Jurisprudence : TA Versailles, du 27-10-2022, n° 2101505


Références

Tribunal Administratif de VERSAILLES

N° 2101505

7éme chambre
lecture du 27 octobre 2022
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 22 janvier 2021, Mme B A, représentée par Me León-Aguirre, demande au tribunal :

1°) d'annuler la délibération du 1er décembre 2020 du jury d'admission à l'examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle des avocats (CRFPA) en tant que son nom ne figure pas sur la liste des admis ;

2°) d'annuler en conséquence les épreuves orales d'admission auxquelles elle s'est soumise dans le cadre de cet examen, qui ont été organisées par l'université Paris-Saclay au cours du mois de novembre 2020 ;

3°) d'enjoindre à l'université Paris-Saclay d'organiser une nouvelle session d'épreuves d'admission au CRFPA à son bénéfice sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'université Paris-Saclay la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Elle soutient que :

- sa requête est recevable ;

- la décision attaquée a été prise au terme d'une procédure irrégulière, dès lors que son épreuve d'exposé-discussion s'est déroulée à huis clos, en méconnaissance des dispositions de l'article 7 de l'arrêté du 17 octobre 2016🏛, qui prévoient que cette épreuve se déroule en séance publique et qui instaurent une garantie.

Une mise en demeure de produire a été adressée le 27 avril 2022 à l'université Paris-Saclay, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 ;

- le décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 ;

- l'arrêté du 17 octobre 2016 fixant le programme et les modalités de l'examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle d'avocats ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mathé, rapporteure,

- les conclusions de M. Armand, rapporteur public,

- et les observations de Me León-Aguirre, représentant Mme A.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B A, candidate à l'examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle des avocats (CRFPA) inscrite à l'Institut d'études judiciaires (IEJ) de l'université Paris-Sud / Paris-Saclay (campus de Sceaux), a été déclarée ajournée à l'issue de la phase d'admission par une délibération du jury du 1er décembre 2020. Par sa requête, Mme A demande au tribunal d'annuler cette délibération en tant qu'elle ne comporte pas son nom au titre des candidats admis, ainsi que les épreuves orales d'admission auxquelles elle s'est soumise dans le cadre de cet examen au cours du mois de novembre 2020.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 51 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat : " () pour être inscrits dans un centre régional de formation professionnelle, les candidats doivent avoir subi avec succès l'examen d'accès au centre, dont le programme et les modalités sont fixés par arrêté conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé de l'enseignement supérieur, après avis du Conseil national des barreaux. / Cet examen comporte des épreuves écrites d'admissibilité et une ou plusieurs épreuves d'admission () ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 17 octobre 2016🏛 fixant le programme et les modalités de l'examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle d'avocats : " L'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle d'avocats, prévu à l'article 51 du décret du 27 novembre 1991 susvisé, a lieu une fois par an. / L'examen, dont le programme est annexé au présent arrêté, comporte des épreuves écrites d'admissibilité et des épreuves orales d'admission. / Il se déroule dans les universités désignées à cet effet conformément aux dispositions du dernier alinéa de l'article 51 du décret du 27 novembre 1991 susvisé, sous la responsabilité de leur président. / () Les épreuves d'admission débutent dans la première quinzaine de novembre de chaque année. Le calendrier annuel est fixé par le président de chaque université organisant l'examen, qui en informe le centre régional de formation professionnelle d'avocats dans le ressort territorial duquel est située l'université. ".

Aux termes de l'article 7 de cet arrêté : " Nul ne peut se présenter aux épreuves d'admission s'il n'a été déclaré admissible par le jury. / Les épreuves orales d'admission comprennent : / 1° Un exposé de quinze minutes, après une préparation d'une heure, suivi d'un entretien de trente minutes avec le jury, sur un sujet relatif à la protection des libertés et des droits fondamentaux permettant d'apprécier les connaissances du candidat, la culture juridique, son aptitude à l'argumentation et à l'expression orale. / Cette épreuve se déroule en séance publique. / La note est affectée d'un coefficient 4. / 2° Une interrogation d'une durée de quinze minutes, après une préparation de quinze minutes en langue anglaise. / La note est affectée d'un coefficient 1. / Les épreuves d'admission sont notées de 0 à 20. " Aux termes de l'article 9 du même arrêté : " Pour être admis, les candidats doivent avoir obtenu une moyenne au moins égale à 10 sur 20 à l'ensemble des épreuves d'admissibilité et d'admission ".

3. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.

4. La requérante soutient sans être aucunement contredite par l'université Paris-Saclay, qui n'a pas produit de mémoire en défense malgré une mise en demeure en ce sens et qui est ainsi réputée acquiescer aux faits sous réserve que leur inexactitude ne ressorte pas des pièces du dossier, que l'épreuve d'exposé-discussion de l'examen d'entrée au CRFPA qu'elle a subie s'est tenue à huis-clos en novembre 2020, au demeurant dans une des salles qui, selon un courriel daté du 17 janvier 2018 de la directrice de l'IEJ, étaient trop petites pour accueillir du public dès lors qu'il n'y avait de la place que pour le candidat et les membres du jury. Dans ces conditions, l'épreuve d'exposé-discussion subie par Mme A ne s'étant pas déroulée en séance publique conformément aux dispositions de l'article 7 de l'arrêté du 17 octobre 2016🏛, la délibération par laquelle le jury de l'examen d'entrée au CRFPA a arrêté la liste des candidats admis est intervenue au terme d'une procédure irrégulière. En outre, la méconnaissance des règles de publicité lors de cette épreuve orale, qui ont pour objet d'assurer l'impartialité du jury ainsi que l'égalité de traitement entre les candidats, a privé Mme A d'une garantie.

5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A est fondée à demander l'annulation de la délibération du 1er décembre 2020 en tant qu'elle ne comporte pas son nom au titre des candidats admis à l'examen d'entrée au CRFPA, ainsi que l'épreuve d'exposé-discussion qu'elle a passée au cours du mois de novembre 2020. En revanche, le surplus des conclusions à fin d'annulation doit être rejeté dès lors qu'aucun moyen de la requête n'est dirigé contre l'épreuve orale de langue étrangère subie par la requérante.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Compte tenu de ses motifs, le présent jugement implique seulement mais nécessairement que l'université Paris-Saclay réorganise au profit de Mme A l'épreuve d'exposé-discussion devant un jury pour se prononcer sur son admission dans des conditions régulières. Il y a lieu d'adresser à la présidente de l'université Paris-Saclay une injonction en ce sens et de lui impartir un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement pour y procéder, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais du litige :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'université Paris-Saclay la somme de 1 000 euros à verser à la requérante au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

D E C I D E :

Article 1er : La délibération du 1er décembre 2020 par laquelle le jury d'examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle d'avocats de l'université Paris-Saclay a arrêté la liste des candidats admis est annulée en tant qu'elle a déclaré Mme A ajournée à l'issue des épreuves d'admission de la session 2020.

Article 2 : Il est enjoint à la présidente de l'université Paris-Saclay de réunir le jury d'examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle d'avocats afin qu'il fasse subir à Mme A l'épreuve d'exposé-discussion dans des conditions régulières, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.

Article 3 : L'université Paris-Saclay versera à Mme A la somme de 1 000 (mille euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à Mme B A et à l'université de Paris-Saclay.

Délibéré après l'audience du 13 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Ouardes, président,

- M. de Miguel, premier conseiller,

- Mme Mathé, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022.

La rapporteure,

signé

C. MathéLe président,

signé

P. OuardesLa greffière,

signé

C. Benoit-Lamaitrie

La République mande et ordonne à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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