Jurisprudence : CAA Lyon, 12-05-2022, n° 22LY00046


Références

COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON

N° 22LY00046


lecture du 12 mai 2022
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SA Worldwide Euro Protection a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période courant du mois de janvier 2012 au mois de décembre 2014 et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Par un jugement n° 2000037 du 16 novembre 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 6 janvier 2022 et un mémoire enregistré le 8 avril 2022, la SA Worldwide Euro Protection, représentée par Me Grousset, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 16 novembre 2021 ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions et majorations contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont commis une erreur de droit sur les critères de rattachement territorial des prestations de service au regard de la TVA en écartant le critère du siège de son activité lequel est situé au Luxembourg et n'est pas fictif et alors qu'elle ne disposait pas d'établissement stable en France ;

- l'application de la pénalité de 80 % prévue par l'article 1728 du code général des impôts🏛 n'est pas justifiée alors que l'opération a été effectivement soumise à la TVA française en application de l'article 283-2 du code général des impôts, le redevable ayant été le bénéficiaire de la prestation, et que la TVA due était déductible ;

- l'application du délai spécial de reprise des deuxièmes alinéas articles L. 169, L. 174 et L. 176 du livre des procédures fiscales🏛🏛🏛 et de la pénalité de 80 % prévue par l'article 1738 du code général des impôts🏛 n'est pas justifiée en l'absence d'établissement stable et dès lors que son comportement résulte d'une erreur sur l'étendue de ses obligations déclaratives.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 ;

- l'arrêt C-547/18 du 7 mai 2020 de la Cour de justice de l'Union européenne⚖️ ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales🏛 ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative🏛 : " () les premiers vice-présidents des cours et les présidents des formations de jugement des cours peuvent, () par ordonnance, rejeter (), après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. () ".

2. La SA Worldwide Euro Protection, qui exerce une activité de société holding et dont le siège social est situé au Luxembourg, dispose de deux filiales en France, les SAS Sacla et Europrotection. A la suite de la vérification de la comptabilité de la société Sacla, ainsi que d'une visite et de saisies autorisées par le juge des libertés et de la détention sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales🏛, le service vérificateur a estimé, par une proposition de rectification du 2 août 2016, que le siège de direction effective de la SAWorldwide Euro Protection au titre des exercices clos 2012, 2013, 2014 était situé en France et que son chiffre d'affaires, réalisé par l'intermédiaire d'un établissement stable constitué par la société Sacla, devait être soumis aux impôts français. La société a en conséquence été taxée d'office à l'impôt sur les sociétés, à la contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés, ainsi qu'à la taxe sur la valeur ajoutée au motif qu'elle exerçait en France une activité occulte et qu'elle n'a pas rempli ses obligations déclaratives en application des articles L. 66 3° et L. 68 du livre des procédures fiscales🏛. Les impositions correspondantes ont été mises en recouvrement le 28 février 2019. La réclamation de la société a toutefois fait l'objet d'une décision d'admission partielle le 28 octobre 2019 en raison du dégrèvement des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés dès lors qu'il a été fait droit à sa demande concernant l'application du régime des sociétés mères prévu aux articles 145 et 216 du code général des impôts🏛🏛 à raison des produits nets de participation reçus de ses filiales. La SA Worldwide Euro Protection a demandé au tribunal de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a été déclarée redevable au titre de la période courant du mois de janvier 2012 au mois de décembre 2014 pour un montant total de 721 034 euros, correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée colletée au titre des prestations de service fournies à ses deux filiales françaises, les SAS Sacla et Europrotection. La SA Worldwide Euro Protection relève appel du jugement en date du 16 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

3. Les moyens tirés de ce que c'est à tort que l'administration fiscale n'a pas rattaché les prestations de service en cause au siège de la société situé au Luxembourg et de ce qu'elle ne disposait pas d'un établissement stable en France ont été écartés à bon droit par le jugement attaqué dont il y a lieu d'adopter les motifs.

4. Il résulte des articles L. 169 et L. 176 du livre des procédures fiscales que dans le cas où un contribuable n'a ni déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, son activité est réputée occulte s'il n'est pas en mesure d'établir qu'il a commis une erreur justifiant qu'il ne se soit acquitté d'aucune de ses obligations déclaratives.

5. S'agissant d'un contribuable qui fait valoir qu'il a satisfait à l'ensemble de ses obligations fiscales dans un Etat autre que la France, la justification de l'erreur commise doit être appréciée en tenant compte de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment du niveau d'imposition dans cet autre État et des modalités d'échange d'informations entre les administrations fiscales des deux Etats.

6. Il résulte des dispositions de l'article 1728 du code général des impôts que dans le cas où un contribuable n'a ni déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, l'administration doit être réputée apporter la preuve, qui lui incombe, de l'exercice occulte de l'activité professionnelle si le contribuable n'est pas lui-même en mesure d'établir qu'il a commis une erreur justifiant qu'il ne se soit acquitté d'aucune de ces obligations déclaratives. Toutefois, s'agissant d'un contribuable qui fait valoir qu'il a satisfait à l'ensemble de ses obligations fiscales dans un État autre que la France, la justification de l'erreur commise doit être appréciée en tenant compte tant du niveau d'imposition dans cet autre État que des modalités d'échange d'informations entre les administrations fiscales des deux États.

7. Ainsi qu'il a été dit plus haut c'est à bon droit que les premiers juges ont rattaché les prestations de services en litige, initialement déclarées en France comme des échanges intracommunautaires entre le Luxembourg et la France, à l'établissement stable dont la requérante disposait en France et qui, pour cette activité intégralement exercée sur le territoire français, n'avait ni déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce. Si la requérante fait valoir qu'elle a satisfait à l'ensemble de ses obligations déclaratives au Luxembourg, il ne résulte pas de l'instruction que la SA Worldwide Euro Protection aurait déclaré aux autorités Luxembourgeoises son établissement en France, constitué par ses installations au sein la société Sacla, tant en matière d'impôt sur les sociétés qu'en matière de taxe sur la valeur ajoutée. L'application délibérément erronée des dispositions du 2 de l'article 283 du code général des impôts🏛 en France ne pouvait tenir lieu de déclaration des opérations en litige au Luxembourg et en France. Enfin il résulte de l'instruction que la non déclaration de l'établissement en France de la SA Worldwide Euro Protection procède d'une intention délibérée de la contribuable. La SA Worldwide Euro Protection n'est dès lors pas fondée à invoquer une erreur justifiant qu'elle ne se soit acquittée d'aucune de ces obligations déclaratives.

8. Il résulte de ce qui précède que la requête de la SA Worldwide Euro Protection est manifestement dépourvue de fondement. Dès lors, elle doit être rejetée, y compris en ses conclusions aux fins de mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de la SA Worldwide Euro Protection est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la SA Worldwide Euro Protection et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Fait à Lyon, le 12 mai 2022.

Le premier vice-président,

François Bourrachot

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

Agir sur cette sélection :

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.