Décret n° 2011-945 du 10 août 2011 relatif aux procédures de résiliation de baux d'habitation et de reprise des lieux en cas d'abandon

Décret n° 2011-945 du 10 août 2011 relatif aux procédures de résiliation de baux d'habitation et de reprise des lieux en cas d'abandon

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L9781IQC

Publics concernés : tribunaux d'instance, juges de l'exécution, huissiers de justice, bailleurs, locataires.

Objet : organisation de la procédure de résiliation du bail d'habitation pour abandon et de la reprise subséquente des lieux.

Entrée en vigueur : le texte entre en vigueur le lendemain de sa publication.

Notice : le décret organise les modalités de résiliation du bail (chapitre Ier) ainsi que la reprise des lieux abandonnés (chapitre II). Outre la faculté de poursuivre la résiliation du bail suivant une procédure ordinaire, sur assignation, il est désormais possible de former cette demande par requête. Le tribunal se prononce alors sans débat préalable sur la résiliation du bail, la reprise des lieux, éventuellement le paiement des arriérés de loyers ou d'autres sommes dues au titre du contrat de bail, ainsi que sur l'abandon des meubles dénués de valeur. Une opposition à cette décision peut être formée par le locataire ou le dernier occupant de son chef, dans le mois suivant sa signification, faute de quoi elle a force de chose jugée. Si le locataire est dans l'impossibilité de former cette opposition dans ce délai sans faute de sa part, il peut obtenir un relevé de forclusion. Une fois l'ordonnance passée en force de chose jugée, le bailleur peut reprendre son bien suivant une procédure d'expulsion simplifiée, qui lui permet en outre de débarrasser les meubles dénués de valeur sur le sort desquels le juge a statué. S'il y a des biens de valeur dans les lieux, il appartient au juge de l'exécution de statuer sur leur sort, conformément au droit commun de la procédure d'expulsion, sous réserve de quelques ajustements. Enfin, la procédure de reprise des lieux nécessite d'adapter certaines règles prévues dans le décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 instituant de nouvelles règles relatives aux procédures civiles d'exécution pour l'application de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution. Les modalités de reprise d'un local abandonné après signification d'une décision d'expulsion et commandement d'avoir à libérer le local sont précisées.

Références : le décret est pris pour l'application des dispositions de l'article 14-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. Les textes sont consultables sur le site Légifrance (http://www.legifrance.gouv.fr).

Le Premier ministre,

Sur le rapport du garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés,

Vu le code de procédure civile ;

Vu le code de l'organisation judiciaire, notamment son article L. 221-5 ;

Vu la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 modifiée tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, notamment ses articles 7, 14, 14-1 et 24 ;

Vu la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 modifiée portant réforme des procédures civiles d'exécution, notamment ses articles 21, 21-1, 61 et 66 ;

Vu le décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 modifié instituant de nouvelles règles relatives aux procédures civiles d'exécution pour l'application de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution ;

Le Conseil d'Etat (section de l'intérieur) entendu,

Décrète :

Chapitre Ier : Dispositions relatives aux procédures aux fins de résiliation du bail et de reprise des locaux pour abandon

Article 1

Peut être formée par requête, présentée dans les conditions prévues par le présent chapitre, la demande tendant à voir constater la résiliation du bail en application de l'article 14-1 de la loi du 6 juillet 1989, en vue de la reprise des locaux abandonnés.

Par la même requête, peut également être demandée la condamnation du locataire au paiement des sommes dues au titre du contrat de bail.

Article 2

La requête est remise ou adressée au greffe par le bailleur ou tout mandataire. Outre les mentions prescrites par l'article 58 du code de procédure civile, elle est accompagnée des pièces justificatives, dont le procès-verbal d'huissier de justice visant à établir l'abandon.

Article 3

S'il ressort manifestement des éléments fournis par le requérant, notamment du constat d'inoccupation des lieux et d'un défaut d'exécution par le locataire de ses obligations, que le bien a été abandonné par ses occupants, le juge du tribunal d'instance constate la résiliation du bail et ordonne la reprise des lieux. Le cas échéant, il statue sur la demande en paiement.

Lorsque l'inventaire contenu dans le procès-verbal de l'huissier de justice fait état de biens laissés sur place, le juge déclare abandonnés les biens n'apparaissant pas avoir de valeur marchande, à l'exception des papiers et documents de nature personnelle qui sont placés sous enveloppe scellée et conservés pendant deux ans par l'huissier de justice.

Si le juge rejette la requête, sa décision est sans recours pour le bailleur sauf, pour celui-ci, à procéder selon les voies de droit commun.

Article 4

L'ordonnance faisant droit à la demande et la requête sont conservées à titre de minute au greffe. Le greffe garde provisoirement les pièces produites par le bailleur à l'appui de la requête ; elles sont restituées au bailleur sur sa demande dès l'opposition ou, passé le délai d'opposition, sur justification de la signification de l'ordonnance.

En cas de rejet de la requête, cette dernière est restituée au requérant avec les pièces produites.

Article 5

Une expédition de l'ordonnance revêtue de la formule exécutoire est signifiée, à l'initiative du bailleur, au locataire et aux derniers occupants du chef du locataire connus du bailleur.

