Réf. : Cass. crim., 11 mai 2022, n° 20-86.594, F-B N° Lexbase : A56387WQ
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N1460BZ4
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par Adélaïde Léon
le 25 Mai 2022
► Le procès-verbal d’intervention établi par les agents des services des douanes, qui ne constate aucune infraction ni ne relate aucun acte d’enquête portant sur une infraction préalable révélée, n’est pas interruptif de prescription.
Rappel des faits. Le 23 juin 2011, l’administration des douanes et des droits indirects a initié un contrôle dans une société spécialisée dans la fabrication et le commerce de boissons alcoolisées.
Le 10 septembre 2013, un procès-verbal d’infraction à la règlementation sur les contributions indirectes a été établi et la société a été citée devant le tribunal correctionnel pour avoir en 2008, 2009, 2010 et 2011, procédé à la tenue irrégulière de sa comptabilité matières, liquidé de manière non conforme les droits d’accises et fait circuler des produits ou biens relevant de la législation des contributions indirectes sans document d’accompagnement ou marque fiscale conforme.
Le 25 octobre 2018, le tribunal correctionnel a constaté la prescription de l’ensemble des faits de la prévention antérieurs au 10 septembre 2010, relaxé partiellement la société, et condamné celle-ci au paiement de six amendes fiscales d’un montant unitaire de 15 euros et à deux pénalités fiscales d’un montant unitaire de 530 432 euros.
La direction générale des douanes et droits indirects et la prévenue ont formé appel principal de cette décision, le procureur de la République, appel incident.
En cause d’appel. La cour d’appel a, pour infractions à la législation sur les contributions indirectes, condamné la société prévenue à des amendes et pénalités fiscales et au paiement des droits fraudés. La chambre correctionnelle de la juridiction a rejeté l’exception de prescription soulevée par la prévenue au motif que l’action fiscale ayant le caractère d’une action publique, son régime devait obéir à celui de cette dernière chaque fois qu’il n’y est pas dérogé.
Les juges rappelaient que l’action publique et l’action fiscale se prescrivent en principe conformément au droit commun et que le délai de prescription est susceptible d’être interrompu par tout acte d’instruction ou de poursuite.
La cour d’appel a considéré que sont interruptifs de prescription les procès-verbaux de constat établis par l’administration des douanes dans la mesure où ils visent à établir l’existence d’une infraction et asseoir l’assiette des droits à recouvrer. Plus encore, elle ajoute qu’il en va ainsi de tous les procès-verbaux portant saisies de documents et auditions de sachant dès lors qu’ils émanent d’agents compétents et que, partant, sont interruptifs de prescription les procès-verbaux d’intervention, d’audition et de réception de documents qui ont été notifiés et remis en copie au cours du contrôle. Les juges considéraient donc que le procès-verbal du 23 juin 2011 d’audition et d’intervention était interruptif de prescription.
La société condamnée a formé un pourvoi contre l’arrêt d’appel.
Moyens du pourvoi. Il était fait grief à l’arrêt d’appel d’avoir rejeté la prescription pour l’ensemble des infractions visées par la prévention. Rappelant que l’action fiscale se prescrit par un délai de trois ans, lequel est susceptible d’être interrompu par tout acte d’instruction ou de poursuite, la société soutenait que tel n’était pas le cas du procès-verbal d’intervention du 23 juin 2011 qui se bornait à constater la remise de documents permettant l’exercice du contrôle.
Décision. La chambre criminelle casse l’arrêt au visa de l’article 7 du Code de procédure pénale, dans sa rédaction applicable à l’époque des faits N° Lexbase : L2666L4I.
La Cour déduit de ce texte que « seul peut être regardé comme un acte d'instruction ou de poursuite le procès-verbal dressé par les agents de l'administration des douanes dans l'exercice de leurs attributions de police judiciaire et à l'effet de constater les infractions, à l'exclusion des actes de l'enquête administrative qui en ont constitué le prélude ».
Dès lors, le procès-verbal d’intervention établi par les agents des services des douanes, qui ne constatait aucune infraction ni ne relatait aucun acte d’enquête portant sur une infraction préalable révélée, n’était pas interruptif de prescription.
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