Jurisprudence : CA Paris, 4, 5, 13-12-2023, n° 20/14623, Confirmation


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5


ARRET DU 13 DECEMBRE 2023


(n° /2023, 11 pages)


Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/14623 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCPE4


Décision déférée à la Cour : Jugement du 6 Juillet 2020 -Tribunal judiciare de PARIS - RG n° 18/09646



APPELANTS


Monsieur [Aa] [J] [K]

[Adresse 2]

[Localité 3]


Madame [L] [X]

[Adresse 2]

[Localité 3]


Représentés par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Ayant pour avocat plaidant Me Mickael OHAYON, avocat au barreau du Val-d'Oise


INTIMEE


S.A.S. MAISONS PIERRE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés

en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 4]


Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Ayant pour avocat plaidant Me Agathe MICHAUD substituant Me Mathieu MOUNDLIC, cabinet LEXINGTON AVOCATS, avocat au barreau de PARIS



COMPOSITION DE LA COUR :


En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile🏛🏛, l'affaire a été débattue le 15 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Elise THEVENIN-SCOTT, chargée du rapport.


Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Ange SENTUCQ, présidente

Elise THEVENIN-SCOTT, conseillère

Alexandre PELIER-TETREAU, vice-présidente placée faisant fonction de conseillère


Greffier, lors des débats : Monsieur Ab A


ARRET :


- contradictoire


- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, délibéré initialement prévu le 13 septembre 2023 et prorogé au 13 décembre 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛.


- signé par Marie-Ange Sentucq, présidente de chambre et par Céline Richard, greffière présente lors du prononcé



FAITS ET PROCÉDURE

Par acte sous seing privé en date du 4 février 2016, [J] [K] et [L] [X] ont conclu avec la société Maisons Pierre un contrat de construction d'une maison individuelle sur un terrain situé à [Localité 5], pour un coût total de 158 530 euros, se décomposant comme suit :

- prix forfaitaire et définitif toute taxe comprise : 138 780 euros,

- coût toute taxe de comprise des travaux à la charge du maître de l'ouvrage : 19 750 euros,

Les maîtres de l'ouvrage ont remis au constructeur un chèque du 10 février 2016 d'un montant de 6 939 euros.

Le 9 juin 2016, la société Maisons Pierre a déposé à la mairie d'[Localité 5] une demande de permis de construire.

Suivant arrêté du 26 août 2016, le maire de cette commune a accordé le permis de construire.

La société Maisons Pierre a adressé à Monsieur [Ac] et à Madame [X] une situation de travaux du 16 janvier 2017 d'un montant de 6 829,00 euros.

Un compte rendu d'un rendez-vous de mise au point technique, organisé entre les maîtres de l'ouvrage et le constructeur, porte la date du 9 janvier 2016.

Par trois courriels en date des 14, 22 et 25 février 2017, [J] [K] a adressé à la société Maisons Pierre le plan d'extension de la maison souhaité.

Un avenant au contrat a été signé le 21 février 2017, portant le prix convenu à 146 020,00 euros toute taxe comprise et le coût des travaux à la charge du maître de l'ouvrage à 52 715,00 euros.

Le 3 avril 2017, la société Maisons Pierre a déposé à la mairie d'[Localité 5] une demande de modification du permis de construire.

Par courrier en date du 14 avril 2017, le maire a demandé la transmission de pièces manquantes.

Le 9 mai 2017, la société Maisons Pierre a déposé une demande d'un nouveau permis de construire.

Suivant arrêté en date du 21 septembre 2017, le maire d'[Localité 5] a accordé le permis de construire.


Monsieur [K] et Madame [X] ont adressé à la société Maisons Pierre une lettre en date du 26 décembre 2017 ayant pour objet 'annulation du contrat de construction n°[Numéro identifiant 1]", expliquant que 'suite à plusieurs problèmes rencontrés avant même le début de la construction de la maison, je vous confirme l'annulation du contrat n°[Numéro identifiant 1]. N'ayant pas été satisfait de vos services, je souhaite que me remboursiez la somme versée dans le cadre du contrat de construction...'

