Jurisprudence : CA Bordeaux, 17-04-2025, n° 21/06729, Infirmation partielle


COUR D'APPEL DE BORDEAUX


2ème CHAMBRE CIVILE


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ARRÊT DU : 17 AVRIL 2025


N° RG 21/06729 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MOUB


S.A.S. A


c/


[M] [B] [T] (décédé)

[X] [W]

S.A. ALLIANZ IARD


Nature de la décision : AU FOND


Grosse délivrée le :


aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 09 novembre 2021 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, Aa B, JCP de BORDEAUX (chambre : 7, RG : 20/02753) suivant déclaration d'appel du 10 décembre 2021



APPELANTE :


S.A.S. CARREDAS

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social sis [Adresse 4]


Représentée par Me Ludovic BOUSQUET, avocat au barreau de BORDEAUX


INTIMÉS :


[M] [B] [T]

né le … … … à [Localité 6]

Décédé le 07.03.22

de … …



… [… …]


Représenté par Me Michel PUYBARAUD de la SCP MICHEL PUYBARAUD, avocat au barreau de BORDEAUX


[X] [W]

de nationalité Française

exerçant sous l'enseigne AKAY-IMMO

demeurant [… …]


S.A. ALLIANZ IARD

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social sis [Adresse 1]


Représentés par Me Claire SAINT-JEVIN de la SELARL SAINT-JEVIN, avocat au barreau de BORDEAUX



COMPOSITION DE LA COUR :


L'affaire a été examinée le 04 mars 2025 en audience publique, devant la cour composée de :


Monsieur Jacques BOUDY, Président

Madame Christine DEFOY, Conseillère

Madame Bénédicte DE VIVIE, Conseillère


Greffier lors des débats : Madame Marie-Laure MIQUEL

Greffier lors du prononcé: Madame Audrey COLLIN


Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries.


ARRÊT :


- contradictoire


- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛.


* * *



FAITS ET PROCÉDURE :


1- Suivant acte authentique du 30 juin 2017, la société par actions simplifiée Carredas (ci-après la Sas Carredas), a acquis de M. [M] [T] un bien à usage d'entrepôt d'une superficie de 304 m², situé dans un immeuble soumis au régime de la copropriété [Adresse 3], moyennant un prix principal de 420 000 euros.


Le diagnostic technique immobilier de ce bien, réalisé par M. [Ab] [W] exerçant sous l'enseigne Ac Ad, et assuré auprès de la Société Anonyme Allianz Iard, mentionnait une absence d'indice d'infection par les termites.


Se plaignant de la découverte de termites postérieurement à la vente, la Sas Carredas a sollicité en référé une mesure d'expertise judiciaire.


Le rapport d'expertise a été déposé le 15 octobre 2019.


2- Par actes des 16 et 19 mars 2020, la Sas Carredas a assigné M. [T], M. [W] exerçant sous l'enseigne Ac Ad, et la SA Allianz Iard, devant le tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins d'indemnisation de ses préjudices.



Par jugement du 9 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :

- débouté la Sas Carredas de ses demandes formées à l'encontre de M. [T],

- condamné M. [W] exerçant sous l'enseigne Ac Ad et la SA Allianz Iard à payer in solidum à la Sas Carredas la somme de 2 180 euros TTC au titre des frais de détermitage, et a autorisé la SA Allianz Iard à opposer à tous sa franchise contractuelle de 1 500 euros par sinistre,

- débouté la Sas Carredas du surplus de ses demandes,

- condamné la Sas Carredas à payer à M. [T] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles,

- débouté les autres parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles,

- rappelé que la présente décision est, de droit, assortie de l'exécution provisoire,

- condamné in solidum M. [W] et la SA Allianz Iard aux dépens, en ce compris, les frais de référé et d'expertise,

- dit que les dépens seront recouvrés ainsi qu'il est dit à l'article 699 du code de procédure civile🏛.



La Sas Carredas a relevé appel du jugement le 10 décembre 2021.


