Jurisprudence : CE Contentieux, 30-12-1998, n° 170959

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 170959

SOCIETE SETIC

Lecture du 30 Decembre 1998

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Le Conseil d'Etat statuant au Contentieux, (Section du contentieux, 9ème et 8ème sous-sections réunies),
Sur le rapport de la 9ème sous-section, de la Section du Contentieux,

Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE SETIC, dont le siège social est 6, rue des Halles à Paris (75001), représentée par son président-directeur général en exercice ; la SOCIETE SETIC demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir le paragraphe 18 de l'instruction 4 H-4-86 de la Direction générale des impôts du 21 février 1986, relatif au "report en arrière" des déficits, prévu par l'article 220 quinquies du code général des impôts, selon lequel les déficits existant à la clôture d'un exercice que l'entreprise n'a pas reportés en arrière ne peuvent faire l'objet que d'un report en avant sur les bénéfices ultérieurs ; 2°) d'annuler la décision de l'administration du 26 janvier 1995 annulant sa créance de 4 529 365 F sur le Trésor Public ; 3°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 10 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. Bonnot, Conseiller d'Etat, - les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SOCIETE SETIC, - les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes des troisième et quatrième alinéas du I de l'article 209 du code général des impôts, relatif à la détermination des bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés : "Sous réserve de l'option prévue à l'article 220 quinquies, en cas de déficit subi pendant un exercice, ce déficit est considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice. Si ce bénéfice n'est pas suffisant pour que la déduction puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur les exercices suivants jusqu'au cinquième exercice qui suit l'exercice déficitaire... La limitation du délai de report prévue à l'alinéa précédent n'est pas applicable à la fraction du déficit qui correspond aux amortissements régulièrement comptabilisés mais réputés différés en période déficitaire..." ; qu'aux termes de l'article 220 quinquies du même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : "I. Par dérogation aux dispositions des troisième et quatrième alinéas du I de l'article 209, le déficit constaté au titre d'un exercice ouvert à compter du 1er janvier 1984 par une entreprise soumise à l'impôt sur les sociétés peut, sur option, être considéré comme une charge déductible du bénéfice de l'antépénultième exercice et, le cas échéant, de celui de l'avantdernier exercice puis de celui de l'exercice précédent, dans la limite de la fraction non distribuée de ces bénéfices et à l'exclusion des bénéfices exonérés en application des articles 44 sexies, 44 septies et 207 à 208 sexies ou qui ont ouvert droit au crédit d'impôt prévu aux articles 220 quater et 220 quater A ou qui ont donné lieu à un impôt payé au moyen d'avoirs fiscaux ou de crédits d'impôts. Cette option porte, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1985, sur les déficits reportables à la clôture d'un exercice en application des troisième et quatrième alinéas du I de l'article 209. Le déficit imputé dans les conditions prévues au premier alinéa cesse d'être reportable sur les résultats des exercices suivant celui au titre duquel il a été constaté. L'excédent d'impôt sur les sociétés résultant de l'application du premier alinéa fait naître au profit de l'entreprise une créance égale au produit du déficit imputé dans les conditions prévues au même alinéa par le taux de l'impôt sur les sociétés applicable à l'exercice déficitaire... IV. Un décret fixe les conditions d'application du présent article, notamment les obligations déclaratives des entreprises..." ; que le I. de l'article 46 quater-OW de l'annexe III au code général des impôts, pris pour l'application de ces dispositions, précise que "l'entreprise qui exerce l'option prévue au premier alinéa du I. de l'article 220 quinquies du code général des impôts doit joindre à la déclaration de résultat de l'exercice au titre duquel cette option a été exercée, une déclaration conforme au modèle fixé par l'administration..." ; que l'article L. 171 A du livre des procédures fiscales dispose que "pour l'application de l'article 220 quinquies du code général des impôts, l'administration est fondée à vérifier l'existence et la quotité de la créance et à en rectifier le montant..." ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SOCIETE SETIC asouscrit une déclaration d'option, jointe à la déclaration de son résultat de l'exercice clos le 31 décembre 1993, pour le "report en arrière", prévu par le I de l'article 220 quinquies du code général des impôts, du déficit fiscal constaté au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1992, reportable sur l'exercice suivant ; qu'ayant procédé à la vérification de la créance de 4 529 365 F dont, par cette déclaration, valant réclamation au sens de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, la société entendait solliciter le remboursement, l'administration ne l'a pas admise ;

Considérant que les déficits sur lesquels peut porter l'option de "report en arrière" prévue par le I de l'article 220 quinquies du code général des impôts, s'entendent, non seulement du déficit né au cours de l'exercice au titre duquel cette option est exercée, mais aussi des déficits des exercices antérieurs qui sont reportables à la clôture de cet exercice en vertu des troisième et quatrième alinéas précités du I de l'article 209 du même code ; qu'en indiquant, dans le paragraphe 18 de l'instruction du 4-H-4-86 de la direction générale des impôts du 21 février 1986, publiée au bulletin officiel de la direction générale des impôts, qu'"à défaut d'option, à la clôture d'un exercice, les déficits qui existent à cette date et que l'entreprise n'a pas reportés en arrière ne peuvent faire l'objet que d'un report en avant sur des bénéfices ultérieurs", le ministre chargé du budget ne s'est pas borné à donner une interprétation de la disposition législative précitée, mais en a illégalement restreint la portée ; que, dès lors, la SOCIETE SETIC est à la fois recevable et fondée à demander l'annulation des dispositions de caractère réglementaire, prises par une autorité incompétente, du paragraphe 18 précité de l'instruction du 21 février 1986, que l'administration a opposées à son option pour le "report en arrière" des résultats déficitaires de son exercice clos le 31 décembre 1992 ;

Considérant que le litige fiscal né du rejet de cette option relève de la compétence, en premier ressort, non du Conseil d'Etat, mais, par application des dispositions combinées de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales et des articles R. 4 et R. 46 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, du tribunal administratifde Paris ; qu'il y a donc lieu de renvoyer à ce tribunal le jugement des conclusions et la requête de la SOCIETE SETIC qui sont dirigées contre la décision du 26 janvier 1995 par laquelle l'administration a prononcé ce rejet ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, de condamner l'Etat à payer à la SOCIETE SETIC la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le paragraphe 18 de l'instruction 4 H-4-86 de la Direction générale des impôts du 21 février 1986 est annulé.

Article 2 : Le jugement du surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE SETIC est renvoyé au tribunal administratif de Paris.

Article 3 : L'Etat paiera à la SOCIETE SETIC une somme de 10 000 F, au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE SETIC et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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