N° 09VE00299
SARL HANO
M. HAÏM, président
Mme Sylvie GARREC, rapporteur
M. SOYEZ, rapporteur public
Lecture du 20 octobre 2011
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
La Cour administrative d'appel de Versailles
6ème chambre
Vu la requête, enregistrée le 29 janvier 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SARL HANO ayant son siège 9 voie Rosière à Goussainville (95190), représentée par son gérant en exercice, par Me Diesse ; la SARL HANO demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0503478 du 27 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge ou à la réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er octobre 1998 au 31 décembre 1999 et de celle du 1er janvier au 31 décembre 2000 ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge ou la réduction demandées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que l'administration a adressé l'ensemble des courriers relatifs aux opérations de contrôle à l'attention de son gérant alors qu'elle devait en être l'unique destinataire, ainsi que le prévoit le n° 22 de la documentation administrative référencée 13 L-1513 du 1er avril 1995 ; que la procédure d'imposition est, pour ce motif, entachée d'irrégularité ; au fond, qu'elle a régulièrement déclaré la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a collectée auprès de ses clients et déduit celle qu'elle a acquittée auprès de ses fournisseurs et qu'elle a ainsi satisfait à ses obligations déclaratives ; que les bons de livraisons présentés au service ont tenu lieu de documents comptables et que l'absence de factures régulièrement établies par ses fournisseurs ne saurait, par suite, lui être opposée pour justifier les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre des périodes en litige sur le fondement du 1 du I de l'article 271 du code général des impôts ; que son activité consistant à revendre des palettes d'occasion, elle doit être regardée comme un revendeur de biens d'occasion et relève ainsi de plein droit du régime de taxation de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge prévu par les dispositions des articles 297 A à 297 F du code général des impôts ; que c'est par l'effet d'une erreur comptable commise de bonne foi qu'elle n'a pas comptabilisé la taxe sur la valeur ajoutée selon ce régime dont elle est fondée, par suite, à revendiquer le bénéfice ; que c'est à tort que l'administration a assorti les rappels en litige des pénalités de mauvaise foi ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de commerce ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 octobre 2011 :
- le rapport de Mme Garrec, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Soyez, rapporteur public ;
Considérant que la SARL HANO, spécialisée dans l'achat en vue de leur revente de palettes en bois d'occasion, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er octobre 1998 au 31 décembre 2000 à l'issue laquelle l'administration, après avoir constaté que la société avait déduit la taxe sur la valeur ajoutée afférente à ses achats de palettes qu'elle avait calculée à partir des seuls bons de livraison de ses fournisseurs et qu'elle n'était pas en possession de factures correspondantes faisant apparaître ladite taxe, en contravention avec les dispositions de l'article 271 du code général des impôts, lui a notifié, selon la procédure de redressement contradictoire, des rappels correspondant au montant de la taxe sur la valeur ajoutée non déductible sur achats d'un montant de 471 793 F (71 924 euros) au titre de la période du 1er octobre 1998 au 31 décembre 1999 et de 582 384 F (88 852 euros) au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2000 ; que la SARL HANO relève appel du jugement du 27 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces rappels ainsi que des pénalités pour absence de bonne foi dont ils ont été assortis ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant que la circonstance que les courriers relatifs aux opérations de contrôle et, notamment, l'avis de vérification du 3 mai 2002 ainsi que la notification de redressements du 26 août 2002, aient été adressés au siège social de la SARL HANO à l'attention de son gérant, lequel est, en vertu des dispositions de l'article L. 223-18 du code de commerce, investi, dans ses rapports avec les tiers, des pouvoirs les plus étendus pour agir au nom de la société, ne l'a privée d'aucune des garanties attachées à la procédure de redressement contradictoire et n'est pas, par suite, de nature à avoir affecté la régularité de cette procédure ; que la SARL HANO ne saurait, en tout état de cause, se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des recommandations de l'instruction administrative référencée 13 L-1513 du 1er avril 1995, laquelle traite exclusivement de questions relatives à la procédure d'imposition ;
Sur le bien-fondé des rappels de TVA :
En ce qui concerne la TVA déductible :
