Par déclaration enregistrée le 10 avril 2024, la CIPAV a relevé appel de cette décision.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 14 août 2024 et reprises oralement sans ajout ni retrait au cours des débats, elle demande à la cour de :
- infirmer le jugement,
A titre principal,
- déclarer irrecevable le recours formé par Mme [G],
A titre subsidiaire,
- juger du bon calcul des points de retraite de base et de retraite complémentaire de Mme [G],
- attribuer à Mme [G] les points de retraite de base suivants :
* 163 points de retraite de base en 2009,
* 322,7 points de retraite de base en 2010,
* 134,4 points de retraite de base en 2011,
* 57 points de retraite de base en 2017,
* 65,9 points de retraite de base en 2018,
* 193,2 points de retraite de base en 2019,
* 195 points de retraite de base en 2020,
- attribuer à Mme [G] les points de retraite complémentaire suivants :
* 10 points de retraite complémentaire en 2009,
* 20 points de retraite complémentaire en 2010,
* 10 points de retraite complémentaire en 2011,
* 8 points de retraite complémentaire en 2017,
* 9 points de retraite complémentaire en 2018,
* 26 points de retraite complémentaire en 2019,
* 26 points de retraite complémentaire en 2020,
En tout état de cause,
- débouter Mme [G] de l'ensemble de ses demandes,
- condamner Mme [G] à lui verser la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager.
Par ses écritures notifiées par voie électronique le 14 mai 2024 et reprises oralement sans ajout ni retrait au cours des débats, Mme [G] demande à la cour de :
- confirmer le jugement, sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en réparation du préjudice moral,
Statuant à nouveau,
- condamner la CIPAV à lui verser la somme de 3 000 euros en réparation du préjudice moral,
Y ajoutant,
- condamner la CIPAV à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation de l'appel abusif,
- condamner la CIPAV à lui verser la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles.
En application de l'
article 455 du code de procédure civile🏛, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions susvisées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
SUR LA RECEVABILITE DU RECOURS DE MME [G] PORTANT SUR LE RELEVE DE SITUATION INDIVIDUELLE
La CIPAV soutient que le recours de Mme [G] sur le relevé de situation individuelle est irrecevable au motif que ce document, purement indicatif et provisoire, ne constitue pas une décision faisant grief, susceptible de recours devant la commission de recours amiable. Elle en déduit qu'en l'absence de réclamation préalable à la CIPAV, la demande de Mme [G] au titre de ce document formulée directement devant la commission de recours amiable puis devant le tribunal est irrecevable.
En réponse, Mme [G] prétend que son relevé de situation individuelle constitue une décision de la CIPAV susceptible d'un recours immédiat. Elle rappelle que ce relevé retranscrit les droits à retraite comptabilisés par chaque caisse de retraite dont le professionnel relève et que la minoration de ses droits figurant dans ledit relevé cause nécessairement grief. Elle ajoute que son relevé de situation individuelle était renseigné et qu'il impliquait, à ce titre, une décision de la CIPAV de calcul erratique de droits à retraite susceptible de recours.
Il résulte des dispositions des
article R. 142-1 et R. 142-6 du code de la sécurité sociale🏛🏛, dans leur rédaction applicable, que les réclamations contre les décisions prises par les organismes de sécurité sociale sont, préalablement à la saisine de la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale, soumises à une commission de recours amiable, l'intéressé pouvant considérer sa demande comme rejetée lorsque la décision de la commission n'a pas été portée à la connaissance du requérant dans le délai de deux mois.
Le relevé de situation individuelle que les organismes et services en charge des régimes de retraite adressent, périodiquement ou à leur demande, aux assurés comportant notamment, pour chaque année pour laquelle des droits ont été constitués, selon les régimes, les durées exprimées en années, trimestres, mois ou jours, les montants de cotisations ou le nombre de points pris en compte ou susceptibles d'être pris en compte pour la détermination des droits à pension, l'assuré est recevable à contester devant la commission de recours amiable puis la juridiction du contentieux général le montant des cotisations ou le nombre de points figurant sur ce relevé (
2e Civ., 11 octobre 2018, pourvoi n° 17-25.956⚖️).
