques d'accident ou de pollution de toute nature susceptibles d'intervenir. Cet arrêté fixe également les conditions dans lesquelles certaines règles peuvent être adaptées par le préfet aux circonstances locales. Selon l'article L. 512-20 dudit code : " En vue de protéger les intérêts visés à l'article L. 511-1, le préfet peut prescrire la réalisation des évaluations et la mise en œuvre des remèdes que rendent nécessaires soit les conséquences d'un accident ou incident survenu dans l'installation, soit les conséquences entraînées par l'inobservation des conditions imposées en application du présent titre, soit tout autre danger ou inconvénient portant ou menaçant de porter atteinte aux intérêts précités. Ces mesures sont prescrites par des arrêtés pris, sauf cas d'urgence, après avis de la commission départementale consultative compétente. ".

12. Il résulte des dispositions précitées, issues du titre Ier du livre V du code de l'environnement consacré à la prévention des pollutions, des risques et des nuisances, que les installations classées sont, pour l'ensemble des objectifs définis par la loi, soumises à un pouvoir de police exercé principalement par le préfet de département, par voie de décisions unilatérales, réglementaires ou individuelles, qu'il s'agisse d'établissements nouveaux ou d'établissements existants.

13. Il résulte de la lecture du rapport de la Cour des Comptes déjà cité, que l'agriculture de la Baie de Saint-Brieuc est dominée par l'élevage bovin, représentant 47 % des exploitations, l'élevage hors sol de porcs et volailles, représentant 23 % des exploitations et les cultures de maïs et céréales. Si le nombre d'exploitations diminue depuis 2012, la superficie agricole utilisée (SAU) reste stable, ce qui implique une augmentation de la surface moyenne agricole. Pour ce qui concerne le secteur de la Baie de Saint-Brieuc, le cheptel, stable entre 2015 et 2018, se caractérise par une forte pression du cheptel porcin, évalué à 37,5 porcs par hectare, contre 21,7 porcs par hectare au niveau du département. La Cour des Comptes relève également que s'agissant du bassin de Saint-Brieuc, la production d'azote, qui est de 152,2 kg/ha, est stable depuis 2015 et se situe largement au-dessus de la moyenne départementale, évaluée à 128,1 kg/ha. De la même manière, les quantités d'azote épandu sont en hausse de 1,8 % entre 2014 et 2018 pour la Baie de Saint-Brieuc, selon une évolution plutôt moins favorable que celle constatée au niveau du département ou des autres bassins versants bretons.

14. Si le préfet des Côtes-d'Armor soutient avoir mis en œuvre, conformément à l'un des objectifs fixés par le PAR signé le 2 août 2018, des contrôles ciblés des exploitations agricoles implantées dans la Baie de Saint-Brieuc, afin de contribuer indirectement à la réduction des flux azotés, les seules données chiffrées produites, qui concernent uniquement les années 2019 et 2020, ne permettent nullement d'apprécier la portée des efforts entrepris par rapport à la période antérieure, alors qu'en tout état de cause, les suites réservées à ces contrôles ne font l'objet d'aucune précision. Au demeurant, et ainsi que le relève l'association requérante, rien ne justifie que les installations classées soumises au régime de la déclaration, pourtant nombreuses dans le secteur de la Baie de Saint-Brieuc, soient exclues de tout contrôle des services de l'Etat. Dans un contexte où la diminution du taux d'azote dans les eaux affiche des résultats décevants et, en tout état de cause, insuffisants pour parvenir à un flux d'azote à la mer sans conséquences environnementales néfastes, qui doit nécessairement tendre, selon le CSEB, à être inférieur à

10 kg/ha/an, le préfet des Côtes-d'Armor n'établit pas, par les éléments dont il se prévaut, à caractère général, s'être engagé dans un contrôle des exploitations permettant une application effective de la réglementation et la réduction des risques sanitaires et environnementaux afférents à certaines activités agricoles.