Par courrier en date du 17 janvier 2018 la société Maisons Pierre a pris bonne note de l'annulation du contrat de construction et demandé à Monsieur [K] et Madame [X] le versement de la somme de 1 363 euros restant due au titre de l'obtention du permis de construire et celle de 14 602 euros, correspondant à 10 % du coût des travaux, à titre d'indemnité de résiliation, soit la somme totale de 15 965 euros.

Suivant lettre de leur avocat en date du 30 mars 2018, les maîtres de l'ouvrage ont laissé comprendre qu'ils refusaient de verser la somme de 15 965 euros demandée par la société Maisons Pierre et ont mis celle-ci en demeure de leur rembourser la somme de 13 239 euros au titre de l'acompte versé.

Dans une réponse en date du 4 juin 2018, le constructeur a contesté les prétentions de Monsieur [K] et Madame [X].

Par exploit d'huissier du 1er octobre 2018, la société Maisons Pierre a fait assigner [L] [X] et [J] [K] devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de les voir condamner à lui payer la somme de 639 euros au titre de l'avancement des travaux et celle de 14 602 euros correspondant à l'indemnité contractuelle de résiliation de 10% du prix convenu.


Par jugement du 6 juillet 2020 le tribunal judiciaire de Paris a :

Condamné in solidum [L] [X] et [J] [K] à payer à la société Maisons Pierre la somme de 529 euros ;

Condamné in solidum [L] [X] et [J] [K] à payer à la société Maisons Pierre la somme de 14 602 euros au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation de 10 % du prix convenu ;

Rejeté les demandes de [L] [X] et [J] [K] comme étant non fondées;

Condamné in solidum [L] [X] et [J] [K] aux dépens ;

Condamné in solidum [L] [X] et [J] [K] à payer à la société Maisons Pierre la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛 ;

Ordonné l'exécution provisoire ;

Débouté les parties de leurs autres demandes.


Par déclaration du 14 octobre 2020, [L] [X] et [J] [K] ont interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions signifiées le 12 juillet 2021, la [L] [X] et [J] [K] demandent à la cour de :

Vu les articles L 230-1 et suivants du Code de la Construction et de l'Habitation🏛,

Vu l'article 1231-5 du Code Civil🏛,

- Recevoir Madame [Ad] et Monsieur [K] en leur appel et le déclarer bien fondé ;

- Débouter l'intimée de l'intégralité de ses demandes ;

- Infirmer le jugement rendu le 6 juillet 2020 en ce qu'il a :

' débouté Madame [X] et Monsieur [K] de leur demande :

' de voir prononcer la résiliation du contrat aux torts exclusifs de la société Maisons Pierre

' de voir cette dernière condamnée à leur payer une somme de 13 768 euros outre 5000 euros au titre de leur préjudice moral et 4 000 euros au titre de l'article 700

' au contraire condamné in solidum Madame [X] et Monsieur [K] à payer à la société Maisons Pierre les sommes de 529 euros, 14 602 euros au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation de 10 % du prix convenu et 3000 euros au titre de l'article 700 avec exécution provisoire.

En conséquence, statuant à nouveau,

A titre principal,

- Prononcer la nullité du contrat de construction de maison individuelle conclu le 4 février 2016, sur le fondement des articles L 230-1, L 231-1, L 231-2, L 231-4 du Code de la construction et de l'habitation🏛🏛🏛;

- Condamner l'intimée à restituer les sommes perçues au titre du contrat frappé de nullité, soit la somme de 13 269 euros, augmentée des intérêts à compter de la première mise en demeure du 26 décembre 2017 ;

- Condamner l'intimée au paiement d'une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts, en indemnisation du préjudice moral subi par les appelants.

- Condamner l'intimée au paiement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

A titre subsidiaire,

Si par impossible la Cour refusait de prononcer la nullité du contrat :

- Infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné les appelants au paiement d'une indemnité de résiliation.

- Condamner le constructeur à la restitution de l'acompte versé d'un montant de 13 269 euros.

