Jurisprudence : CA Pau, 09-09-2020, n° 19/03609, clôture


HD/ND

Numéro 20/2195

COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1

ARRET DU 09/09/2020

Dossier : N° RG 19/03609 - N° Portalis DBVV-V-B7D-HNKN

Nature affaire :

Autres demandes relatives à la saisie mobilière

Affaire :

SCI YL

SARL JOANTEGUY

SARL METAL ADOUR

Société METALKI

Grosse délivrée le :

a

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRET

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 09 septembre 2020, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

En application de la loi n°2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 et de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale, l'affaire, fixée à l'audience du 29 juin 2020 a été examinée selon la procédure sans audience.


Monsieur Hervé DUPEN, magistrat chargé du rapport, en application de l'article 786 du Code de Procédure Civile et a rendu compte à la Cour composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Conseiller faisant fonction de Président Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller

Monsieur Hervé DUPEN, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :


APPELANTE :

SCI YL

QUARTIER ALOTZ

64200 ARCANGUES

Représentée par Me Lionel FOURGEAU, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMEES :

SARL JOANTEGUY

19 ALLEE DE LA FLORIDE

64100 BAYONNE

SARL METAL ADOUR

21 RUE HELENE BOUCHER

40220 TARNOS

Société METALKI

19 b rue de la Négresse

64200 BIARRITZ

Représentées par Me Carole DUBOIS-MERLE de la SCP CDM, avocat au barreau de

BAYONNE

sur appel de la décision

en date du 24 octobre 2019

rendue par le Juge de l'Exécution de Bayonne


Faits et procédure

La SCI YL, propriétaire d'un ensemble immobilier et foncier donné à bail commercial à la SARL Atelier Indus Bât, a obtenu à l'encontre de celle-ci un jugement du tribunal de grande instance de Bayonne en date du 10 avril 2017, désormais définitif, qui a notamment :

- condamné la SARL Atelier Indus Bât à faire procéder à ses frais à la dépollution du terrain loué par une entreprise spécialisée et habilitée en dépollution sous peine d'une astreinte de 5000 € par jour de retard,

- condamné la SARL Atelier Indus Bât à faire procéder à ses frais à une analyse du terrain par le laboratoire LP pour vérifier la parfaite dépollution du terrain loué sous peine d'une astreinte de 5000 € par jour de retard,

- condamné la SARL Atelier Indus Bât à faire évacuer à ses frais l'ensemble du matériel et des «bid bags de résidus de peinture thermo-laquage souillés » entreposés sur le terrain loué sous peine d'une astreinte de 5000 € par jour de retard,

- condamné la SARL Atelier Indus Bât à faire procéder à ses frais à la suppression de la cheminée horizontale non mise aux normes sous peine d'une astreinte de 5000 € par jour de retard,

- condamné la SARL Atelier Indus Bât à la dépollution de l'intégralité du terrain voisin non loué appartenant à la SCI YL (Zone verte) par une entreprise spécialisée et habilitée en dépollution sous peine d'une astreinte de 5000 € par jour de retard,

- condamné la SARL Atelier Indus Bât à une analyse de la zone verte par le laboratoire LP pour vérifier la parfaite dépollution du terrain sous peine d'une astreinte de 5000 € par jour de retard,

- condamné la SARL Atelier Indus Bât à faire supprimer à ses frais les deux cheminées verticales rajoutées sans autorisation en remettant le bâtiment et sa toiture dans son état d'origine sous peine d'une astreinte de 5000 € par jour de retard,

- condamné la SARL Atelier Indus Bât à faire procéder à ses frais aux réparations de la poignée et la serrure du grand portail et à la remise dans leur état d'origine des gouttières, des chéneaux de la toiture et des plaques métalliques horizontales, sous peine d'une astreinte de 5000 € par jour de retard,

- condamné la SARL Atelier Indus Bât à évacuer la servitude de passage (chemin d'accès à la zone verte partie non louée, appartenant à la SCI YL) sous peine d'une astreinte de 5000 € par jour de retard.

Par jugement désormais définitif en date du 16 novembre 2017, le juge de l'exécution du tribunal de Bayonne a liquidé, à la date du 2 juin 2017, à la somme de 1'980'000 € l'astreinte provisoire fixée par le tribunal de grande instance, condamné la SARL Atelier Indus Bât à payer à la SCI YL la somme de 1'980'000 € avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation et assorti d'une astreinte définitive l'exécution de neuf des obligations auxquelles la SARL Atelier Indus Bât a été condamnée par le tribunal de grande instance de Bayonne, pour chacune d'elles, de 500 € par jour pour une durée de 12 mois à compter de la signification du jugement.