M. [Ae] est décédé en cours d'instance en mars 2022. L'instance n'a pas été reprise, ni régularisée par ses héritiers.


3- Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 17 juin 2024, la Sas Carredas demande à la cour d'appel, sur le fondement des articles 1240 du code civil🏛, L271-4 du code de la construction de l'habitation, et 370 du code de procédure civile:

- de déclarer interrompue la procédure à l'égard de M. [T] et de ses héritiers,

- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel et statuant à nouveau, de

condamner solidairement M. [W] et la société Allianz Iard à lui payer :

- la somme de 149 656, 03 euros au titre des travaux de réfection et de confortation, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- la somme de 2 180, 20 euros correspondant aux frais de détermitage, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- la somme de 117 000 euros arrêtée au 1er mars 2022, et ce avec intérêts au taux légal à compter des conclusions signifiées le 8 mars 2022, au titre du préjudice de jouissance,

- de condamner les mêmes et sous la même solidarité à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile🏛, ainsi que les entiers dépens en ce compris ceux de référé et d'expertise, de première instance et d'appel.


4- Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 5 septembre 2024, M. [W] et la SA Allianz Iard demandent à la cour d'appel, sur le fondement des articles 1240 du code civil, L271-4 du code de la construction et de l'habitation🏛, :

à titre principal,

- d'infirmer le jugement en ce qu'il les a condamnés à payer in solidum à la Sas Carredas la somme de 2 180 euros TTC au titre des frais de détermitage,

- d'infirmer le jugement en ce qu'il les a déboutés de leur demande au titre des frais irrépétibles,

- d'infirmer le jugement en ce qu'il les a condamnés in solidum aux dépens, en ce compris les frais de référé et d'expertise,

- de débouter la Sas Carredas de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

à titre subsidiaire,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la Sas Carredas du surplus de ses demandes excédant la somme de 2 180 euros TTC,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a autorisé la SA Allianz Iard à opposer sa franchise contractuelle de 1 500 euros par sinistre,

en tout état de cause,

- de condamner la Sas Carredas au paiement d'une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel, et les frais d'expertise judiciaire.


L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 février 2025.


Pour une plus ample connaissance du litige et des prétentions et moyens des parties, il est fait expressément référence aux dernières conclusions et pièces régulièrement communiquées par les parties.



MOTIFS DE LA DÉCISION


Sur l'interruption d'instance à l'égard de M.[T].


5- Compte-tenu du décès de M.[T] en cours d'instance, il convient de constater que l'instance est interrompue à son égard, par application des dispositions de l'article 370 du code de procédure civile🏛, et que ses héritiers n'ont pas été mis en cause par les appelants.


En conséquence, la cour d'appel constate que l'appel est limité aux chefs de dispositif du jugement qui ont condamné M.[W] et son assureur à payer à la Sas Carredas la somme de 2180 euros au titre des frais de détermitage, et débouté la Sas Carredas du surplus de ses demandes.


Sur la responsabilité de M.[W] exerçant sous Ac Ad.


6- La Sas Carredas expose que si le diagnostic effectué par M.[W] concluait à l'absence d'indices d'infestation de termites, l'expertise judiciaire réalisée, à l'inverse, met en évidence une infestation de l'immeuble par les termites.

Elle soutient que M.[W] n'a pas réalisé sa mission conformément aux règles de l'art, et ne l'a pas alertée sur la présence de termites, mais également sur l'état réel de l'ossature en bois, et que sa responsabilité est donc engagée.


7- Dans le cadre de leur appel incident, M. [X] [W] et son assureur, la société Allianz, répliquent que s'il est indéniable que le diagnostic effectué par M.[W] n'a pas permis d'identifier l'infestation de l'immeuble par les termites, ce dernier avait cependant signalé l'impossibilité d'inspecter les lieux de façon exhaustive, compte-tenu de leur état d'encombrement, et avait au surplus fait état de l'infestation par des insectes xylophages au niveau du plancher bois et de la charpente. Il conteste donc avoir commis une faute.


Sur ce,


8- L'article L.271-4 du code de la construction et de l'habitation prévoit, dans sa version en vigueur applicable au présent litige, qu' 'en cas de vente de tout ou partie d'un immeuble bâti, un dossier de diagnostic technique, fourni par le vendeur, est annexé à la promesse de vente ou à l'acte authentique de vente...le dossier de diagnostic comprend ...l'état relatif à la présence de termites dans le bâtiment tel que prévu à l'article L.126-24 du même code...'.


Il est constant que tout manquement du professionnel intervenant dans le cadre des diagnostics réalisés conformément à l'article L.271-4 du code de la construction et de l'habitation, préalablement à une vente immobilière, engage sa responsabilité délictuelle à l'égard de l'acquéreur du bien, s'il commet une faute dans l'exécution de sa mission.


