Jurisprudence : CE 7/8 SSR, 17-06-1981, n° 13147

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 13147

M. xxxxx

Lecture du 17 Juin 1981

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)



Sur le rapport de la 7ème Sous-section

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 27 juin 1978 et le 7 mai 1979, présentés pour M. xxxxx et tendant à ce que le Conseil d'Etat: 1° - annule un jugement en date du 27 avril 1978 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des annees 1970 et 1972, 2° - lui accorde la décharge des impositions et pénalités contestées;

Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;

Vu le code général des impôts;

Vu la loi du 30 décembre 1977.
Considérant que M. xxxxx demande le décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 1970 et 1972, après évaluation d'office de ses bénéfices imposables des années 1969, 1970, 1971 et 1972;

Sur la réqularité de la procédure d'imposition et la charge de la preuve:
Considérant que, par un jugement avant-dire-droit en date du 17 mars 1977, qui est passé en force de chose jugée, le tribunal administratif de Nancy a jugé que la procédure d'évaluation d'office a été régulièrement menée, que la comptabilit, produite par le requérant était dénuée de valeur probante et qu'en conséquence il appartient au contribuable d'apporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues; que, dès lors, les moyens invoqués par M. xxxxx sur ces différents points à l'appui de sa requête devant le Conseil d'Etat ne peuvent qu'être rejetés;

Sur le bien-fondé des impositions:
En ce qui concerne le montant des produit à retenir:
Considérant, en premier lieu, que, dans le cadre de la gestion des prêts hypothécaires à la conclusion desquels il participe, M. xxxxx garantit aux créanciers le remboursement régulier des prêts et est ainsi conduit à se substituer aux débiteurs détaillants; qu'il réclame alors à ces derniers des intérêts en cas de retard dans le paiement d'une créance; que le service a réintégré, dans les bénéfices imposables des exercices au cours desquels ils ont été acquis, les intérêts dus à M. xxxxx à ce titre;
Considérant qu'aux termes de l'article 38-2 du code général des impôts: "Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt, L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés";
Considérant que les intérêts de retard mis à la charge des débiteurs défaillants par M. xxxxx ont concouru, quelle qu'ait été leur qualification, à l'accroissement de l'actif de l'entreprise; que, par suite, sans qu'il y ait lieu de rechercher si, comme le prétend M. xxxxx ces intérêts présentaient le caractère d'indemnités en capital, lesdits intérêts ont été à bon droit réintégrés dans les bénéfices imposables;
Considérant, en second lieu, qu'en se bornant à soutenir sans aucune précision que "l'administration a calculé le montant de ces intérêts de manière forfaitaire et arbitraire", M. xxxxx ne rapporte pas la preuve, dont il a la charge, de l'exagération de l'évaluation administrative;
Considérant, en troisième lieu, que, dans la mesure où le requérant soutiendrait que l'administration n'a pas admis la constitution en franchise d'impôt, par imputation sur les commissions perçues, de retenues de garantie destinées à couvrir le paiement des premiers intérêts, ce moyen est inopérant dès lors qu'aucune réintégration n'a été opérée à ce titre;
En ce qui concerne la réintégration de provisions pour créances douteuses:
Considérant qu'aux termes de l'article "39-1 du code général des impôts: le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant... notamment... 5° les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précises et que des évènements en cours rendent probables à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice et figurent au relevé des provisions prévu à l'article 54";
Considérant que l'administration n'a pas admis la constitution de provisions destinées à garantir le recouvrement d'intérêts non payés par les débiteurs défaillants au motif que le recouvrement de ces intérêts est déjà garanti par une hypothèque immobilière qui couvre leur montant en sus de celui du capital prêté; qu'il ne résulte d'aucun élément du dossier que cette affirmation soit controuvée, M. xxxxx se bornant à soutenir qu'il n'a constitué des provisions que pour le montant des intérêts dont le défaut de paiement l'avait amené à engager une procédure de réalisation du gage, ce qui ne suffit pas à établir que le non recouvrement de ces créances d'intérêts pouvait à la date de clôture de chaque exercice, être tenu pour probable; qu'ainsi, sans qu'il y ait lieu d'examiner si les provisions dont il s'agit ont été comptabilisées et déclarées conformément aux prescriptions de l'article 39-1-5° précité, M. xxxxx n'est pas fondé à critiquer leur réintégration dans ses bénéfices imposables;
En ce qui concerne l'imputation des pertes hypothécaires:
Considérant que le litige porte sur la détermination des exercices sur lesquels certaines pertes sur prêts hypothécaires ont été imputées;
Considérant qu'en vertu de l'article 38-2 précité du code, la perte résultant de ce qu'une créance est devenue irrecouvrable ne peut être imputée que sur les résultats de l'exercice à la clôture duquel le caractère définitivement irrecouvrable de la créance est établi;
Considérant que, lorsque M. xxxxx participait à des opérations de prêts hypothécaires à l'occasion desquelles, à la suite de la défaillance des emprunteurs, il devenait à son tour créancier de ces derniers après avoir désintéressé leurs prêteurs, il faisait réaliser la vente judiciaire des immeubles hypothéqués et, le plus souvent, procédait lui-même au rachat desdits immeubles sur lesquels il avait pris rang de première hypothèque;
Considérant que le service a estimé qu'en pareil cas, le caractère irrecouvrable des créances devait être constaté dès la réalisation de la vente judiciaire, dès lors que cette vente constituait l'acte ultime de l'opération de prêt et son dénouement dès lors qu'avaient été épuisées toutes les autres possibilités de recouvrement contentieux; qu'à l'inverse, M. xxxxx soutient qu'il disposait, même après la vente judiciaire, de certaines possibilités de récupérer des créances et qu'il était donc fondé à ne pas les regarder comme définitivement perdues;
Considérant que la perte devait être regardée comme définitive si et dans la mesure où, l'immeuble hypothèque ayant été vendu, le produit de cette vente restait inférieur au montant total de la créance de M xxxxx; que la circonstance que M. xxxxx se porte acquéreur de l'immeuble et pourra ensuite le revendre et réaliser un profit à l'occasion de cette revente doit rester sans incidence sur la détermination de l'exercice auquel la perte de la créance doit être rattachée, dès lors que, même si le profit réalisé sur la revente ultérieure de l'immeuble est égal ou supérieur à la perte subie sur la créance, il s'agit de deux opérations distinctes, réalisées avec des co-contractants différents; que, dès lors, M xxxxx n'est pas fondé à critiquer la manière dont l'administration a déterminé les exercices auxquels devaient être rattachées les pertes subies sur créances hypothécaires;
En ce qui concerne la réintégration de charges représentatives de travaux de rénovation des immeubles en stock et de frais engagés pour l'acquisition déterminés:
Considérant que, par son jugement sus-mentionné du 17 mars 1977, le tribunal administratif a rejeté les prétentions du requérant sur ce point; que l'autorité de la chose jugée fait obstacle à ce que ces prétentions soient utilement reprises à l'appui de la présente requête;