Dans le cadre de l'exécution des décisions judiciaires dont elle disposait à l'encontre de son locataire, la SCI YL a fait procéder, en février et mars 2018, à des mesures de saisies-attributions entre les mains de la SARL Joanteguy, de la SARL SN Métal Adour et de la SAS Metalki pour une somme totale de 2'006'682,12 €.

Invoquant le fait que les tiers-saisis se sont abstenus d'indiquer à l'huissier le montant des sommes en principal et intérêts qu'ils devaient à la SARL Atelier Indus Bât, la SCI YL, par actes d'huissier de justice en date du 20 août 2018, a fait assigner ces tiers-saisis devant le juge de l'exécution de Bayonne en demandant de :

- les condamner solidairement ou l'une à défaut de l'autre à lui payer la somme de 2'006'682,12 € en application notamment des articles L. 211 - 2 alinéa 1 et R. 211 - 5 du code des procédures civiles d'exécution,

- condamner solidairement la SARL Joanteguy, la SARL SN Métal Adour et la SAS Metalki ou l'une à défaut de l'autre à lui payer une indemnité de 150'000 € pour négligence fautive et/ou déclaration inexacte et mensongère, en application de l'article R. 211 - 5 du code des procédures civiles d'exécution,

- condamner solidairement la SARL Joanteguy, la SARL SN Métal Adour et la SAS Metalki ou l'une à défaut de l'autre à lui payer la somme de 3500 £au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement la SARL Joanteguy, la SARL SN Métal Adour et la SAS Metalki ou l'une à défaut de l'autre aux entiers dépens, en ce compris le coût des procès-verbaux de saisie-attribution.


Par jugement en date du 24 octobre 2019, le juge de l'exécution a :

- débouté la SCI YL,

- condamné celle-ci à payer à la SARL Joanteguy la somme de 1500 €, à la SARL SN Métal Adour, la somme de 1500 € et à la SAS Metalki la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SCI YL aux dépens.

Par déclaration en date du 15 novembre 2019, la SCI YL a relevé appel du jugement.

La clôture de la procédure est intervenue le 20 mai 2020.

Dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire en application de la loi 2020-290 du 23 mars 2020, la fixation de l'affaire a été maintenue avec procédure de dépôt sans audience au 29 juin 2020 selon les dispositions de l'article 8 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020.

Vu l'acceptation du recours à la procédure sans audience dans le cadre de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 de Maître Fourgeau en date du 29 juin 2020 et de Maître Dubois-Merle en date du 24 juin 2020.

Vu la vérification du dépôt des dossiers de plaidoirie par le Premier président de la cour d'appel de Pau pour le dépôt du 29 juin 2020 selon ordonnance d'organisation des services en date du 25 juin 2020 et après communication aux avocats des parties du feuilleton des dossiers retenus et précisant la composition de la cour et la date de délibéré fixée au 9 septembre 2020.


Prétentions et moyens des parties

Par conclusions récapitulatives notifiées le 18 mai 2020, au contenu desquelles il sera renvoyé pour l'énoncé du détail de l'argumentation, la SCI YL, présente les demandes suivantes :

- dire et juger son appel recevable et fondé et réformer dans son intégralité le jugement dont appel,

En conséquence et, statuant à nouveau,

A titre principal, vu les articles L. 211 - 2 alinéa 1 et R. 211 - 5 du code des procédures civiles exécution :

- condamner solidairement la SARL Joanteguy, la SARL SN Métal Adour et la SAS Metalki ou l'une à défaut de l'autre à lui payer la somme de 1'930'916,66 € (2'006'689,12 € - 75'772,46 €), en application notamment des articles L. 211 - 2 alinéa 1 et R. 211 - 5 du code des procédures civiles d'exécution,

- condamner solidairement la SARL Joanteguy, la SARL SN Métal Adour et la SAS Metalki ou l'une à défaut de l'autre à lui payer une juste indemnité de 15 000 € pour négligence fautive et/ou déclaration inexacte et mensongère, en application de l'article R. 211 - 5 du code des procédures civiles d'exécution,

