Jurisprudence : Cass. com., 01-06-2022, n° 21-11.921, F-D, Cassation


COMM.

FB


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 1er juin 2022


Cassation


Mme DARBOIS, conseiller doyen
faisant fonction de président


Arrêt n° 348 F-D

Pourvoi n° S 21-11.921


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 1ER JUIN 2022


1°/ La société [Y] constructeurs, société anonyme,

2°/ la société Olympia développement, société par actions simplifiée,

ayant toutes deux leur siège [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° S 21-11.921 contre l'arrêt rendu le 10 décembre 2020 par la cour d'appel de Grenoble (chambre commerciale), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [Y] [O], domicilié [… …],

2°/ à la société BTS, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4],

3°/ à la société Hydrosystem, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Champalaune, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Aa et Rebeyrol, avocat des sociétés [Y] constructeurs et Olympia développement, de la SARL Boré, Ab de Bruneton et Mégret, avocat de M. [O] et de la société BTS, et l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 avril 2022 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Champalaune, conseiller rapporteur, Mme Michel-Amsellem, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 10 décembre 2020), la société [Y] constructeurs, filiale de la société Olympia développement, conçoit et fabrique des véhicules spéciaux.

2. Estimant que M. [Ac], son ancien salarié, qui a créé, le 30 mars 2015, la société BTS, installée dans les locaux de la société Hydrosystem, et que M. [Ad], un autre de ses anciens salariés tenu par une clause de non-concurrence et aussi embauché par cette dernière, avaient commis des actes de concurrence déloyale envers elle, la société [Y] constructeurs, ainsi que la société Olympia développement, ont assigné M. [Ac], M. [Ad], la société BTS et la société Hydrosystem en réparation de leurs préjudices. Elles demandaient également la suppression, sous astreinte, de documents et le prononcé d'une mesure d'interdiction d'exercice contre la société BTS.


Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses cinquième et sixième branches, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches, réunies

Enoncé du moyen

4. Les sociétés [Y] constructeurs et Olympia développement font grief à l'arrêt de rejeter leurs prétentions contre la société BTS et M. [Ac], ce dernier en sa qualité de gérant de la société BTS, alors :

« 1°/ que l'appropriation, par des procèdes déloyaux, d'informations confidentielles relatives à l'activité d'un concurrent, constitue un acte de concurrence déloyale ; qu'en l'espèce, il résultait des propres constatations de la cour d'appel que M. [Ac], ancien salarié de la société [Y] constructeurs, avait fondé une société ayant une activité concurrente, la société BTS, et qu'il s'était "approprié (…) des données notamment techniques appartenant à la société [Y] Constructeurs" sans motif légitime, de sorte que M. [Ac] avait ainsi commis une faute, de même que sa société BTS qui détenait ces données ; qu'en retenant toutefois qu'il appartenait aux sociétés [Y] constructeurs et Olympia développement "d'établir que ces détournements de données (avaient) permis l'accomplissement d'actes de concurrence déloyale", la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences qui découlaient de ses propres constatations, a violé par refus d'application l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil🏛 ;

3°/ que la création, par un ancien salarié, d'une entreprise concurrente de celle dans laquelle il était auparavant employé est constitutive d'un acte de concurrence déloyale lorsqu'elle s'accompagne de pratiques illicites ; qu'en l'espèce, il résultait des propres constatations de la cour d'appel que M. [Ac], qui avait créé et dirigeait la société BTS concurrente de la société [Y] constructeurs, s'était indûment approprié des données appartenant à cette dernière société, dont il était l'ancien salarié ; qu'en jugeant encore qu'aucun acte de concurrence déloyale n'était établi au motif que M. [O] était libre de créer une société avec une activité "éventuellement concurrente", la cour d'appel a violé de plus fort, par refus d'application, l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil🏛 ;

4°/ que l'appropriation, par des procèdes déloyaux, d'informations confidentielles relatives à l'activité d'un concurrent constitue un acte de concurrence déloyale ; qu'en retenant qu'aucun acte de concurrence déloyale ne pouvait être reproché à M. [O] aux motifs qu'il était délié de son contrat de travail et de toute clause restrictive à la suite d'une rupture négociée, quand ces circonstances ne l'autorisaient pas à piller les données de la société [Y] constructeurs au profit de la société qu'il avait créée, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil🏛 . »


Réponse de la Cour

Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil🏛 :

