Jurisprudence : CE 4/6 SSR, 29-12-2000, n° 212813, M. DUFFAU

CE 4/6 SSR, 29-12-2000, n° 212813, M. DUFFAU

A6484APT

Référence

CE 4/6 SSR, 29-12-2000, n° 212813, M. DUFFAU. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/928171-ce-46-ssr-29122000-n-212813-m-duffau
Copier

CONSEIL D'ÉTAT

Statuant au contentieux

Cette décision sera publiée au recueil LEBON

N° 212813

M. DUFFAU

Mme Dumortier, Rapporteur

M. Schwartz, Commissaire du Gouvernement

Séance du 8 décembre 2000

Lecture du 29 décembre 2000

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'État statuant au contentieux

(Section du contentieux, 4ème et 6ème sous-sections réunies)

Sur 1e rapport de la 4ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 septembre 1999 et 21 janvier 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés pour M. Jean-Paul DUFFAU, demeurant 69, boulevard de l'Ayrolle à Millau (12100) ; M. DUFFAU demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler la décision du 8 juillet 1999 par laquelle la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins, annulant la décision du 19 septembre 1998 du Conseil régional de l'Ordre des médecins de Midi-Pyrénées, lui a interdit d'exercer la médecine pendant un an ;

2°) de condamner le Conseil national de l'Ordre des médecins au versement de la somme de 25 000 F au titre de l'application de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

3°) d'ordonner le sursis à exécution de la décision attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. et notamment son article 3 ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le décret n° 48-1671 du 26 octobre 1948 ;

Vu le décret du 6 septembre 1995 portant code de déontologie médicale ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 194, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de Mme Dumortier, Auditeur,

- les observations de la SCP Defrenois, Levis, avocat de M. DUFFAU et de la SCP Vier, Barthélemy, avocat du Conseil national de l'Ordre des médecins,

- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 28 du décret du 26 octobre 1948 : « (...) La minute de chaque décision est signée par le président et le secrétaire (...) » ; qu'il ressort des pièces du dossier que la minute de la décision attaquée de la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins en date du 8 juillet 1999 a été signée par le président et le secrétaire ; que le moyen tiré de ce qu'il n'aurait pas été satisfait à cette exigence manque en fait ;

Considérant qu'aux termes de l'article 37 du décret du 6 septembre 199 portant code de déontologie médicale : « en toutes circonstances, le médecin doit s'efforcer de soulager les souffrances de son malade, l'assister moralement et éviter toute obstination déraisonnable dans les investigations et la thérapeutique » ; que l'article 38 dispose : « Le médecin doit accompagner le mourant jusqu'à ses derniers moments, assurer par des soins et mesures appropriés, la qualité d'une vie qui prend fin, sauvegarder la dignité du malade et réconforter son entourage. Il n'a pas le droit de provoquer délibérément la mort » ;

Considérant qu'après avoir mentionné l'ensemble des graves pathologies dont était atteinte Mme J.., et les traitements qui lui avaient été prodigués, y compris les soins palliatifs à base de morphine pour une personne en « fin de vie programmée », la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins a retenu à l'encontre de M. DUFFAU le fait, d'ailleurs non contesté, d'avoir pratiqué sur la malade l'injection d'une dose de chlorure de potassium destinée à provoquer immédiatement la mort par arrêt cardiaque ; qu'elle a estimé que cet acte n'entrait pas au nombre de ceux prescrits aux médecins par les articles 37 et 38 précités du code de déontologie médicale mais constituait un acte d'euthanasie active, destiné à provoquer délibérément la mort de sa patiente ; qu'elle a enfin relevé que cet acte était interdit par l'article 38 du code de déontologie. quelles que soient les circonstances, et notamment celles, invoquées par M. DUFFAU, tirées des souffrances de la patiente et des inconvénients pour l'entourage et l'environnement immédiat de Mme J... de la progression de la gangrène dont elle était atteinte ; qu'elle a ainsi suffisamment motivé sa décision d'infliger au requérant la sanction de l'interdiction temporaire d'exercer la médecine en répondant à ses moyens tirés de ce qu'il n'y avait pas lieu de distinguer euthanasie active et euthanasie passive et de ce que l'état dans lequel se trouvait la patiente était de nature à justifier son comportement;

Considérant qu'en analysant ainsi qu'elle l'a fait l'argumentation soulevée en défense par M. DUFFAU la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins n'a pas dénaturé ses écritures ;

Considérant qu'en qualifiant de faute déontologique le fait, pour M. DUFFAU d'avoir provoqué délibérément dans les circonstances qu'elle a relevées la mort de sa patiente, la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre n'a méconnu ni les dispositions de l'article 38 du code de déontologie médicale. ni le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aux termes duquel « nul ne peut être soumis à des traitements inhumains ou dégradants » ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. DUFFAU n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision de la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins lui interdisant d'exercer la médecine pendant un an ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que le Conseil national de l'Ordre des médecins, qui n'a pas la qualité de partie dans la présente instance, soit condamné à payer à M. DUFFAU la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. DUFFAU est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Paul DUFFAU, au conseil départemental de l'Aveyron, au Conseil national de l'Ordre des médecins et au ministre de (emploi et de la solidarité.

Agir sur cette sélection :

Revues liées à ce document

Ouvrages liés à ce document

Chaîne du contentieux

Décisions similaires

  • Tout désélectionner
Lancer la recherche par visa

Domaine juridique - SANTE PUBLIQUE

  • Tout désélectionner
Lancer la recherche par thème
La Guadeloupe
La Martinique
La Guyane
La Réunion
Mayotte
Tahiti

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.