9- L'article 1382 du code civil🏛, dans sa version applicable au présent litige, dispose que 'tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un préjudice, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer'.


Il incombe à la Sas Carredas de démontrer l'existence d'une faute imputable au diagnostiqueur, d'un préjudice en résultant, et d'un lien de causalité entre la faute et le dommage.


10- Il est admis que le contrôle auquel doit procéder le professionnel diagnostiqueur n'est pas purement visuel, mais qu'il lui appartient d'effectuer les vérifications nécessaires n'impliquant pas de travaux destructifs.


11- Le diagnostic effectué par M.[W] le 7 janvier 2017 mentionne l'absence d'indice d'infestation visible de termites pour chaque partie de l'immeuble, à savoir ' le rez-de-chaussée de l'entrepôt, le rez-de-chaussée bureau, le rez-de-chaussée toilettes, l'entrepôt et les combles', et comporte en outre les précisions suivantes:


'Identification des bâtiments et parties de bâtiments n'ayant pu être visités: aucune sur les parties privatives. Parties communes hors champ de mission...


Moyens d'investigation utilisés: selon la norme NF P03-201

L'inspection est effectuée de manière visuelle, par sondage sonore, poinçonnements légers au poinçon, couteau ou cutter et sans dépose des revêtements, ni destruction


Constatations diverses: nous notons des dégradations par vrillettes et capricornes (larves xylophages) au niveau des planchers bois et charpente de combles, ainsi que certains bois dans l'entrepôt.

De plus, il est impossible de diagnostiquer la totalité des planchers du comble sans réaliser la dépose totale de l'isolant qui est dessus' (pièce 2 Sas Carredas).


Or, en l'espèce, il n'est pas contesté par les parties, et il résulte du rapport d'expertise rédigé par M.[P], que la présence de termites vivants affecte lourdement le rez-de-chaussée de l'immeuble, et dans une moindre mesure le niveau supérieur à partir des sommets de poteaux et des éléments contigus, et ponctuellement les pannes sablières.


L'expert décrit ainsi l'immeuble: 'il s'agit d'un immeuble datant des années 1940, il est situé dans le [Adresse 7]...

La partie avant est bâtie en pierre sur deux niveaux, charpente traditionnelle en bois, couverture tuile...

La partie arrière de l'immeuble est à structure pierre et brique, charpente traditionnelle en bois sur poteaux, couverture tuiles...'.


Il constate 'l'infestation de l'immeuble par les termites', et estime que 'les indices d'infestation localisés sur les poteaux bois sont suffisamment prononcés pour permettre d'affirmer qu'ils étaient présents en janvier 2017, les dégâts observés au niveau des combles permettent également de situer une antériorité à plus de trois ans, soit avant 2015.

La présence importante d'humidité constitue un facteur essentiel dans le développement de l'infestation'.


Par ailleurs, l'expert indique que 'concernant les autres agents de dégradation biologique du bois, d'importants désordres liés à des infiltrations diverses par la toiture ou les ouvrages de zinguerie défectueux et à des remontées d'humidité par les maçonneries, sont à l'origine de la détériorations progressive des bois par des agents de pourriture (champignons lignivores se développant dès que le taux d'humidité dans le bois excède de manière continue la valeur de 30%). Ces pathologies sont anciennes (plus de dix années)....

A titre secondaire, nous constatons la présence généralisée de dégradations causées par la présence d'insectes à larve xylophage, à la fois dans les parties aubieuses des bois secs et dans la totalité des bois affectés par un agent de pourriture'.


Il conclut que 'l'état général des structures en bois est donc très préoccupant...il y a notamment un risque d'effondrement des ouvrages de charpente et de plancher du comble'.


Par ailleurs, l'expert précise que 'l'arrêté du 29 mars 2007 prévoit que l'opérateur se doit de mettre en oeuvre l'ensemble des moyens mis à sa disposition pour détecter une éventuelle présence de termites'.


12- Il résulte de ces éléments que l'opérateur est certes tenu d'une obligation de moyens, mais qu'il doit cependant effectuer un repérage, aux fins de détecter la présence de termites le plus complet possible avant la vente.


13- En premier lieu, il est effectivement bien précisé par M.[W], au titre de ses observations générales, que la totalité des planchers des combles n'ont pas pu être visités du fait de la présence d'un isolant.


Cependant, la cour d'appel observe que l'expert ne mentionne pas la présence de termites au niveau du plancher des combles, de sorte que le fait que celui-ci n'ait pas pu être inspecté, est un argument inopérant.