Si le relevé de situation individuelle délivré à l'assuré mentionne « données non disponibles » ou « absence de données carrière », il fait alors état d'une absence de données et ne peut caractériser une ou des décisions prises par les organismes de sécurité sociale compétents pour la détermination des droits à retraite d'un assuré social, à la différence d'un relevé dont les mentions feraient apparaître une absence des droits. En cas d'absence de données, l'assuré ne peut former donc une réclamation en se fondant sur un tel relevé qui ne matérialise aucune décision de la CIPAV et son recours direct auprès de la commission de recours amiable puis ensuite devant la juridiction du contentieux général de la sécurité social est irrecevable (
2e Civ., 1er décembre 2022, pourvoi n° 21-12.784⚖️).
Au cas particulier, suite à l'obtention de son relevé de situation individuelle, Mme [G] a relevé des erreurs sur l'acquisition de ses droits à retraite de base et complémentaire au titre des années 2009 à 2011 et 2017 à 2020.
Mme [G] est ainsi recevable à contester les mentions figurant sur son relevé de situation individuelle au titre des années 2009 à 2011 et 2017 à 2020, ce document comportant pour l'ensemble de ces années l'indication du nombre de points pris en compte pour la détermination de ses droits à pension et caractérisant une décision prise par la caisse au
titre des années concernées.
Par ailleurs, le paiement des cotisations est sans emport sur la question de l'existence d'une décision de la caisse, préalable nécessaire à la formation d'un recours.
Il convient, dans ces conditions, de confirmer le jugement en ce qu'il déclare recevable le recours de Mme [G] pour les années 2009 à 2011 et 2017 à 2020.
SUR LA DEMANDE EN RECTIFICATION DES POINTS DE RETRAITE
1 - sur les points de retraite complémentaire
Au soutien de son recours, la CIPAV prétend que Mme [G] commet une erreur en se fondant sur son chiffre d'affaires dans le calcul de ses points de retraite complémentaire pour la période antérieure à 2016. Elle estime en effet que les droits des auto-entrepreneurs se calculent après un abattement forfaitaire sur le chiffre d'affaires correspondant au revenu déclaré réalisé par l'auto-entrepreneur selon son activité lequel est de 34% pour les professions libérales non réglementées soumises au BNC.
Elle se prévaut des dispositions du décret 79-262 du 21 mars 1979🏛 (en particulier l'article 2) et de ses statuts (en particulier l'article 3-12), ajoutant que le régime complémentaire de la CIPAV étant un régime obligatoire, ses statuts s'appliquent à tous ses assurés, quel que soit leur régime (droit commun ou auto-entreprise).
Elle considère ainsi qu'il convient de calculer les points de retraite complémentaire pour la période 2009 à 2015, en prenant en compte le bénéfice non commercial déclaré de l'auto-entrepreneur affilié afin de déterminer la plus faible cotisation non nulle dont il aurait pu être redevable au titre du régime classique en application de l'article 2 du décret du n° 79-262 du 21 mars 1979 et conformément à l'article R. 133-30-10 du code de la sécurité sociale.
De plus, la CIPAV prétend que, concernant les auto-entrepreneurs, il convient d'opérer une distinction entre la période antérieure au 1er janvier 2016 pour laquelle une compensation du régime par l'Etat a été prévue et la période postérieure à cette date à partir de laquelle la compensation a pris fin.
Ainsi, elle expose que pour la période antérieure au 1er janvier 2016, le montant compensé par l'État correspond à la différence entre la plus faible cotisation dont le régime d'activité permettait à l'assuré de bénéficier et la part du forfait social affectée au régime de retraite complémentaire et acquittée par l'assuré.
En ce qui concerne la période à compter du 1er janvier 2016, le nombre de points attribués est proportionnel, selon la caisse, aux cotisations effectivement réglées dans le respect du principe de proportionnalité et afin d'éviter une rupture d'égalité vis-à-vis de ses autres adhérents ne relevant pas du régime de l'auto-entreprise. Elle en déduit qu'elle a fait une exacte application de la loi en retenant l'attribution des points à Mme [G] proportionnellement au montant des cotisations payées ».