- condamner solidairement la SARL Joanteguy, la SARL SN Métal Adour et la SAS Metalki ou l'une à défaut de l'autre à lui payer la somme de 6 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement la SARL Joanteguy, la SARL SN Métal Adour et la SAS Metalki ou l'une à défaut de l'autre aux entiers dépens de première instance ainsi que de la procédure d'appel en ce compris le coût des procès-verbaux de saisie-attribution,

A titre subsidiaire, vu les article R. 211 - 6 et R. 211 - 9 du code des procédures civiles d'exécution,

- ordonner avant-dire droit à la SAS Metalki de communiquer, sous peine d'une astreinte de 500 € par jour de retard pour une durée de 30 jours, sa comptabilité détaillée listant les factures nominatives détaillées payées par elle à ses créanciers à compter du 16 février 2018 (date de la première saisie attribution) jusqu'au 14 mai 2018 (date du jugement du tribunal de commerce de Bayonne mettant en redressement judiciaire la SARL Atelier Indus Bât),

- ordonner avant-dire droit à la SARL Joanteguy de communiquer, sous peine d'une astreinte de 500 € par jour de retard pour une durée de 30 jours, sa comptabilité détaillée listant les factures nominatives détaillées payées par elle à ses créanciers à compter du 16 février 2018 (date de la première saisie attribution) jusqu'au 14 mai 2018 (date du jugement du tribunal de commerce de Bayonne mettant en redressement judiciaire la SARL Atelier Indus Bât),

- ordonner avant-dire droit à la SARL SN Métal Adour de communiquer, sous peine d'une astreinte de 500 € par jour de retard pour une durée de 30 jours, sa comptabilité détaillée listant les factures nominatives détaillées payées par elle à ses créanciers à compter du 16 février 2018 (date de la première saisie attribution) jusqu'au 14'mai 2018 (date du jugement du tribunal de commerce de Bayonne mettant en redressement judiciaire la SARL Atelier Indus Bât),

- dire et juger que l'instance sera poursuivie à l'initiative de la partie la plus diligente à l'expiration du délai fixé par la Cour d'Appel concernant la demande de communication précitée de la comptabilité sous astreinte de la SARL Joanteguy, de la SARL SN Métal Adour et de la SAS Metalki,

- réserver les dépens et les demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 29 mai 2020, au contenu desquelles il sera renvoyé pour l'énoncé du détail de l'argumentation, la SARL Joanteguy, la SARL SN Métal Adour et la SAS Metalki présentent les demandes suivantes :

A titre liminaire, vu les articles 783 et 784 du code de procédure civile,

- constater la tardiveté des conclusions de la SCI YL contenant des demandes nouvelles,

- déclarer les conclusions de la SCI YL signifiées en date du 18 mai 2020 irrecevables,

A défaut,

- révoquer l'ordonnance de clôture et déclarer recevables les présentes conclusions en réponse,

A titre principal, vu l'article 564 du code de procédure civile,

- déclarer irrecevables les demandes subsidiaires de communication sous astreinte comme constituant des demandes nouvelles au sens de l'article 564 du code de procédure civile,

Vu les articles L. 211 - 2 et R. 511-5 du code des procédures civiles d'exécution,

Vu le jugement du juge de l'exécution en date du 24 octobre 2019,

- débouter la SCI YL de l'ensemble de ses demandes,

- confirmer le jugement du 24 octobre 2019 dans l'ensemble de ses dispositions,

- condamner la SCI YL à verser à :

> la SARL Joanteguy la somme de 6 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

> la SARL SN Métal Adour la somme de 6000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

> la SAS Metalki la somme de 6000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.


MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'application des articles 783 et 784 du code de procédure civile

L'article 783 du code de procédure civile fixe le principe selon lequel aucune conclusion ne peut être déposée postérieurement à l'ordonnance de clôture, ni aucune pièce produite au débat, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, sauf exceptions limitativement énoncées.

L'article 784 vise les cas dans lesquels l'ordonnance de clôture peut être révoquée en précisant qu'elle peut l'être, notamment, après ouverture des débats, par décision motivée de la juridiction.

En l'espèce, l'appelante a procédé à la notification par voie dématérialisée, le 18 mai 2020, de conclusions récapitulatives. Dans ses écritures, précédant de 48 heures l'ordonnance de clôture, elle maintient et réitère les demandes principales qu'elle avait antérieurement formulées et présente une prétention subsidiaire visant à obtenir des tiers-saisis, les sociétés intimées, qu'elles produisent des éléments issus de leur comptabilité lui permettant de s'assurer qu'aucun paiement n'a été effectué par elles au profit de son débiteur, à une date postérieure aux mesures de saisies-attributions qu'elle a fait pratiquer entre leurs mains.

