Réf. : Cass. civ. 3, 11 mai 2023, n° 22-13.696, FS-B N° Lexbase : A39639TX
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N5429BZ4
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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats
le 22 Mai 2023
►Le garant d’achèvement d’une construction qui achève les travaux abandonnés par le constructeur peut exiger le paiement du prix correspondant à la réalisation de ces travaux ; s’il réclame le paiement de ce prix, il doit prouver que les travaux ont bien été réalisés.
Quand les grands principes du droit commun croisent les règles du droit spécial, cela donne toujours lieu à contestation/interprétation afin de savoir si la règle du droit spécial permet de déroger aux grands principes du droit commun, même lorsqu’il n’y a pas de disposition contraire. Les décisions de conciliation sont donc toujours notables ainsi qu’en atteste l’arrêt rapporté, destiné à être publié au bulletin. Il s’agissait, en l’espèce, de concilier la charge de la preuve avec les règles d’achèvement du garant dans le cadre d’une VEFA.
En l’espèce, un vendeur en l’état futur d’achèvement fait construire un immeuble à usage d’habitation dont il a vendu des lots à une SCI. Une garantie extrinsèque est souscrite sous la forme d’un cautionnement bancaire. Le chantier connaît d’importantes difficultés et le constructeur finit par l’abandonner pour être placé en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire. Le garant assigne la SCI accédante à la propriété en paiement du solde du prix.
La cour d’appel de Papeete, dans un arrêt rendu le 25 novembre 2021 (CA Papeete, 25 novembre 2021 n° 18/00279 N° Lexbase : A60427D7, condamne la SCI à verser le solde du prix. Elle forme un pourvoi en cassation. Elle articule que le garant d’achèvement d’une construction vendue en l’état futur d’achèvement qui achève ou fait achever en les payant les travaux abandonnés par le constructeur défaillant n’est fondé à exiger des acquéreurs que le paiement du solde du prix de vente encore éventuellement dû par ces derniers.
La Haute juridiction suit et casse l’arrêt d’appel.
Au double visa de l’article R. 261-21 du Code de la construction et de l’habitation N° Lexbase : L3172K7M, d’une part, et de l’article 1315 du Code civil (devenu 1353 N° Lexbase : L1013KZK), d’autre part, elle expose que :
1/ le garant d’achèvement d’une construction vendue en EFA qui achève ou fait achever en les payant les travaux abandonnés par le constructeur peut exiger de l’acquéreur le solde du prix de vente ;
elle rappelle une jurisprudence déjà bien établie sur ce point (Cass. civ. 3, 7 novembre 2007, n° 05-15.515 N° Lexbase : A4145DZK) ;
la créance du garant sur le prix de vente encore détenu par les acquéreurs est la contrepartie des travaux financés.
2/ mais, en application des règles applicables à la charge de la preuve, il appartient à la partie qui se prétend créancière d’une obligation de l’établir.
Pour exiger le paiement du prix correspond aux travaux, encore faut-il prouver que les travaux ont été réalisés.
La solution est, à l’évidence, favorable aux accédants à la propriété qui vont pouvoir retenir ce prix si ces travaux ne sont pas (ou mal ?) réalisés.
Elle a, aussi, pour but d’encourager le garant à faire exécuter les travaux d’achèvement au plus vite et au mieux, s’il veut être payé.
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