Jurisprudence : CA Metz, 21-06-2022, n° 20/01915, Infirmation partielle


Arrêt n° 22/00421


21 juin 2022

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N° RG 20/01915 -

N° Portalis DBVS-V-B7E-FLR6

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Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Forbach

28 septembre 2020

19/00204

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D'APPEL DE METZ


Chambre Sociale-Section 1


ARRÊT DU


Vingt et un juin deux mille vingt deux


APPELANT :


M. [T] [R]

[Adresse 2]

Représenté par Me Philippe DAVID, avocat au barreau de METZ


INTIMÉES :


UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 4], Association déclarée prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 3]

Représentée par Me Yaël CYTRYNBLUM, avocat au barreau de SARREGUEMINES


SELAS [V] ET ASSOCIES prise en la personne de Me [I] [V] ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL ARPITEC

[Adresse 1]

Représentée par Me Yaël CYTRYNBLUM, avocat au barreau de SARREGUEMINES



COMPOSITION DE LA COUR :


En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile🏛, l'affaire a été débattue le 08 mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Anne FABERT, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.


Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :


Mme Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre

Mme Anne FABERT, Conseillère

Madame Laëtitia WELTER, Conseillère


Greffier, lors des débats : Mme Catherine MALHERBE


ARRÊT : Contradictoire


Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛 ;


Signé par Anne FABERT, Conseillère, pour la Présidente de chambre régulièrement empêchée, et par Mme Catherine MALHERBE, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.



EXPOSE DES FAITS


M. [R] a été embauché par la société Arpitec, selon contrat à durée indéterminée, à compter du 1er septembre 2010, en qualité de technicien.


Selon avenant du 12 février 2016, M. [R] s'est vu attribuer les fonctions de responsable du parc roulant/responsable d'atelier.


La société a été placée en liquidation judiciaire par jugement en date du 12 février 2019 avec cessation d'activité immédiate. Maître [V] a été désigné ès qualité de mandataire liquidateur.


Me [V] a notifié à M. [R] son licenciement pour motif économique le 23 mars 2019.


Par acte introductif enregistré au greffe le 04 juin 2019, M. [R] a saisi le Conseil de prud'hommes de Forbach aux fins de :


prendre acte de l'ouverture de la procédure collective de la SARL Arpitec, par jugement prononcé le 12 février 2019 par la chambre commerciale du tribunal de Grande Instance de Sarreguemines,

dire et juger recevable sa demande, tendant à l'intervention de Me [I] [V], es qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL Arpitec,

fixer sa créance à la liquidation judiciaire de la SARL Arpitec aux sommes de :

'4.836,55 euros au titre des heures supplémentaires,

'7.383,38 euros au titre du solde des RTT pour les années 2017 et 2018,

'2.333,70 euros brut correspondant au salaire du mois de mars 2019 au prorata,

'146,62 euros au titre des frais de fournitures atelier et des frais de carburant impayés,

prendre acte de ce qu'il se désiste de ses chefs de demande relatifs aux congés payés, ainsi qu'à la prime de licenciement, ces deux demandes étant devenues sans objet,

déclarer le jugement à intervenir commun et opposable au CGEA de [Localité 4],

condamner Me [I] [V], ès qualité, à lui remettre sa fiche de salaire correspondant au mois de mars 2019, sous astreinte de 50 euros par jour de retard suivant la notification de la décision à intervenir, ordonnant la remise de ces documents,

condamner Me [I] [V], ès qualité, au paiement d'une indemnité d'un montant de 1.200 euros, au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile🏛.



Par jugement du 28 septembre 2020, le Conseil de prud'hommes de Forbach, section activités diverses, a statué ainsi qu'il suit :


Prend acte de l'ouverture de la procédure collective de la SARL Arpitec, par jugement prononcé le 12 février 2019 par la chambre commerciale du Tribunal de Grande Instance de Sarreguemines,

Dit et juge recevable la demande de M. [T] [R], tendant à l'intervention de Me [I] [V], ès qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL Arpitec,

Déboute M. [R] de sa demande au titre des heures supplémentaires,

Déboute M. [R] de sa demande de créance au titre du solde de RTT pour les années 2017 et 2018,

Fixe la créance de M. [T] [R] à l'égard de la SARL Arpitec, en liquidation judiciaire, représentée par Me [I] [V], mandataire liquidateur à la somme de 1.108,50 euros correspondant au salaire du mois de mars 2019,

