Jurisprudence : CAA Nancy, 19-06-1990, n° 89NC00224

CAA Nancy, 19-06-1990, n° 89NC00224

A9982AWM

Référence

CAA Nancy, 19-06-1990, n° 89NC00224. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1114811-caa-nancy-19061990-n-89nc00224
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Cour administrative d'appel de Nancy

Statuant au contentieux
Pierre CORNET


LOOTEN, Rapporteur
FRAYSSE, Commissaire du gouvernement


Lecture du 19 juin 1990



R E P U B L I Q U E   F R A N C A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


    
Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 23 septembre 1986 sous le n° 82 258 et au greffe de la Cour administrative d'appel de NANCY sous le n° 89NC00224, présentée par M. Pierre CORNET demeurant à ACHICOURT, 77, rue Marcel Delis ;
    M. Pierre CORNET demande à la Cour :
    1/ d'annuler le jugement du 29 mai 1986 par lequel le tribunal administratif de LILLE a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 1978 ;
    2/ de lui accorder la décharge demandée ;
    Vu la décision en date du 1er décembre 1988 par laquelle le Président de la 9ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 02 septembre 1988, la requête présentée par M. Pierre CORNET ;
    Vu l'ordonnance du 21 septembre 1989 par laquelle le Président de la Cour a rouvert l'instruction ;
    Vu, enregistré au greffe de la Cour le 10 novembre 1989, le nouveau mémoire de M. CORNET qui tend aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;
    Vu le jugement attaqué ;
    Vu les autres pièces du dossier ;
    Vu le code général des impôts ;
    Vu le livre des procédures fiscales ;
    Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
    Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
    Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
    Après avoir entendu au cours de l'audience du 5 juin 1990 :
    - le rapport de Monsieur LOOTEN, Conseiller,
    - et les conclusions de Mme FRAYSSE, Commissaire du Gouvernement ;


    
Considérant que M. CORNET a porté dans sa déclaration de revenus de l'année 1978 une somme de 340 000 F qu'il a perçue à son départ des sociétés A.C.M., CARUELLE et SOFIMA dont il assurait la direction ; qu'il soutient qu'eu égard aux circonstances de son départ, cette somme avait le caractère de dommages et intérêts et n'était pas soumise à l'impôt sur le revenu ;
    Sur la recevabilité de la demande présentée par M. CORNET :
    Considérant qu'aux termes de l'article R.197-3 du L.P.F., dans la rédaction que lui a donnée l'article 1er du décret du 26 septembre 1985 : 'Toute réclamation doit, à peine d'irrecevabilité : ...c. Porter la signature manuscrite de son auteur. - A défaut, l'administration invite, par lettre recommandée avec accusé de réception le contribuable à signer la réclamation dans un délai de trente jours ...' ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article R.200-2 du même livre : ' ... - Les vices de forme prévus aux a, b et d de l'article R.197-3 peuvent, lorsqu'ils ont motivé le rejet d'une réclamation par l'administration, être utilement couverts dans la demande adressée au tribunal administratif. - Il en est de même pour le défaut de signature de la réclamation lorsque l'administration a omis d'en demander la régularisation dans les conditions prévues au c de l'article R.197-3' ;
    Considérant que l'administration soutient que la réclamation présentée pour M. CORNET, par son conseil juridique, le 7 janvier 1981 n'était pas accompagnée du mandat habilitant ce dernier à représenter le contribuable et que la demande de M. CORNET est par suite irrecevable ;
    Considérant toutefois que le tribunal administratif de LILLE a statué sur la requête par un jugement du 29 mai 1986 ; qu'à cette date, les dispositions précitées du dernier alinéa de l'article R.200-2 du L.P.F. prévoyant la possibilité de couvrir le vice de forme tiré du défaut de signature de la requête, introduites par le décret du 26 septembre 1985, étaient applicables devant le tribunal administratif ; qu'il résulte de l'instruction que l'administration n'a pas invité M. CORNET à régulariser le vice de forme dont était entachée sa réclamation dans les conditions prévues à l'article R.197-3 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, ce vice de forme a pu être utilement couvert dans la demande, revêtue de sa signature, que M. CORNET a présentée au tribunal administratif le 7 octobre 1981 ;
    Considérant qu'il suit de là que la fin de non-recevoir opposée par le ministre doit être écartée ;
    Sur le bien-fondé de l'imposition litigieuse :
    Considérant qu'aux termes de l'article 79 du code général des impôts : 'Les traitements, indemnités, salaires pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu' ;


____Considérant que M. CORNET, salarié du groupe SCHWICH et BAIZEAU depuis 1949, exerçait au sein de ce groupe les fonctions de directeur général des sociétés A.C.M., CARUELLE et SOFIMA au développement desquelles il a pris une part déterminante ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite d'un changement de direction intervenu en 1976, ses principaux collaborateurs ont été licenciés, et qu'un nouveau directeur général, nommé à ses côtés, s'est vu confier la direction du personnel, la présidence des comités d'entreprise et une mission d'étude des mesures propres à mettre fin aux difficultés que connaissaient alors les sociétés que dirigeait M. CORNET ; que le 30 juin 1978, M. CORNET, auquel il était reproché de n'avoir pas su prendre, en 1977, les décisions qu'imposait la situation des sociétés dont s'agit, a dû accepter un protocole prévoyant le rachat par son employeur des actions qu'il détenait dans le capital desdites sociétés, qu'il donnerait sa démission au 30 juin de ses fonctions d'administrateur desdites sociétés, et qu'en contrepartie, il lui serait versé une indemnité de préavis de 160 000 F et une indemnité de mise à la retraite de 340 000 F ; que la première de ces indemnités, qui était représentative de six mois de salaire brut, avait été fixée selon les stipulations de l'article 25 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie, relatif aux indemnités de préavis due aux cadres licenciés après 55 ans, et devait supporter les charges sociales ; que la seconde de ces indemnités a été calculée selon les stipulations de l'article 27 de la même convention, relatif à l'indemnité de congédiement due également aux cadres licenciés ; qu'à l'exception de missions de Conseil qu'il a acceptées auprès de son ancien employeur, après le congédiement de son successeur pressenti, M. CORNET qui était âgé de 62 ans lors de son départ du groupe SCHWICH et BAIZEAU, n'a plus retrouvé d'emploi avant son accès définitif à la retraite ; que compte tenu de ces circonstances, la somme de 340 000 F qui lui a été versée en sus de l'indemnité de préavis doit être regardée comme ayant eu pour objet de réparer un préjudice distinct de la perte de salaire entraînée par la rupture de son contrat de travail ; qu'ayant eu ainsi le caractère de dommages et intérêts, cette somme n'était pas imposable à l'impôt sur le revenu ;

    Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. CORNET est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de LILLE a rejeté sa requête ;


Article 1 : Le jugement du tribunal administratif de LILLE du 29 mai 1986 est annulé.
Article 2 : Il est accordé décharge à M. CORNET du supplément d'imposition correspondant à l'intégration, dans ses revenus de l'année 1978, de la somme de 340 000 F.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. CORNET et au ministre délégué, chargé du Budget.

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