MOTIFS DE L'ARRÊT
1) Sur la responsabilité de la société Saint Brieuc diagnostic
Le tribunal a retenu que'l'action des demandeurs contre la société Saint Brieuc diagnostic a un fondement délictuel et qu'ils doivent rapporter la preuve d'une faute, d'un lien de causalité et d'un préjudice, en application de l'
article 1240 du code civil🏛.
Puis le tribunal a rejeté la demande à l'encontre de la société Saint Brieuc diagnostic et son assureur au motif que la société Saint Brieuc diagnostic n'a pas commis de faute et qu'elle a suffisamment alerté les acquéreurs sur ses constatations et leurs conséquences éventuelles. Cependant, contrairement à ce que soutiennent les appelants, le tribunal n'a pas retenu que la faute de la société de traitement des bois exonère de sa responsabilité la société Saint Brieuc diagnostic. Le tribunal a écarté toute responsabilité de la société Saint Brieuc diagnostic.
La norme applicable au travail de la société Saint Brieuc diagnostic est la norme'NFP 03 200. Le diagnostiqueur doit procéder à un examen le plus complet possible, à tous les niveaux, des parties visibles et accessibles de l'immeuble afin de rechercher des indices sur les sols, murs, cloisons, plafonds et ensemble des bois, de présence d'agents de dégradation biologique du bois tels que des insectes xylophages et des champignons lignivores. Il doit également rechercher et examiner les zones favorables au développement des agents de dégradation biologique du bois (zones humides, branchements d'eau, arrivées et départs de fluides, regards, gaines, câblages, joints de dilatation, fissures, toitures...). Un examen particulier des éléments de bois en contact avec la maçonnerie doit être effectué ainsi qu'un examen des façades et ouvrages extérieurs faisant corps avec le bâti.
Il doit être relevé que la société Saint Brieuc diagnostic était également chargée de dresser le diagnostic relatif à la présence d'amiante, ce qui implique qu'elle était d'autant tenue d'être très attentive à l'état de la maison.
La société Saint Brieuc diagnostic, après avoir rappelé les objectifs du contrôle et les moyens d'investigation, a signalé les points suivants dans son rapport, s'agissant du rez-de-chaussée': pas de relevé supérieur à 15 % à l'humidimètre, sauf dans le cellier, la buanderie et le séjour où le relevé est supérieur à 22 %'; présence d'insectes ou traces d'insectes xylophages sur plusieurs portes et fenêtres et sur les bois d'oeuvre visibles anciens, notamment sur les planchers hauts du bureau et du séjour et sur le plancher bas, le soubassement, la porte et la cheminée du séjour'; traces d'humidité à proximité des fenêtres de la salle à manger et du bureau et traces d'infiltration dans l'embrasure du pignon dans le séjour.
Dans le reste de la maison la société Saint Brieuc diagnostic n'a pas relevé de taux d'humidité supérieur à 10 % sauf dans les combles des étages 1 et 3 (humidité supérieure à 22 %). Elle a relevé des traces d'humidité sur un palier et dans une chambre du 2ème étage, à proximité des fenêtres.
Elle n'a relevé aucune présence d'insectes à larve xylophage ou de champignons lignivores dans le reste de la maison, sauf la présence d'insectes à larve xylophage sur le premier palier, dans les combles du 1er étage (sur la charpente), sur le palier du 2ème étage (sur l'escalier en bois), dans une chambre et une salle d'eau du 2ème étage et dans les combles du 3ème étage.
S'agissant des combles du 1er étage, elle a signalé une humidité au taux de 22 % dans les murs et la volige, à proximité des tabatières, la présence d'échauffures et d'insectes à larve xylophage sur les bois d'oeuvre de la charpente et la présence de champignons de pourriture fibreuse sur la volige.
Puis, dans un paragraphe intitulé «'Devoir de conseil'» elle a, outre des généralités sur les conséquences d'une humidité du bois supérieure à 18 % sur le développement de champignons et les conditions de développement des champignons lignivores, mentionné'la déformation des planchers bois, indiqué que l'étanchéité était à corriger ou surveiller au niveau des fenêtres, de la toiture et du plancher d'une salle de bain.
Elle a également précisé que les traces d'insectes à larve xylophage constatées démontrent qu'il y a eu présence et activité d'agents de dégradation biologique des bois et qu'au jour du constat, aucune activité, ni indice d'activité n'a été décelée sur les zones repérées et qu'il convient de veiller à l'absence de reprise d'activité. Elle a préconisé de se rapprocher d'entreprises spécialisées pour corriger l'ensemble des désordres constatés afin d'éviter de futures pathologies et traiter le développement des agents de dégradation biologique sur les bois attaqués.