Déboute M. [R] de sa demande au titre des frais de fournitures ateliers et de carburant,

Prend acte de ce que M. [Aa] se désiste de ses chefs de demande relatifs aux congés payés, ainsi qu'à la prime de licenciement,

Ordonne l'inscription des créances par Me [I] [V] sur le relevé des créances,

Déclare le jugement opposable au CGEA-AGS de [Localité 4],

Condamné Me [V], es qualité, à remettre à M. [R] la fiche de paie de mars 2019, sous astreinte de 10 euros par jour de retard, à compter du 15ème jour suivant la notification du présent jugement,

Condamné Me [V], ès qualité, au paiement d'une indemnité de 100 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile🏛,

Dit et juge que la garantie de l'AGS n'a vocation à s'appliquer que dans les limites des dispositions des articles L.3253-8 et suivants du Code du Travail🏛,

Dit et juge qu'au regard du principe de subsidiarité, le CGEA-AGS ne doit sa garantie qu'autant qu'il n'existe pas de fonds disponibles dans la procédure collective,

Dit et juge que le CGEA-AGS ne garantit que les montants dus au titre de l'exécution du contrat de travail,

Dit et juge que le CGEA-AGS ne garantit pas les montants alloués au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile🏛 ni même les astreintes,

Dit et juge qu'en application des dispositions de l'article L.621-48 du Code de Commerce🏛, les intérêts cessent de courir à compter du jour de l'ouverture de la procédure collective,

Dit et juge que la garantie de l'AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis à l'article D.3253-5 du Code du Travail🏛,

Déboute Me [V] et le CGEA-AGS de leurs autres demandes reconventionnelles,

Met les frais et dépens à la charge de la liquidation judiciaire de la SARL Arpitec.



Par déclaration formée par voie électronique le 27 octobre 2020 et enregistrée au greffe le jour même, M. [R] a régulièrement interjeté appel du jugement.


Par ses dernières conclusions datées du 28 septembre 2021, M. [R] demande à la Cour de :


Prendre acte de l'ouverture de la procédure collective de la SARL Arpitec, par jugement prononcé le 12 février 2019 par la chambre commerciale du Tribunal de Grande Instance de Sarreguemines.

Dire et juger recevable sa demande tendant à l'intervention de Me [I] [V], ès qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL Arpitec.

Fixer sa créance à la liquidation judiciaire de la SARL Arpitec aux sommes de :

'4 836,55 euros, au titre des heures supplémentaires

'7 383,38 euros, au titre du solde des RTT pour les années 2017 et 2018

'146,62 euros, au titre des frais de fournitures atelier et des frais de carburant impayés.

Déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable au CGEA de [Localité 4].

Condamner Maître [I] [V], ès qualité, au paiement d'une indemnité d'un montant de 1 440 euros, au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile🏛.


Par ses dernières conclusions datées du 19 avril 2021, Me [V], ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL Arpitec, demande à la Cour de :


Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Débouter le salarié de ses prétentions liées aux heures supplémentaires et aux RTT ainsi qu'aux frais de fournitures atelier et frais de carburant impayés.

Dire et juger qu'en application des dispositions de l'article L.621-48 du code de commerce🏛, les intérêts cessent de courir à compter du jour de l'ouverture de la procédure collective,

Mettre les entiers frais et dépens à la charge de M. [R].


Par ses dernières conclusions datées du 19 avril 2021, l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 4] demande à la Cour de :


Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Débouter le salarié de ses prétentions liées aux heures supplémentaires et aux RTT ainsi qu'aux frais de fournitures atelier et frais de carburant impayés.

Dire et juger que la garantie de l'AGS n'a vocation à s'appliquer que dans les limites des dispositions des articles L.3253-8 et suivants du Code du Travail🏛.

Dire et juger qu'au regard du principe de subsidiarité, le CGEA AGS ne doit sa garantie qu'autant qu'il n'existe pas de fonds disponibles dans la procédure collective.

En tout état de cause, rappeler les grands principes et limites applicables en matière de garanties sur les salaires.

Mettre les entiers frais et dépens à la charge de M. [R].


L'ordonnance de clôture a été rendue le 06 octobre 2021.


Il convient en application de l'article 455 du Code de procédure civile🏛 de se référer aux conclusions respectives des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.



MOTIFS


A titre liminaire, la cour relève qu'aucune des parties n'a fait appel s'agissant des dispositions relatives au rappel de salaire pour le mois de mars 2019 de sorte que le jugement entrepris est devenu définitif sur ce point.