15. Alors que l'action des services de l'Etat au titre de la police des installations classées a été complétée, dans la Baie de Saint-Brieuc, par la signature d'un contrat de baie, dans le cadre du deuxième PLAV pour la période 2017-2021, la Cour des Comptes n'a pu que constater que les résultats du bilan intermédiaire ont fait apparaître en 2020 des résultats en terme de qualité d'eau, avec un flux de 180 tonnes d'azote, trop éloignés de l'objectif attendu de 160 tonnes pour 2021. Plus globalement, les magistrats financiers ont relevé des retards notables quant aux objectifs d'amélioration des pratiques agricoles et d'évolution des systèmes de production, notamment s'agissant des évolutions tenant au développement des cultures pérennes, de l'agriculture biologique et de la baisse des surfaces de zones humides cultivées, et ce d'autant qu'aucun outil ne permet de s'assurer de la pérennité des mesures mises en place, qui pour certaines relèvent uniquement de démarches volontaires des exploitants. Les actions d'accompagnement prévues dans le deuxième PLAV rencontrent également d'importants retards, susceptibles de modifier significativement les résultats attendus en 2021 et en 2027, particulièrement concernant l'accompagnement des exploitations, la gestion efficiente de l'azote, l'aménagement des zones sensibles et le foncier agricole. Compte tenu des difficultés constatées dans la mise en œuvre effective des ambitions affichées par le PLAV, la Cour des Comptes recommande donc une meilleure gouvernance territoriale qui doit conduire l'Etat à participer plus activement à la coordination de l'ensemble du dispositif, tant sur le plan préventif que curatif. Le rapport d'information du Sénat du 9 février 2022, portant sur le suivi des recommandations du rapport " Algues vertes en Bretagne, de la nécessité d'une ambition plus forte ", déplore également la baisse significative des effectifs consacrés aux contrôles, dans les bassins versants algues vertes, et souligne qu'au-delà du ramassage des algues, qui ne traite pas le problème en amont, les actions préventives demeurent lacunaires dans les territoires touchés par les échouages d'algues vertes.

16. Au regard de ces éléments, l'association requérante est fondée à soutenir que le préfet des Côtes-d'Armor n'a pas mis en œuvre l'ensemble des prérogatives qui lui sont dévolues au titre de la police des installations classées pour réduire les dangers et inconvénients résultant de l'activité agricole dans la Baie de Saint-Brieuc, ce qui est de nature à révéler une carence fautive.

S'agissant de la protection de la biodiversité de la Baie de Saint-Brieuc :

17. D'une part, aux termes de l'article 5 de la Charte de l'environnement : " Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. ".

18. D'autre part, aux termes de l'article L. 332-1 du code de l'environnement🏛 : " I.- Des parties du territoire terrestre ou maritime d'une ou de plusieurs communes peuvent être classées en réserve naturelle lorsque la conservation de la faune, de la flore, du sol, des eaux, des gisements de minéraux et de fossiles et, en général, du milieu naturel présente une importance particulière ou qu'il convient de les soustraire à toute intervention artificielle susceptible de les dégrader. () ". L'article L. 332-2 de ce code🏛 ajoute que : " I. - Le classement d'une réserve naturelle nationale est prononcé pour assurer la conservation d'éléments du milieu naturel d'intérêt national ou la mise en œuvre d'une réglementation européenne ou d'une obligation résultant d'une convention internationale. () ". Les articles L. 332-20 et L. 332-22 du même code🏛🏛 précisent le régime de constatation des infractions aux règlementations intéressant la protection d'une zone naturelle et de leur poursuite.

19. Le décret du 28 avril 1998🏛 créant la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc prévoit notamment en son article 7 que : " Le préfet peut prendre, après avis du comité consultatif, toutes mesures en vue d'assurer la conservation d'espèces animales ou végétales ou la limitation d'animaux ou de végétaux surabondants dans la réserve. ".

