COUR D ' APPEL D ' ORLÉANS
CHAMBRE SOCIALE
PRUD'HOMMES
GROSSES le 29 SEPTEMBRE 2011 à
Me François ...
Me Alexis ...
Nadine Z
COPIES le 29 SEPTEMBRE 2011 à
Olivier Y
CGEA DE RENNES
ARRÊT du 29 SEPTEMBRE 2011
N° 550/11 - N° RG 10/02989
DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOURS en date du 08 Juillet 2010 - Section ACTIVITÉS DIVERSES
ENTRE
APPELANT
Monsieur Olivier Y
né le 01 Juin 1975
Jardin du Vallon 2 - ESVRES
représenté par Maître François RABY, avocat au barreau de TOURS
ET
INTIMÉ
Maître Z Nadine ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL GUARDS PROTECT
TOURS CEDEX 1
non comparante, ni représentée
PARTIE INTERVENANTE
CGEA DE RENNES
RENNES CEDEX
représenté par Maître Alexis LEPAGE, avocat au barreau de TOURS substitué par Maître Maryline SIMONNEAU, avocat au barreau de TOURS
Après débats et audition des parties à l'audience publique du 30 Juin 2011
LA COUR COMPOSÉE DE
Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre,
Monsieur Pierre LEBRUN, Conseiller,
Madame Catherine PAFFENHOFF, Conseiller,
Assistés lors des débats de Madame Valérie LATOUCHE, Greffier.
Puis ces mêmes magistrats ont délibéré dans la même formation et le 29 Septembre 2011, Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre, assisté de Madame Valérie LATOUCHE, Greffier, a rendu l'arrêt par mise à disposition au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
RÉSUMÉ DES FAITS et DE LA PROCÉDURE
Monsieur Olivier Y a été recruté par la SARL GUARDS PROTECT SÉCURITÉ PRIVÉE à compter du 23 mai 2005, en qualité d'agent de sécurité, niveau II, échelon un, coefficient 110, dans le cadre d'un contrat de travail à temps partiel écrit de 18 heures hebdomadaires.
Un premier avenant du 1er septembre 2005 a fixé la durée hebdomadaire de travail à 20 heures, uniquement pour le mois de septembre 2005, et un deuxième avenant a réduit la durée de ce travail hebdomadaire à 3 heures, qui devait être exécuté le dimanche de 9h30 à 12h30 à compter du 1er octobre 2005.
Une transaction a été signée entre les parties le 17 avril 2007, moyennant le paiement d'une indemnité de 2.000 euros, puis le 14 avril 2008, le salarié a été convoqué à un entretien préalable au licenciement prévu pour le 24 avril 2008.
Cependant, le 13 juin 2008, il a pris acte de la rupture de son contrat de travail et a saisi, le 1er décembre suivant, le conseil de prud'hommes de TOURS, en sa section des activités diverses contre son ancien employeur pour qu'il soit jugé
- que le contrat de travail était à temps complet à compter du 23 mai 2005,
- que la transaction conclue le 17 avril 2007 est nulle,
- que la rupture du contrat de travail est imputable à l'employeur,
- et que soient inscrites au passif de la liquidation judiciaire de la société les sommes suivantes
· 25.338,15 euros de rappel de salaires pour la période du 23 mai 2005 à avril 2007,
· 2.533,81 euros de congés payés afférents,
· 2.642,04 euros d'indemnité de préavis,
· 264,20 euros d'indemnité compensatrice de congés payés,
· 378,11 euros d'indemnité de licenciement,
· 1.321,02 euros d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,
· 10.000 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le liquidateur judiciaire de la société n'a pas conclu et le CGEA de RENNES a sollicité le rejet pur et simple de toutes les demandes de l'ancien salarié.
Par jugement du 8 juillet 2010, ce conseil de prud'hommes a annulé la transaction du 17 avril 2007, débouté le salarié du surplus de ses demandes et a mis à la charge des parties les dépens par moitié.
Le 1er octobre 2010, celui-ci a interjeté appel.
DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES
1°) Ceux du salarié appelant
Il conclut à l'infirmation de toutes les dispositions du jugement contesté et reprend ses demandes initiales devant le conseil de prud'hommes ainsi qu'une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il souhaite également que lui soient remis les documents habituels de rupture dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte provisoire de 50 euros par document et par jour de retard, la cour devant se réserver la faculté de liquider l'astreinte.
En premier lieu, il soutient la nullité de la transaction du 17 avril 2007, parce qu'elle est antérieure à la rupture du contrat de travail et que l'employeur n'a consenti aucune concession réelle, en sorte qu'il n'y a pas eu de transaction valable, la somme arrêtée restant très inférieure au montant des seules créances salariales qui devaient lui être réglées au titre de la relation de travail.