Sur le rappel d'heures supplémentaires


M. [R] sollicite le paiement d'heures supplémentaires en 2017, 2018 et 2019 au motif que le forfait annuel en jours mentionné dans son contrat de travail ne s'appliquait pas pour la période correspondant au litige.


M. [R] soutient que son salaire était calculé sur une base de 151,67 heures, générant de ce fait la possibilité d'heures supplémentaires, et que les bulletins de paie correspondant aux années 2018 et 2019 ne mentionnaient quant à eux plus du tout le forfait annuel en jours.


M. [R] fait valoir qu'il ne disposait d'aucune autonomie, ses horaires professionnels en atelier étant en effet contrôlés par une pointeuse et son activité sur les sites extérieurs étant régie par les règles s'appliquant sur ces sites.


M. [R] affirme qu'il n'a jamais eu le moindre entretien annuel avec son employeur et que Me [V], ès qualité, reconnaît expressément, par aveu judiciaire, que les conditions d'application d'un forfait annuel, telles qu'elles résultent des dispositions de l'article L.3121-6 du Code du Travail🏛, n'ont jamais été respectées par l'employeur.


Enfin, M. [R] soutient qu'à supposer que, par impossible, le forfait jours se soit appliqué, sa demande n'en demeurerait pas moins justifiée puisqu'en cas de dépassement du forfait de 217 jours, il avait le droit de bénéficier de jours de repos supplémentaires ou d'une rémunération de jours de travail supplémentaire, rémunérés et majorés à 25 %.


Me [V], ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL Arpitec, et l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 4] répliquent que les conditions de validité du forfait jours étaient remplies et que M. [R] n'avait pas droit au paiement d'heures supplémentaires.

Me [V], ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL Arpitec, et l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 4] soutiennent que M. [R] disposait d'une réelle autonomie et d'une totale liberté dans l'organisation de son travail.


Ils soulignent que l'installation d'une pointeuse au profit du personnel n'est pas de nature à modifier la réalité de l'accord trouvé fixant la durée du travail à 217 jours travaillés au cours de l'année.


Sur la validité du forfait en jours


L'article L.3121-39 du code du travail🏛, dans sa version applicable au jour de la signature du contrat de travail prévoyant un forfait jours, autorise la conclusion de conventions individuelles de forfait en heures ou en jours sur l'année, si elle est prévue par un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche et renvoie à cet accord notamment la détermination des catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait.


L'article L.3121-40 du code du travail🏛, dans sa version applicable au litige, ajoute que la conclusion d'une convention individuelle de forfait requiert l'accord du salarié et est établie par écrit.


L'article L.3121-43 du code du travail🏛, dans sa version applicable au litige, autorise l'employeur à conclure une convention de forfait en jours sur l'année avec les cadres qui disposent d'une autonomie d'organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auxquels ils sont intégrés, ainsi qu'avec les salariés dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps pour l'exercice des responsabilités qui leurs sont confiées.


L'article L.3121-46 du code du travail🏛, dans sa version résultant de la loi n°2008-789 du 20 août 2008🏛, dispose qu'un entretien annuel individuel est organisé par l'employeur avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l'année. Il porte sur la charge de travail du salarié, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie personnelle, ainsi que sur la rémunération du salarié.


L 'article L.3121-65 du même code🏛, dans sa version applicable à compter du 10 août 2016, prévoit qu'à défaut de stipulations conventionnelles prévues aux 1° et 2° du II de l'article L.3121-64, une convention individuelle de forfait en jours peut être valablement conclue sous réserve du respect des dispositions suivantes :

1° L'employeur établit un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées. Sous la responsabilité de l'employeur, ce document peut être renseigné par le salarié ;

2° L'employeur s'assure que la charge de travail du salarié est compatible avec le respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires ;

3° L'employeur organise une fois par an un entretien avec le salarié pour évoquer sa charge de travail, qui doit être raisonnable, l'organisation de son travail, l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle ainsi que sa rémunération.


L'article L.3121-60 du code du travail🏛, dans sa version en vigueur à compter du 10 août 2016, prévoit que l'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail.


En l'espèce, le contrat de travail de M. [R] était soumis à la convention collective des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieur-conseil et des sociétés de conseil (SYNTEC) et à l'accord national sur la réduction du temps de travail SYNTEC du 22 juin 1999 qui autorisent le recours au forfait jours.