De plus, M. [W], qui allègue que l'encombrement et la configuration des lieux interdisaient des investigations plus poussées que celles menées, n'a, à aucun moment, signalé, comme il était tenu de de le faire, que certaines parties du bâtiments n'étaient pas accessibles et a même, à l'inverse, mentionné dans son rapport de diagnostic qu'aucune partie du bâtiment n'avait pas pu être visitée (page 2 du diagnostic).


14- En second lieu, le moyen soulevé par l'intimé selon lequel il avait détecté la présence de vrillettes et de capricornes dans les planchers en bois et charpente et dans certains bois de l'entrepôt, ce qui est effectivement exact, n'est en tout état de cause pas de nature à l'exonérer de son obligation de moyens tendant à la détection des termites, qui entrait précisément dans le champ de sa mission.


15- Enfin, l'argument développé par M. [W] aux termes de son diagnostic, selon lequel il aurait effectué des poinçonnements légers au cutter, couteau et poinçon, ne résiste pas aux constatations de l'expert qui relève 'l'absence de marques de sondage des bois' et précise même 'en particulier sur les huisseries bois recouverte de peinture, nous n'avons pas pu mettre en oeuvre la présence de quelconques marques ou traces d'une action de sondage'.


Or, il ressort du rapport d'expertise que les indices d'infestation de termites ont été observés sur les pièces de bois par 'un examen visuel attentif à l'aide d'une lampe torche et un sondage mécanique des bois avec un poinçon métallique' (page 20 du rapport d'expertise), que dès lors la présence de termites était aisèment et très simplement détectable, et ce sans qu'il soit nécessaire de procéder à des travaux destructifs.


16- En considération de l'ensemble de ces éléments, en indiquant l'absence d'indices d'infestation de termites, alors que selon le rapport d'expertise non contesté, la présence de termites était parfaitement visible, sans travaux destructifs, dans la quasi-totalité de l'ensemble du bien immobilier, et alors même qu'il n'avait pas mentionné que des parties de l'immeuble n'avaient pas pu être visitées, M. [W] a établi un diagnostic erroné.


Il en résulte qu'il a commis une faute délictuelle, en procédant à un examen visuel insuffisant et en omettant de procéder à des vérifications à l'aide d'un poinçon, de sorte que sa responsabilité civile délictuelle, comme l'a jugé à juste titre le tribunal, est bien engagée.


Sur les demandes indemnitaires.


- Sur le préjudice matériel.


17- La Sas Carredas sollicite la condamnation des intimés à lui payer la somme de 149 656, 03 euros au titre des travaux de réfection et de confortation, et la somme de 2180, 20 euros correspondant au frais de détermitage.

Elle explique qu'elle a été dans l'obligation de procéder à une destruction totale des ouvrages de charpente, couverture et plancher, et à leur reconstruction, et soutient que le diagnostic immobilier fait dans les règles de l'art lui aurait permis de s'apercevoir de l'état du bien.


18- M.[W] et la Sa Allianz Iard contestent le lien de causalité entre la faute de M.[W] et le dommage dont la réparation est sollicitée, au motif que celui-ci trouve son origine dans la vétusté générale des éléments en bois provoquée par les fuites de la toiture et de la zinguerie, ainsi qu'un manque général d'entretien sur plusieurs années, n'entrant pas dans la sphère de sa mission.


Sur ce,


19- Le tribunal a limité le montant des dommages et intérêts alloués au coût des travaux de détermitage, en estimant qu'il résulte des constatations de l'expert et des devis antérieurs à la vente, que la présence de termites affectant les pièces en bois d'une partie de la structure de l'entrepôt n'est pas la cause de la nécessité de refaire la charpente et la couverture, et n'a pas non plus constitué un facteur aggravant.


20- Il est constant que toute faute dans la réalisation du diagnostic oblige à réparer le préjudice certain subi par les acquéreurs, et que l'acquéreur peut réclamer l'indemnisation de son préjudice ayant un caractère certain, distinct d'une simple perte de chance d'obtenir une réduction de prix.


21- Il appartient cependant à la Sas Carredas, outre la démonstration de son préjudice, de rapporter la preuve du lien de causalité entre celui-ci et le diagnostic erroné rédigé par M. [W].


