Aux termes d'un arrêt rendu le 28 mars 2013, la première chambre civile de la Cour de cassation retient que les Etats ne peuvent renoncer à leur immunité d'exécution que de manière expresse et spéciale (Cass. civ. 1, 28 mars 2013, n° 10-25.938
N° Lexbase : A2242KBN, n° 11-10.450
N° Lexbase : A2243KBP et n° 11-13.323
N° Lexbase : A2245KBR, FS-P+B+I). En l'espèce, la République argentine a conclu avec une banque américaine un contrat de service financier, destiné à l'émission d'un emprunt obligataire, contenant en annexe un modèle de contrat d'émission de titres comprenant lui-même une clause de renonciation de cet Etat à son immunité d'exécution. En 2000, l'Etat a souscrit, en application de ce contrat, deux contrats d'émission d'obligations, reprenant, en partie, le libellé de la clause de renonciation. Une société établie aux îles Caïmans et détenue par un fonds d'investissement américain a acquis des obligations provenant des deux séries d'émission résultant de ces contrats. Le juge américain a condamné l'Argentine à lui rembourser les obligations acquises. La société a fait pratiquer sept saisies conservatoires sur des créances dont une succursale argentine d'une société française est redevable auprès des autorités argentines, à titre de redevances pétrolières, du fait de son activité d'exploitation de gisements pétroliers situés sur le territoire. La société française considère que les paiements auprès de la société américaine n'ont pas d'effet libératoire sur l'acquittement de ses obligations fiscales envers l'Argentine. La Haute juridiction judiciaire relève que, selon le droit international coutumier, tel que reflété par la Convention des Nations Unies du 2 décembre 2004, sur l'immunité juridictionnelle des Etats et de leurs biens, si les Etats peuvent renoncer, par contrat écrit, à leur immunité d'exécution sur des biens ou des catégories de biens utilisés ou destinés à être utilisés à des fins publiques, il ne peut y être renoncé que de manière expresse et spéciale, en mentionnant les biens ou la catégorie de biens pour lesquels la renonciation est consentie. Or, les créances faisant l'objet des saisies conservatoires en cause se rattachaient nécessairement à l'exercice par l'Etat argentin des prérogatives liées à sa souveraineté, ces créances correspondant à des contributions fiscales ou parafiscales ayant pour origine le pouvoir régalien de l'Etat et pour vocation le financement d'autres prérogatives régaliennes. Ces créances ne sont pas expressément mentionnées dans la clause de renonciation figurant aux contrats d'émission d'obligations et au contrat de service financier. Dès lors, l'Argentine n'a pas renoncé à son immunité d'exécution sur ces créances, et la société française a bien intérêt à agir pour obtenir la mainlevée des saisies opérées par la société américaine dans la succursale argentine.
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