Les époux [Aa] se sont adressés à la société INS Bretagne, qui a proposé un devis, à hauteur de 7291,25 euros TTC le 2 juin 2017, pour le traitement curatif des bois et des murs contre les attaques de champignons lignivores, dans le salon du rez-de-chaussée et deux chambres au 1er et 2ème étage.
Courant mai 2017, une entreprise chargée de la réalisation de travaux de rénovation par les époux [Aa] a découvert la présence de champignons lignivores au rez-de-chaussée, après avoir déposé une partie des doublages intérieurs.
Il ressort des conclusions de l'expert judiciaire que' la maison est affectée d'une attaque parasitaire de type mérule sur sa façade Sud, du rez-de-chaussée au premier étage ainsi que d'un développement de champignons de pourriture fibreuse dans les cadres de menuiserie et sous le parquet du rez-de-chaussée. Il précise que la contamination est ancienne et provient de la conception de l'immeuble et de son entretien.
Sur la responsabilité du diagnostiqueur professionnel, l'expert expose que celui-ci ne pouvait pas constater la présence de champignons sans procéder à des sondages destructifs, tout en relevant que les poinçonnements sur les bois visibles ont été insuffisants. Il ajoute que les relevés d'humidité réalisés par le diagnostiqueur indiquaient la présence de zones à risques dans les bois encastrés dans la maçonnerie et rappelle que la norme NF 03 200 impose une attention particulière sur ces zones. Il estime que la société Saint Brieuc diagnostic, à défaut de sondages destructifs, aurait dû préciser qu'elle n'a pas pu vérifier l'état des abouts de solive dans la maçonnerie et la présence, le risque étant certain, de champignon de pourriture.
L'expert rappelle que la présence de dégradations par de la grosse vrillette sur des bois humides, en partie non accessibles lors du constat, est un indice de risque significatif de développement de champignon de pourriture.
Contrairement à ce que l'expert retient, ce risque a bien été signalé dans son rapport par la société Saint Brieuc diagnostic mais pas de façon claire et suffisamment explicite pour un non professionnel.
Dans l'échange par courriels des 15 et 16 janvier 2017 entre M. [V] et M. [Ad], qui a réalisé le diagnostic, ce dernier rappelle seulement qu'il existe des traces de grosses et petites vrillettes, indiquant d'anciennes altérations, et qu'il n'a repéré la présence de vrillettes, indiquant une activité en cours, que sur les solives. Il n'attire pas plus que dans son rapport l'attention de M. [Aa], sur le fait que la trace ou la présence de grosses vrillettes dans un endroit humide, alors que les éléments en bois ne sont pas visibles, est un indicateur de la présence de mérule.
Il ressort d'ailleurs du message de M. [V] que la lecture du rapport de la société Saint Brieuc diagnostic avait essentiellement attiré son attention sur la présence ou non d'insectes à larve xylophage.
Sur l'exécution de sa mission par la société Saint Brieuc diagnostic l'expert rappelle qu'il n'a pas trouvé de poinçons en nombre suffisant sur les bois apparents, ces bois étant toujours présents lors de l'expertise, puisque seules les cloisons de doublages avaient été déposées. Mais ceci étant, à défaut de sondages destructifs le diagnostiqueur, quelque soit le nombre de poinçonnement, ne pouvait vérifier les abouts de solive. Cependant, s'agissant du plancher du rez-de-chaussée, l'expert explique qu'une très légère trace de contamination en sous-face du parquet, qui n'aurait pas dû échapper à l'attention du professionnel, nécessitait un examen très minutieux du parquet.
Ainsi, contrairement à ce que le tribunal a jugé, il est établi que la société Saint Brieuc diagnostic a manqué à ses obligations professionnelles. Elle n'a pas réalisé sa mission avec toute la minutie et l'attention nécessaires et elle n'a pas suffisamment attiré l'attention du lecteur de son rapport sur le fait qu'elle n'a pas procédé à des sondages destructifs, qui auraient révélé l'infestation, ni sur le fait qu'il existe des indices de la présence de champignons lignivores, soit les attaques par de la grosse vrillette, la présence d'humidité anormale dans plusieurs endroits de la maison et la présence de cloisons de doublage au rez-de-chaussée, maintenant une atmosphère confinée.
La faute commise par le diagnostiqueur dans l'exécution de sa mission a engagé sa responsabilité délictuelle envers les époux [V], qui doivent, alors que ce poste de dépenses n'était pas prévu dans leur projet, réaliser des travaux d'éradication des parasites et des champignons.