22- S'il n'est pas contesté que l'expert a relevé un état général très dégradé des structures en bois avec un risque d'effondrement des ouvrages de charpente et de plancher des combles, il a également expliqué la chronologie des désordres de la façon suivante:


' En premier lieu, les défaillances des ouvrages à la fois de couverture et de zinguerie provoquées par le vieillissement de l'immeuble et le manque d'entretien, ont entraîné le développement de multiples pathologies à caractère fongique sur les bois exposés à une humidité anormalement élevée et continue. Ceci remonte à plus de dix ans en arrière.

Ce faisant, une réaction en chaîne s'est produite, des ouvrages secondaires en bois se dégradant, ce qui a accentué les infiltrations et pénétrations d'eau et aggravé la situation, entraînant progressivement une atteinte des ouvrages principaux de structure.

Parallèlement, les ouvrages en bois situés en combles, notamment les fermes et les pannes, ont été contaminés par des insectes à larve xylophage ...

Les conséquences demeurent secondaires, sauf lorsqu'elles se combinent avec des pourrissements, ce qui permet à certaines larves de dégrader la totalité du bois.

Là encore, aucune action d'entretien des bois n'a été effectuée par le passé, tel qu'un traitement curatif contre ces insectes à larve xylophage.

En troisième lieu, et beaucoup plus récemment (avant 2015), les termites ont colonisé les lieux, en raison de leur présence naturelle sur la commune, mais aussi en particulier de la présence de matériaux cellulosiques et d'une humidité importante...

Ils ont ainsi investi l'immeuble, ce qui se caractérise par une présence étendue d'insectes vivants, de galeries-tunnels en surface des matériaux et concrétions à l'intérieur des bois.

Ils n'ont toutefois à ce jour que peu affecté les ouvrages de charpente, excepté les pannes sablières et quelques ouvrages de triangulation des fermes contigus aux poteaux (jambes de force)' (page 28 du rapport d'expertise).


23- Il résulte de l'ensemble de ces éléments que les dommages ont pour cause une conjugaison d'éléments, à savoir la vétusté générale des éléments en bois, le manque d'entretien, la présence d'insectes xylophages, au demeurant détectée par M. [W] et la présence de termites non signalée.


24- Il ne peut être utilement reproché à M.[W], contrairement à ce que soutient la Sas Carredas, de ne pas avoir alerté davantage la Sas Carredas de l'état général dégradé de la charpente et de la couverture du bien, dès lors que sa mission était circonscrite au diagnostic de termites et d'amiante.


25- Cependant, la cour d'appel considère que si les causes principales des dommages affectant la charpente et la couverture de l'immeuble sont la vétusté de l'immeuble et un défaut d'entretien, combinés à la présence d'insectes xylophages, la lecture de l'expertise démontre que l'infestation par les termites constitue toutefois une cause secondaire de ceux-ci entraînant pour partie la nécessité de refaire la charpente et le plancher, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal.


26- En considération de ces éléments, la présence de termites dans la survenance des désordres sera retenue à hauteur de 20%, et M. [W] et son assureur la Sa Allianz seront donc condamnés in solidum à indemniser la Sas Carredas à hauteur de 20 % du montant des préjudice subis.


27- L'expert a évalué à la somme de 2180, 20 euros TTC les frais de détermitage, suivant la facture de la société TSO Termites du 17 mai 2019.


Il a ensuite indiqué que les travaux d'étaiement des structures en bois de la charpente, dans l'attente des travaux ultérieurs de réfection, s'étaient élevés à la somme de 21 486, 36 euros TTC.


Il a enfin évalué, selon devis des 18 juillet 2018, 17 juillet 2018 et 26 mars 2019 émanant de la société BR3, de la société GCA et de la société Allyre à la somme de 126 636, 64 euros TTC les travaux de réfection et de confortation de la charpente et du plancher.


28- La Sas Carredas justifie avoir déjà procédé aux travaux de réfection nécessaires pour un montant total de 128, 169, 67 euros TTC , suivant facture émise par l'entreprise Batssalle.


29- Le jugement en ce qu'il a condamné in solidum M.[W] et son assureur la Sa Allianz Iard à payer à la Sas Carredas la somme de 2180 euros TTC au titre des frais de détermitage sera confirmé.


30- En revanche, eu égard à ce qui précède, le jugement en ce qu'il a débouté la Sas Carredas de sa demande au titre des travaux de réfection et de confortation sera infirmé, et M.[W] et son assureur la Sa Allianz Iard seront condamnés in solidum à payer à la Sas carredas la somme de 29 931, 20 euros (20 % de la somme de 149 656, 03 euros) en réparation de son préjudice matériel lié aux travaux réparatoires.


