Jurisprudence : Cass. crim., 26-02-2025, n° 24-86.851, F-B, Cassation

Cass. crim., 26-02-2025, n° 24-86.851, F-B, Cassation

A44346ZA

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2025:CR00389

Identifiant Legifrance : JURITEXT000051284100

Référence

Cass. crim., 26-02-2025, n° 24-86.851, F-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/116446207-cass-crim-26022025-n-2486851-fb-cassation
Copier

Abstract

Lorsque la chambre des appels correctionnels, saisie de la contestation d'une décision du procureur de la République de reconnaissance et d'exécution en France d'une condamnation à une peine ou une mesure de sûreté privative de liberté prononcée par un Etat membre de l'Union européenne, envisage d'opposer l'un des motifs de refus prévus aux 1° à 4°, 7°, 10° et 11°, de l'article 728-32 ou au 1° de l'article 728-33 du code de procédure pénale, elle doit en informer l'autorité compétente de l'Etat de condamnation s'il n'a pas déjà été procédé à cette information par le procureur de la République, et ce afin de permettre à ladite autorité de fournir, le cas échéant, toutes informations complémentaires


N° Z 24-86.851 F-B

N° 00389


RB5
26 FÉVRIER 2025


CASSATION PARTIELLE


M. BONNAL président,


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 26 FÉVRIER 2025



Le procureur général près la cour d'appel de Rennes a formé un pourvoi contre l'arrêt de ladite cour d'appel, 12e chambre, en date du 19 novembre 2024, qui a prononcé sur la contestation formée par M. [X] [Z] d'une décision de reconnaissance et d'exécution d'une peine prononcée par une juridiction d'un autre Etat membre.


Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Leprieur, conseiller, et les conclusions de M. Fusina, avocat général, après débats en l'audience publique du 26 février 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Leprieur, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Les autorités judiciaires roumaines ont décerné, le 15 mars 2022, à l'encontre de M. [X] [Z], de nationalité roumaine, un mandat d'arrêt européen aux fins d'exécution de deux peines d'emprisonnement sur le fondement d'une sentence pénale n° 30 du 12 février 2021, rendue par le tribunal d'instance de Vânju Mare, devenue définitive par arrêt pénal n° 238 du 18 février 2022, rendu par la cour d'appel de Craiova :

- une peine de deux ans d'emprisonnement pour conduite d'un véhicule sur la voie publique sans être titulaire d'un permis de conduire ;

- un reliquat de peine d'emprisonnement de mille trois cent trente et un jours, suite à la révocation d'une libération conditionnelle afférente à une peine de seize ans d'emprisonnement prononcée du chef d'homicide volontaire, le 31 octobre 2002, par le tribunal de Mehedinti, devenue définitive par sentence pénale du 20 janvier 2004 de la Haute Cour de cassation et de justice.

3. L'intéressé a été interpellé le 3 mai 2023. Il n'a pas consenti à sa remise.

4. Par arrêt du 19 mai 2023, la chambre de l'instruction, après avoir retenu qu'il n'existait aucun motif de refus obligatoire du mandat d'arrêt européen, a, s'agissant du motif de refus facultatif de l'article 695-24, 2°, du code de procédure pénale🏛🏛, ordonné, avant-dire-droit, un supplément d'information, invité les autorités judiciaires roumaines à indiquer si elles refusaient ou envisageaient une demande aux fins de reconnaissance et d'exécution de la condamnation sur le territoire français et invité le procureur de la République à préciser s'il entendait susciter la transmission par les autorités roumaines d'une telle demande.

5. Les autorités roumaines ont adressé une requête officielle aux fins de reconnaissance et d'exécution des deux peines sur le territoire français, accompagnée du certificat, daté du 2 février 2024, prévu par l'article 4 de la décision-cadre 2008/909/JAI du Conseil du 27 novembre 2008.

6. Le procureur de la République a rendu le 23 septembre 2024 une décision de reconnaissance de la décision de condamnation n° 30 du 12 février 2021 prononcée par le tribunal d'instance de Vânju Mare, restée définitive par la décision pénale n° 238 du 18 février 2022, prononcée par la cour d'appel de Craiova, comme étant exécutoire sur le territoire français. Il a ordonné la mise à exécution de la peine de deux ans d'emprisonnement et du reliquat de peine de mille trois cent trente et un jours.

7. M. [Z] a formé un recours, sur le fondement de l'article 728-48 du code de procédure pénale🏛.


Examen du moyen

Enoncé du moyen

8. Le moyen est pris de la violation des articles 728-32, 728-33, 728-37 à 40, 728-42 à 44 et 728-52 du code de procédure pénale🏛🏛🏛🏛🏛🏛🏛.

