Jurisprudence : Cass. civ. 3, 20-04-2023, n° 22-14.391, F-D, Cassation

Cass. civ. 3, 20-04-2023, n° 22-14.391, F-D, Cassation

A76989Q8

Référence

Cass. civ. 3, 20-04-2023, n° 22-14.391, F-D, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/95448299-cass-civ-3-20042023-n-2214391-fd-cassation
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Abstract

► Dans le cadre d'un prêt à usage d'un logement, le preneur est tenu aux dépenses ordinaires ayant pour objet le fonctionnement ou la conservation de la chose prêtée, et donc notamment aux charges de consommation d'eau.


CIV. 3

VB


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 avril 2023


Cassation partielle


Mme TEILLER, président


Arrêt n° 304 F-D

Pourvoi n° X 22-14.391


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 AVRIL 2023


La société de l'Europe, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° X 22-14.391 contre l'arrêt rendu le 2 février 2022 par la cour d'appel de Rennes (5e chambre), dans le litige l'opposant à M. [V] [U], domicilié [… …], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Gallet, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société civile immobilière de l'Europe, de la SCP Richard, avocat de M. [U], après débats en l'audience publique du 14 mars 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Gallet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Andrich, conseiller, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 2 février 2022), la société civile immobilière de l'Europe (la SCI), propriétaire d'un immeuble comportant des locaux à usage d'habitation, a mis un logement à disposition de M. [V] [U].

2. La SCI l'a assigné en reconnaissance d'un bail verbal et en paiement d'un arriéré de loyers et de charges.


Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première à troisième branches

Enoncé du moyen

3. La SCI fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors :

« 1°/ qu'en énonçant, pour débouter la SCI de l'Europe de ses demandes en paiement à titre de loyer ou d'une indemnité d'occupation, que "dans un courrier du 30 avril 2012 adressé au service des impôts, M. [L] [M], pour le compte de la SCI de l'Europe, signale les loyers perçus ; force est de constater que [V] [M] y apparaît comme un associé qui bénéficie de la jouissance gratuite de tout ou partie des immeubles de la société" et que "ce document est suffisant pour juger que l'occupation du logement par M. [V] [U] était à titre gratuit (en ce compris les charges)", quand ce courrier se bornait à dresser une note explicative des loyers perçus par la SCI de l'Europe, mentionnait uniquement le nom de M. [V] [U] dans le tableau des "locataires au 1er janvier de l'année" (courrier de M. [Aa] [M] du 30 avril 2012) et ne faisait état, à aucun moment, d'une quelconque occupation à titre gratuit du logement par M. [V] [M], la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce courrier et méconnu l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

2°/ que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que, dans ses écritures d'appel, la SCI de l'Europe se prévalait d'un courrier en date du 11 juin 2013 aux termes duquel M. [V] [U] avait reconnu le caractère onéreux de son occupation ; qu'en se bornant à énoncer, pour débouter la SCI de l'Europe de ses demandes en paiement à titre de loyer ou d'une indemnité d'occupation et retenir que l'occupation du logement était à titre gratuit, que les attestations versées au dossier n'étaient pas probantes, sans analyser le courrier du 11 juin 2013 par lequel M. [V] [U] avait affirmé que "l'accord oral qui avait été convenu entre nous était l'occupation à titre gratuite de cet appartement en contrepartie, pour vous-même et à votre profit, de la somme de 300 euros", démontrant par là-même le caractère onéreux de l'occupation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile🏛 ;

3°/ que la preuve d'un bail verbal ayant reçu un commencement d'exécution peut être rapportée par témoins ; qu'en déniant toute valeur probante aux attestations produites par la SCI de l'Europe pour établir l'existence d'un bail verbal parce qu'elles "émanent des frères et soeurs de M. [L] [U], gérant de la SCI, et sont donc pour le moins subjectives", cependant que le litige s'inscrivait dans un contexte familial et que les déclarants, qui étaient les frères et soeurs de M. [L] [U], étaient également ceux de M. [V] [U], la cour d'appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard de l'article 1715 du code civil🏛. »


Réponse de la Cour

4. La cour d'appel a relevé, par une interprétation souveraine exclusive de dénaturation, de la déclaration de revenus locatifs adressée par le gérant de la SCI aux services fiscaux, que l'ambiguïté née du rapprochement de ses termes rendait nécessaire, que M. [V] [U] y figurait comme un associé bénéficiant de la jouissance gratuite d'un logement.

5. Appréciant la portée des éléments soumis à son examen, et sans être tenue de s'expliquer sur les éléments qu'elle décidait d'écarter, elle a souverainement retenu le caractère non onéreux de la mise à disposition du logement .

6. Les griefs ne sont donc pas fondés.


Mais sur le moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

7. La SCI fait le même grief à l'arrêt, alors « que, subsidiairement, le prêt à usage est essentiellement gratuit ; que le preneur est néanmoins tenu aux dépenses ordinaires ayant pour objet le fonctionnement ou la conservation de la chose prêtée ; qu'en déboutant la SCI de l'Europe de sa demande en paiement d'une somme de 3 000 euros au titre de la consommation d'eau parce que "l'occupation du logement par M. [V] [U] était à titre gratuit", quand le caractère gratuit de l'occupation ne dispensait pas l'occupant de payer les dépenses ordinaires de fonctionnement, au titre desquelles figurait sa consommation d'eau, la cour d'appel a violé l'article 1876 du code civil🏛. »


Réponse de la Cour

Vu l'article 1876 du code civil :

8. Selon ce texte, le prêt à usage est essentiellement gratuit.

9. Pour rejeter la demande en paiement d'une certaine somme au titre de la consommation d'eau, l'arrêt retient que la gratuité de l'occupation du logement par M. [V] [U] s'étendait aux charges.

10. En statuant ainsi, alors que le preneur est tenu aux dépenses ordinaires ayant pour objet le fonctionnement ou la conservation de la chose prêtée, la cour d'appel a violé le texte susvisé.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande en paiement de la somme de 3 000 euros au titre de la consommation d'eau, l'arrêt rendu le 2 février 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;

Condamne M. [V] [U] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille vingt-trois.

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