Il expose que la requalification en contrat de travail à temps complet s'impose pour la période du 23 mai 2005 au 17 avril 2007 dans la mesure où le contrat de travail était verbal jusqu'au 17 avril 2007 et que la preuve d'un contrat de travail à temps partiel écrit n'est pas rapportée.
Il met en valeur que la prise d'acte de rupture prend les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse alors que l'employeur l'a maintenu dans une disposition permanente à son service durant de nombreux mois, tout en lui assurant un travail réduit au strict minimum, l'a soumis à une transaction dans des conditions répréhensibles et a manqué à son obligation essentielle de fourniture de travail pendant de nombreux mois, ce qui constitue un manque flagrant à l'obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail.
2°) Ceux du CGEA de RENNES
Il conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il a procédé à l'annulation de la transaction, en toute hypothèse, au rejet de toutes les demandes du salarié et, à titre subsidiaire, à la réduction à de plus justes proportions des éventuelles indemnités qui pourraient lui être allouées.
Il soutient que la transaction du 17 avril 2007 a autorité de la chose jugée entre les parties et, relativement à tout litige en relations avec le contrat de travail, en sorte qu'il ne peut prétendre à quoi que ce soit pour la période antérieure à la fin des relations contractuelles, alors que, par ailleurs, il ne justifie en rien des sommes qu'il réclame. Selon lui, aucune pièce ne justifie le manquement de la part de l'employeur qui puisse justifier la prise d'acte.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La notification du jugement est intervenue le 4 septembre 2010, en sorte que l'appel, régularisé au greffe de cette cour le 1er octobre suivant, dans le délai légal d'un mois, s'avère recevable en la forme.
1°) Sur la requalification du contrat de travail en temps complet
Il convient de statuer en premier lieu sur la requalification pour asseoir par la suite un raisonnement quant à la transaction conclue.
L'article L 3123-14 du code du travail dispose que le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit qui mentionne la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.
La jurisprudence constante, en application de cet article, considère que l'absence de clause prévoyant la répartition des heures de travail entre les jours de la semaine et la semaine du mois fait présumer que l'emploi est à temps complet et que l'employeur, qui conteste cette présomption, doit rapporter la preuve, d'une part, qu'il s'agissait d'un emploi à temps partiel et, d'autre part, que le salarié n'était pas dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était pas dans l'obligation de se tenir à la disposition de son employeur.
Or, l'article quatre du contrat de travail du 23 mai 2005, lu et approuvé par le salarié, stipule que l'horaire de travail est déterminé selon les nécessités du service et des postes d'affectation, que l'intéressé peut être appelé à travailler de jour, de nuit, les samedis et dimanches et jours de fête et que la société pourra modifier l'horaire de l'intéressé, le changer d'équipe ou lui demander l'exécution d'heures supplémentaires, dans les limites légales sous réserve d'observation du délai de prévenance réglementaire, l'horaire hebdomadaire étant de 18 heures.
Il en ressort que la présomption d'emploi à temps complet n'est pas utilement combattue par le liquidateur qui ne fournit aucune pièce à cet égard, au moins jusqu'au 1er septembre 2005, en conséquence de quoi la requalification du contrat de travail à temps partiel devra intervenir pour un temps complet du 23 mai 2005 au 31 août 2005.
En effet, deux avenants sont intervenus, dont rien ne prouve qu'ils ont été antidatés comme le suggère le salarié
- le 1er septembre 2005, Monsieur Y signe un avenant comportant une durée totale de travail ramenée à 90 heures par mois soit 20 heures par semaine, répartie entre les jours de la semaine, les mercredis,jeudis et vendredis de 15 heures à 19 heures, le samedi de 14 heures à 19 heures et le dimanche de 9h30 à 12h30,
- le 1er octobre 2005, il approuve, après l'avoir lu, un second avenant qui réduit partiellement la durée habituelle de travail pour la cantonner au dimanche de 9h30 à 12h30 soit 13 heures par mois et 3 heures par semaine.
Ces deux avenants n'encourent pas le reproche porté aux dispositions du contrat de travail initial et les pièces fournies par le salarié réduites aux seuls bulletins de salaire ne démontrent pas qu'il ait accompli, à partir du 1er septembre 2005, davantage d'heures que celles inscrites sur les deux avenants, les heures supplémentaires ayant été normalement rémunérées.
À cet égard, il n'y a pas lieu de tenir compte d'une mention ambiguë, répétée sur les bulletins de paie qui ont inscrit des heures d'absences par rapport à un horaire mensuel, qui complique la lecture mais qui ne démontre absolument pas que l'intéressé ait accompli plus d'heures que celles fixées dans les avenants successifs.