- Sur le préjudice de jouissance.


31- La Sas Carredas soutient qu'elle subit un préjudice de jouissance caractérisé par l'impossibilité de donner à bail l'immeuble jusqu'au premier mars 2022, date de la fin des travaux de réfection. Elle sollicite la somme de 117 600 euros à titre de dommages et intérêts à ce titre.


32- Les intimés répliquent que la Sas Carredas n'a subi aucun préjudice dès lors notamment qu'elle a revendu le bien le 30 mars 2022, moyennant le prix de 720 000 euros, réalisant ainsi une plus-value de plus de 300 000 euros.

Sur ce


33- A l'appui de sa prétention, la Sas Carredas verse aux débats un bail commercial conclu avec la société Imocom en février 2018, qui prévoyait un loyer mensuel de 2000 euros par mois (pièce 5 Sas Carredas). Il n'est pas contesté que le locataire n'a pas pu entrer dans les lieux compte-tenu de l'état de l'immeuble.


34- L'argument développé par les intimés selon lequel le bien litigieux a été revendu en mars 2022, en réalisant une plus-value de plus de 300 000 euros après réalisation des travaux de réfection, s'il est factuellement exact (pièce 29 intimés), ne fait cependant pas obstacle à l'indemnisation du préjudice de jouissance subi par la Sas Carredas en lien avec la faute du diagnostiqueur, qui a un fondement différent, dès lors qu'il est destiné en l'espèce à réparer la perte de chance de percevoir des loyers et non la perte de valeur de l'immeuble.


35- Compte-tenu de ces éléments, le préjudice subi au titre de la privation des loyers sur une période qui est comprise entre le premier février 2018 et le 30 mars 2022, doit être évalué, contrairement à ce que prétend la Sas Carredas, à l'aune de la perte de chance de percevoir les loyers qui ne peut être équivalente à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.


36-Toutefois, dans la mesure où un bail commercial était déjà signé, Il y a lieu d'évaluer la perte de chance subie par la Sas Carredas à ce titre à 90% et de dire que son préjudice de jouissance est de 105 300 euros (90 %de 117 000 euros).


Eu égard à ce qui précède, et de la part de responsabilité de M.[W] qui a été retenue à hauteur de 20%, le jugement entrepris qui a débouté la Sas Carredas de sa demande en réparation de son préjudice de jouissance sera infirmé, et M.[W] et la Sa Allianz iard seront condamnés in solidum à lui payer la somme de 21 060 euros à ce titre (20% de la somme de 105 300 euros).


Le jugement qui a dit que la Sa Allianz Iard est fondée à opposer à toute partie le montant de sa franchise contractuelle à hauteur de 1500 euros, sera confirmé sur ce point.


Sur les mesures accessoires.


37- Le jugement est confirmé sur les dépens et les frais irrépétibles.


38- M.[X] [W], exerçant sous l'enseigne Ac Ad, et la Sa Allianz Iard seront condamnés in solidum aux dépens de la procédure d'appel, et à verser à la Sas Carredas la somme de 2000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



PAR CES MOTIFS


Dans les limites de l'appel,


Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a condamné in solidum M.[X] [W] exerçant sous l'enseigne Ac Ad et la Sa Allianz Iard à payer à la Sas Carredas la somme de 2180 euros TTC au titre des frais de détermitage, et en ce qu'il a dit que la Sa Allianz Iard est fondée à opposer à toute partie le montant de sa franchise contractuelle à hauteur de 1500 euros,


Statuant à nouveau,


Condamne in solidum M.[X] [W] exerçant sous l'enseigne Ac Ad et la Sa Allianz Iard à payer à la Sas Carredas les sommes de:


- 29 931, 20 euros TTc à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel lié aux travaux de réfection,


- 21 060 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice de jouissance,


Condamne in solidum M.[X] [W] exerçant sous l'enseigne Ac Ad et la Sa Allianz Iard aux dépens de la procédure d'appel,


Condamne in solidum M.[X] [W] exerçant sous l'enseigne Ac Ad et la Sa Allianz Iard à payer à la Sas Carredas la somme de 2000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.


Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jacques BOUDY, président, et par Madame Audrey COLLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Le Greffier, Le Président,

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