Les sociétés intimées y ont répondu par des écritures notifiées par voie dématérialisée le 29 mai 2020 en présentant des moyens et arguments de défense pour s'opposer à l'ensemble des prétentions adverses.

La tardiveté des écritures de l'appelante n'a donc pas mis en péril le principe du contradictoire à l'égard des sociétés intimées qui ont pu y répliquer.

En outre, par message RPVA en date du 3 juin 2020, le conseil de la société appelante, prenant acte de la récente noification des écritures des intimées postérieurement à la clôture, a indiqué que l'appelante les acceptait, en précisant être d'accord pour un rabat de l'ordonnance de clôture.

En conséquence, il convient de révoquer l'ordonnance de clôture et de reporter celle-ci au 29 juin 2020, jour de l'audience.

Sur l'application de l'article 564 du code de procédure civile

L'article 564 du code de procédure civile énonce qu''à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger des questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait'.

Toutefois, l'article 566 du même code prévoit que 'les parties peuvent aussi expliciter les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et ajouter à celles-ci toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément".

En l'espèce, la procédure engagée et poursuivie par la SCI YL vise à faire reconnaître que les tiers-saisis n'ont pas respecté les dispositions de l'article L. 211 - 2 du code des procédures civiles d'exécution qui prévoient qu'en matière de saisie-attribution, le tiers-saisi est personnellement débiteur des causes de la saisie dans la limite de son obligation.

Il résulte de cet article que l'acte de saisie emporte attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie disponible entre les mains du tiers.

La SCI YL, par le biais de sa demande subsidiaire visant à obtenir communication par les tiers-saisis de leur comptabilité entre le 16 février 2018 et le 14 mai 2018, entend vérifier qu'aucun paiement n'a pu être fait au profit de son débiteur en violation de cette disposition du code des procédures civiles d'exécution.

Cette demande doit donc bien être considérée, au regard des dispositions de l'article 566, comme étant l'accessoire ou le complément de sa demande principale puisqu'elle a pour but d'expliciter et conforter ses prétentions.

Celle-ci doit donc être déclarée, en la forme, recevable, et le moyen présenté par les sociétés intimées écarté.

Sur la demande principale

La SCI YL invoque, au soutien de ses demandes, les dispositions de l'article L. 211 - 2 du code des procédures civiles d'exécution pris en son premier alinéa, qui énoncent que ' l'acte de saisie emporte, à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée, attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie, disponible entre les mains du tiers ainsi que de tous les accessoires. Il rend le tiers personnellement débiteur des causes de la saisie dans la limite de son obligation."

Elle déclare également se fonder sur les dispositions de l'article R. 211 - 5 du même code qui prévoient que 'le tiers-saisi qui, sans motif légitime, ne fournit pas les renseignements prévus est condamné, à la demande du créancier, à payer les sommes dues à ce dernier sans préjudice de ce recours débiteur. Il peut être condamné à des dommages et intérêts en cas de négligence fautive ou de déclaration inexacte ou mensongère."

La SCI YL soutient que les tiers-saisis, dans les réponses fournies à l'huissier, se sont montrés défaillants pour indiquer le montant des sommes qu'ils devaient au débiteur saisi en s'abstenant de fournir aucune pièce justificative. Elle ajoute que les sociétés intimées, en leur qualité de tiers-saisis, par leur résistance abusive, lui ont causé un préjudice puisqu'elle n'a pu spontanément obtenir de leur part les fonds qui lui sont dus.

Ainsi qu'il résulte des procès-verbaux de saisie-attribution qui ont été régularisés en exécution de la décision du juge de l'exécution de Bayonne en date du 16 novembre 2017 :

- le 16 février 2018 à l'égard de la SARL Joanteguy, celle-ci a indiqué à l'huissier n'avoir pas encore reçu de la SARL Atelier Indus Bât, son fournisseur, les factures, signifiant ainsi qu'elle ignorait ce qu'elle lui devait,

- le même jour à la SARL SN Métal Adour, cette dernière a précisé à l'huissier: « Je tiendrai compte de la présente saisie »,

- le même jour à la SAS Metalki, cette dernière a répondu à l'huissier être débitrice d'une facture de 3901,20 €, qu'une autre devait lui parvenir prochainement et qu'elle tiendrait compte de la mesure de saisie.