20. L'association requérante expose qu'il appartient également au préfet des Côtes-d'Armor de mettre en œuvre les pouvoirs de police qui lui sont dévolus pour assurer la protection de la biodiversité de la Baie de Saint-Brieuc, qui bénéficie du fait de son classement en tant que réserve naturelle du régime de protection prévu par les articles L. 332-1 et suivants du code de l'environnement. Pour contester sa responsabilité ou l'insuffisance de son action, le préfet des Côtes-d'Armor fait valoir que la gestion de la réserve de la Baie de Saint-Brieuc est déléguée par convention à Saint-Brieuc Armor agglomération et à l'association de protection de l'environnement Vivarmor Nature, que le plan de gestion pour la période 2019-2028 a été adopté, après avoir reçu les trois avis favorables du conseil scientifique, du comité consultatif et du conseil scientifique régional du patrimoine naturel et que le rapport d'activité pour l'année 2020 dresse un état des lieux qui, s'agissant de la connaissance et du suivi continu du patrimoine naturel, ne signale pas de diminution importante de la biodiversité en lien avec la présence d'algues dans la Baie de Saint-Brieuc. Par cette argumentation, le préfet des Côtes-d'Armor méconnaît, pourtant, l'étendue de sa compétence dès lors qu'il lui appartient de s'assurer que le plan de gestion conçu et mis en œuvre par le gestionnaire de la réserve permet d'assurer effectivement la conservation du patrimoine naturel et de la biodiversité de la réserve. Au demeurant, le rapport pour l'année 2020 des activités des instances concourant à la gestion du site de la Baie de Saint-Brieuc, qui ne procède à aucune présentation détaillée des thèmes ayant fait l'objet d'un suivi par le conseil scientifique, ne permet aucunement de déduire l'absence d'incidence de la présence d'ulves sur la biodiversité du site. De fait, bien que le plan de gestion de la réserve pour l'année 2020 fixe notamment pour objectifs l'analyse des dynamiques des espèces benthiques, le suivi du peuplement ornithologique, le suivi des populations d'oiseaux nicheurs, le suivi de la présence de la loutre ou encore le suivi de la dynamique d'espèces d'intérêt patrimonial, le préfet n'apporte aucune précision, dans le cadre de la présente instance, sur les résultats ainsi obtenus.

