Jurisprudence : CAA Nancy, 1ère, 22-12-2005, n° 02NC00590



N° 02NC00590


SARL BRASSERIE DU THEATRE


Mme Mazzega, Présidente

Mme Fischer-Hirtz, Rapporteur

M. Adrien, Commissaire du gouvernement


Audience du 17 novembre 2005

Lecture du 22 décembre 2005

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

La Cour administrative d'appel de Nancy


(1ère Chambre)


Vu la requête, enregistrée au greffe le 3 juin 2002, présentée pour la SARL BRASSERIE DU THEATRE, dont le siège est 1 rue de Vesle à Reims (51100), prise en la personne de son gérant représentée par la société juridique et fiscale de Champagne, société d'avocats, complétée par un mémoire enregistré le 4 octobre 2002 ; la SARL BRASSERIE DU THEATRE demande à la Cour :


1°) d'annuler le jugement n° 00-1277/01-31 du 12 mars 2002 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses demandes tendant à l'annulation, d'une part, de la décision du maire de Reims en date du 3 mai 2000 refusant le renouvellement d'un bail commercial, d'autre part, de la décision du 13 décembre 2000 du maire de Reims refusant de retirer une décision du 28 août 2000 mettant fin à l'autorisation d'occuper une partie du domaine public communal ;


2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;


3°) d'enjoindre au maire de Reims de procéder à la régularisation d'une convention portant renouvellement de bail commercial ;


4°) de condamner la ville de Reims à lui verser 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Elle soutient que :


- le jugement est irrégulier, dans la mesure où elle n'a pas été convoquée à l'audience publique du 26 février 2002, elle n'a pas été informée de la jonction des demandes présentées au tribunal administratif et n'a pas donné son accord au désistement des conclusions reconventionnelles présentées par la ville de Reims ;


- le maire de Reims n'était pas compétent pour refuser le renouvellement du bail commercial ;


- la décision du 3 mai 2000 refusant de renouveler le bail commercial n'a pas été notifiée à la SARL BRASSERIE DU THEATRE ;


- le bail commercial devait être renouvelé conformément aux dispositions du décret du 30 septembre 1953 ;


Vu le jugement attaqué ;


Vu le mémoire, enregistré le 6 septembre 2002, présenté pour la ville de Reims, représentée par son maire en exercice, à ce habilité par délibération du conseil municipal du 21 mai 2001, par Me Brissart, avocat ;


La ville de Reims conclut au rejet de la requête ;


Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;


Vu les autres pièces du dossier ;


Vu le code général des collectivités territoriales ;


Vu le décret n° 53-960 du 30 septembre 1953 ;


Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;


Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 novembre 2005 :


- le rapport de Mme Fischer-Hirtz, premier conseiller,


- et les conclusions de M. Adrien, commissaire du gouvernement ;


Considérant que le 17 mai 1991, la ville de Reims a conclu avec la SARL BRASSERIE DU THEATRE une convention aux termes de laquelle elle mettait à disposition de ladite société, à titre d'occupation du domaine public, le café du théâtre situé à l'angle des rues de Vesle et Tronsson Ducoutray dépendant du théâtre municipal ; que la convention dont s'agit, conclue pour une durée de neuf ans, devait prendre fin de plein droit le 30 juin 2000 ; que le 28 juin 1996, le maire de Reims a également délivré à la SARL BRASSERIE DU THEATRE un arrêté portant permis de stationnement aux termes duquel il autorisait la société à installer des jardinières pour délimiter la terrasse découverte qu'elle exploite au droit de son établissement ; que, par la présente requête, la SARL BRASSERIE DU THEATRE fait appel du jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne qui a rejeté ses demandes dirigées, d'une part, contre la décision du 3 mai 2000 du maire de Reims refusant de faire droit à sa demande tendant à obtenir "le renouvellement de son bail commercial pour une durée de neuf ans", d'autre part, contre l'arrêté en date du 28 août 2000 retirant l'autorisation relative à l'aménagement de la terrasse extérieure, ensemble la décision du 13 décembre 2000 par laquelle le maire de Reims a refusé de retirer cet arrêté ;


Sur la régularité du jugement attaqué :


Considérant, en premier lieu, que si la SARL BRASSERIE DU THEATRE soutient qu'elle n'a pas été avertie de la date d'audience qui s'est tenue au Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne le 26 février 2002, il ressort toutefois des pièces du dossier que les avis d'audience ont été régulièrement adressés à son conseil le 29 janvier 2002 ; que, dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure doit être écarté ;


Considérant, en deuxième lieu, que le pouvoir de prononcer la jonction de demandes qui ont fait l'objet d'une instruction commune relève de l'appréciation souveraine des premiers juges et est sans influence sur la régularité des jugements attaqués ; que, dès lors, il n'appartient pas à la société requérante de discuter devant le juge d'appel de l'opportunité pour le tribunal de recourir à cette faculté ;