L'article III « rémunération du forfait jours » du contrat de travail de M. [R] à effet du 1er septembre 2010 prévoit que, compte tenu du degré d'autonomie de ce dernier, il sera rémunéré sur la base de 217 jours sur l'année et percevra une rémunération annuelle brute forfaitaire de 32 500 euros.


Les avenants successifs au contrat de travail relatifs à l'emploi et aux attributions de M. [R] disposent que « les clauses existantes au contrat initial restent inchangées ».


Les parties ont donc convenu d'un commun accord de l'application du régime du forfait jours. Le fait que les bulletins de salaire de mars 2018 à février 2019 ne renseignent pas sur la nature du forfait et le nombre de jours de travail, contrairement aux bulletins de salaire de l'année 2017 qui indiquent « forfait annuel de 217 jours », et le fait que l'ensemble des bulletins de salaire mentionnent par erreur une base horaire de 151,67 heures ne suffisent pas à rendre sans effet la clause prévoyant un forfait jours auquel M. [R] a consenti en signant son contrat de travail.


De plus, il n'est pas démontré qu'en qualité de responsable d'atelier, M. [R] était soumis à l'horaire collectif et aux règles des sites et ne disposait d'aucune autonomie dans l'organisation de son emploi du temps. En l'occurrence, il ressort des relevés de pointage que M. [R] pouvait prendre son poste après 8 heures et pouvait quitter son poste avant 12 heures ou avant 16 heures sans en justifier les raisons à la direction ou demander une autorisation et que ses temps de pause n'étaient pas contrôlés puisqu'il pouvait prendre moins d'une heure comme plus d'une heure en fonction des jours si bien que l'appelant bénéficiait d'une large autonomie permettant à l'employeur de conclure une convention de forfait jours avec lui.


Par contre, Me [V], ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL Arpitec, reconnaît expressément que compte tenu du poste occupé par M. [R] au sein de cette entreprise spécialisée dans le secteur d'activité de l'ingénierie des études techniques et de son degré d'autonomie, il est évident qu'aucun contrôle de son temps de travail n'était envisageable.


Le représentant de l'employeur ne justifie donc pas que celui-ci a contrôlé la charge de travail du salarié ni organisé le moindre entretien individuel qui lui aurait permis de remédier en temps utile à une charge de travail de M. [R] éventuellement incompatible avec une durée raisonnable, en tout cas entre 2017 et 2019, étant précisé que le système de pointage et les relevés d'activité n'étaient pas de nature à eux seuls à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables ni à assurer une bonne répartition du travail de l'intéressé dans le temps.


L'inobservation des règles légales dont le respect est de nature à assurer la protection et la sécurité et la santé du salarié soumis à un forfait en jours prive ainsi d'effet la clause de forfait jours qui doit être déclarée inopposable au salarié, ce qui lui ouvre droit au paiement d'heures supplémentaires, sous réserve qu'elles soient établies, peu important que M. [R] ne se soit jamais plaint des heures réalisées.


Sur les heures supplémentaires


Il résulte de l'article L. 3171-4 du Code du travail🏛 que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié et que le juge doit se déterminer au vu de ces éléments et de ceux produits par le salarié.


Le salarié étant en demande, il lui appartient néanmoins de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande, tant sur l'existence des heures dont il revendique le paiement que sur leur quantum, à charge pour l'employeur de les contester ensuite en produisant ses propres éléments.


Ces éléments doivent être suffisamment sérieux et précis quant aux heures effectivement réalisées pour permettre à l'employeur d'y répondre.


En l'espèce, M. [R] produit les relevés du système de pointage du 1er janvier 2017 au 31 mai 2017 et les relevés d'activité complétés par les responsables de site et signés par l'employeur du 24 septembre 2018 au 20 janvier 2019 de sorte que par la production de ces pièces, M. [R] fournit des éléments sérieux et précis de nature à étayer sa demande tant sur l'existence des heures dont il revendique le paiement que sur leur quantum.


Il appartient donc à l'employeur de les contester par la production des heures de travail effectivement réalisées par le salarié, ce qu'il ne fait pas. Me [V], ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL Arpitec, ne conteste pas d'avantage les modalités de calculs présentées par M. [R] et établies en fonction des relevés de pointage et des rapports d'activité.


Par conséquent, infirmant le jugement entrepris, il convient de fixer au passif de la SARL Arpitec la créance de M. [R] à un montant total de 4 836,55 euros au titre du rappel d'heures supplémentaires (2 337,21 euros pour 2017 + 2 499, 34 euros pour 2018 et 2019).