Dans ces conditions, la CIPAV prétend que faire bénéficier Mme [G] du nombre maximum de points reviendrait à lui attribuer des points à une valeur d'achat moindre et créerait une rupture d'égalité vis-à-vis des adhérents de la caisse ne relevant pas du régime de l'auto-entreprise. Elle estime que Mme [G], ayant opté pour le statut d'auto-entrepreneur, doit assumer les conséquences de son choix
Elle termine en indiquant que la détermination du nombre des points acquis ne résulte que de l'application des dispositions réglementaires applicables au régime de l'auto-entrepreneur et du principe de proportionnalité des droits aux cotisations versées.
En réponse, Mme [G] soutient que, selon l'
article 2 du décret du 21 mars 1979🏛, le nombre de points procède directement de la classe de cotisation de l'affilié déterminée en fonction de son chiffre d'affaires et non pas de ses bénéfices non commerciaux (BNC). Elle considère que la CIPAV ne peut allouer des points de retraite complémentaires inférieurs à ceux de la classe à laquelle elle est susceptible de prétendre en fonction de son revenu. Elle prétend que les relations financières entre l'Etat et la CIPAV, étrangères à la question de la comptabilisation des droits à la retraite, n'intéressent pas l'adhérent, de même que la ventilation du forfait social.
Elle ajoute que l'invocation d'une règle de proportionnalité, au surplus sans fondement textuel ni jurisprudentiel, est incompatible avec ce décret qui vise un octroi de points forfaitaires et non proportionnels. Elle relève encore que l'application d'une règle de proportionnalité est contraire à l'
article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale🏛 qui prévoit expressément pour l'auto-entrepreneur un régime dérogatoire du droit commun.
Mme [G] souligne ensuite que l'article 3.12 des statuts de la CIPAV qui prévoit l'application d'une règle de proportionnalité lui est inopposable et que la CIPAV doit se référer uniquement au chiffre d'affaires et non au bénéfice pour calculer tant les points de retraite complémentaire que les trimestres acquis.
La cour rappelle que l'
article 2 du décret n° 79- 262 du 21 mars 1979🏛 fixe la méthode de calcul des points de retraite complémentaire et vise l'octroi de points forfaitaires et non proportionnels. L'invocation par la CIPAV d'une règle de proportionnalité est donc inopérante et sans fondement textuel ni au surplus jurisprudentiel sur ce point. Et les statuts de la caisse à ce titre ne sauraient en rajouter dès lors qu'ils n'ont aucune valeur normative à l'endroit de l'adhérent et n'intéressent que le fonctionnement interne de l'organisme social.
L'article 2 du décret précité dispose que le régime d'assurance vieillesse complémentaire des indépendants relevant de la CIPAV comporte 8 classes de cotisations (A, B, C, D, E, F, G et H) portant attribution annuelle d'un certain nombre de points. Il y est précisé que les montants des cotisations des classes B, C, D, E, F, G et H sont respectivement égaux à 2, 3, 5, 7, 11, 12 et 13 fois le montant de la cotisation de la classe A et que la cotisation due par chaque assujetti est celle de la classe à laquelle correspond, dans les conditions fixées par les statuts prévus à l'article 5, son revenu d'activité tel que défini à l'
article L. 131-6 du code de la sécurité sociale🏛.
Il résulte de ces dispositions seules applicables, en droit commun, au calcul et à la fixation du nombre de points de retraite complémentaire attribués annuellement aux assujettis à la CIPAV, que ce nombre de points procède directement de la classe de cotisations de l'affilié, déterminée en fonction de son revenu d'activité.
Or, l'article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale, dans ses versions successives issues de la
loi n° 2009-431 du 20 avril 2009🏛, de la
loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012🏛, et de la
loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015🏛, devenu L. 613-7 du même code à compter du 14 juin 2018, prévoit que les auto-entrepreneurs bénéficient d'un régime dérogatoire quant à l'assiette et au taux des cotisations et contributions de sécurité sociale et que celles dont ils sont redevables sont calculées mensuellement ou trimestriellement, sur la base de leur chiffre d'affaires.
Dès lors, le revenu d'activité à prendre en compte pour déterminer la classe de cotisations applicable à l'auto-entrepreneur et le nombre de points de retraite complémentaire en découlant est son chiffre d'affaires.
