Jurisprudence : CE 9/8 SSR, 13-02-1995, n° 139060

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 139060

MINISTRE DU BUDGET
contre
S.A. Solving

Lecture du 13 Février 1995

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Le Conseil d'Etat statuant au Contentieux, (Section du contentieux, 9ème et 8ème sous-sections réunies), Sur le rapport de la 9ème sous-section, de la Section du Contentieux,
Vu le recours et les mémoires complémentaires, enregistrés les 9 juillet 1992, 6 novembre 1992 et 9 décembre 1993, présentés par le MINISTRE DU BUDGET ; le MINISTRE DU BUDGET demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt du 7 mai 1992 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement du 18 juin 1991 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à la S.A. Solving, dont le siège est 22, avenue de la Grande-Armée à Paris (75017), la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle avait été assujettie au titre de chacune des années 1981 à 1984 ; 2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 18 juin1991, et de remettre les impositions litigieuses à la charge de la S.A. Solving ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la réponse du ministre du budget à M. Pringalle, député, publiée au Journal Officiel du 28 juillet 1979 ;
Vu les instructions 4 A-8-79 et 4 A-6-80 publiées au Bulletin Officiel de la Direction Générale des Impôts des 18 avril 1979 et 9 avril 1980 ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. Fabre, Conseiller d'Etat, - les observations de la SCP Monod, avocat de la S.A. Solving, - les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la S.A. Solving, qui a été assujettie à l'impôt sur les sociétés au titre des années 1981 à 1984, en conséquence du refus de l'administration de lui reconnaître le droit de bénéficier des mesures d'allègement fiscal instituées en faveur des entreprises industrielles nouvelles par les dispositions, respectivement issues de l'article 17 de la loi du 30 décembre 1977 et de l'article 19 de la loi du 29 décembre 1978, des articles 44 bis et 44 ter du code général des impôts, aux motifs que, si cette société, qui a pour objet l'exercice de la profession d'ingénieur-conseil, et n'exploite donc pas une entreprise industrielle, n'entrait pas, comme d'ailleurs elle l'admettait, dans le champ d'application de ces dispositions, elle était, néanmoins, fondée, ainsi que l'avait jugé le tribunal administratif, à en revendiquer le bénéfice en se prévalant, sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, de l'interprétation que le MINISTRE DU BUDGET en a donnée dans sa réponse à M. Pringalle, député, publiée au Journal Officiel du 28 juillet 1979 ;
Considérant qu'aux termes de ladite réponse : "Pour l'application des dispositions de l'article 17 de la loi de finances pour 1978 et 19 de la loi de finances pour 1979, les entreprises nouvelles sont considérées comme industrielles dès lors qu'elles ont pour objet d'accomplir des actes constituant l'exercice d'une profession dont les bénéfices sont qualifiés d'industriels et commerciaux par l'article 34 du code général des impôts..." ; que ces termes visent clairement les seules entreprises dont l'activité est de nature commerciale, industrielle ou artisanale, à l'exclusion de celles qui, sous quelque forme juridique qu'elles soient exploitées, ont pour objet d'effectuer des actes relevant de l'exercice d'une profession non commerciale ou agricole ; que la cour administrative d'appel de Paris a, par suite, méconnu la portée de l'interprétation ainsi admise par le MINISTRE DU BUDGET des articles 44 bis et 44 ter du code général des impôts, en estimant que celle-ci étendait l'applicabilité des allégements fiscaux prévus auxdits articles aux sociétés anonymes dont les bénéfices, quelle que soit la nature de l'activité d'où ils proviennent, sont, en vertu de l'article 209-I du code général des impôts, imposés en tant que bénéfices industriels et commerciaux ; que le MINISTRE DU BUDGET est, dès lors, fondé à soutenir que la cour administrative d'appel a fait une inexacte application de l'aticle L.80 A du livre des procédures fiscales et à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, pour le Conseil d'Etat, de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'eu égard à la nature non commerciale de son activité, la S.A. Solving ne peut utilement se prévaloir, sur le fondementde l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, de l'interprétation contenue dans la réponse ministérielle à M. Pringalle, député, publiée le 28 juillet 1979 ;
Considérant qu'en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, il y a lieu d'examiner l'autre moyen soulevé par la S.A. Solving au soutien de sa demande en décharge ;
Considérant que les instructions 4 A-8-79 et 4 A-6-80, publiées au Bulletin Officiel de la Direction Générale des Impôts du 18 avril 1979 et du 9 avril 1980, énoncent, en termes identiques, que, pour l'application des dispositions que, respectivement, elles commentent des articles 17 de la loi de finances pour 1978 et 19 de la loi de finances pour 1979, les entreprises nouvelles seront regardées comme industrielles à la condition, notamment, qu'elles entrent dans les prévisions de l'article 34 du code général des impôts, que pourront, ainsi, bénéficier du régime spécial "les artisans de fabrication, ... les prestataires de services... ainsi que... des entreprises commerciales", mais que ce régime "ne saurait, en revanche, être appliqué aux membres des professions libérales et agricoles" ; que, contrairement à ce que soutient la S.A. Solving, l'interprétation que comportent ces énonciations admet au bénéfice des dispositions des articles 44 bis et 44 ter du code général des impôts les entreprises dont l'activité consiste à effectuer des prestations de services commerciales, mais en exclut toutes les entreprises qui ont, comme elle, pour objet d'accomplir les actes ressortissant à l'exercice d'une profession non commerciale ; que la S.A. Solving ne peut, dès lors, utilement invoquer les deux instructions susmentionnées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif a accordé à la S.A. Solving la décharge des rappels d'impôt sur les sociétés auxquels elle avait été assujettie au titre de chacune des années 1981 à 1984 ;
Considérant que, l'Etat n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, les conclusions présentées devant le Conseil d'Etat par la S.A. Solving, et tendant à ce que l'Etat lui paye la somme de 30 000 F à raison des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés, ne peuvent, en application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 7 mai 1992 et le jugement du tribunal administratif du 18 juin 1991 sont annulés.
Article 2 : Les cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles la S.A Solving avait été assujettie au titre de chacune des années 1981 à 1984 par voie de rôle mis en recouvrement le 31 octobre 1986 sont remises à sa charge.
Article 3 : Les conclusions de la S.A. Solving à fins d'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre du budget et à la S.A. Solving.

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