Jurisprudence : TA Cergy-Pontoise, du 02-07-2024, n° 2111617


Références

Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise

N° 2111617

9ème Chambre
lecture du 02 juillet 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983🏛 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986🏛 ;

- l'ordonnance n° 2017-53 du 10 janvier 2017 ;

- le décret n°2020-566 du 13 mai 2020🏛 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Debourg, rapporteure,

- les conclusions de Mme Chabrol, rapporteure publique,

- et les observations de Me Rajbenbach, représentant l'assistance publique - hôpitaux de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D a exercé en qualité d'infirmière au sein du service de santé au travail du centre hospitalier Raymond Poincaré de 2010 à décembre 2019. Le 3 octobre 2019, elle a déposé une déclaration d'accident de service survenu le 10 septembre 2019. Par un arrêté du 25 mars 2021, l'AP-HP a refusé de reconnaitre l'imputabilité au service de son état de santé. Par un courrier du 21 mai 2021, elle a formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision. Du silence gardé par l'administration est née une décision implicite de rejet. Par la présente requête, Mme D demande l'annulation de ces décisions.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, la décision contestée a été signée par M. B A, adjoint à la directrice des ressources humaines qui disposait d'une délégation de signature à cette fin, en cas d'absence ou d'empêchement de Mme F, directrice des ressources humaines, consentie par un arrêté du 29 octobre 2020, à l'effet de signer toutes les décisions relatives aux matières énoncées à l'article 1 paragraphe A, B, G1 et G2 de l'arrêté directorial n°2013 0318-0006, dont " " les décisions relatives au placement ou refusant le placement des personnels non médicaux de catégorie A ou B ou C en position d'accident de service, de malade contractée dans l'exercice de leurs fonctions, toute les décisions prévues par l'article 41 de la loi n°86-33 susvisée, ainsi que les décisions de prise en charge financière des soins suite à accident de service ou maladie contractée dans l'exercice des fonctions ", mentionnées à l'article 1 B, 8) de l'arrêté directorial du 14 novembre 2013, publié au recueil normal n°184 du 15 novembre 2013.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration🏛 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : () 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir () ".

4. Il ressort des termes de la décision attaquée qu'elle vise les textes applicables, l'examen par la commission de réforme du dossier de Mme D relatif à l'accident du 10 septembre 2019 et la raison pour laquelle l'administration a estimé que son accident n'est pas imputable au service, à savoir que le fait accidentel déclaré ne rend pas compte des lésions décrites sur les certificats médicaux. Elle comporte ainsi une motivation suffisante pour permettre à Mme D de comprendre les raisons pour lesquelles elle a été prise. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque en fait et doit être écarté.

5. En troisième lieu, à titre liminaire, l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 susvisée a, en conséquence de l'institution du congé pour invalidité temporaire imputable au service à l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983🏛, modifié des dispositions de la loi du 9 janvier 1986 régissant la fonction publique hospitalière. Le IV de l'article 10, pour la fonction publique hospitalière, dispose ainsi que " A l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986🏛 susvisée : a) Au deuxième alinéa du 2°, les mots : " ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions " sont remplacés par les mots : ", à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service " ; b) Au 4°, le deuxième alinéa est supprimé ; c) Après le quatrième alinéa du 4°, est inséré un alinéa ainsi rédigé : " Les dispositions du quatrième alinéa du 2° du présent article sont applicables au congé de longue durée. "

6. L'application de ces dispositions résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 était manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi de ce nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. Les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ne sont donc entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique hospitalière, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 16 mai 2020, du décret du 13 mai 2020🏛 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique hospitalière, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que les dispositions de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 13 mai 2020. Enfin, les droits des agents publics en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée.

7. En l'espèce, Mme D a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service de son accident de service survenu le 10 septembre 2019, soit antérieurement à l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de celles du II et IV de l'article 35-3 du décret n°88-386 du 19 avril 1988🏛 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière. Elle ne peut dès lors utilement se prévaloir de ces dispositions.

8. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 applicable en l'espèce : " Le fonctionnaire en activité a droit : / () / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 42. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite🏛, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / ()."

9. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service, le caractère d'un accident de service. Constitue un accident de service un évènement, quelle que soit sa nature, survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci.

10. En l'espèce, le 10 septembre 2019, Mme D a eu un entretien avec sa supérieure hiérarchique, Mme C, médecin du travail. Il ressort des pièces du dossier qu'à l'issue de cet entretien, durant lequel sa supérieure aurait adopté un ton inapproprié et aurait formulé des reproches à son encontre, Mme D a été placée en congé de maladie à compter du 18 septembre 2019 en raison d'un syndrome anxio-dépressif et d'un état de stress post-traumatique. Toutefois, il est constant que Mme D présente des antécédents dès lors que d'une part, le compte-rendu des urgences psychiatriques de Versailles en date du 7 juin 2019 mentionne des antécédents psychiatriques pour lesquels elle est suivie depuis 2008, soit antérieurement à son affectation dans ce service. D'autre part, les différentes attestations des médecins produites par la requérante mentionnent également un état dépressif antérieur à l'accident du service en cause. Par conséquent, le syndrome anxio-dépressif de Mme D ne peut donc être qualifié d'accident de service auquel serait imputable cette pathologie dès lors qu'il ne résulte pas d'un évènement nouveau et soudain. Par suite, en refusant de reconnaître l'imputabilité de son état de santé à un accident de service survenu le 10 septembre 2019, l'administration n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision en litige. Par suite, les conclusions à fin d'annulation de la requête doivent être rejetées. Il en va de même, par voie de conséquence, des conclusions aux fins d'injonction.

Sur les frais du litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'AP-HP qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme D demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

13. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme D, la somme réclamée par l'AP-HP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'AP-HP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme E D et à l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris.

Délibéré après l'audience du 21 mai 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Le Griel, présidente ;

Mme Colin, première conseillère ;

Mme Debourg, conseillère ;

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juillet 2024.

La rapporteure,

signé

T. Debourg

La présidente,

signé

H. Le Griel

La greffière,

signé

H. Mofid

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°2111617

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