Les dispositions de l'article R. 133-30-10 du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2016, définissant les modalités de la compensation financière de l'Etat aux fins d'inciter une adhésion au statut des auto-entrepreneurs, sont étrangères aux rapports entre la CIPAV et ses cotisants auto-entrepreneurs, d'autant que l'adhésion de ces derniers résulte non pas d'une adhésion volontaire mais du caractère obligatoire des dispositions législatives et réglementaires applicables.
Il s'ensuit que la CIPAV ne peut ici utilement arguer de l'incidence d'un dispositif législatif et réglementaire ayant pour objet l'incitation à l'adhésion au statut d'auto-entrepreneur aux fins de retenir une classe de cotisations inférieure à celle à laquelle les revenus d'activité de Mme [G] lui ouvraient droit, en appliquant au chiffre d'affaires un abattement pour déterminer la classe de cotisation applicable et le nombre de points attribués.
De même, c'est en vain que la CIPAV prétend que les auto-entrepreneurs, étant soumis à un seuil de chiffre d'affaires, ne peuvent prétendre au nombre de points prévus en cas de revenus supérieurs à ce seuil, dans la mesure où les conditions d'ouverture du droit au bénéfice du statut d'auto-entrepreneur sont sans incidence sur les modalités de calcul des points de retraite complémentaire.
Le revenu de référence pour les auto-entrepreneurs est leur chiffre d'affaires (ou « leurs recettes effectivement réalisées ») qui constitue l'assiette spécifique des cotisations (« forfait social »). Ce régime garantit aux auto-entrepreneurs l'acquisition de droits identiques à ceux des professionnels libéraux « classiques » par référence à un niveau de contribution réputé équivalent. Il déroge ainsi au régime de droit commun.
Au surplus, si l'auto-entrepreneur est autorisé à régler un impôt sur le revenu calculé sur la base de son chiffre d'affaires grâce au prélèvement libératoire (2,2% du chiffre d'affaires), l'abattement fiscal de 34% qui s'applique hors prélèvement obligatoire ne peut pas être transposé pour la détermination de la classe de revenu. C'est donc à tort que la CIPAV entend calculer le « forfait social » sur les bénéfices non commerciaux.
Le BNC auquel a eu recours la CIPAV sur les périodes 2009 à 2011 et 2017 à 2020 est donc infondé pour les auto-entrepreneurs.
Par conséquent, dès lors qu'en l'espèce le montant des revenus d'activité de Mme [G] et le paiement afférent de ses cotisations ne sont pas discutés, il convient de condamner la CIPAV à rectifier l'assiette de calcul des points de retraite complémentaire en prenant en compte le chiffre d'affaires de l'intéressée pour déterminer la classe de cotisations et le nombre de points attribués afférent.
Le calcul proposé par Mme [G], détaillé dans ses écritures et confirmé par ses pièces, sera validé.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il condamne la CIPAV à rectifier les points de retraite complémentaire acquis, sur relevé de situation individuelle de Mme [G], comme suit :
- 40 points en 2009,
- 40 points en 2010,
- 40 points en 2011,
- 36 points en 2017,
- 36 points en 2018,
- 36 points en 2019,
- 36 points en 2020.
2 - sur les points de retraite de base
Les parties s'accordent sur la formule de calcul des points de retraite de base des auto-entrepreneurs mais divergent sur l'assiette du revenu.
La CIPAV fait valoir que, pour la période antérieure à 2016 et contrairement à ce que conclut Mme [G], il doit être pris en compte le BNC déclaré, égale à une valeur fixée par décret, et non pas le chiffre d'affaires. Elle considère que les droits des auto-entrepreneurs se calculent après un abattement forfaitaire sur le chiffre d'affaires correspondant au revenu déclaré réalisé par l'auto-entrepreneur selon son activité lequel est de 34% pour les professions libérales non réglementées soumises au BNC.
A compter du 1er janvier 2016, la CIPAV retient que le nombre de point acquis est proportionnel au montant reversé par l'ACOSS (pourcentage au titre de la cotisation de retraite de base. Elle applique ainsi au revenu d'activité une réfaction correspondant au pourcentage du forfait social que lui reverse l'ACOSS conformément à l'
article D. 131-5-3 du code de la sécurité sociale🏛 en vigueur au 31 décembre 2018, devenu D. 613-6 du même code, au titre des tranches 1 et 2 de la cotisation d'assurance vieillesse de base. Elle s'estime dès lors fondée à retenir l'attribution de points proportionnellement au montant des cotisations acquittées, chaque point ayant une valeur déterminée en fonction de sa tranche.
