Jurisprudence : Cass. civ. 2, 14-04-2022, n° 21-16.435, FS-B, Rejet

Cass. civ. 2, 14-04-2022, n° 21-16.435, FS-B, Rejet

A44677TM

Référence

Cass. civ. 2, 14-04-2022, n° 21-16.435, FS-B, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/83585759-cass-civ-2-14042022-n-2116435-fsb-rejet
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Abstract

► Lorsque le professionnel de santé, considéré comme responsable du dommage, ou l'assureur garantissant sa responsabilité civile, fait opposition au titre exécutoire émis par l'ONIAM, subrogé dans les droits de la victime sur le fondement de l'article L. 1142-15 du Code de la santé publique pour recouvrer les sommes versées, ce recours tend à contester devant le juge le principe de sa responsabilité ou le montant de la réparation ; par suite, ce recours relève, dans tous les cas, de la matière délictuelle au sens de l'article 46, alinéa 3, du Code de procédure civile et peut être porté devant la juridiction du lieu du fait dommageable.


CIV. 2

LM


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 14 avril 2022


Rejet


M. PIREYRE, président


Arrêt n° 404 FS-B

Pourvoi n° Y 21-16.435


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 14 AVRIL 2022



L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), dont le siège est [Adresse 4], [Localité 2], a formé le pourvoi n° Y 21-16.435 contre l'arrêt rendu le 11 mars 2021 par la cour d'appel de Lyon (6e chambre), dans le litige l'opposant à la Mutuelle assurances corps médical français (MACSF), dont le siège est [Adresse 3], [Localité 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Durin-Karsenty, conseiller, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, de la SCP Richard, avocat de la société Mutuelle assurances corps médical français, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 mars 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Durin-Karsenty, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, Mme Kermina, M. Delbano, conseillers, Mmes Jollec, Bohnert, M. Cardini, Mmes Dumas, Latreille, Bonnet, conseillers référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 11 mars 2021), [L] [I] est décédé le 10 novembre 2014 d'un carcinome hépatocellulaire métastasé survenu sur hépatopathie chronique virale C.

2. La Commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux Rhône Alpes a émis, le 12 mai 2015, un avis en faveur d'une responsabilité conjointe de plusieurs médecins, dont celle de M. [H], estimée à 20 %, ce dernier étant assuré en responsabilité civile professionnelle auprès de la Mutuelle assurances corps médical français (MACSF).

3. La MACSF ayant refusé de faire une offre aux ayants droit de [L] [I], l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM)) s'est substitué à |'assureur en versant aux ayants droit du défunt plusieurs sommes.

4. L'ONIAM a ensuite exercé le recours subrogatoire prévu à l'article L. 1142-15 du code de la santé publique🏛 et émis à cette fin deux titres exécutoires à l'encontre de la MACSF pour 10 400 euros et 640 euros.

5. Par acte d'huissier de justice du 22 novembre 2019, la MACSF a assigné l'ONIAM devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins d'annuler les titres exécutoires et d'être déchargée du paiement de la somme de 11 040 euros.

6. Saisi d'une exception d'incompétence territoriale formée par l'ONIAM, le juge de la mise en état, par ordonnance du 6 octobre 2020, a déclaré le tribunal judiciaire de Lyon incompétent au profit du tribunal judiciaire de Bobigny.

7. La MACSF a relevé appel de cette décision.


Examen du moyen

Enoncé du moyen

8. L'ONIAM fait grief à l'arrêt d'infirmer l'ordonnance déférée, de rejeter l'exception d'incompétence et de renvoyer les parties à poursuivre la procédure devant le tribunal judiciaire de Lyon, alors « qu'il résulte de l'article 42 du code de procédure civile🏛 que la juridiction territorialement compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur ; que si l'article 46 dudit code prévoit qu'en matière délictuelle le demandeur peut saisir, à son choix, outre cette juridiction, celle du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort de laquelle le dommage a été subi, cette disposition n'est pas applicable à une action exercée par un assureur prenant la forme et produisant les effets d'une opposition à titre exécutoire lorsque cette opposition est dirigée contre un titre émis par l'ONIAM, une telle opposition à titre exécutoire, qui pour objet l'annulation de ce titre et, le cas échéant, la décharge des sommes concernées, ne constituant pas une action en matière délictuelle quand bien même se rapporterait-elle, pour ce qui concerne le bien-fondé de la créance, aux conditions d'engagement de la responsabilité d'un établissement ou d'un professionnel de santé sur le fondement de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique🏛 ; qu'en retenant que l'assureur demandeur à l'action avait pu exercer l'option offerte par l'article 46 du code de procédure civile🏛 au motif inopérant que la contestation des titres exécutoires imposait un débat sur la responsabilité du médecin et que la validité en la forme de ces titres n'était pas contestée, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 42 du code de procédure civile🏛 et, par fausse application, l'article 46 dudit code. »