- Condamner l'intimée au paiement d'une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts, en indemnisation du préjudice moral subi par les appelants.

- Condamner l'intimée au paiement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

A titre infiniment subsidiaire,

Si par impossible, la Cour devait considérer que la résiliation s'est faite aux torts des appelants, et mettre à leur charge une indemnité de résiliation

- Réduire l'indemnité de résiliation contractuelle à de plus justes proportions, et plus précisément à un montant symbolique de 100 euros.

- Condamner l'intimée au paiement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions signifiées le 12 décembre 2022 la société Maisons Pierre demande à la cour de :

Vu le contrat de construction de maison individuelle du 4 février 2016 ;

Vu les dispositions des articles 1103 et suivants du Code civil🏛 ;

Vu les dispositions de l'article 1794 du Code civil🏛 ;

Vu les dispositions des anciens articles 1152 et 1229 du Code civil🏛🏛 applicables au litige ;

Vu les dispositions articles 696 et 700 du Code de procédure civile🏛 ;

- Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum [L] [X] et [J] [K] à payer à la société Maisons Pierre certaines sommes en paiement du solde du prix dû au titre de l'avancement des travaux, mais infirmer le jugement en ce qu'il a condamné, à ce titre, les maîtres d'ouvrage au paiement de la seule somme de 529 euros et, subsidiairement, confirmer la condamnation des maîtres d'ouvrage au paiement de ce montant ;

- Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum [L] [X] et [J] [K] à payer à la société Maisons Pierre la somme de 14 602 euros au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation de 10% du prix convenu ;

- Confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'ensemble des demandes, fins, moyens et prétentions de [L] [X] et d'[J] [K] ;

- Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [K] et Madame [X] de leur demande de restitution des sommes qu'ils ont versées à Maisons Pierre ;

- Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté [L] [X] et [J] [K] de leur demande d'indemnisation au titre de leur prétendu préjudice moral ;

- Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum [L] [X] et [J] [K] aux entiers dépens et à l'article 700 du Code de procédure civile.

Et, statuant à nouveau :

- Déclarer irrecevable la demande de nullité formée par Monsieur [K] et Madame [X] à l'égard du Contrat de construction de maison individuelle conclu avec Maisons Pierre ;

- En tout état de cause, rejeter la demande de nullité formée par Monsieur [K] et Madame [X] à l'encontre du Contrat de construction de maison individuelle conclu avec Maisons Pierre ;

- Dire et juger que Maisons Pierre était légitime à réclamer aux maîtres d'ouvrage le paiement du solde dû au titre de l'avancement des travaux au moment de la résiliation du Contrat de construction de maison individuelle, soit 10% du prix ;

En conséquence,

- Condamner Monsieur [K] et Madame [X] à verser à Maisons Pierre la somme de 639 euros au titre de l'avancement des travaux qu'ils restent lui devoir ;

- Débouter Monsieur [K] et Madame [X] de leur demande de restitution des sommes qu'ils ont versées à Maisons Pierre ;

- Dire et juger que la résiliation du Contrat de construction de maison individuelle n'est pas imputable à une faute de Maisons Pierre et ne résulte que de la seule initiative des maîtres d'ouvrage ;

En conséquence,

- Condamner Monsieur [K] et Madame [X] à verser à Maisons Pierre la somme de 14 602 euros au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation de 10 % du prix convenu ;

- Débouter Monsieur [K] et Madame [X] de leur demande d'indemnisation au titre de leur prétendu préjudice moral ;

- Débouter Monsieur [K] et Madame [X] de leur demande de réduction de l'indemnité de résiliation prévu au contrat conclu entre les parties ;

En tout état de cause,

- Rejeter l'ensemble des demandes, fins, moyens et prétentions de Monsieur [K] et Madame [X] ;

- Condamner Monsieur [K] et Madame [X] à payer à la société Maisons Pierre la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction, pour ceux la concernant, au profit de la Selarl 2H Avocats prise en la personne de Maître Patricia Hardouin et ce, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile🏛.


L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 mars 2023.