5. Selon ce texte, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

6. Pour rejeter les demandes des sociétés [Y] constructeurs et Ae développement dirigées contre M. [Ac] et la société BTS, l'arrêt retient que des données émanant de la société [Y] constructeurs ont été retrouvées, en 2016, sur l'ordinateur professionnel de M. [Ac] se trouvant dans les locaux de la société BTS, qu'à cette date, il ne justifiait plus d'aucun motif légitime pour détenir ces documents, qu'il s'est approprié des données, notamment techniques, appartenant à la société [Y] constructeurs, mais qu'il appartient aux sociétés [Y] constructeurs et Olympia développement d'établir que ces détournements de données ont permis l'accomplissement d'actes de concurrence déloyale. Il retient que M. [O] était libre de créer cette société, avec une activité éventuellement concurrente, étant délié de son contrat de travail et de toute clause restrictive à la suite d'une rupture négociée.

7. En statuant ainsi, alors que la conservation d'informations confidentielles appartenant à une société tierce par un ancien salarié, ne serait-il pas tenu par une clause de non-concurrence, et leur appropriation par la société qu'il a créée, constitue un acte de concurrence déloyale, la cour d'appel a violé le texte susvisé.


Sur le deuxième moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, réunies

Enoncé du moyen

8. Les sociétés [Y] constructeurs et Olympia développement font grief à l'arrêt de rejeter leurs prétentions contre la société Hydrosystem, alors :

« 2°/ qu'il ressortait des propres constatations de la cour d'appel que les sociétés Hydrosystem et [Y] constructeurs étaient "marginalement en concurrence" ou encore que la première était "accessoirement une concurrente de la seconde", ce dont il résultait nécessairement qu'une concurrence, fût-elle réduite, existait entre elles, de sorte qu'en excluant toute concurrence déloyale de ce fait, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil🏛 ;

3°/ que le fait d'embaucher en toute connaissance de cause le salarié d'une société concurrente au mépris d'une clause de non-concurrence constitue un acte de concurrence déloyale ; qu'en l'espèce, la société Hydrosystem avait procédé à l'embauche de M. [I] alors qu'il était lié par une clause de non-concurrence souscrite au profit des exposantes, clause dont elle avait eu connaissance, ce qui établissait la faute de la société Hydrosystem ; qu'en estimant toutefois que l'embauche de M. [I] à partir du 1er janvier 2016 ne pouvait suffire à établir un débauchage de ce salarié, "peu important que la société Hydrosystem ait connu ou non l'existence d'une clause de non-concurrence dans le contrat de travail de M. [Ad], au regard de faits de concurrence non établis", la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil🏛. »


Réponse de la Cour

Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil🏛 :

9. Pour rejeter les demandes formées contre la société Hydrosystem au titre de l'embauche de M. [Ad], l'arrêt retient qu'aucun acte de concurrence déloyale ne peut lui être imputé, cependant qu'elle n'est qu'accessoirement une concurrente de la société [Y] constructeurs, pour une très faible part de son chiffre d'affaires, et que l'embauche de M. [I], à partir du 1er janvier 2016, ne peut suffire à établir un débauchage de ce salarié, peu important que la société Hydrosystem ait connu ou non l'existence d'une clause de non-concurrence dans le contrat de travail de M. [Ad], au regard de faits de concurrence non établis.

10. En statuant ainsi, alors que commet une faute délictuelle celui qui, sciemment, recrute un salarié en connaissance de l'obligation de non-concurrence souscrite par ce dernier au bénéfice de son ancien employeur, peu important le faible degré de concurrence existant entre les ancien et nouvel employeurs et sans qu'il soit nécessaire d'établir à son encontre l'existence de manœuvres déloyales, la cour d'appel a violé le texte susvisé.


Sur ce moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

11. Les sociétés [Y] constructeurs et Olympia développement font le même grief à l'arrêt, alors « que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, les sociétés [Y] constructeurs et Olympia développement rappelaient que de nombreux documents confidentiels et stratégiques dont elles précisaient la teneur avaient "été retrouvés directement sur l'ordinaAfeur de M. [J][L]", dirigeant de la société Hydrosystem, lesquels ne concernaient pas des prestations confiées par [Y] constructeurs à la société Hydrosystem, détention qui établissait la faute de la société Hydrosystem ; qu'en ne répondant à ces conclusions dirimantes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile🏛. »


Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile🏛 :

12. Le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs.

13. Par les mêmes motifs que ceux précédemment rappelés, l'arrêt rejette les demandes formées contre la société Hydrosystem au titre de la détention fautive d'informations.

14. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions des sociétés [Y] constructeurs et Olympia développement soutenant que la société Hydrosystem détenait illicitement des documents leur appartenant, la cour d'appel a violé le texte susvisé.