2) Sur le montant du préjudice au titre des travaux de réparation
Il est de jurisprudence désormais constante, ce qui n'est pas contesté, que le diagnostiqueur fautif doit indemniser intégralement, et non pas seulement au titre de la perte de chance, les acquéreurs du montant des travaux nécessaires pour traiter les zones atteintes par l'infestation.
L'expert a estimé le coût des travaux de réparation du désordre lié à la présence de mérule à la somme de 70 000 euros, dont les époux [V] réclament le paiement.
Les époux [Aa] avaient prévu de réaliser des travaux importants de rénovation de la maison qu'ils venaient d'acquérir': dépose de cloisons et de cloisons de doublage, démolition d'un escalier extérieur, création d'une ouverture à la place. Dans la mesure où les zones d'humidité et d'infiltration leur avaient été signalées, ils étaient également tenus d'intervenir sur ces zones, qui ne pouvaient rester en l'état.
Ne doivent donc être mis à la charge de la société Saint Brieuc diagnostic, comme étant la conséquence directe de sa faute, que le surcoût lié au traitement des bois et de la maçonnerie à l'intérieur, avec mise à nu aux étages, la dépose des cloisons du rez-de-chaussée étant comprise dans les travaux prévus par les éAaoux [V].
L'expert se fonde sur un devis ABC actualisé après une dernière réunion d'expertise, qu'aucune des parties ne produit. Les intimés exposent, sans être contredits, que le poste de maçonnerie en extérieur s'élève à la somme de 15 311,05 euros TTC.
Ce montant sera déduit de la somme de 62 434,48 euros, montant total du dernier devis ABC, soit un solde de 47 123⚖️,43 euros TTC pour les travaux de traitement.
A ce montant seront ajoutés le montant du devis de l'entreprise INS, retenu par l'expert, soit 6628,41 euros TTC, et le coût des sondages, soit 610,50 euros TTC, demandés par l'expert et payés par les époux [V], soit un total de 54 362,34 euros TTC.
Le coût du chiffrage des travaux nécessaires, sollicité par les époux [V] pour présenter leur demande à l'expert, sera également mis à la charge des intimés, au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
3) Sur le montant du préjudice de jouissance
L'expert a estimé que les complications liées à la découverte de la mérule et à la résolution du litige ont empêché les époux [V] d'aménager comme prévu dans leur maison le 15 juillet 2017, que les travaux auront une durée de 4 mois et que la valeur locative de la maison est de 900 euros par mois.
Les époux [Aa], qui réclament une indemnité pour trouble de jouissance pour la période allant du 15 juillet 2017 jusqu'au jugement à intervenir, sans préciser s'il s'agit du jugement du 15 septembre 2020 ou de l'arrêt de la cour, soutiennent que leur maison est inhabitable mais ne justifient pas de leur situation actuelle, plus de cinq années après l'acquisition de la maison. Ils ne soutiennent pas qu'ils n'ont pas pu réaliser les travaux de traitement de la mérule et achever la rénovation de la maison.
La dernière réunion d'expertise a eu lieu le 15 mai 2018. La maison n'était pas habitable mais les travaux de rénovation étaient en cours.
Compte-tenu de l'ensemble de ces éléments, la cour fixera le montant des dommages et intérêts dus aux époux [V] au titre du préjudice de jouissance à la somme de 12 600 euros (900 euros pendant 14 mois à compter du 15 juillet 2017).
4) Sur la franchise contractuelle
L'
article L 112-6 du code des assurances🏛 dispose : « L'assureur peut opposer au porteur de la police ou au tiers qui en invoque le bénéfice les exceptions opposables au souscripteur originaire. »
En application de ces dispositions, la franchise contractuelle est opposable au créancier de l'indemnité due par l'assureur du responsable du dommage.
Au vu du contrat d'assurance de la société Saint Brieuc diagnostic souscrit auprès de la société Allianz IARD il sera fait droit à la demande de celle-ci au titre de la franchise contractuelle, d'un montant de 1500 euros.
5) Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens
Le tribunal a mis les dépens à la charge de la société AEI et de ses assureurs et a rejeté les demandes réciproques des époux [V], de la société Saint Brieuc diagnostic et de son assureur au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Ces chefs du jugement seront confirmés, d'autant que la société AEI et ses assureurs n'ont pas fait appel de leur condamnation aux dépens.
Les dépens d'appel seront mis à la charge des intimés, parties perdantes, et leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.
Il n'est pas équitable de laisser à la charge des époux [Aa] les frais qu'ils ont exposés qui ne sont pas compris dans les dépens. Il leur sera alloué la somme de 6000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, comprenant le coût du chiffrage des travaux de reprise.