MOTIVATION

Sur la nullité du contrat de construction de maison individuelle :

Monsieur [K] et Madame [X] demandent à la cour de déclarer leurs demandes au titre de la nullité du contrat de construction de maison individuelle recevables au sens des dispositions de l'article 565 du code de procédure civile🏛 en ce qu'il s'agit de prétentions visant à répondre à celles de la société Maisons Pierre. Sur le fond, ils entendent voir déclaré nul le contrat de construction de maison individuelle conclu entre eux et la société Maisons Pierre le 4 février 2016 aux motifs :

- Du défaut de garantie de remboursement dès lors que celle annexée n'était pas nominative

- De l'absence de justification par le maître d'ouvrage, au jour de la signature du contrat de construction de maison individuelle, d'un titre de propriété sur le terrain concerné dès lors que le 4 février 2016 le délai de rétractation de l'article L.442-8 du code de l'urbanisme🏛 n'était pas écoulé et n'allait l'être que le 18 février 2016.

La société Maisons Pierre demande à la cour de déclarer irrecevables les demandes de Monsieur [K] et Madame [X] tendant à la nullité du contrat de construction de maison individuelle comme étant nouvelles en cause d'appel.

Sur le fond, elle affirme que l'article L.231-4 du code de la construction et de l'habitation autorise la conclusion d'un contrat de construction de maison individuelle si le maître d'ouvrage bénéficie d'une promesse de vente sans autre précision. Or, une promesse de vente a été conclue antérieurement au contrat de construction de maison individuelle. S'agissant de la garantie de remboursement, la société Maisons Pierre argue que l'attestation générale peut être régularisée ultérieurement par une attestation nominative comme ce fût le cas en l'espèce.

Réponse de la cour :

Sur la recevabilité des demandes de Monsieur [K] et Madame [X] au titre de la nullité du contrat de construction de maison individuelle :

L'article 564 du code de procédure civile🏛 énonce qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Il ressort de la lecture de l'article 565 du même code que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.

En l'espèce, les demandes de Monsieur [K] et Madame [X] relatives à la nullité du contrat de construction de maison individuelle sont soumises à la cour pour écarter la demande en paiement de la société Maisons Pierre. Elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges, soit la restitution des sommes versées au titre du CCMI et seront, à ce titre, déclarées recevables.

Sur la nullité du contrat au regard du défaut de désignation du titre de propriété ou du droit réel permettant de construire

Selon l'article L.231-2 du code de la construction et de l'habitation, d'ordre public, le contrat doit notamment comporter l'énonciation suivante :

« a) La désignation du terrain destiné à l'implantation de la construction et la mention du titre de propriété du maître de l'ouvrage ou des droits réels lui permettant de construire »

L'article L231-4 du même code dispose que « I.- Le contrat défini à l'article L.231-1 peut être conclu sous les conditions suspensives suivantes :

a) L'acquisition du terrain ou des droits réels permettant de construire si le maître de l'ouvrage bénéficie d'une promesse de vente ;

b) L'obtention du permis de construire et des autres autorisations administratives, le maître de l'ouvrage étant tenu de préciser la date limite de dépôt de la demande ;

c) L'obtention des prêts demandés pour le financement de la construction ;

d) L'obtention de l'assurance de dommages ;

e) L'obtention de la garantie de livraison.

Le délai maximum de réalisation des conditions suspensives ainsi que la date d'ouverture du chantier, déterminée à partir de ce délai, sont précisés par le contrat. »

L'article R. 231-2 ajoute qu'il est satisfait aux obligations prévues au a) de l'article L. 231-2 par les énonciations suivantes portées au contrat :

- En ce qui concerne la désignation du terrain : sa situation avec l'indication de son adresse ou lieudit ainsi que sa surface et sa désignation cadastrale ;

- En ce qui concerne le titre de propriété ou les droits réels permettant de construire : la nature des droits, la nature du titre, sa date, l'indication des nom et adresse du rédacteur de l'acte.