La signification contient, à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice :

1° L'indication qu'il peut être fait opposition à l'ordonnance par le destinataire qui entend la contester ;

2° L'indication du délai dans lequel l'opposition doit être formée, le tribunal devant lequel elle doit être portée, et les formes selon lesquelles elle doit être faite ;

3° L'information que le destinataire peut prendre connaissance au greffe des documents produits par le bailleur dans le délai prévu au 2° ;

4° L'avertissement qu'à défaut d'opposition dans le délai indiqué il ne pourra plus exercer aucun recours et que le bailleur pourra reprendre son bien ;

5° Si l'ordonnance statue sur le sort de meubles laissés sur place :

a) L'avertissement qu'à défaut d'opposition dans le délai indiqué il ne pourra plus exercer aucun recours et qu'il pourra être procédé à l'évacuation des biens laissés sur place ;

b) La sommation d'avoir à les retirer dans le délai d'un mois suivant la signification de l'ordonnance et le rappel des dispositions de l'article 207 du décret du 31 juillet 1992 susvisé.

Si la signification n'est faite à personne, l'huissier de justice doit porter verbalement à la connaissance du locataire les indications mentionnées aux alinéas précédents. L'accomplissement de cette formalité est mentionné dans l'acte de signification.

L'ordonnance est non avenue si elle n'a pas été signifiée dans les deux mois de sa date.

Article 6

Le locataire ou tout occupant de son chef peut former opposition à l'ordonnance.

L'opposition est formée dans un délai d'un mois suivant la signification de l'ordonnance par déclaration remise ou adressée au greffe.

L'exécution de l'ordonnance est suspendue pendant le délai d'opposition ainsi qu'en cas d'opposition formée dans ce délai.

Article 7

En cas d'opposition, le greffier en avise sans délai l'huissier de justice ayant dressé le procès-verbal prévu à l'article 14-1 de la loi du 6 juillet 1989 susvisée et convoque les parties à l'audience, selon les modalités prévues à l'article 844 du code de procédure civile. La convocation est adressée à toutes les parties, même à celles qui n'ont pas formé opposition.

Le tribunal statue sur les demandes présentées par le bailleur en application de l'article 1er, conformément aux règles de la procédure aux fins de jugement prévues par les articles 845 à 847-3 du code de procédure civile. Il connaît des demandes incidentes ou moyens de défense au fond qui ne soulèvent pas une question relevant de la compétence exclusive d'une autre juridiction.

Le jugement du tribunal se substitue à l'ordonnance.

Si le juge constate que la requête a été présentée de manière abusive, il condamne le demandeur à l'amende civile prévue par l'article 32-1 du code de procédure civile.

Si aucune des parties ne se présente, le tribunal constate l'extinction de l'instance. Celle-ci rend non avenue l'ordonnance.

Article 8

En l'absence d'opposition dans le mois suivant la signification, ou en cas de désistement de la partie qui a formé opposition, l'ordonnance produit tous les effets d'un jugement passé en force de chose jugée. Toutefois, un relevé de forclusion peut être demandé dans les conditions prévues à l'article 540 du code de procédure civile.

Chapitre II : Dispositions relatives à la reprise des lieux modifiant le décret n° 92-755 du 31 juillet 1992

Article 9

I. ― Le titre IX du décret du 31 juillet 1992 susvisé est ainsi modifié :

1° Il est créé un chapitre Ier intitulé « Dispositions générales » comprenant les articles 194 à 208 ;

2° Après le chapitre Ier, il est créé un chapitre II ainsi rédigé :

« Chapitre II

« Dispositions propres à la reprise des lieux

« Art. 208-1.-Pour l'application des dispositions de l'article 21-1 de la loi du 9 juillet 1991,1'huissier de justice chargé de l'exécution procède aux opérations de reprise des lieux :

« 1° Lorsqu'il constate que la personne expulsée et les occupants de son chef ont volontairement libéré les lieux postérieurement à la signification du commandement prévu à l'article 61 de la loi du 9 juillet 1991 ;

« 2° Lorsqu'il est autorisé par décision de justice passée en force de chose jugée à reprendre des locaux abandonnés, dans les conditions prévues par les articles 1er à 8 du décret n° 2011-945 du 10 août 2011 pris pour l'application de l'article 14-1 de la loi du 6 juillet 1989.

« Art. 208-2.-L'huissier de justice chargé de l'exécution dresse un procès-verbal des opérations de reprise des lieux dans les conditions prévues par l'article 199 qu'il signifie conformément aux dispositions de l'article 202.

« Art. 208-3.-Dans le cas prévu au 1° de l'article 208-1, le procès-verbal de reprise des lieux peut être dressé avant l'expiration du délai fixé dans le commandement d'avoir à libérer les locaux.

« Art. 208-4.-Dans le cas prévu au 2° de l'article 208-1 :

« 1° S'il reste sur place des meubles sur le sort desquels il n'a pas déjà été statué, il est fait application des dispositions des articles 200,201, à l'exception de son deuxième alinéa, et 203 à 207 ; toutefois, le délai prévu au 3° de l'article 201 et à l'article 203 est de quinze jours ;

« 2° S'il s'avère, à l'occasion des opérations de reprise des locaux que ceux-ci sont à nouveau occupés par la personne expulsée ou toute personne de son chef, l'huissier de justice procède conformément aux dispositions du chapitre Ier, sans qu'il ait à obtenir un nouveau titre d'expulsion ;

« 3° Pour l'application de l'article 208, en cas de réinstallation sans titre de la personne expulsée postérieurement aux opérations de reprise des locaux, constitutive de voie de fait, la signification de la décision de justice, passée en force de chose jugée, autorisant la reprise des lieux tient lieu de commandement d'avoir à libérer les locaux.

« Les autres dispositions du chapitre Ier ne sont pas applicables. »

II.-Il est créé un chapitre III intitulé « Dispositions communes » comprenant l'article 209.

III.-A l'article 209, le mot : « chapitre » est remplacé par le mot : « titre ».

Article 10

Le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, est chargé de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Fait le 10 août 2011.

François Fillon

Par le Premier ministre :

Le garde des sceaux,

ministre de la justice et des libertés,

Michel Mercier

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