Et sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

15. Les sociétés [Y] constructeurs et Olympia développement font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes et, en particulier, leur demande de suppression des documents détenus par M. [Ac] et les sociétés BTS et Hydrosystem, alors « que le juge ne peut pas méconnaître les termes du litige, tels qu'ils s'évincent des conclusions des parties ; qu'en l'espèce, les exposantes invitaient le juge à condamner "les sociétés Hydrosystem et BTS à supprimer de tous (leurs) ordinateurs, disques durs ou tous supports informatiques les plans qu'elles détiennent frauduleusement (intégralité des pièces saisies aux constats) et sous astreinte de 50 000 euros par infraction constatée", constats qui étaient produits et qui décrivaient précisément les fichiers saisis par l'huissier et indûment stockés par les sociétés BTS et Hydrosystem ; qu'en rejetant une telle demande aux motifs qu'elle était "indéterminée" ou "non détaillée concernant les fichiers concernés", la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile🏛. »


Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile🏛 :

16. Selon ce texte, la censure qui s'attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation, sauf le cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.

17. La cassation prononcée sur le premier moyen entraîne la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif critiqué par le moyen, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

Sur la demande de mise hors de cause

18. En application de l'article 625 du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de mettre hors de cause M. [Ac] et la société BTS, dont la présence est nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 décembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Rejette la demande de mise hors de cause M. [Ac] et de la société BTS ;

Condamne M. [O], la société BTS et la société Hydrosystem aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par M. [O] et la société BTS et les condamne in solidum à payer à la société [Y] constructeurs et la société Olympia développement la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du premier juin deux mille vingt-deux. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau, Aa et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour les sociétés [Y] constructeurs et Olympia développement.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Les sociétés [Y] Constructeurs et Olympia Développement font grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR jugé qu'elles devaient être déboutées de leurs prétentions à l'encontre de la société BTS et de M. [Y] [O], ce dernier en sa qualité de gérant de la société BTS,

1°/ ALORS QUE l'appropriation, par des procèdes déloyaux, d'informations confidentielles relatives à l'activité d'un concurrent, constitue un acte de concurrence déloyale ; qu'en l'espèce, il résultait des propres constatations de la cour d'appel que M. [Ac], ancien salarié de la société [Y] Constructeurs, avait fondé une société ayant une activité concurrente, la société BTS, et qu'il s'était « approprié (…) des données notamment techniques appartenant à la sociétéì [Y] Constructeurs » sans motif légitime (arrêt attaqué, p. 16), de sorte que M. [Ac] avait ainsi commis une faute, de même que sa société BTS qui détenait ces données ; qu'en retenant toutefois qu'il appartenait aux exposantes « d'établir que ces détournements de données (avaient) permis l'accomplissement d'actes de concurrence déloyale » (arrêt attaqué, p. 16), la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences qui découlaient de ses propres constatations, a violé par refus d'application l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil🏛.

2°/ ALORS QUE l'appropriation, par des procèdes déloyaux, d'informations confidentielles relatives à l'activité d'un concurrent, constitue un acte de concurrence déloyale ; qu'en l'espèce, les exposantes soutenaient encore que la responsabilité de la société BTS, qui exerçait une activité concurrente à la société [Y] Constructeurs, était engagée en raison « des documents trouvés sur l'ordinateur de la société BTS » par l'huissier, lesquelles constituaient des « données propres à [Y] Constructeurs qui n'avaient aucune vocation à se retrouver dans les données d'une société concurrente » (concl. d'appel [Y] Constructeurs, p. 38), en sorte qu'elle était « responsable du détournement de documents » et « complice de la violation de la clause de secret professionnel » (concl. d'appel [Y] Constructeurs, p. 39) ; qu'en excluant toute faute de la société BTS aux motifs inopérants que les activités des sociétés Hydrosystem et [Y] Constructeurs n'étaient que marginalement en concurrence, ce qui n'excluait en rien la faute de la société BTS, qui était une société distincte, la cour d'appel a violé de plus fort l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil🏛.


3°/ ALORS QUE la création, par un ancien salarié, d'une entreprise concurrente de celle dans laquelle il était auparavant employé est constitutive d'un acte de concurrence déloyale lorsqu'elle s'accompagne de pratiques illicites ; qu'en l'espèce, il résultait des propres constatations de la cour d'appel que M. [Ac], qui avait créé et dirigeait la société BTS concurrente de la société [Y] Constructeurs, s'était indûment approprié des données appartenant à cette dernière société, dont il était l'ancien salarié ; qu'en jugeant encore qu'aucun acte de concurrence déloyale n'était établi au motif que M. [O] était libre de créer une société avec une activité « éventuellement concurrente » (arrêt attaqué, p. 16), la cour d'appel a violé de plus fort, par refus d'application, l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil🏛.