Sur les repos au titre de la réduction du temps de travail


M. [R] sollicite le paiement des RTT qu'il n'a pas pu prendre compte tenu des nombreux projets qu'il avait à effectuer.


Me [V], ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL Arpitec, et l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 4] soutiennent que M. [R] ne justifie pas avoir entamé une quelconque démarche pour bénéficier de ses jours de RTT et conteste la validité de l'attestation de Mme [B].


La cour rappelle qu'à défaut d'un accord collectif prévoyant une indemnisation, l'absence de prise des jours de repos au titre de la réduction du temps de travail n'ouvre droit à une indemnité que si cette situation est imputable à l'employeur.


En l'espèce, la seule pièce produite par M. [R] à cet égard, à savoir l'attestation de Mme [G] [B], d'une part, ne répond pas aux exigences de l'article 202 du code de procédure civile🏛 en ce qu'elle n'est pas annexée de la pièce identité de l'auteur de l'attestation mais par celle de Mme [Ab] [Ac], née [J], et d'autre part, est rédigée en termes généraux sans préciser quels étaient les « impératifs de fonctionnement de l'entreprise », les « exigences des chantiers successifs » ni les « délais de réception des travaux » et en quoi ils empêchaient M. [R] de prendre ses RTT.


Il n'est donc nullement établi que le salarié ait été soumis à une charge de travail excessive qui l'aurait mis dans l'impossibilité de prendre les jours de RTT auxquels il avait droit comme il le prétend. M. [R], qui ne justifie pas que l'absence de prise de ses jours de RTT est imputable à l'employeur et n'invoque aucun accord collectif prévoyant l'indemnisation des jours non pris, sera alors débouté de sa demande de paiement des RTT non pris et le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a statué en ce sens.


Sur le remboursement des frais


M. [R] demande le remboursement des frais de fournitures en atelier ainsi que des frais de carburant.


Me [V], ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL Arpitec, et l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 4] répliquent qu'aucun élément justificatif d'achat de carburant ou de frais n'est produit.


En l'espèce, M. [Aa] se borne à produire la déclaration de créance du 27 août 2018, envoyée à la SELAS [V] et Associés, relative au frais de fourniture d'atelier (10,80 euros) et au frais de carburant (135,82 euros) sans justifier d'aucune facture de fourniture d'atelier ni de carburant, ce malgré la demande du mandataire liquidateur de production des pièces justificatives le 29 août 2018.


Il convient dès lors de débouter M. [R] de sa demande de remboursement de frais et le jugement entrepris sera confirmé en ce sens sur ce point.


Sur la garantie de l'Unedic, délégation AGS CGE AGS de [Localité 4], les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile🏛


Il convient de rappeler que l'Unedic, Délégation AGS CGEA de [Localité 4] n'est redevable de sa garantie que dans les limites précises des dispositions légales des articles L.3253-6 et L. 3253-8 du code du travail🏛.


Il sera également rappelé que le jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire de l'intimée a fait cesser le cours des intérêts.


Le jugement entrepris sera confirmé s'agissant de ses dispositions sur les dépens et sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile🏛.


Les dépens accroîtront les frais privilégiés de la procédure de liquidation judiciaire et l'équité n'impose pas l'application de l'article 700 du code de procédure civile🏛.



PAR CES MOTIFS,


La Cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,


Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté M. [T] [R] de sa demande de rappel d'heures supplémentaires.


Et, statuant à nouveau dans cette limite, et y ajoutant,


Fixe la créance de M. [T] [R] au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Arpitec, représentée par Me [V], ès qualité de mandataire liquidateur, à la somme de 4 836,55 euros bruts au titres des heures supplémentaires réalisées en 2017, 2018 et 2019.


Dit que l'UNEDIC, délégation AGS CGEA de [Localité 4] doit sa garantie à titre subsidiaire pour le paiement des créances fixées en application de l'article L. 3253-8 1° du code du travail🏛, y compris les dommages et intérêts liés à la rupture du contrat de travail, selon les conditions et les limites prévues par les lois et règlements applicables en matière de garantie des salaires.


Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile🏛.


Dit que les dépens seront traités comme frais privilégiés de la procédure de liquidation judiciaire de la SARL Arpitec, représentée par son liquidateur ès qualité.


La Greffière, P/La Présidente régulièrement empêchée

La Conseillère,

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