Considérant qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (...) II.1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures (...) 2. La déduction ne peut être opérée si les entreprises ne sont pas en possession (...) desdites factures (...) ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un redevable de la taxe sur la valeur ajoutée doit, pour exercer son droit à déduction, être en possession des factures délivrées par ses fournisseurs ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le vérificateur a, lors des opérations de contrôle, relevé qu'aucune facture d'achat de palettes d'occasion n'avait été établie par les fournisseurs de la SARL HANO, lesquels n'étaient pas, au demeurant, pour la majorité d'entre eux, redevables de la ladite taxe et ne pouvaient ainsi la faire figurer sur ces factures ; qu'il est par ailleurs constant que la SARL HANO a calculé mensuellement la taxe sur la valeur ajoutée déductible sur la base des seuls bons de livraison de palettes et des sommes qu'elle a versées à ses fournisseurs en règlement desdites palettes, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 271 du code général des impôts ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a procédé aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a regardée comme non déductible à hauteur des montants susmentionnés ;
En ce qui concerne l'application du régime dit de la marge prévu aux articles 297 A à 297 F du code général des impôts :
Considérant qu'aux termes de l'article 297 A du code général des impôts : I. 1° La base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion, d'oeuvres d'art, d'objets de collection ou d'antiquité qui lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison est constituée de la différence entre le prix de vente et le prix d'achat ; qu'aux termes de l'article 297 C du même code : Pour chaque livraison de biens d'occasion, d'oeuvres d'art, d'objets de collection ou d'antiquité, les assujettis revendeurs peuvent appliquer les règles de taxe sur la valeur ajoutée applicables aux autres assujettis ; qu'aux termes de l'article 297 E du même code : Les assujettis qui appliquent les dispositions de l'article 297 A ne peuvent pas faire apparaître la taxe sur la valeur ajoutée sur leurs factures ou tous autres documents en tenant lieu. ; et qu'aux termes de l'article 297 F du même code : Les assujettis qui effectuent des opérations portant sur des biens d'occasion, des oeuvres d'art, des objets de collection ou d'antiquité doivent comptabiliser distinctement par mode d'imposition leurs opérations portant sur ces biens. ;
Considérant qu'à l'appui de ses conclusions en réduction, la SARL HANO demande, en tant que revendeur de palettes d'occasion, que lui soit appliqué le régime de la taxation sur la marge des biens d'occasion prévu par les dispositions des articles 297 A à 297 F ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que l'intéressée a soumis à la taxe sur la valeur ajoutée ses ventes de palettes pour leur prix total et déduit la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux achats correspondants calculée selon les modalités susindiquées à partir des bons de livraisons de ses fournisseurs ; qu'en procédant de la sorte, elle doit être regardée comme s'étant placée sous le régime de droit commun de taxation à la taxe sur la valeur ajoutée de l'article 256 du code général des impôts et ne saurait, par suite, revendiquer le bénéfice du régime de la marge, en se retranchant par ailleurs derrière des erreurs comptables commises de bonne foi et dont elle ne rapporte pas la preuve ; qu'elle ne saurait en tout état de cause, sur ce point, se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des n° 2 à 10 de la doctrine administrative référencée 4 A 214 du 1er septembre 1993, laquelle n'est pas applicable en matière de taxe sur la valeur ajoutée ;
Sur les pénalités de mauvaise foi :
Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 p. 100 s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales (...) ;
Considérant que, pour justifier l'application des pénalités exclusives de bonne foi aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige, le service fait valoir, sans être sérieusement contredit, que la SARL HANO a délibérément déclaré au titre des exercices vérifiés des montants de taxe sur la valeur ajoutée déductible fictifs, calculés en contravention des dispositions fiscales applicables qu'elle ne pouvait méconnaître, alors surtout qu'elle était assistée d'un comptable et que ces rappels représentent 90 % du montant de la taxe sur la valeur ajoutée irrégulièrement déduite ; qu'il établit ainsi l'absence de bonne foi de la société requérante et le bien-fondé desdites pénalités ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL HANO n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par suite, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL HANO est rejetée.