Réponse de la Cour

9. Selon l'article 46 du code de procédure civile🏛, le demandeur peut saisir à son choix, outre la juridiction du lieu où demeure le défendeur, en matière délictuelle, la juridiction du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort de laquelle le dommage a été subi.

10. Il résulte de l'article L. 1142-15 du code de la santé publique🏛, que lorsque l'ONIAM transige avec la victime ou ses ayants droit, en application du présent article, cette transaction est opposable à l'assureur ou, le cas échéant, au fonds institué à l'article L. 426-1 du code des assurances🏛 ou au responsable des dommages, sauf le droit pour ceux-ci de contester devant le juge le principe de la responsabilité ou le montant des sommes réclamées. Quelle que soit la décision du juge, le montant des indemnités allouées à la victime lui reste acquis.

11. Il découle de l'article R. 1142-53 du code de la santé publique🏛, tel qu'interprété par le Conseil d'Etat (Avis, 9 mai 2019, n° 426321⚖️ et 426365), que l'ONIAM peut émettre un titre exécutoire en vue du recouvrement de toute créance dont le fondement se trouve dans les dispositions d'une loi, d'un règlement ou d'une décision de justice, ou dans les obligations contractuelles ou quasi délictuelles du débiteur. Les débiteurs peuvent introduire un recours contre un titre exécutoire devant la juridiction compétente.

12. Lorsque le professionnel de santé, l'établissement, le service, l'organisme de santé ou le producteur de produits, considéré comme responsable du dommage, ou l'assureur garantissant sa responsabilité civile, fait opposition au titre exécutoire émis par l'ONIAM, subrogé dans les droits de la victime sur le fondement de l'article L. 1142-15 de code de la santé publique🏛 pour recouvrer les sommes versées, ce recours tend à contester devant le juge le principe de sa responsabilité ou le montant de la réparation.

13. Par suite, ce recours relève, dans tous les cas, de la matière délictuelle au sens de l'article 46, alinéa 3, du code de procédure civile🏛 et peut être porté devant la juridiction du lieu du fait dommageable.

14. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile🏛, l'arrêt se trouve légalement justifié.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et le condamne à payer à la Mutuelle assurances corps médical français (MACSF) la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM)

L'ONIAM reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir infirmé l'ordonnance déférée, rejeté l'exception d'incompétence et renvoyé les parties à poursuivre la procédure devant le tribunal judiciaire de Lyon ;

Alors qu'il résulte de l'article 42 du code de procédure civile🏛 que la juridiction territorialement compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur ; que si l'article 46 dudit code prévoit qu'en matière délictuelle le demandeur peut saisir, à son choix, outre cette juridiction, celle du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort de laquelle le dommage a été subi, cette disposition n'est pas applicable à une action exercée par un assureur prenant la forme et produisant les effets d'une opposition à titre exécutoire lorsque cette opposition est dirigée contre un titre émis par l'ONIAM, une telle opposition à titre exécutoire, qui pour objet l'annulation de ce titre et, le cas échéant, la décharge des sommes concernées, ne constituant pas une action en matière délictuelle quand bien même se rapporterait-elle, pour ce qui concerne le bien-fondé de la créance, aux conditions d'engagement de la responsabilité d'un établissement ou d'un professionnel de santé sur le fondement de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique🏛 ; qu'en retenant que l'assureur demandeur à l'action avait pu exercer l'option offerte par l'article 46 du code de procédure civile🏛 au motif inopérant que la contestation des titres exécutoires imposait un débat sur la responsabilité du médecin et que la validité en la forme de ces titres n'était pas contestée, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 42 du code de procédure civile🏛 et, par fausse application, l'article 46 dudit code.

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