Mme [G] rétorque que la CIPAV a pratiqué à tort sur le chiffre d'affaires un abattement de 34% avant 2016. Et elle estime que la rectification de ses points de retraite de base doit être réalisée conformément aux tableaux figurant en sa pièce 1-2.
En application de l'article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale, dans ses versions successives issues de la loi n° 2009-431 du 20 avril 2009, de la loi n° 2012-1404 en date du 17 décembre 2012, et de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015, devenu L. 613-7 du même code à compter du 14 juin 2018, par dérogation à l'article L. 131-6-2, les travailleurs indépendants bénéficiant des régimes définis aux
articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts🏛🏛 peuvent opter, sur simple demande, pour que l'ensemble des cotisations et contributions de sécurité sociale dont ils sont redevables soient calculées mensuellement ou trimestriellement en appliquant au montant de leur chiffre d'affaires ou de leurs revenus non commerciaux effectivement réalisés le mois ou le trimestre précédent un taux fixé par décret pour chaque catégorie d'activité mentionnée aux dits articles du code général des impôts de manière à garantir un niveau équivalent entre le taux effectif des cotisations et contributions sociales versées et celui applicable aux mêmes titres aux revenus des travailleurs indépendants.
Il résulte de ces dispositions que les auto-entrepreneurs bénéficient d'un régime dérogatoire quant à l'assiette et au taux des cotisations et contributions de sécurité sociale et que celles dont ils sont redevables sont calculées mensuellement ou trimestriellement, sur la base de leur chiffre d'affaires.
En outre, les dispositions de l'article R. 133-30-10 du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2016, définissant les modalités de la compensation financière de l'Etat aux fins d'inciter une adhésion au statut des auto-entrepreneurs, sont étrangères aux rapports entre la CIPAV et ses cotisants auto-entrepreneurs, d'autant que l'adhésion de ces derniers résulte non point d'une adhésion volontaire mais du caractère obligatoire des dispositions législatives et réglementaires applicables.
Ici, les parties s'accordent sur la formule de calcul des points de retraite de base des auto-entrepreneurs mais divergent sur l'assiette de revenus, la CIPAV pratiquant un abattement de 34% sur le chiffre d'affaires conduisant à une minoration des points de retraite de 34%.
Il ressort des textes légaux précités que la caisse ne peut utilement arguer de l'incidence d'un dispositif législatif et réglementaire ayant pour objet l'incitation à l'adhésion au statut d'auto-entrepreneur afin de justifier l'application d'un abattement sur le chiffre d'affaires réalisé par l'auto-entrepreneur, pour déterminer l'assiette du calcul des points de retraite de base.
De même, la répartition des montants de cotisations sociales recouvrées pour les adhérents de la CIPAV relevant du régime de l'auto-entrepreneur, prévue à l'article D. 131-5-3 du code de la sécurité sociale, à compter du 13 décembre 2018, n'a aucune incidence sur les modalités de calcul des droits à la retraite.
Dès lors, en l'espèce, le montant des revenus d'activité de Mme [G] et le paiement afférent de ses cotisations n'étant pas discutés, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il condamne la CIPAV à rectifier l'assiette de calcul des points de retraite de base en prenant en compte les revenus d'activité de l'intéressée sans appliquer aucun abattement pour les années 2009, 2010 et 2011, ni sans appliquer un taux de répartition des montants de cotisations.
Le calcul des points de retraite de base proposé par Mme [G], conforme à ces principes, sera, en conséquence, validé par la cour.
Il s'en évince que le jugement sera confirmé en ce qu'il rectifie le nombre de points de retraite de base acquis par Mme [G] jusqu'en 2016 comme suit :
246,9 points en 2009,
451,8 points en 2010,
332,8 points en 2011.
Pour la période postérieure à 2016, c'est à tort que la CIPAV prend pour base le montant des cotisations qui lui ont été effectivement versées par application du forfait social.