En l'espèce, Monsieur [K] et Madame [X] produisent la promesse de vente portant sur le terrain et conclue le même jour que le contrat de construction de maison individuelle, ainsi qu'une lettre recommandée avec avis de réception datée du 9 février 2016 leur notifiant leur droit de rétractation sur ladite promesse de vente en application de l'article L.442-8 du code de l'urbanisme. Il n'est pas contesté que ce droit expirait le 18 février 2016.

Le CCMI a été conclu sous la condition suspensive de l'acquisition d'un terrain, et une promesse de vente relative audit terrain a été conclue le même jour que le CCMI.

Selon l'article 1589 du code civil🏛 dans sa version antérieure à l'l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016🏛 applicable aux faits, la promesse de vente vaut vente, lorsqu'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix. 

Il en résulte que la promesse est réputée conclue dès sa signature, la réalisation de la condition suspensive prévue n'ayant qu'un effet réitératif de l'accord des parties, la non échéance du délai de rétractation prévu au CCMI lors de la signature de la promesse étant inopérant et ne remet pas en cause la validité initiale du CCMI.

La nullité poursuivie de ce chef par Monsieur [K] et Madame [X] sera donc rejetée.

Sur la nullité tenant à la garantie de remboursement

L'article L.231-2 du code de la construction et de l'habitat prévoit que le CCMI doit comporter les énonciations suivantes :

k) Les justifications des garanties de remboursement et de livraison apportées par le constructeur, les attestations de ces garanties étant établies par le garant et annexées au contrat. En application de l'article R.231-8 code de la construction et de l'habitat :

I. ' Lorsque le contrat n'a pas stipulé un dépôt de garantie conforme à l'article L. 231-4-III, il prévoit un paiement n'excédant pas 5 p. 100 du prix convenu de la construction au jour de la signature ainsi qu'un paiement n'excédant pas 5 p. 100 dudit prix à la délivrance du permis de construire. En ce cas une attestation de garantie de remboursement est annexée au contrat.

II. ' La garantie de remboursement est constituée par une caution solidaire donnée par un établissement de crédit, une société de financement ou une entreprise d'assurance agréés à cet effet.

La garantie est donnée:

1. Pour le cas où le contrat ne peut être exécuté faute de réalisation des conditions suspensives dans le délai prévu;

2. Pour le cas où le chantier n'est pas ouvert à la date convenue;

3. Pour le cas où le maître de l'ouvrage exerce la faculté de rétractation prévue à l'article L. 271-1.

Cette garantie prend fin à la date d'ouverture du chantier.

Aucun texte ne s'oppose à la délivrance par l'établissement garant d'une attestation globale pour tous les contrats conclus par le constructeur.

La société Maisons Pierre justifie qu'elle disposait d'une garantie générale de remboursement fournie par la société AXA France IARD pour tous les contrats de construction de maison individuelle conclus par elle entre le 1er janvier et le 30 juin 2016, et donc pour le contrat conclu par Monsieur [K] et Madame [X] qui a été signé le 4 février 2016. Cette garantie était annexée au CCMI et respecte les prescriptions des textes précités.

En conséquence, aucune nullité n'est encourue de ce chef.

Sur la résolution judiciaire du contrat

Le jugement a débouté Monsieur [K] et Madame [X] de leur demande de résolution judiciaire du contrat considérant qu'ils ne caractérisaient aucune faute de la société Maisons Pierre, ni aucun manquement à ses obligations contractuelles.

Monsieur [K] et Madame [X] sollicite l'infirmation du jugement et le prononcé de la résolution judiciaire du contrat de construction de maison individuelle devant la cour d'appel en invoquant l'inexécution de ses obligations par le constructeur qui n'aurait déposé aucun dossier de permis de construire conforme à leurs observations.

La société Maisons Pierre sollicite la confirmation du jugement soulignant qu'aucune faute n'est établie à son encontre.

Réponse de la cour :

Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile🏛, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l'espèce, Monsieur [K] et Madame [X] affirment que la société Maisons Pierre a manqué à ses obligations en ne déposant aucun dossier de permis de construire conforme à leurs observations, mais sans préciser ni démontrer quels seraient exactement les manquements allégués.