Il s'ensuit que les sommes dues auraient pu être, selon le calcul du salarié de sa pièce 33, à hauteur de
2.566,96 euros du 23 mai au 1er septembre 2005, outre 256,69 euros pour les congés payés afférents. 2°) Sur l'exception de nullité de la transaction du 17 avril 2007
L'article 2044 alinéa 1 du Code civil dispose que la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître.
La nullité d'une transaction résultant de ce qu'elle a été conclue avant la notification du licenciement est un nullité relative instituée dans l'intérêt du salarié.
En l'espèce, le salarié n'a pris acte de la rupture de son contrat de travail que le 13 juin 2008 et il résulte de ce qui précède que la transaction ne pouvait comporter des clauses concernant la rupture future du contrat de travail. Cependant, elle reste valable pour le passé et il est essentiel pour la validité de cette transaction qu'il existe des concessions réciproques.
L'article 1 précise que la transaction a pour objet de régler, de façon amiable et irrévocable tout différend en relation avec le contrat de travail existant entre les parties et, plus particulièrement, les conséquences juridiques et pécuniaires.
L'article deux énonce que la société est disposée à verser au salarié 2.000 euros à titre d'indemnité forfaitaire, globale et définitive, toutes causes de préjudices confondus, celui-ci acceptant à titre de solde de tout compte.
Il est clair, ainsi,
- d'une part, que Monsieur Y a renoncé à un procès prud'homal pour revendiquer les sommes dues avant le 17 avril 2007 que la cour a évaluées plus haut à 2.566,96 euros et 256,69 euros de congés payés afférents
- d'autre part, que la société a accepté de lui verser une indemnité forfaitaire, définitive et globale de 2.000 euros.
La cour est ainsi en état d'en conclure qu'il existait des concessions réciproques appréciables, en conséquence de quoi la transaction doit être considérée comme valable. Il s'ensuit que toutes les revendications de salaires antérieurs au 17 avril 2007 doivent être rejetées puisque la transaction a fait la loi des parties de manière définitive.
3°) Sur l'effet de la prise d'acte de rupture du 13 juin 2008
Le salarié expose " je n'ai pas eu de planning de travail depuis le 30 mars dernier. D'autre part, je découvre que je n'ai pas toujours été déclaré, lorsque je travaillais pour votre compte, les cotisations sociales n'ont pas été toujours payées, il a fallu que je travaille selon les disponibilités que vous me demandiez, donc je prends acte de la rupture de mon contrat de travail. "
La prise d'acte de rupture d'un contrat travail prend les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si le salarié justifie de manquements graves de l'employeur et,à défaut, d'une démission pure et simple du salarié.
En l'occurrence, Monsieur Y ne justifie d'aucune des allégations contenues dans sa lettre de prise d'acte, alors que,par ailleurs, la transaction éteint tout litige pour la rédaction défectueuse du contrat de travail initial jusqu'au 1er septembre 2005. Dans ces conditions, il convient de considérer que la prise d'acte de rupture du 13 juin 2007 doit s'analyser comme une démission pure et simple. Toutes les demandes du salarié à cet égard concernant l'indemnité de préavis et les congés payés, l'indemnité de licenciement, les dommages-intérêts pour licenciement abusif et non-respect de la procédure devront donc être repoussées comme mal fondées.
Dans la mesure où le salarié appelant succombe dans l'intégralité de ses prétentions il devra supporter les dépens de première instance et d'appel et voir rejetée sa demande de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Enfin, il sera simplement rappelé que le redressement judiciaire est intervenu le 22 novembre 2005, tandis que la liquidation judiciaire a été prononcée le 28 avril 2009, en raison de la résolution du plan.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par mise à disposition au greffe et par arrêt réputé contradictoire,
REÇOIT en la forme, l'appel de Monsieur Olivier Y,
AU FOND, CONFIRME le jugement critiqué (conseil de prud'hommes de TOURS, section activités diverses, le 8 juillet 2010) sur le débouté de toutes les demandes du salarié,
MAIS L'INFIRME POUR LE SURPLUS et, statuant à nouveau,
REJETTE l'exception de nullité de la transaction du 17 avril 2007 et LA DÉCLARE valable pour les litiges entre les parties antérieurs à cette date,
DÉBOUTE les parties de toutes leurs demandes complémentaires,
DÉCLARE cet arrêt opposable au CGEA de RENNES dans les limites et plafonds prévus par le code du travail,
CONDAMNE le salarié aux dépens de première instance et d'appel.
Et le présent arrêt a été signé par le Président de Chambre et par le Greffier
Valérie ... Daniel VELLY