4°/ ALORS QUE l'appropriation, par des procèdes déloyaux, d'informations confidentielles relatives à l'activité d'un concurrent constitue un acte de concurrence déloyale ; qu'en retenant qu'aucun acte de concurrence déloyale ne pouvait être reproché à M. [O] aux motifs qu'il était délié de son contrat de travail et de toute clause restrictive à la suite d'une rupture négociée, quand ces circonstances ne l'autorisaient pas à piller les données de la société [Y] Constructeurs au profit de la société qu'il avait créée, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil🏛.

5°/ ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, il était établi que le projet d'élaborer une société concurrente était envisagé par M. [O] depuis 2013, société dont le business plan mentionnait les clients de la société [Y] Constructeurs et qui verra finalement le jour sous les traits de la société BTS ; qu'en retenant, d'une part, qu'il ne peut être « soutenu que la création d'une activité concurrente était envisagée depuis plusieurs années » (arrêt attaqué, p. 16) par M. [O] tout en relevant, d'autre part, que le business plan évoquant la création d'une société nouvelle avait été élaboré au cours de l'année 2013, fût-ce en réponse à la crainte du dépôt de bilan de la société Constructeurs, ce dont il résultait nécessairement que le projet d'élaborer une activité concurrente remontait à plusieurs années, la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé l'article 455 du code de procédure civile🏛.

6°/ ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, les exposantes soutenaient qu'il n'existait aucune preuve de ce que les difficultés passagères rencontrées par la société [Y] Constructeurs étaient susceptibles de « menacer la pérennité de l'entreprise » (concl. d'appel, p. 29-30), ajoutant que la société [Y] Constructeurs était restée pleinement active jusqu'à ce jour et que, juste après le départ de MM. [O] et [I], elle avait au demeurant embauché deux ingénieurs à « rémunération égale ou supérieure » (concl. d'appel, p. 31) ; qu'en ne répondant pas à ce chef dirimant des conclusions, d'où il ressortait que les prétendues difficultés rencontrées par la société [Y]


Constructeurs n'expliquaient en rien l'élaboration d'un business plan relatif à la création d'une société directement concurrente reprenant les clients de la société [Y] Constructeurs, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile🏛.

7°/ ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, les exposantes soutenaient que M. [Ac] avait eu un comportement déloyal à l'égard de son ancien employeur pour avoir notamment adressé un courriel anonyme et mensonger au commissaire aux comptes dénonçant des prétendues majorations artificielles des encours de fabrication (concl. d'appel, p. 32), courriel que la société BTS avait produit en sorte que M. [O] en était nécessairement l'auteur (concl. d'appel, p. 32) ; qu'en ne répondant pas à ce chef dirimant des conclusions, d'où ressortait encore la faute des sociétés BTS et de M. [Ac], la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile🏛.

8°/ ALORS QU'une situation de concurrence directe ou effective entre deux sociétés n'est pas une condition de l'action en concurrence déloyale qui exige seulement l'existence de faits fautifs générateurs d'un préjudice ; qu'en écartant la responsabilité de la société BTS aux motifs inopérants que, à la différence de celle-ci, la société [Y] Constructeurs n'avait aucune activité dans le domaine agricole, tout en relevant d'ailleurs qu'elle avait été tentée par un projet d'épandeur, et donc projeté de déployer son activité dans le domaine agricole, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil🏛.

9°/ ALORS QUE tout acte de concurrence déloyal oblige celui qui en est l'auteur à réparer le préjudice qu'il a causé ; qu'en l'espèce, les exposantes soutenaient et offraient de prouver, schémas à l'appui, que le projet de camion d'épandeur de la société [Y] Constructeurs était très similaire à celui que commercialisera par la suite la société BTS (concl. d'appel, p. 49 s.) ; qu'en se bornant à relever que le projet Agro-Tract de la société BTS avait justifié de nombreuses heures de recherches et de développement pour exclure toute faute de sa part, quand ces éléments n'excluaient nullement qu'elle ait pu s'appuyer sur les recherches préalablement effectuées par la société [Y] Constructeurs, dont elle s'était accaparé les données, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil🏛, devenu 1240 du même code🏛 depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016🏛.

