En vertu du principe de la liberté du commerce et de l'industrie, le démarchage de la clientèle d'autrui, fût-ce par un ancien salarié de celui-ci, est libre, dès lors que ce démarchage ne s'accompagne pas d'un acte déloyal. Aussi, la cour d'appel qui, pour dire qu'une société a commis des actes de concurrence déloyale envers une société concurrente, a constaté un simple transfert de clientèle sans relever un tel acte de la part des salariés concernés, a privé sa décision de base légale. Par ailleurs, un manquement à une règle de déontologie, dont l'objet est de fixer les devoirs des membres d'une profession et qui est assortie de sanctions disciplinaires, ne constitue pas nécessairement un acte de concurrence déloyale. Aussi, le non-respect de la règle déontologique applicable à l'activité d'expert-comptable, selon laquelle le membre de l'ordre qui est appelé à remplacer un confrère dans la tenue de la comptabilité d'un client ne peut accepter sa mission qu'après en avoir informé ce confrère, ne peut constituer un acte de concurrence déloyale que s'il est établi que cette faute est à l'origine du transfert de clientèle. Or, tel n'est pas le cas de la seule violation de cette règle, dès lors que l'absence d'envoi de la lettre exigée avant le transfert du dossier n'est pas à l'origine de celui-ci et de l'éventuel détournement de clientèle. Tels sont les principes énoncés par la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 10 septembre 2013, promis à une large publicité (Cass. com., 10 septembre 2013, n° 12-19.356, FS-P+B+R
N° Lexbase : A1470KLZ). En l'espèce, une société exerçant une activité d'expertise comptable dans l'île de la Réunion et disposant de plusieurs cabinets répartis dans le département ainsi que son fondateur ont recherché la responsabilité des sociétés de trois autres sociétés qui toutes trois ont un cabinet à Saint-Gilles, en leur reprochant des actes de concurrence déloyale. C'est dans ces conditions qu'après avoir approuvé la cour d'appel sur le second des principes précités, la Chambre commerciale, énonçant le premier, casse l'arrêt d'appel au visa de l'article 1382 du Code civil (
N° Lexbase : L1488ABQ), en ce qu'il a retenu que, s'il peut être admis que la clientèle d'un cabinet d'expertise comptable ne soit pas captive et puisse s'attacher à un salarié expert-comptable dudit cabinet et le suivre lorsqu'il s'installe ailleurs, il n'est pas acceptable qu'une nouvelle société d'expertise bénéficie d'une augmentation significative de clientèle résultant de l'activité antérieure d'une société préexistante sans aucune contrepartie financière.
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