M. [S] [B] a présenté, par deux mémoires spéciaux reçus le 31 janvier 2025, quatre questions prioritaires de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par lui contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 2e section, en date du 12 décembre 2024, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises spécialement composée, sous l'accusation de fourniture de prestations de cryptologie visant à assurer des fonctions de confidentialité sans déclaration conforme, importation et fourniture d'un moyen de cryptologie sans déclaration préalable, associations de malfaiteurs, blanchiments aggravés.
Des observations ont été produites.
Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [S] [B], et les conclusions de Mme Caby, avocat général, après débats en l'audience publique du 25 mars 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'
article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. La première question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« Les dispositions de l'
article 567 du code de procédure pénale🏛, qui interdisent à la personne qui, résidant à l'étranger sans être en fuite, a fait l'objet d'un mandat d'arrêt avant d'être mise en accusation, de former un pourvoi en cassation contre l'arrêt de la chambre de l'instruction prononçant sa mise en accusation, méconnaissent-elles le droit à un recours juridictionnel effectif, Ie droit à un procès équitable et les droits de la défense, garantis par l'article 16 de la Déclaration de 1789, et le principe d'égalité dans l'exercice de ces droits, garanti par les articles 1er et 6 de la Déclaration de 1789 et 1er de la Constitution de 1958 ? ».
2. La deuxième question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« Les dispositions de l'
article 183 du code de procédure pénale🏛, qui ne prévoient pas que la personne qui, résidant à l'étranger sans être en fuite, a fait l'objet d'un mandat d'arrêt avant d'être mise en accusation, doit se voir notifier l'ordonnance prononçant sa mise en accusation, cependant même que ce droit est offert à la personne qui, mise en accusation dans les mêmes termes, a pu être mise en examen au cours de la procédure, méconnaissent-elles le droit à un recours juridictionnel effectif, le droit à un procès équitable et les droits de la défense, garantis par l'article 16 de la Déclaration de 1789, et le principe d'égalité dans l'exercice de ces droits, garanti par les articles 1er et 6 de la Déclaration de 1789 et 1er de la Constitution de 1958 ? ».
3. La troisième question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« Les dispositions des
articles 185 à 187-3 du code de procédure pénale🏛🏛, qui ne prévoient pas que la personne qui, résidant à l'étranger sans être en fuite, a fait l'objet d'un mandat d'arrêt avant d'être mise en accusation, peut interjeter appel de l'ordonnance prononçant sa mise en accusation, cependant même que ce droit est offert à la personne qui, mise en accusation dans les mêmes termes, a pu être mise en examen au cours de la procédure, méconnaissent-elles le droit à un recours juridictionnel effectif, le droit à un procès équitable et les droits de la défense, garantis par l'article 16 de la Déclaration de 1789, et le principe d'égalité dans l'exercice de ces droits, garanti par les articles 1er et 6 de la Déclaration de 1789 et 1er de la Constitution de 1958 ? ».
4. La quatrième question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« Les dispositions des
articles 197, 198 et 199 du code de procédure pénale🏛🏛🏛, qui ne prévoient pas que la personne qui, résidant à l'étranger sans être en fuite, a fait l'objet d'un mandat d'arrêt avant d'être mise en accusation, peut être avisée de la date de l'audience relative à l'appel de son ordonnance de mise en accusation, déposer un mémoire en vue de celle-ci et y participer, au besoin en se faisant représenter par un avocat, cependant même que ce droit est offert à la personne qui, mise en accusation dans les mêmes termes, a pu être mise en examen au cours de la procédure, méconnaissent-elles le droit à un recours juridictionnel effectif, le droit à un procès équitable et les droits de la défense, garantis par l'article 16 de la Déclaration de 1789, et le principe d'égalité dans l'exercice de ces droits, garanti par les articles 1er et 6 de la Déclaration de 1789 et 1er de la Constitution de 1958 ? ».
Sur la première question prioritaire de constitutionnalité
5. La disposition législative contestée est applicable à la procédure et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
6. La question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.
7. La question posée ne présente pas un caractère sérieux, pour les motifs qui suivent.
8. Premièrement, la personne qui, bien que n'étant pas en fuite, se sachant recherchée, se soustrait volontairement à la procédure d'information se place, par une manoeuvre de son propre fait, dans l'impossibilité de bénéficier des dispositions de l'article 567 du code de procédure pénale.
9. Deuxièmement, le bénéfice de ces dispositions, dont le corollaire est le droit d'accéder à la procédure, constituerait dans ce cas un avantage injustifié par rapport à la personne mise en examen ou au témoin assisté qui a normalement comparu aux actes de la procédure et serait contraire à l'objectif de valeur constitutionnelle de bonne administration de la justice.
10. Troisièmement, les dispositions de l'article critiqué concilient le principe constitutionnel du droit à un recours juridictionnel effectif et l'objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d'infractions, en ce qu'elles ne font pas obstacle à ce que la personne qui, s'étant ainsi soustraite à la procédure et faisant l'objet d'une décision de mise en accusation rendue par une juridiction d'instruction, puisse la contester, selon les procédures prévues au code de procédure pénale, en comparaissant devant la juridiction saisie au fond ou, le cas échéant, en étant défendue devant la juridiction criminelle en application des
articles 379-2 et suivants du code de procédure pénale🏛.
11. Dès lors, il n'y a pas lieu de renvoyer la première question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.
Sur les deuxième, troisième et quatrième questions prioritaires de constitutionnalité
12. La question prioritaire de constitutionnalité étant un moyen venant au soutien d'un pourvoi, sa recevabilité est subordonnée à celle de ce dernier.
13. L'irrecevabilité du pourvoi, constatée par arrêt de ce jour, entraîne, par voie de conséquence, celle des trois autres questions prioritaires de constitutionnalité.