Le jugement les ayant déboutés de leur demande de résolution judiciaire sera donc confirmé.

Sur les sommes dues par Monsieur [K] et Madame [X]


Au titre de l'acompte :


Le jugement a condamné Monsieur [K] et Madame [X] à payer à la société Maisons Pierre la somme de 529 euros restant due au titre de l'acompte, ce que Monsieur [K] et Madame [X] ne contestent pas.

Il sera confirmé sur ce point.


Au titre de l'indemnité de résiliation


Le jugement a condamné Monsieur [K] et Madame [X] à payer à la société Maisons Pierre la somme de 14 602 euros au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation correspondant à 10% du prix convenu.

Monsieur [K] et Madame [X] s'opposent au paiement de cette somme contestant la validité même du contrat de construction de maison individuelle et à titre subsidiaire en application de l'article 1231-5 du code civil, demandent sa réduction à 100 euros.

La société Maisons Pierre demande la confirmation du jugement et la condamnation de Monsieur [K] et Madame [X] à lui payer l'intégralité de l'indemnité de résiliation prévue.

Réponse de la cour :

En vertu de l'article 1794 du code civil, le maître peut résilier, par sa seule volonté, le marché à forfait, quoique l'ouvrage soit déjà commencé, en dédommageant l'entrepreneur de toutes ses dépenses, de tous ses travaux, et de tout ce qu'il aurait pu gagner dans cette entreprise.

L'article 1231-5 du code civil prévoit que lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

En l'espèce, l'article 17-2 du contrat de construction de maison individuelle conclu entre la société Maisons Pierre et Monsieur [K] et Madame [X] prévoit que « la résiliation par le maître d'ouvrage en application de l'article 1794 du code civil entraîne l'exigibilité, en plus des sommes correspondant à l'avancement des travaux, d'une indemnité forfaitaire évaluée à 10% du prix convenu de la construction en dédommagement des frais engagés par le constructeur et du bénéfice qu'il aurait pu retirer de la réalisation complète de la construction.»

Cette clause vise à compenser l'exercice de la faculté de résiliation accordée au maître d'ouvrage et non à sanctionner l'inexécution d'une obligation. Elle ne peut donc être qualifiée de clause pénale et soumise au pouvoir d'appréciation du juge.

Il n'est pas contesté que Monsieur [K] et Madame [Ad] ont résilié le contrat de construction de maison individuelle conclu avec la société Maisons Pierre, et il a été décidé que cette résiliation ne pouvait être justifiée par le moindre manquement du constructeur. En conséquence, l'indemnité de résiliation est due à hauteur de 14 602 euros et le jugement ayant condamné Monsieur [K] et Madame [X] à son paiement sera confirmé.

Sur la demande de dommages-intérêts au titre du préjudice moral formée par Monsieur [K] et Madame [X]

Le jugement a débouté Monsieur [K] et Madame [X] de cette demande.

Monsieur [K] et Madame [X] sollicitent l'infirmation et l'octroi d'une somme de 5 000 euros au titre de leur préjudice moral.

Toutefois, la cour constate qu'ils ne démontrent pas l'existence du préjudice allégué, pas plus qu'ils n'établissent l'existence d'une faute imputable à la société Maisons Pierre et qui serait à l'origine directe d'un éventuel préjudice moral.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer le jugement en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [K] et Madame [X] succombant en appel seront condamnés aux entiers dépens, toutefois l'équité ne commande pas de faire droit à la demande d'indemnité de la société Maisons Pierre au titre de ses frais irrépétibles.



PAR CES MOTIFS

La cour,

DÉCLARE recevables les demandes de Monsieur [K] et Madame [X] relatives à la nullité du contrat de construction de maison individuelle ;

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Paris en date du 6 juillet 2020 ;

Y ajoutant,

REJETTE les demandes de Monsieur [K] et Madame [X] relatives à la nullité du contrat de construction de maison individuelle ;

CONDAMNE Monsieur [K] et Madame [X] aux dépens d'appel ;

ADMET les avocats qui en ont fait la demande et qui peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.


La greffière La présidente

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