Jurisprudence : CE 2/7 ch.-r., 02-11-2022, n° 464479, mentionné aux tables du recueil Lebon

CE 2/7 ch.-r., 02-11-2022, n° 464479, mentionné aux tables du recueil Lebon

A82828R8

Référence

CE 2/7 ch.-r., 02-11-2022, n° 464479, mentionné aux tables du recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/89542824-ce-27-chr-02112022-n-464479-mentionne-aux-tables-du-recueil-lebon
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Abstract

39-02-005 Il résulte de la combinaison des articles L. 2141-4 du code de la commande publique (CCP) et 506 du code de procédure pénale (CPP) qu’une personne dont le jugement l’ayant condamnée à une peine d’exclusion des marchés n’est pas exécutoire en raison de l’appel formé à son encontre ne peut être exclue, pour ce motif, de la procédure de passation du marché.



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

N° 464479

Séance du 17 octobre 2022

Lecture du 02 novembre 2022

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 7ème et 2ème chambres réunies)


Vu la procédure suivante :

La société Icare a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Versailles, statuant sur le fondement de l'article L. 551-1 du code de justice administrative🏛, d'une part, d'annuler la décision du 24 mars 2022 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa candidature à l'attribution du marché relatif à l'acquisition d'heures de vol, sans équipage, sur hélicoptère civil H225, au profit des équipages de l'armée de l'air et de l'espace, et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à la ministre de reprendre la procédure au stade de l'examen des candidatures en la réintégrant.

Par une ordonnance n° 2203342 du 17 mai 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a enjoint à la ministre des armées de reprendre la procédure de passation litigieuse, si elle entendait la poursuivre, au stade de l'examen des candidatures.

Par un pourvoi, enregistré le 30 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre des armées demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de la société Icare ;

3°) de mettre à la charge de la société Icare la somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la commande publique ;

- le code pénal ;

- le code de procédure pénale ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexis Goin, auditeur,

- les conclusions de M. A B de Vendeuil, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Icare ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par un avis d'appel public à la concurrence publié le 25 janvier 2022, la ministre des armées (plate-forme affrètement et transport, base aérienne de Villacoublay) a lancé une consultation pour la passation d'un accord-cadre de défense et de sécurité ayant pour objet l'acquisition d'heures de vol, sans équipage, sur hélicoptère civil H225, au profit des équipages de l'armée de l'air et de l'espace, d'une durée de deux ans reconductible trois fois pour une durée de douze mois. Par un courrier du 24 mars 2022, la ministre des armées a notifié à la société Icare le rejet de sa candidature au motif qu'une peine d'exclusion des marchés publics avait été prononcée à son encontre par un jugement du tribunal correctionnel de Paris du 29 juin 2021. Saisi par la société Icare, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles, par l'ordonnance attaquée du 17 mai 2022, a enjoint à la ministre, si elle entendait poursuivre la passation du marché en litige, de reprendre la procédure au stade de l'examen des candidatures.

2. En premier lieu, il ressort des termes du point 8 de l'ordonnance attaquée que, si son auteur a commencé par apprécier le bien-fondé du motif de l'exclusion de la société Icare par le pouvoir adjudicateur au regard des dispositions de l'article L. 2341-1 du code de la commande publique🏛, qui prévoient une exclusion automatique, par l'effet de la loi, en cas de condamnation définitive à certaines infractions, alors que cette exclusion était fondée sur celles du 3° de l'article L. 2141-4 du même code, qui concernent le cas où l'exclusion des marchés publics est prononcée par le juge pénal lui-même, il a ensuite estimé que les dispositions de ce dernier article ne permettaient pas davantage de justifier légalement l'exclusion de la société Icare. Par suite, le ministre des armées ne peut utilement soutenir que le juge des référés a commis une erreur de droit en faisant application des dispositions de l'article L. 2341-1 du code de la commande publique🏛, qui sont inapplicables au litige, ce motif de l'ordonnance attaquée étant surabondant.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 2141-4 du code de la commande publique🏛, rendu applicable aux marchés de défense et de sécurité par l'article L. 2341-2 du même code🏛 : " Sont exclues de la procédure de passation des marchés les personnes qui : () / 3° Ont été condamnées au titre du 5° de l'article 131-39 du code pénal🏛 ou sont des personnes physiques condamnées à une peine d'exclusion des marchés. () ". Aux termes de l'article 506 du code de procédure pénale🏛 : " Pendant les délais d'appel et durant l'instance d'appel, il est sursis à l'exécution du jugement, sous réserve des dispositions des articles 464 (deuxième et troisième alinéas), 464-1, 464-2, 471, 507, 508 et 708 ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'une personne dont le jugement l'ayant condamnée à une peine d'exclusion des marchés n'est pas exécutoire en raison de l'appel formé à son encontre ne peut être exclue, pour ce motif, de la procédure de passation du marché. Par suite, le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la ministre des armées ne pouvait légalement se fonder sur la condamnation prononcée à l'encontre de la société Icare, qui faisait l'objet d'un appel, pour exclure sa candidature.

4. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi du ministre des armées doit être rejeté.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société Icare au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛. Les dispositions de cet article font obstacle à ce qu'une somme soit mise sur le même fondement à la charge de la société Icare, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi du ministre des armées est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la société Icare la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛. Ses conclusions présentées au même titre sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre des armées et à la société Icare.

Délibéré à l'issue de la séance du 17 octobre 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; M. Géraud Sajust de Bergues, Mme Anne Courrèges, M. Benoît Bohnert, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, conseillers d'Etat et M. Alexis Goin, auditeur-rapporteur.

Rendu le 2 novembre 2022.

La présidente :

Signé : Mme Christine Maugüé

Le rapporteur :

Signé : M. Alexis Goin

La secrétaire :

Signé : Mme Nadine PelatHY7PTC81

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