Sur les pénalités appliquées au titre de l'année 1970:
Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition 1970, "lorsque la bonne foi du contribuable ne peut être admise, les droits correspondants aux infractions définies à l'article 1728 sont majorés de 50% si le montant des droits est supérieur à la moitié des droits réellement dus";
Considérant qu'il résulte de l'instruction, eu égard notamment à la circonstance que les irrégularités dont est entachée la comptabilité, produite par M. xxxxx ne procédaient pas de l'intention de dissimuler les bases d'imposition, que la bonne foi de M. xxxxx peut être admise qu'il y a lieu, par suite, de substituer à la majoration qui a été appliquée sur le fondement des dispositions précitées de l'article 1729 du code les intérêts de retard prévus aux articles 1727 et 1734, dont le montant doit toutefois être limité à celui de la majoration indument appliquée;
Considérant que, sur ce point, M. xxxxx est fondé à demander la réparation du jugement attaqué; qu'en revanche il résulte de ce qui précède que le surplus des conclusions de la requête doit être rejeté.
DECIDE
Article 1er - Les intérêts de retard prévus aux articles 1727 et 1734 du code général des impôts sont substitués à la majoration appliquée, sur le fondement de l'article 1729, du même code aux redressements afférents à l'année 1970, dans la limite du montant de cette majoration.
Article 2 - Le jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 27 avril 1978 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 - Le surplus des conclusions de la requête de M. est rejeté.

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