Jurisprudence : Cass. civ. 3, 26-10-2011, n° 10-11.000, FS-P+B, Cassation

Cass. civ. 3, 26-10-2011, n° 10-11.000, FS-P+B, Cassation

A0629HZC

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Cass. civ. 3, 26-10-2011, n° 10-11.000, FS-P+B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/5619428-cass-civ-3-26102011-n-1011000-fsp-b-cassation
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Abstract

Aux termes de l'article L. 411-69 du Code rural, le preneur qui a, par son travail ou par ses investissements, apporté des améliorations au fonds loué a droit, à l'expiration du bail, à une indemnité due par le bailleur, quelle que soit la cause qui a mis fin au bail.



CIV.3 FB
COUR DE CASSATION
Audience publique du 26 octobre 2011
Cassation
M. TERRIER, président
Arrêt no 1244 FS-P+B
Pourvoi no P 10-11.000
Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de M. Charles Z.
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 11 mai 2010.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par M. Patrice Y Y, domicilié Versailles,
contre l'arrêt rendu le 10 novembre 2009 par la cour d'appel de Grenoble (2e chambre civile), dans le litige l'opposant
1o/ à M. Charles Z, domicilié Morestel,
2o/ à M. Michel X,
3o/ à Mme Micheline WX, épouse WX,
domiciliés Morestel,
défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 27 septembre 2011, où étaient présents M. Terrier, président, Mme Fossaert, conseiller rapporteur, Mme Bellamy, conseiller doyen, Mme Feydeau, MM. Fournier, Echappé, Parneix, conseillers, Mmes Manes-Roussel, Monge, Proust, Pic, M. Crevel, Mme Guillaudier, conseillers référendaires, M. Laurent-Atthalin, avocat général, Mme Jacomy, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Fossaert, conseiller, les observations de Me Foussard, avocat de M. Y Y, de Me Le Prado, avocat de M. Z, l'avis de M. Laurent-Atthalin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à M. ... ... ... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. et Mme X ;
Sur le premier moyen
Vu l'article L. 411-69, ensemble l'article L. 411-56 du code rural ;
Attendu que le preneur qui a, par son travail ou par ses investissements, apporté des améliorations au fonds loué a droit, à l'expiration du bail, à une indemnité due par le bailleur, quelle que soit la cause qui a mis fin au bail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 10 novembre 2009), statuant sur renvoi après cassation (Civ. III, 8 juillet 2008 pourvoi 07-14.602), que par acte du 20 novembre 1979, Mme ... ... ... a donné une propriété agricole à bail à long terme à M. Z, pour une durée de 18 ans ; que par acte du 5 juin 1986, Mme ... ... ..., usufruitière, et M. Patrice Y Y Y son fils, nu-propriétaire, ont consenti à M. Z un avenant lui donnant d'autres terres à bail ; que ce dernier a, par acte du 5 novembre 1991, cédé son bail aux époux X pour le temps restant à courir ; que préalablement, par acte du 1er août 1991, les époux X se sont engagés à verser à M. Z une certaine somme à titre d'indemnisation pour les investissements effectués sur le domaine loué ; que les époux X n'ayant réglé que partiellement cette somme, M. Z a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux pour obtenir condamnation des époux X à lui payer le solde dû, et subsidiairement voir condamner le bailleur au payement d'une indemnité pour améliorations du bien loué ;

Attendu que pour condamner le bailleur au payement d'une indemnité pour améliorations, l'arrêt retient que l'acte de cession du 5 novembre 1991 comporte la signature des bailleurs, ce qui démontre que ceux-ci avaient pris acte de la fin du bail avec M. Z ;