9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à reconnaissance de la décision de condamnation n° 30 du 12 février 2021 prononcée par le tribunal d'instance de Vânju Mare, restée définitive par la décision pénale n° 238 du 18 février 2022 prononcée par la cour d'appel de Craiova, comme étant exécutoire sur le territoire français en ce qu'elle ordonne la mise à exécution de mille trois cent trente et un jours de détention au titre de la révocation d'une libération conditionnelle dont aurait bénéficié M. [Aa], et a reconnu pour le surplus la décision précitée en ce qu'elle condamne ce dernier à une peine de deux ans d'emprisonnement, alors :

1°/ que le refus de reconnaissance et d'exécution d'une peine sur le territoire national doit être motivé au regard des articles 728-32 et 728-33 du code de procédure pénale ;

2°/ que lorsqu'un tel refus est envisagé, l'autorité d'exécution est tenue d'informer l'autorité de condamnation en amont de sa décision pour lui permettre de fournir toutes informations supplémentaires.


Réponse de la Cour

Vu l'article 728-52 du code de procédure pénale :

10. Il résulte de ce texte que, lorsque la chambre des appels correctionnels, saisie de la contestation d'une décision du procureur de la République de reconnaissance et d'exécution en France d'une condamnation à une peine ou une mesure de sûreté privative de liberté prononcée par un Etat membre de l'Union européenne, envisage d'opposer l'un des motifs de refus prévus aux 1° à 4°, 7°, 10° et 11° de l'article 728-32 ou au 1° de l'article 728-33 du code de procédure pénale, elle doit en informer l'autorité compétente de l'Etat de condamnation s'il n'a pas déjà été procédé à cette information par le procureur de la République en application de l'article 728-40 du même code🏛, et ce afin de permettre à ladite autorité de fournir, le cas échéant, toutes informations complémentaires.

11. Pour dire n'y avoir lieu à reconnaissance de la décision de condamnation en ce qu'elle ordonne la mise à exécution de mille trois cent trente et un jours de détention au titre de la révocation d'une libération conditionnelle afférente à une condamnation pour meurtre, mais reconnaître la décision en ce qu'elle condamne M. [Z] à une peine de deux ans d'emprisonnement du chef de conduite sans permis, l'arrêt attaqué relève que, ni la décision de la Haute Cour de cassation et de justice, ni la décision n° 30 du 12 février 2021 prononcée le 18 février 2022 par le tribunal d'instance de Vânju Mare, pas plus qu'une décision ayant ordonné la libération conditionnelle, ne sont produites à la procédure.

12. Les juges ajoutent ne pas disposer des éléments leur permettant de savoir précisément si une libération conditionnelle a été accordée, le cas échéant dans quelles conditions, et par quelle juridiction cette libération conditionnelle aurait été expressément révoquée.

13. Ils soulignent qu'il convient d'être particulièrement vigilant sur les causes et titres de détention.

14. Ils en concluent, se fondant sur l'article 728-32,1°, du code de procédure pénale🏛, qu'il n'y a pas lieu de reconnaître la mise à exécution de la décision de condamnation n° 30 du 12 février 2021 prononcée par le tribunal d'instance de Vânju Mare, rendue définitive par la décision pénale n° 238 du 18 février 2022 prononcée par la cour d'appel de Craiova, de mille trois cent trente et un jours de détention au titre de la révocation d'une libération conditionnelle.

15. Ils décident de reconnaître en revanche lesdits jugement et arrêt en ce qu'ils ont prononcé à l'encontre de M. [Z] une peine de deux ans d'emprisonnement.

16. En statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.

17. En effet, envisageant un cas de refus prévu au 1° de l'article 728-32 du code de procédure pénale, elle devait en informer l'autorité compétente de l'Etat de condamnation afin de lui permettre de fournir, le cas échéant, toutes informations supplémentaires, dès lors qu'il n'avait pas déjà été procédé à cette information par le procureur de la République.

18. La cassation est par conséquent encourue, sans qu'il y ait lieu d'examiner l'autre grief.

Portée et conséquences de la cassation

19. La cassation sera limitée aux dispositions de l'arrêt disant n'y avoir lieu de reconnaître la condamnation à la peine de mille trois cent trente et un jours de détention au titre de la révocation d'une libération conditionnelle. Les autres dispositions seront donc maintenues.



PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Rennes, en date du 19 novembre 2024, mais en ses seules dispositions relatives à l'exécution de la peine de mille trois cent trente et un jours de détention au titre de la révocation d'une libération conditionnelle, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Rennes et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille vingt-cinq.

Agir sur cette sélection :

Cookies juridiques

Considérant en premier lieu que le site requiert le consentement de l'utilisateur pour l'usage des cookies; Considérant en second lieu qu'une navigation sans cookies, c'est comme naviguer sans boussole; Considérant enfin que lesdits cookies n'ont d'autre utilité que l'optimisation de votre expérience en ligne; Par ces motifs, la Cour vous invite à les autoriser pour votre propre confort en ligne.

En savoir plus