Jurisprudence : Cass. soc., 01-12-2015, n° 14-14.735, F-D, Rejet



SOC. JL
COUR DE CASSATION
Audience publique du 1er décembre 2015
Rejet
M. HUGLO, conseiller le plus ancien faisant fonction de président
Arrêt n 1840 F D Pourvoi n F 14-14.735 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par la société Ideal Fibres & Fabrics Dunkerque, société par actions simplifiée, dont le siège est Dunkerque,
contre l'arrêt rendu le 31 janvier 2014 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. Y Y, domicilié Coudekerque-Branche,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 13 octobre 2015, où étaient présents M. Huglo, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Reygner, conseiller rapporteur, Mme Farthouat-Danon, conseiller, M. Petitprez, avocat général, Mme Hotte, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Reygner, conseiller, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Ideal Fibres & Fabrics Dunkerque, de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de M. Y, l'avis de M. Petitprez, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 31 janvier 2014), que M. Y a été engagé le 13 avril 1989 par la société Ideal Fibres & Fabrics Dunkerque (la société) en qualité d'ouvrier de production ; qu'en avril 2012 ce salarié, investi de plusieurs mandats représentatifs, a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ; qu'en novembre 2012, la société a fermé son site de production ; que l'administration du travail ayant refusé d'autoriser le licenciement pour motif économique du salarié, la société a dispensé celui-ci d'activité avec maintien de sa rémunération ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner à payer au salarié des sommes à titre de rappel de primes de panier et d'heures de délégation alors, selon le moyen
1 / qu'un représentant du personnel placé en situation de dispense rémunérée d'activité du fait de la fermeture du site auquel il est affecté ne peut cumuler sa rémunération avec le paiement des heures de délégation, seraient-elles effectuées en dehors du temps de travail théorique ; qu'en accordant au salarié un rappel d'heures de délégation prises en dehors du temps de travail résultant de son planning théorique, la cour d'appel a violé les articles L. 2315-1, L. 2315-3, L. 2325-6, L. 2325-7, L. 2143-13 et L. 2143-17 du code du travail ;
2 / que la prime de panier n'est due, selon l'article 2-D de l'accord d'entreprise du 30 juin 2000 l'ayant instituée, que pour les jours où le salarié a été présent dans l'entreprise sans interruption au moins quatre heures ; que l'employeur soulignait qu'il avait versé au salarié cette prime après la cessation d'activité du site lorsque, faisant usage de ses heures de délégation durant cette période de dispense rémunérée d'activité, il avait rempli cette condition et qu'il l'avait ainsi rempli de ses droits ; qu'en accordant au salarié le paiement des indemnités de panier qu'il aurait perçues s'il avait travaillé suivant son planning théorique, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Mais attendu, d'abord, qu'après avoir exactement énoncé que l'utilisation des heures de délégation ne doit entraîner aucune perte de salaire pour le représentant du personnel et que lorsque les heures de délégation sont prises en dehors du temps de travail, en raison des nécessités du mandat, elles doivent être payées en plus des heures de travail, la cour d'appel en a déduit à bon droit qu'en cas de dispense d'activité, il convient de se référer aux horaires que le salarié aurait dû suivre s'il avait travaillé et que ce dernier est donc fondé à réclamer le paiement des heures de délégation prises en dehors du temps de travail résultant de son planning théorique ;
Attendu, ensuite, qu'après avoir exactement énoncé que le salarié ne peut être privé, du fait de l'exercice de son mandat, du paiement d'une indemnité forfaitaire compensant une sujétion particulière de son emploi qui constitue un complément de salaire, la cour d'appel, qui a relevé par un motif non critiqué que l'indemnité litigieuse constituait un complément de salaire, a décidé à juste titre que le salarié devait bénéficier des indemnités de panier qu'il aurait perçues s'il avait travaillé suivant son planning théorique ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Ideal Fibres & Fabrics Dunkerque aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Ideal Fibres & Fabrics Dunkerque à verser à M. Y la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Ideal Fibres & Fabrics Dunkerque