21. En outre, il résulte de l'instruction que, par un courrier du 11 juin 2019 adressé à l'association requérante, le conservateur de la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc a précisé qu'un travail mené en 2010 sur les impacts des échouages des algues en haut de plages avait montré une dégradation ponctuelle de la qualité du peuplement benthique (invertébrés qui vivent dans le sable) au cours de l'été, mais que ces peuplements se rétablissaient rapidement dès l'élimination des algues soit par ramassage, soit à l'automne. Il ajoutait néanmoins qu'à long terme, les communautés pourraient être dominées par des espèces opportunistes et s'accompagner d'une diminution de la biomasse et de la richesse spécifique. De fait, des études scientifiques menées plus récemment suggèrent que la présence de biomasses élevées d'algues vertes modifie les interactions et les processus biologiques, ce qui implique des évolutions dans la composition de la communauté benthique et de la communauté de poissons sur le site. Dans une thèse de doctorat, intitulée " Ecological trajectories : methods and applications. A case study on the conservation and taxonomic/functional/trophic dynamics of soft bottom benthic assemblages in the bay of Saint-Brieuc " et soutenue le 14 décembre 2021 auprès de l'école doctorale des sciences de la mer et du littoral de l'université de Bretagne occidentale, Anthony Sturbois fait état des effets à long terme des marées vertes dans certains assemblages des communautés benthiques, avec notamment une diminution des espèces fragiles, flexibles, tubicoles et déposivores. Dans une étude intitulée " Algues vertes et biodiversité dans la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc : état des lieux, impact sur les espèces benthiques, conclusions ", menée en avril et mai 2022, Pauline Erhel, étudiante en biologie à l'université Le Havre Normandie, constate, au regard des différents inventaires réalisés, que les macro-algues modifient les conditions environnementales de la réserve naturelle en provoquant l'anoxie et la libération de sulfure d'hydrogène, ce qui a pour effet une réduction de la richesse en espèces et de l'abondance des communautés. Elle observe que l'abondance totale et la richesse spécifique en espèces de la baie demeure très faible, particulièrement à proximité du Gouessant où les amas d'algues échouées étaient les plus importants. Elle ajoute que cet impact négatif des algues vertes sur la biodiversité est également visuel, puisqu'il est possible d'établir une relation directe entre le gradient de couleur du gris au noir sombre et l'absence d'espèces présentes, " Plus le sédiment est noir jusqu'à atteindre la couleur noir fumée moins la biodiversité est présente ". De même, l'observation des têtes de rochers, notamment au niveau de l'estuaire du Gouessant, permet de relever l'absence de toute présence de crustacés ou de mollusques, ce qui " tend à démontrer que l'hydrogène sulfuré se dilue et se dégrade dans les eaux salées au point de faire disparaître la quasi-totalité de la biodiversité émergée, tant faunistique que floristique ". Enfin, elle souligne que l'effondrement de la faune estuarienne affecte directement la chaîne de la biodiversité du littoral et que si de rares canards ont été aperçus pendant toute la période des inventaires, aucun échassier ni aucun martin-pêcheur ne fréquente plus les lieux. Le préfet des Côtes-d'Armor ne conteste pas, en défense, la pertinence des inventaires ainsi réalisés et les conséquences des amas d'algues vertes sur la biodiversité de la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc.

22. Si le préfet des Côtes-d'Armor entend se prévaloir de l'élaboration d'une zone soumise à contraintes environnementales (ZSCE) pour la Baie de Saint-Brieuc permettant, en se fondant sur les travaux de modélisation développés par l'INRAE et financés par l'Etat, la mise en œuvre d'un programme d'actions pour une période de trois ans, à compter de la saison culturale 2022-2023, les axes définis tenant à la réduction des fuites d'azote sous les parcelles agricoles par des pratiques agronomiques de précision, l'amélioration de la couverture des sols, l'amélioration de la gestion des cultures, la protection des zones humides et des cours d'eau visant à améliorer le pouvoir épuratoire des milieux et l'amélioration de la gestion des cultures maraîchères et des cultures sous serres reposent principalement sur un engagement volontaire des partenaires de l'Etat. L'article 9 de l'arrêté préfectoral du 9 septembre 2022 instaurant ce programme d'actions volontaires visant à diminuer les flux de nitrates et les risques de fuite d'azote contribuant à la prolifération des algues vertes de la Baie de Saint-Brieuc prévoit qu'une analyse de l'atteinte des objectifs poursuivis sera réalisée après trois campagnes culturales de mise en œuvre du programme d'actions et que, seulement à cette échéance, des mesures règlementaires pourront être décidées en cas de non-respect des engagements ou de non atteinte de ces objectifs. Le seul fait que le préfet affirme pouvoir compter sur des moyens tant financiers qu'humains renforcés ne saurait suffire à considérer qu'un tel dispositif est susceptible de produire davantage d'effets que les plans antérieurement mis en place.

23. En conséquence, la carence fautive du préfet des Côtes-d'Armor dans la mise en œuvre des pouvoirs qui doivent permettre d'assurer la préservation effective de la biodiversité de la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc doit également être regardée comme suffisamment établie.

