Réf. : CE, 9°-10° ch. réunies, 3 février 2023, n° 462840, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A25789B4
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N4281BZL
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par Yann Le Foll
le 13 Février 2023
► Est légal le rehaussement du volume global maximal d'électricité susceptible d'être cédé pour 2022 dans le cadre de l’ARENH, cette hausse répondant aux objectifs de libre choix du fournisseur et de stabilité des prix, ne constituant pas une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre d'EDF et ne pouvant être qualifiée d’aide d'État du fait de sa nature de mécanisme de rééquilibrage des charges entre opérateurs aux fins de favoriser la concurrence.
Faits. Les requérants demandent l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 2022-342, du 11 mars 2022, définissant les modalités d'attribution d'un volume additionnel d'électricité pouvant être alloué en 2022, à titre exceptionnel, dans le cadre de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH) N° Lexbase : L8711MBA, de deux arrêtés du même jour des ministres chargés de l'Économie et de l'Énergie ayant fixé, d'une part, à 20 térawattheures (TWh) le volume attribué en application de ces dispositions, en complément du volume global maximal de 100 TWh défini par un arrêté du 28 avril 2011, et, d'autre part, à 46,20 euros par mégawattheure (MWh) le prix de ce volume d'électricité additionnel N° Lexbase : L8764MB9, ainsi que de deux arrêtés des 12 N° Lexbase : L8830MBN et 25 mars 2022 N° Lexbase : L1483MCW ayant précisé les modalités de cession des garanties de capacité devant être transférées à chaque fournisseur à raison de ce volume additionnel d'électricité cédé à titre exceptionnel et défini un nouveau modèle d'accord-cadre pour l'ARENH.
Stabilité des prix et liberté d'entreprendre. Le rehaussement de 20 TWh du volume global maximal d'électricité pouvant être cédé en 2022 par EDF aux fournisseurs d'électricité dans le cadre de l'ARENH, prévu par l'arrêté du 11 mars 2022, s'inscrit dans un contexte de tensions inédites sur le marché de l'électricité et répond au double objectif d'intérêt général assigné à l'ARENH, consistant, d'une part, à garantir la liberté de choix du fournisseur d'électricité en développant et en maintenant une concurrence équilibrée sur le marché de la fourniture d'électricité et, d'autre part, à assurer la stabilité des prix à un niveau raisonnable pour le consommateur final en faisant bénéficier l'ensemble des fournisseurs et leurs clients de la compétitivité du parc électronucléaire français.
Dans les circonstances particulières de l'espèce, le rehaussement transitoire contesté, qui répond à une situation de crise exceptionnelle, ne porte pas à la liberté d'entreprendre d'EDF, qui dispose du monopole d'exploitation du parc électronucléaire français, une atteinte disproportionnée au regard des objectifs poursuivis par la mesure contestée (donc pas de remise en cause d'une situation juridiquement constituée au sens de CE, 9°-10° ch. réunies, 9 juin 2022, n° 454294, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7894747).
Qualification d'aide d'État. Il ne ressort des pièces du dossier ni que le plafond du volume global maximal d'électricité susceptible d'être cédé dans le cadre de l'ARENH, fixé par l'article L. 336-2 du Code de l'énergie N° Lexbase : L7520MDU, ni que le volume global maximal d'électricité fixé, dans le cadre de cet article, par les ministres chargés de l'Économie et de l'Énergie, ni que le prix d'achat fixé par ces mêmes ministres ont excédé et excèdent ce qui était et reste nécessaire afin de réduire les écarts de coûts d'approvisionnement en électricité entre EDF et les autres fournisseurs d'électricité.
Dès lors, en imposant à EDF de céder une part de l'électricité produite par le parc nucléaire français et en offrant ainsi aux fournisseurs alternatifs la possibilité de réduire leurs coûts d'approvisionnement en électricité, favorisant, de ce fait, le développement de la concurrence sur le marché de l'électricité, l'ARENH doit être regardé comme un mécanisme opérant un rééquilibrage des charges entre opérateurs sur le marché de l'électricité français aux fins de favoriser la concurrence, et ne saurait par suite caractériser l'existence d'une aide au sens du paragraphe 1 de l'article 107 TFUE N° Lexbase : L2404IPQ.
Par suite, les actes attaqués ne sont pas dépourvus de base légale au regard de l’article L. 336-2 du Code de l'énergie, faute d'avoir fait l'objet d'une notification à la Commission européenne au titre du régime des aides d'Etat.
À ce sujet. Lire La régulation du nucléaire à l’épreuve de la flambée des prix sur les marchés de gros – questions à Guillaume Dezobry, Maitre de conférences en droit public à l’Université d’Amiens, Avocat associé FIDAL et Marjolaine Germain-Letaleur, Avocate FIDAL, Lexbase Public, juin 2022, n° 671 N° Lexbase : N1825BZM. |
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