Qu'en statuant ainsi,alors qu'elle avait constaté que le bail de 18 ans avait été cédé "pour le temps restant à courir", la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 novembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;
Condamne M. Z aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande M. De Y ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils pour M. Y Y.
PREMIER MOYEN DE CASSATION L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a confirmé le jugement du 13 décembre 2005, à l'exception du chef ayant prescrit une expertise, et condamné M. ... ... ... à payer à M. Z la somme de 45.000 euros ;
AUX MOTIFS propres QUE " l'argumentation de M. ... ... ... selon laquelle le bail n'étant pas parvenu à son terme, le prêteur ne pouvait prétendre à indemnisation doit être rejetée puisque l'acte de cession du 5 novembre 1991 comporte la signature des bailleurs ce qui démontre que ceux-ci avaient pris acte de la fin du bail avec M. Z ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont constaté que M. ... ... ... ne rapportait pas la preuve de la renonciation du bailleur aux améliorations dont se prévaut M. Z (...) " (arrêt, p. 5 et 6) ;
Et AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE " néanmoins le preneur sortant bénéficie aux termes des articles L 411-69 et suivants et R 411-15 et suivants du Code Rural du droit à l'indemnisation par son bailleur des investissements ou améliorations apportés aux biens loués ; qu'il est constant par ailleurs que le bailleur peut renoncer à son droit d'accession en fin de bail ; qu'aux termes des déclarations des parties et des documents produits - bail conclu le 29/10/1968 entre Mme ... ... de SAINT PERN et Mr Z d'une part, - avenant au bail du 5/6/1986 conclu entre Mme de SAINT PERN, Mr Patrice Y Y Y et Mr Z, - acte authentique dénommé " cession de bail " du 18/11/1991 auquel sont intervenus outre les consorts X et Mr Z, Mme de SAINT PERN et son fils Mr de Y Y Patrice, - acte litigieux du 1/8/1991, conclu entre Mr Z et les consorts X, aux termes duquel ceux-ci s'engagent à verser à Mr Z " la somme de 600 000 frs à titre d'indemnisation pour les investissements réalisés sur la ferme, tant sur les bâtiments d'habitation que d'exploitation, que pour les améliorations apportées aux terres... " il apparaît que - si Mme de SAINT PERN a signé seule le bail initial sur des biens qui lui appartenaient en propre par la suite, et les époux ... ... ... ayant fait donation de leurs biens à leurs enfants et Mme de SAINT PERN s'en étant réservé l'usufruit, celle-ci a signé conjointement avec son fils Y l'extension du bail sur d'autres terres et les documents suivants, - les bailleurs es qualités ont consenti à la cession de bail sans régler le problème des éventuelles indemnités, tout en reconnaissant que les entrants étaient en possession de l'état des lieux établi à l'entrée de Mr Z, à cet égard un renvoi incomplet mentionne " ils déclarent en outre faire leur affaire personnelle de... ", - Mr de SAINT PERN père a signé seul, mais uniquement et expressément es qualités de témoin, l'accord intervenu entre le locataire entrant et le sortant sans rien stipuler à cet égard hormis la mention " lu et approuvé " ; que la renonciation à un droit ne se présume pas, mais doit être expresse ; qu'ainsi il ne peut être déduit des documents produits que les propriétaires bailleurs aient entendu expressément renoncer à leur droit d'accession ; qu'il convient de le constater et de droit ainsi que les locataires entrants ne pouvaient, au regard des règles légales, être tenus au paiement des améliorations ; que l'action en paiement dirigée contre eux à ce titre est irrecevable " (jugement, p. 4 dernier §, et p.5 § 1 et 2) ;
ALORS QUE, premièrement, le preneur demeure propriétaire des améliorations pendant tout le cours du bail ; que s'il cède son bail avant l'échéance de ce dernier, en transférant les droits attachés à ce bail, le bailleur ne devient propriétaire des améliorations que lors de l'échéance du bail passé entre les mains de l'ayant-droit du preneur originaire ; qu'en décidant le contraire pour considérer qu'à la date du 5 novembre 1991, les améliorations étaient entrées dans le patrimoine du bailleur, quand le bail était en cours et s'est poursuivi jusqu'au 1er novembre 1997, les juges du fond ont violé les articles 1134 et 1709 du Code civil, ensemble les articles L.411-69 et L.411-73 du Code rural ;
ALORS QUE, deuxièmement, les juges du fond ne pouvaient considérer que le bail, tel que conclu le 20 novembre 1979, avec avenant du 5 juin 1986, avait pris fin, dès lors qu'ils avaient eux-mêmes constaté que le droit au bail avait été cédé par M. Z, ce qui supposait qu'il subsiste, et qu'en toute hypothèse, ils avaient également considéré que le bail était cédé pour le temps restant à courir (arrêt, p. 3, § 4) ; qu'en statuant comme ils l'ont fait sans tirer les conséquences légales de leurs propres constatations, les juges du fond ont violé les articles 1134 et 1709 du Code civil, ensemble les articles L.411-69 et L.411-73 du Code rural ;