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société IDEAL FIBRES & FABRICS à payer à M. Y les sommes de 804,44 euros à titre de rappel de prime de panier, 2.133,04 euros à titre de rappel d'heures de délégation, et 1.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS QUE Eric Y rappelle que l'usine est fermée depuis le 23 novembre 2012. Il fait valoir que les salariés protégés sont rémunérés au titre des feux continus mais que l'employeur considère qu'ils sont libérés de leur tâche et de leurs horaires, de sorte qu'il ne paie plus les heures de délégation, en considérant qu'elles sont incluses dans la rémunération qu'il maintient. Il estime que la modification du rythme de travail constitue une modification du contrat. Il tient le même raisonnement s'agissant des primes de panier, précisant que la prime ne constitue pas un remboursement de frais mais une indemnité forfaitaire. La société Ideal fibres & fabrics explique que les salariés ont été dispensés de réaliser leur prestation de travail afin de leur permettre de participer aux réunions collectives ou de se rendre aux entretiens individuels dans le cadre de la cellule de reclassement. Elle estime que le salarié ne peut cumuler le maintien de sa rémunération avec le paiement des heures de délégation, ce qui reviendrait à le payer plus que s'il avait travaillé. Elle soutient en outre que la prime de panier est versée quand le salarié est présent dans l'entreprise au minimum 4 heures sans interruption et qu'Eric Y a perçu les primes correspondant strictement aux heures de délégation déclarées. L'utilisation des heures de délégation ne doit entraîner aucune perte de salaire pour représentant du personnel. Lorsque les heures de délégation sont prises en dehors du temps de travail, en raison des nécessités du mandat, elles doivent être payées en plus des heures de travail. En conséquence en cas de dispense d'activité, il convient de référer aux horaires que le salarié aurait dû suivre s'il avait travaillé. L'employeur est en effet tenu de fournir du travail et le salarié n'est pas responsable de cette dispense d'activité qui ne résulte pas d'un cas de force majeure. Eric Y est donc fondé à réclamer le paiement des heures de délégation prises en dehors du temps de travail résultant de son planning théorique, soit pour un montant non contesté de 2 133,04 euros. Par ailleurs, le salarié ne peut être privé, du fait de l'exercice de son mandat, du paiement d'une indemnité forfaitaire compensant une sujétion particulière de son emploi qui constitue un complément de salaire. En l'espèce l'accord d'entreprise du 30 juin 2000 prévoit le versement d'une indemnité forfaire de panier dès que le salarié est présent dans l'entreprise au minimum 4 heures, de sorte qu'elle est versée en contrepartie d'une contrainte liée à l'organisation du travail en postes. Eric Y réclame le paiement des indemnités qu'il aurait perçues s'il avait travaillé suivant son planning théorique. Il sera fait droit à la demande à hauteur de 804,44 euros ;
1. ALORS QU'un représentant du personnel placé en situation de dispense rémunérée d'activité du fait de la fermeture du site auquel il est affecté ne peut cumuler sa rémunération avec le paiement des heures de délégation, seraient-elles effectuées en dehors du temps de travail théorique ; qu'en accordant au salarié un rappel d'heures de délégation prises en dehors du temps de travail résultant de son planning théorique, la cour d'appel a violé les articles L. 2315-1, L. 2315-3, L. 2325-6, L. 2325-7, L. 2143-13 et L. 2143-17 du Code du travail ;
2. ALORS QUE la prime de panier n'est due, selon l'article 2-D de l'accord d'entreprise du 30 juin 2000 l'ayant instituée, que pour les jours où le salarié a été présent dans l'entreprise sans interruption au moins quatre heures ; que l'employeur soulignait qu'il avait versé à M. Y cette prime après la cessation d'activité du site lorsque, faisant usage de ses heures de délégation durant cette période de dispense rémunérée d'activité, il avait rempli cette condition et qu'il l'avait ainsi rempli de ses droits (conclusions d'appel, p. 32) ; qu'en accordant en outre au salarié le paiement des indemnités de panier qu'il aurait perçues s'il avait travaillé suivant son planning théorique, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

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