En ce qui concerne le préjudice moral de l'association requérante :

24. Il n'est pas contesté que, ainsi qu'elle l'expose, les actions que mène l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre depuis sa création en 1976 pour la protection des intérêts environnementaux définis à l'article 2 de ses statuts l'ont conduite à œuvrer à la sensibilisation du plus grand nombre, sur l'ensemble du département des Côtes-d'Armor, aux conséquences des échouages d'ulves sur les plages du littoral. Par ses opérations notamment de mesure des taux de gaz toxique généré par les amas d'algues vertes et de suivi de la qualité de la biodiversité dans les espaces atteints par les marées vertes, dont les médias se sont largement fait écho, l'association requérante a notamment concouru à la prise de conscience collective des enjeux liés à la lutte contre la pollution résultant des flux d'azote. Ainsi qu'il a été précédemment exposé, l'action insuffisamment volontaire des services de l'Etat afin de réduire sensiblement les fuites d'azote agricole vers le milieu maritime a directement contribué à la persistance des marées vertes. Cette carence des services de l'Etat a ainsi été de nature à porter atteinte aux intérêts que l'association requérante entend défendre et à faire obstacle aux objectifs de protection et de préservation du patrimoine naturel et paysager qu'elle s'est assignés. Par suite, l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre établit que l'inaction du représentant de l'Etat a eu pour effet de lui causer un préjudice moral direct, certain et personnel, dont elle est fondée à demander réparation.

25. Au regard de ses nombreuses interventions publiques et des démarches entreprises auprès des décideurs publics, dont le préfet des Côtes-d'Armor, pour les engager à prendre conscience des risques sanitaires et environnementaux résultant des amas d'algues vertes, il sera, dans les circonstances de l'espèce, fait une juste appréciation de la réparation due pour ce préjudice en condamnant l'Etat à verser à l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre la somme de 3 000 euros.

En ce qui concerne le préjudice écologique de l'association requérante :

26. Aux termes de l'article 1246 du code civil : " Toute personne responsable d'un préjudice écologique est tenue de le réparer. ". L'article 1247 du même code précise que : " Est réparable, dans les conditions prévues au présent titre, le préjudice écologique consistant en une atteinte non négligeable aux éléments ou aux fonctions des écosystèmes ou aux bénéfices collectifs tirés par l'homme de l'environnement. ". L'article 1248 de ce code dispose que : " L'action en réparation du préjudice écologique est ouverte à toute personne ayant qualité et intérêt à agir, telle que l'Etat, l'Office français de la biodiversité, les collectivités territoriales et leurs groupements dont le territoire est concerné, ainsi que les établissements publics et les associations agréées ou créées depuis au moins cinq ans à la date d'introduction de l'instance qui ont pour objet la protection de la nature et la défense de l'environnement. ".

27. Il résulte de ces dispositions que les associations, qu'elles soient agréées ou non, qui ont pour objet statutaire la protection de la nature et la défense de l'environnement, au sens de l'article L. 142-1 du code de l'environnement, ont qualité pour introduire devant la juridiction administrative un recours tendant à la réparation d'un préjudice écologique. En l'espèce, la seule circonstance que l'association requérante, qui a été créée en 1976, ait attendu le mois de

juin 2020 pour lever l'ambiguïté, dans ses statuts, relative à l'étendue de son champ d'action territorial, qui portait initialement sur le territoire du Trégor, alors même qu'il n'est pas contesté qu'elle menait déjà des actions de sensibilisation sur l'ensemble du département des Côtes-d'Armor, ne permet pas de considérer, comme le soutient le préfet des Côtes-d'Armor, qu'elle ne remplirait pas la condition d'antériorité prévue par l'article 1248 du code civil. Si le préfet des Côtes-d'Armor affirme que le dépôt de nouveaux statuts en juin 2020 aurait eu pour effet la création d'une nouvelle association, il ressort de la consultation du Journal Officiel des associations que les services de l'Etat ont procédé à l'enregistrement de ce document en tant que modification des statuts de l'association, laquelle a conservé, sous le nom A, son numéro d'identification antérieur au répertoire national des associations (RNA). Le préfet des Côtes-d'Armor n'est dès lors pas fondé à soutenir que l'association requérante ne justifie pas remplir les conditions pour engager une action en réparation du préjudice écologique sur le fondement de l'article 1248 du code civil.