Et ALORS QUE, troisièmement, si M. Z pouvait prendre l'initiative de céder son bail et mettre ainsi fin à la relation contractuelle qu'il entretenait avec le bailleur, dans le cadre d'une cession, cette circonstance ne pouvait en aucune façon affecter la situation du bailleur, ses droits et obligations restant les mêmes et l'accession, comme le droit à indemnité qui en était le corollaire, ne pouvaient se produire qu'à la fin du bail, soit le 1er novembre 1997 ; que, de ce point de vue également, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des articles 1134 et 1709 du Code civil, ainsi que des articles L.411-69 et L.411-73 du Code rural.
SECOND MOYEN DE CASSATION
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a confirmé le jugement du 13 décembre 2005, écartant ainsi l'existence d'une renonciation, à l'exception du chef ayant prescrit une expertise, et condamné M. ... ... ... à payer à M. Z la somme de 45.000 euros ;
AUX MOTIFS propres QUE " la renonciation à un droit doit être expresse et ne se présume pas ; que la preuve de cette renonciation peut être rapportée par tous moyens ; qu'au soutien de sa démonstration, M. ... ... ... verse aux débats l'acte du 1er août 1991 sur le versement de la somme de 600.000,00 Fr par les époux X à M. Z et l'acte de cession de droit au bail en date du 5 novembre 1991 ; que le fait que M. Thibault ... ... ... ait été témoin à l'acte du 1er août 1991, qu'aucune mention des améliorations apportés n'ait été visée dans l'acte du 5 novembre 1991 ou encore que M. Z indique dans sa lettre de saisine du Tribunal paritaire des baux ruraux que M. ... ... ... avait entendu renoncer à ces améliorations, ne sauraient valoir renonciation expresse ; que l'argumentation de M. ... ... ... selon laquelle le bail n'étant pas parvenu à son terme, le prêteur ne pouvait prétendre à indemnisation doit être rejetée puisque l'acte de cession du5 novembre 1991 comporte la signature des bailleurs ce qui démontre que ceux-ci avaient pris acte de la fin du bail avec M. Z ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont constaté que M. ... ... ... ne rapportait pas la preuve de la renonciation du bailleur aux améliorations dont se prévaut M. Z (...) " (arrêt, p. 5 et 6) ;
Et AUX MOTIFS adoptés QU'il est constant que le bailleur peut renoncer à son droit d'accession en fin de bail ; " aux termes des déclarations des parties et des documents produits - bail conclu le 29/10/1968 entre Mme la comtesse de SAINT PERN et M. Z d'une part, - avenant au bail du 5/6/1986 conclu entre Mme de SAINT PERN, M. Patrice Y Y Y et M. Z, - acte authentique dénommé " cession de bail " du 18/11/1991 auquel sont intervenus les consorts X et M. Z, Mme de SAINT PERN et son fils M. Y Y Y Y, - acte litigieux du 1/8/1991, conclu entre M. Z et les consorts X, aux termes duquel ceux-ci s'engagent à verser à M. Z " la somme de 600.000 frs à titre d'indemnisation pour les investissements réalisés sur la ferme, tant sur les bâtiments d'habitation que d'exploitation, que pour les améliorations apportées aux terres ... " ; il apparaît que - si Mme de SAINT PERN a signé seule le bail initial sur des biens qui lui appartenaient en propre par la suite, et les époux ... ... ... ayant fait donation de leurs biens à leurs enfants et Mme de SAINT PERN s'en étant réservé l'usufruit, celle-ci a signé conjointement avec son fils Patrice l'extension du bail sur d'autres terres et les documents suivants, - les bailleurs es-qualités ont consenti à la cession de bail sans régler le problème des éventuelles indemnités, tout en reconnaissant que les enfants étaient en possession de l'état des lieux établi à l'entrée de M. Z ; qu'à cet égard, un renvoi incomplet mentionne " ils déclarent en outre faire leur affaire personnelle de ... ", - M. ... ... ... père a signé seul, mais uniquement et expressément es-qualités de témoin, l'accord intervenu entre le locataire entrant et le sortant sans rien stipuler à cet égard hormis la mention " lu et approuvé " ; que la renonciation à un droit ne se présume pas, mais doit être expresse ; qu'ainsi, il ne peut être déduit des documents produits que les propriétaires bailleurs aient entendu expressément renoncer à leur droit d'accession ; qu'il convient de le constater et de dire ainsi que les locataires entrants ne pouvaient, au regard des règles légales, être tenus au paiement des améliorations (...) " (jugement, p. 5) ;
ALORS QUE, premièrement, en exigeant une renonciation expresse du bailleur aux améliorations, quand la renonciation peut prendre deux formes et être soit expresse, soit tacite, la renonciation tacite produisant les mêmes effets que la renonciation expresse, les juges du fond ont violé l'article 1134 du Code civil, ensemble les règles régissant la renonciation, et notamment la renonciation tacite ;
Et ALORS QUE, deuxièmement, en s'abstenant de rechercher si, comme il était demandé (conclusions de M. ... ... ..., p. ---, § ---), il n'y avait pas eu renonciation tacite du bailleur, les juges du fond ont à tout le moins privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L.411-69 du Code rural.

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