Considérant, en troisième lieu, que le désistement n'est pas soumis à son acceptation par le défendeur ; que par suite, en donnant acte à la ville de Reims du désistement de ses conclusions reconventionnelles tendant à ce que le tribunal ordonne à la SARL BRASSERIE DU THEATRE de libérer le domaine public communal sous astreinte, sans mettre cette dernière à même d'accepter un tel désistement, les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité ;


Sur les conclusions dirigées contre la décision du 3 mai 2000 portant refus par la ville de Reims de renouveler le bail consenti à la SARL BRASSERIE DU THEATRE :


Considérant, en premier lieu, que par la décision du 3 mai 2000, le maire de Reims s'est borné à indiquer à la SARL BRASSERIE DU THEATRE qu'il ne pouvait réserver de suite favorable à sa demande du 18 avril 2000 par laquelle elle sollicitait le "renouvellement de son bail commercial pour une durée de neuf ans à compter du 1er juillet 2000" ; qu'en revanche, le maire de Reims a proposé à la société de se maintenir dans les lieux par une convention d'occupation temporaire d'une année ; que, contrairement aux allégations de la SARL BRASSERIE DU THEATRE, le maire de Reims, qui n'a procédé à la rupture d'aucun lien contractuel qui unirait la SARL BRASSERIE DU THEATRE à la ville de Reims, était bien compétent, sur le fondement des dispositions de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales, pour prendre une telle décision ;


Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de ce que la décision du 3 mai 2000 n'aurait pas été notifiée à la SARL BRASSERIE DU THEATRE manque en fait ;


Considérant, en troisième lieu, que la SARL BRASSERIE DU THEATRE n'établit pas en quoi les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu pour la Cour d'adopter, commis une erreur en estimant que la convention du 17 mai 1991 comportait occupation du domaine public ; que, dès lors, la société n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions du décret du 30 septembre 1953 réglant les rapports entre les propriétaires et les locataires en ce qui concerne le renouvellement des baux à loyer des locaux à usage commercial pour soutenir qu'elle avait droit, sur ce fondement, à son maintien dans les lieux ;


Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;


Sur les conclusions dirigées contre les décisions du maire de Reims en date des 28 août et 13 décembre 2000 retirant à la SARL BRASSERIE DU THEATRE l'autorisation d'occuper le domaine public pour installer une terrasse :


Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens :


Considérant que par l'arrêté en date du 28 août 2000, le maire de Reims a mis fin à l'occupation du domaine public communal antérieurement consentie à SARL BRASSERIE DU THEATRE l'autorisant à installer, rue de Vesle, une terrasse découverte et des jardinières au droit de l'établissement qu'elle exploitait ; que, par décision du 13 décembre 2000, le maire de Reims a refusé de faire droit à la demande gracieuse de la SARL BRASSERIE DU THEATRE tendant au retrait de cet arrêté ;


Considérant que pour motiver son refus le maire de Reims s'est fondé sur la nécessité de laisser libre en permanence le cheminement des handicapés permettant l'accès au grand théâtre ; que, toutefois, pour contester un tel motif justifiant le retrait de l'autorisation initialement délivrée, la SARL BRASSERIE DU THEATRE soutient, sans être utilement contredite, que l'arrêté en vertu duquel elle avait été autorisée à exploiter sa terrasse prévoyait déjà de laisser un passage de sécurité de 1,40 mètre, suffisant pour permettre aux personnes handicapées d'accéder au théâtre et qu'aucun des rapports de la commission de sécurité versés au dossier ne préconise la suppression de la terrasse ; que, dès lors, la SARL BRASSERIE DU THEATRE est fondée à soutenir que l'arrêté litigieux, qui repose sur des faits inexacts, et la décision du 13 décembre 2000 par laquelle le maire a refusé de le retirer, doivent être annulés ;


Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL BRASSERIE DU THEATRE est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté les conclusions de sa demande d'annulation de l'arrêté du maire du Reims de 28 août 2000 ainsi que celles dirigées contre la décision du maire de Reims du 13 décembre 2000 ; qu'il y a lieu, dans cette mesure d'annuler le jugement du 12 mars 2002 ;


Sur les conclusions à fins d'injonction :


Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de la SARL BRASSERIE DU THEATRE tendant à l'annulation de la décision du maire de Reims du 3 mai 2000, n'implique pas qu'il soit fait droit à la demande de la requérante tendant à ce que le maire de Reims procède à la conclusion d'une nouvelle convention portant renouvellement de son bail ;


Sur les conclusions de la SARL BRASSERIE DU THEATRE tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :


Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner la ville de Reims à payer à la SARL BRASSERIE DU THEATRE une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par celle-ci en appel et non compris dans les dépens ;


DECIDE :


Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 12 mars 2002 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la demande n° 01-31 de la SARL BRASSERIE DU THEATRE tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Reims du 28 août 2000 ensemble de la décision du maire de Reims du 13 décembre 2000.


Article 2 : L'arrêté du maire de Reims en date du 28 août 2000 et la décision du maire de Reims du 13 décembre 2000 sont annulés.


Article 3 : La ville de Reims versera à la SARL BRASSERIE DU THEATRE la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL BRASSERIE DU THEATRE est rejeté.


Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL BRASSERIE DU THEATRE et à la ville de Reims.


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