Pour des raisons qu'elle n'explique pas, la SCI YL a de nouveau fait délivrer, le 13 mars 2018, un second procès-verbal de saisie-attribution à la SARL Joanteguy, procédant toujours de la même décision du juge de l'exécution de Bayonne en date du 16 novembre 2017. Le tiers-saisi a alors indiqué à l'huissier n'avoir rien à lui dire, ce qui ne signifie rien d'autre qu'une absence de déclaration.

Le second procès-verbal de saisie attribution régularisé le 12 mars 2018 à l'encontre de la SARL Joanteguy contient mention de ce que le tiers-saisi a déclaré tenir compte de cette mesure d'exécution.

Enfin, la même mesure pratiquée auprès de la SAS Metalki le même jour a amené de la part de celle-ci une réponse aux termes de laquelle elle indiquait à l'huissier tenir compte de cette saisie pour une facture venant à échéance le 15 avril 2018 dont elle entendait lui communiquer le montant par mail.

Contrairement à ce qui est soutenu par l'appelante, les réponses fournies à l'huissier par chacun des tiers-saisis ne caractérisent pas une volonté déterminée de ne pas fournir à celui-ci les renseignements demandés, ni une résistance abusive de leur part, ni même une négligence fautive ou encore des déclarations inexactes et mensongères.

Par ailleurs, il n'est pas davantage démontré que l'une ou l'autre des sociétés intimées s'est refusée à fournir des pièces justificatives dont l'huissier ne dit d'ailleurs pas qu'il les a réclamées.

Enfin, la SCI YL ne démontre pas le préjudice qu'elle affirme subir en raison de l'attitude qu'elle prête aux sociétés intimées.

En conséquence, il convient de confirmer la décision entreprise qui a débouté à juste titre la SCI YL de ses demandes principales.

Sur la demande subsidiaire

L'intimée demande, à titre subsidiaire, qu'il soit ordonné aux tiers-saisis, sous astreinte, de communiquer leur comptabilité détaillée et notamment les factures nominatives payées à leurs créanciers, entre le 16 février 2018, date de la première saisie-attribution pratiquée sur sa demande, jusqu'au 14 mai 2018, date à laquelle le tribunal de commerce de Bayonne a placé la SARL Atelier Indus Bât, sa débitrice, en redressement judiciaire.

Les articles R. 211 - 6 et R. 211 - 9 du code des procédures civiles d'exécution visés par la SCI YL au soutien de ses demandes ne peuvent recevoir application puisque ces dispositions traitent de la manière dont le tiers-saisi procède au paiement des sommes dues ou de la compétence du juge de l'exécution pour trancher des contestations en cas de refus de paiement par le tiers-saisi des sommes dont il a été jugé débiteur ou qu'il a reconnu devoir.

Si l'article R. 211 - 4 du même code prévoit toutefois que le tiers-saisi doit fournir à l'huissier les renseignements prévus à l'article L. 211 - 3 et communiquer les pièces justificatives, il s'agit uniquement des documents se rapportant à l'étendue de ses obligations à l'égard de son créancier, le débiteur poursuivi.

La production et la communication à un tiers de l'ensemble des factures que les sociétés intimées ont pu être amenées à payer à leurs créanciers entre le 16 février et le 14 mai 2018 excèdent manifestement les limites fixées par les dispositions légales et réglementaires du code des procédures civiles d'exécution. En outre, cette demande, dans son étendue, est de nature à heurter le principe de confidentialité qui s'attache au monde des affaires.

Par ailleurs, la SCI YL ne justifie en aucune façon de la suspicion qu'elle nourrit à l'égard des parties intimées au titre d'un quelconque réglement effectué par celles-ci au profit de son débiteur qui pourrait justifier une mesure de la nature de celle qu'elle sollicite.

La SCI YL est en conséquence déboutée de cette demande.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les entiers dépens de l'instance seront assumés par la SCI YL.

Elle sera également tenue de verser à chacune des parties intimées une indemnité de 1000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.


PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Ordonne le rabat de l'ordonnance de clôture et fixe celle-ci au jour de l'audience, soit le 29 juin 2020,

Confirme le jugement du juge de l'exécution de Bayonne en date du 24 octobre 2019,

Déboute la SCI YL de ses demandes,

Condamne la SCI YL aux entiers dépens de l'instance,

Condamne la SCI YL à verser à chacune des parties intimées une indemnité de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Marc MAGNON, Conseiller faisant fonction de Président, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,

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