28. Aux termes de l'article 1249 du code civil🏛 : " La réparation du préjudice écologique s'effectue par priorité en nature. / En cas d'impossibilité de droit ou de fait ou d'insuffisance des mesures de réparation, le juge condamne le responsable à verser des dommages et intérêts, affectés à la réparation de l'environnement, au demandeur ou, si celui-ci ne peut prendre les mesures utiles à cette fin, à l'État. () ". Et aux termes de l'article 1252 du code civil🏛 : " Indépendamment de la réparation du préjudice écologique, le juge, saisi d'une demande en ce sens par une personne mentionnée à l'article 1248, peut prescrire les mesures raisonnables propres à prévenir ou faire cesser le dommage. ".

29. Il résulte de ce qui a été développé précédemment, que les atteintes portées à la biodiversité de la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc par les amas persistants d'algues vertes constituent un préjudice écologique, au sens des dispositions précitées de l'article 1247 du code civil🏛. Selon l'expertise collective du CNRS, de l'INRA, de l'IRSTEA et de l'IFREMER, déjà citée, consacrée au phénomène d'eutrophisation, la restauration de l'écosystème dégradé suppose principalement de faire cesser la cause extérieure qui a produit le changement d'état, l'écosystème pouvant alors retrouver, à terme, un fonctionnement se rapprochant de son fonctionnement antérieur. Dans ces conditions, et ainsi que l'association requérante le soutient, seul un contrôle strict des rejets azotés dans les eaux côtières est susceptible de constituer une action efficace permettant une remise en état progressive du milieu endommagé par l'eutrophisation. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet des Côtes-d'Armor de prévoir, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent jugement, des prescriptions, applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement à l'origine des fuites d'azote dans le milieu naturel, propres à limiter l'apport azoté total dû aux engrais aux besoins des cultures afin de permettre une réduction effective du phénomène d'eutrophisation, selon des seuils conformes aux préconisations scientifiques. Il y a également lieu d'enjoindre au préfet des Côtes-d'Armor de programmer un contrôle périodique de l'ensemble des exploitations agricoles situées sur le territoire de la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc, en application de ses pouvoirs de police des installations classées pour la protection de l'environnement. Le surplus des conclusions à fin d'injonction réparatoire ne peut, en revanche, être accueilli.

Sur les dépens :

30. L'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre ne justifie pas des dépens qu'elle aurait exposés dans le cadre de la présente instance. Ainsi, ses conclusions tendant à ce que les dépens de l'instance soient mis à la charge de l'Etat sont dépourvues d'objet et ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de l'association Glaz Natur est admise.

Article 2 : L'Etat versera à l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre la somme de

3 000 euros en réparation de son préjudice moral.

Article 3 : Il est enjoint au préfet des Côtes-d'Armor de prévoir, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent jugement, des prescriptions, applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement à l'origine des fuites d'azote dans le milieu naturel, propres à limiter l'apport azoté total dû aux engrais aux besoins des cultures afin de permettre une réduction effective du phénomène d'eutrophisation, selon des seuils conformes aux préconisations scientifiques, et de programmer un contrôle périodique de l'ensemble des exploitations agricoles situées sur le territoire de la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à l'association Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre, à l'association Glaz Natur et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Une copie du présent jugement sera adressée au préfet des Côtes-d'Armor.

Délibéré après l'audience du 22 juin 2023, à laquelle siégeaient :

M. Vergne, président,

Mme Thalabard, première conseillère,

M. Blanchard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juillet 2023.

La rapporteure,

Signé

M. Thalabard

Le président,

Signé

G.-V. VergneLa greffière,

Signé

I. Le Vaillant

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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