Il résulte des dispositions de l'article L. 133-6-8 devenu L. 613-7 du code de la sécurité que les cotisations et les contributions de sécurité sociale dont sont redevables les travailleurs indépendants mentionnés au II du présent article bénéficiant des régimes définis aux articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts sont calculées mensuellement ou trimestriellement, en appliquant au montant de leur chiffre d'affaires ou de leurs recettes effectivement réalisés le mois ou le trimestre précédent un taux global fixé par décret pour chaque catégorie d'activité mentionnée aux mêmes articles, de manière à garantir, pour des montants de chiffre d'affaires ou de recettes déterminés par décret pour chacune de ces catégories, un niveau équivalent entre le taux effectif global des cotisations et des contributions sociales versées, d'une part, par ces travailleurs indépendants et, d'autre part, par ceux ne relevant pas des dispositions du présent article (...) ».
Mme [G] soutient donc à bon droit que, pour garantir aux auto-entrepreneurs un niveau de droits équivalent aux autres travailleurs indépendants, le nombre de points retraite qui leur est attribué au titre du régime de base doit être calculé à partir de leur chiffre d'affaires et non du montant du forfait social prélevé sur ce chiffre d'affaires.
Conformément à la méthode de calcul déclinée en pièce 1-2 de l'assurée, Mme [G] a acquis les points de retraite de base pour les années postérieures à 2016 suivants :
- 83,7 points en 2017,
- 98,7points en 2018,
- 289,2 points en 2019,
- 292,3 points en 2020.
Le jugement sera confirmé en ses dispositions en ce sens.
SUR LA REMISE D'UN RELEVE DE SITUATION INDIVIDUELLE CONFORME
La cour relève que le jugement n'est pas remis en cause en ce qu'il rejette la demande formée par Mme [G] tendant à voir condamner la CIPAV à lui transmettre et à lui rendre accessible, y compris en ligne, un relevé de situation individuelle conforme dans son contenu, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision, et passé ce délai, sous astreinte de 250 euros par jour de retard.
SUR LA DEMANDE DE DOMMAGES ET INTERETS POUR PREJUDICE MORAL
Mme [G] réclame la somme de 3 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral découlant de la minoration de ses droits à retraite et du stress généré par le sentiment d'impuissance à obtenir rectification de ses droits.
La CIPAV s'y oppose au motif que la divergence d'interprétation des textes ne saurait être constitutive d'une faute de sa part.
L'
article 1240 du code civil🏛 dispose que tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, et l'article 1241 du même code ajoute que chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait mais encore par sa négligence ou par son imprudence.
L'
article 9 du code de procédure civile🏛 fait obligation à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
Un différend juridique sur des modalités de calcul de droits à pension ne peut à lui seul constituer une faute et si la CIPAV a ici fait une application erronée des textes, cette position ne revêt pas un caractère fautif, ce qui doit conduire au rejet de la demande de dommages et intérêts présentée par Mme [G], ce d'autant plus qu'elle ne justifie d'aucun préjudice en découlant. Enfin, dans la mesure où le présent arrêt fait droit aux demandes de Mme [G] sur les périodes litigieuses, elle n'est pas fondée à alléguer une minoration de ses droits qui ne sont que des droits futurs. Le stress allégué n'est au surplus pas démontré.
La demande indemnitaire de Mme [G] sera donc rejetée et le jugement confirmé.
SUR LA DEMANDE DE DOMMAGES ET INTERETS POUR APPEL ABUSIF
Mme [G] soutient que l'appel de la caisse visait uniquement à la décourager et à la dissuader dans ses démarches, ainsi qu'à profiter de l'effet suspensif lié au recours pendant une durée excessivement longue.
La CIPAV rétorque que la divergence d'interprétation des textes ne saurait l'empêcher d'exercer son droit d'appel. Elle ajoute avoir fait une juste application des textes et que Mme [G] ne justifie d'aucun préjudice.
Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Il est constant l'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol. En outre, la faute, même non grossière ou dolosive suffit, lorsqu'un préjudice en résulte, à justifier une condamnation à des dommages et intérêts.
En l'espèce, Mme [G] ne démontre pas l'intention de nuire qui caractériserait le caractère abusif de l'appel diligenté par la CIPAV ni même son préjudice.
Ajoutant au jugement, sa demande de dommages et intérêts sera donc rejetée comme non fondée.
SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES
La décision attaquée sera confirmée en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.
La CIPAV, qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel et au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.