10°/ ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, la société [Y] Constructeurs soutenait et offrait de prouver que M. [W] [K], qui l'avait sollicitée en premier lieu pour élaborer un épandeur, avait été détourné par la société BTS auprès de laquelle elle avait acquis un épandeur Agro-Tract en 2018, comme l'affirmait la société BTS elle-même en février 2018, ce que démontraient les images du site internet de la société BTS reproduites par les exposantes dans leurs conclusions d'appel (concl. d'appel, p. 55) ; qu'en retenant que M. [K] n'avait acquis aucun épandeur « ayant conservé son ancien matériel » (arrêt attaqué, p. 16), sans répondre aux conclusions des exposantes sur ce point, qui démontraient le contraire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile🏛.

DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION

Les sociétés [Y] Constructeurs et Olympia Développement font grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR jugé qu'elles devaient être déboutées de leurs prétentions à l'encontre de la société Hydrosystem,

1°/ ALORS QU'une situation de concurrence directe ou effective entre deux sociétés n'est pas une condition de l'action en concurrence déloyale qui exige seulement l'existence de faits fautifs générateurs d'un préjudice ; qu'en retenant qu'aucun acte de concurrence déloyale ne pouvait être imputé à la société Hydrosystem dès lors « qu'elle n'est qu'accessoirement une concurrente de la société [Y] Constructeurs, pour une très faible part de son chiffre d'affaires » (arrêt attaqué, p. 17), la cour d'appel, qui a statué par motifs inopérants, a violé l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil🏛.

2°/ ALORS, à tout le moins, QU'il ressortait des propres constatations de la cour d'appel que les sociétés Hydrosystem et [Y] Constructeurs étaient « marginalement en concurrence » (arrêt attaqué, p. 16) ou encore que la première était « accessoirement une concurrente de la seconde » (arrêt attaqué, p. 17), ce dont il résultait nécessairement qu'une concurrence, fût-elle réduite, existait entre elles, de sorte qu'en excluant toute concurrence déloyale de ce fait, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil🏛.

3°/ ALORS QUE le fait d'embaucher en toute connaissance de cause le salarié d'une société concurrente au mépris d'une clause de non-concurrence constitue un acte de concurrence déloyale ; qu'en l'espèce, la société Hydrosystem avait procédé à l'embauche de M. [I] alors qu'il était lié par une clause de non-concurrence souscrite au profit des exposantes, clause dont elle avait eu connaissance, ce qui établissait la faute de la société Hydrosystem ; qu'en estimant toutefois que l'embauche de M. [I] à partir du 1er janvier 2016 ne pouvait suffire à établir un débauchage de ce salarié, « peu important que la société Hydrosystem ait connu ou non l'existence d'une clause de non-concurrence dans le contrat de travail de M. [Ad], au regard de faits de concurrence non établis » (arrêt attaqué, p. 17), la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil🏛.

4°/ ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, les exposantes rappelaient que de nombreux documents confidentiels et stratégiques dont elles précisaient la teneur avaient « été retrouvés directement sur l'ordinateur de M.[Af] [L] » (concl. d'appel, p. 72 s.), dirigeant de la société Hydrosystem, lesquels ne concernaient pas des prestations confiées par [Y] Constructeurs à la société Hydrosystem, détention qui établissait la faute de la société Hydrosystem ; qu'en ne répondant à ces conclusions dirimantes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile🏛.

TROISIÈME MOYEN DE CASSATION

Les sociétés [Y] Constructeurs et Olympia Développement font grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR jugé qu'elles devaient être déboutées de leurs demandes et, en particulier, de leur demande de suppression des documents détenus par M. [Ac] et les sociétés BTS et Hydrosystem,

ALORS QUE le juge ne peut pas méconnaître les termes du litige, tels qu'ils s'évincent des conclusions des parties ; qu'en l'espèce, les exposantes invitaient le juge à condamner « les sociétés HYDROSYSTEM et BTS à supprimer de tous (leurs) ordinateurs, disques durs ou tous supports informatiques les plans qu'elles détiennent frauduleusement (intégralité des pièces saisies aux constats) et sous astreinte de 50 000 € par infraction constatée » (concl. d'appel [Y] Constructeurs, p. 92), constats qui étaient produites et qui décrivaient précisément les fichiers saisis par l'huissier et indûment stockés par les sociétés BTS et Hydrosystem ; qu'en rejetant une telle demande aux motifs qu'elle était « indéterminée » ou « non détaillée concernant les fichiers concernés », la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile🏛.

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