Jurisprudence : CE 1/4 ch.-r., 28-10-2022, n° 454338, mentionné aux tables du recueil Lebon

CE 1/4 ch.-r., 28-10-2022, n° 454338, mentionné aux tables du recueil Lebon

A34708RX

Référence

CE 1/4 ch.-r., 28-10-2022, n° 454338, mentionné aux tables du recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/89363698-ce-14-chr-28102022-n-454338-mentionne-aux-tables-du-recueil-lebon
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Abstract

66-01-01-02 1) Lorsqu’elle est saisie d’une demande d’autorisation du transfert du contrat de travail d'un salarié protégé présentée en application des articles L. 1224-1, L. 2414-1 et L. 2421-9 du code du travail, il appartient à l'autorité administrative, en premier lieu, de vérifier que l’article L. 1224-1 du code du travail est applicable au transfert partiel d’entreprise ou d’établissement en cause, ce qui suppose qu’il concerne une entité économique autonome. Tel est le cas lorsqu’est transféré un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels et incorporels permettant l'exercice d'une activité qui poursuit un objectif propre, conservant son identité, et dont l'activité est poursuivie par le nouvel employeur. ...2) Lorsque l’article L. 1224-1 du code du travail est applicable, l’autorité administrative doit, en second lieu, contrôler que le salarié protégé susceptible d’être transféré ne fait pas l’objet à cette occasion d’une mesure discriminatoire. ...a) A ce titre, elle doit s’assurer, d’une part, que le contrat de travail du salarié protégé est en cours au jours de la modification intervenue dans la situation juridique de l’employeur, b) d’autre part, que ce salarié exerce ses fonctions dans l’entité transférée à la date du transfert de l’activité en cause, c) sans que la circonstance que son contrat du travail soit alors suspendu y fasse obstacle.



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

N° 454338

Séance du 07 octobre 2022

Lecture du 28 octobre 2022

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 4ème et 1ère chambres réunies)


Vu la procédure suivante :

M. A B a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 24 novembre 2017 par laquelle la ministre du travail a, d'une part, annulé la décision du 27 juin 2017 de l'inspecteur du travail de l'unité de contrôle n°1 des Alpes-Maritimes refusant d'accorder à la société Intel Mobile Communications France SAS (IMC) l'autorisation de procéder au transfert de son contrat de travail à la société 843 Corporation dite Newco et, d'autre part, autorisé ce transfert. Par un jugement n° 1800294 du 16 juin 2020, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 20MA02714 du 7 mai 2021, la cour administrative d'appel de Marseille⚖️ a, sur appel de M. B, annulé ce jugement et la décision du 24 novembre 2017 de la ministre du travail en tant qu'elle autorise le transfert du contrat de travail de M. B.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juillet et 7 octobre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Intel Corporation, venant aux droits de la société Intel Mobile Communications France, demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. B ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de M. B la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Fraval, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Intel Corporation et à la SCP Duhamel - Rameix - Gury - Maître, avocat de M. A B ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Intel Mobile Communications (IMC), appartenant au groupe Intel, a sollicité le transfert du contrat de travail de M. B, ingénieur développement, délégué du personnel et membre du comité d'entreprise, dans le cadre de la cession à la société 843 Corporation dite " Newco ", le 1er juillet 2017, de l'activité de recherche et développement des logiciels embarqués. Par une décision du 27 juin 2017, l'inspecteur du travail de l'unité de contrôle n°1 des Alpes-Maritimes a refusé d'accorder à la société IMC l'autorisation de procéder au transfert de son contrat de travail. Par une décision du 24 novembre 2017, la ministre du travail a annulé cette décision et autorisé le transfert du contrat de travail de M. B. Par un jugement du 16 juin 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de M. B tendant à l'annulation de la décision de la ministre du travail autorisant le transfert de son contrat de travail. La société Intel Corporation, venant aux droits de la société IMC, se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 7 mai 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de M. B, annulé ce jugement et la décision du 24 novembre 2017 de la ministre du travail en tant qu'elle autorise le transfert du contrat de travail de M. B.

2. Aux termes de l'article L. 1224-1 du code du travail🏛 : " Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. " Aux termes de l'article L. 2414-1 du même code, dans sa version applicable au litige : " Le transfert d'un salarié compris dans un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement par application de l'article L. 1224-1 ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail lorsqu'il est investi de l'un des mandats suivants : () / 2° Délégué du personnel ; / 3° Membre élu du comité d'entreprise ; / 4° Représentant syndical au comité d'entreprise ; () ". Aux termes de l'article L. 2421-9 du code du travail🏛 : " Lorsque l'inspecteur du travail est saisi d'une demande d'autorisation de transfert, en application de l'article L. 2414-1, à l'occasion d'un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement, il s'assure que le salarié ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire () ".

3. Lorsqu'elle est saisie d'une demande d'autorisation du transfert du contrat de travail d'un salarié protégé présentée en application de ces dispositions, il appartient à l'autorité administrative, en premier lieu, de vérifier que les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail🏛 sont applicables au transfert partiel d'entreprise ou d'établissement en cause, ce qui suppose qu'il concerne une entité économique autonome. Tel est le cas lorsqu'est transféré un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels et incorporels permettant l'exercice d'une activité qui poursuit un objectif propre, conservant son identité, et dont l'activité est poursuivie par le nouvel employeur. Lorsque les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail🏛 sont applicables, l'autorité administrative doit, en second lieu, contrôler que le salarié protégé susceptible d'être transféré ne fait pas l'objet à cette occasion d'une mesure discriminatoire. A ce titre, elle doit s'assurer, d'une part, que le contrat de travail du salarié protégé est en cours au jour de la modification intervenue dans la situation juridique de l'employeur, d'autre part, que ce salarié exerce ses fonctions dans l'entité transférée à la date du transfert de l'activité en cause, sans que la circonstance que son contrat du travail soit alors suspendu y fasse obstacle.

4. Il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Marseille a relevé que, si M. B appartenait à l'équipe dite " LTE firmware " dont les membres ont été inclus dans le secteur d'activité transféré de la société Intel Mobile Communications à la société 843 Corporation dite " Newco ", son contrat de travail était, à la date du transfert, suspendu, d'un commun accord avec son employeur, au motif que, dans le cadre d'une mesure de reclassement externe anticipé, alors prévue dans le projet de plan de sauvegarde de l'emploi, il avait conclu un contrat à durée indéterminée avec un autre employeur, en anticipant sur son licenciement par la société Intel Mobile Communications après l'homologation ou la validation du plan de sauvegarde de l'emploi par l'autorité administrative. La cour en a déduit que M. B ne pouvait plus être regardé comme exerçant effectivement ses fonctions dans l'entité transférée, de sorte que l'autorité administrative ne pouvait légalement autoriser son transfert. En statuant ainsi, alors qu'ainsi qu'il a été dit au point précédent, la suspension du contrat de travail du salarié protégé ne fait pas obstacle à ce qu'il soit regardé comme exerçant ses fonctions dans l'entité transférée, la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède que la société Intel Corporation est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B la somme que demande la requérante au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise sur leur fondement à la charge, d'une part, de la société Intel Corporation, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, d'autre part, de l'Etat qui n'est pas partie à la présente instance.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 7 mai 2021 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : Les conclusions présentées par la société Intel Corporation et par M. B au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛 sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Intel Corporation et à M. A B.

Copie en sera adressée au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.6VRGC7QD

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