Lexbase Affaires n°152 du 27 janvier 2005 : Bancaire

[Panorama] Surendettement des particuliers : actualité législative et jurisprudentielle

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N4379ABS

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le 01 Octobre 2012

Comme l'affirme régulièrement le Premier ministre, la lutte contre le surendettement des particuliers est l'une des préoccupations majeures du Gouvernement. En atteste encore, en ce mois de janvier, la publication de la loi n° 2005-32 de programmation pour la cohésion sociale (N° Lexbase : L6384G49), ainsi que la proposition de loi tendant à prévenir le surendettement, déposée sur le bureau du Parlement.
  • Aspects législatifs et réglementaires

- Proposition de loi du 18 janvier 2005 tendant à prévenir le surendettement

Si le législateur s'est attaqué à encadrer le dénouement d'une situation de surendettement -notamment par l'instauration du rétablissement personnel (décret n° 2004-180 du 24 février 2004 relatif à la procédure de traitement des situations de surendettement N° Lexbase : L7994DNE)-, le dispositif normatif doit, également, se doter d'un mécanisme permettant de traiter de la prévention.

C'est l'objet de cette proposition de loi qui entend appuyer l'action du législateur sur l'information aux souscripteurs de prêts. La proposition de loi s'appuie sur le rapport de la Banque de France du 14 février 2002 qui stipule expressément que la multiplication des crédits revolving est la cause de 80 % des dossiers de surendettement. Le nombre de foyers surendettés croît chaque année, en témoigne le nombre de dossier examinés par la Commission de surendettement, ou encore le nombre de personnes inscrites au fichier des incidents de paiements liés au crédit des personnes physiques (FICP). Par conséquent, les auteurs de la proposition souhaitent responsabiliser les établissements de crédit sur l'étude de la situation financière des souscripteurs (pour plus d'information, lire le rapport n° 2034 de M. Jean-Christophe Lagarde). De même, ils espèrent, par ce biais, encadrer plus strictement le crédit revolving.

La première disposition, novatrice qui plus est, de ce texte est la création d'un nouveau cas de responsabilité du banquier (article premier). Celui-ci, en cas de non vérification de la solvabilité du souscripteur ou de la caution, engagerait dès lors sa responsabilité et ne pourrait, en cas de défaillance de ce dernier, engager de recours. Si cette disposition va dans le sens de la protection des emprunteurs, force est de constater qu'elle semble difficilement applicable. En effet, le législateur ajouterait une nouvelle obligation au banquier qui, déjà, a son lot quotidien (obligations d'information, de conseil, de vigilance). Il rendrait son travail complexe puisqu'il l'obligerait à tout contrôler sans faire d'intuitu personae, base du droit des contrats. De plus, cette disposition n'est-elle pas contraire au principe de non-ingérence du banquier dans les affaires de son client, autre obligation imposée aux établissements de crédit ? Il convient de rester prudent sur les aboutissants de cette disposition.

Par ailleurs, la proposition de loi entend rendre obligatoire un délai d'agrément de sept jours, tant pour l'établissement de crédit que pour l'emprunteur, afin que la banque ait le temps de procéder à l'étude de la solvabilité de l'emprunteur (article deux). A l'inverse, l'emprunteur peut également revenir sur son engagement.

Enfin, la proposition de loi souhaite créer un nouveau fichier intitulé "Répertoire national des crédits aux particuliers pour des besoins non professionnels". Ce répertoire offrirait une double protection aux consommateurs selon les rédacteurs du texte. D'une part, il serait géré par la seule Banque de France à l'exclusion de tout organisme privé, bancaire ou non. D'autre part, les établissements de crédit n'auraient accès aux informations que dans l'hypothèse où l'emprunteur potentiel les y aurait explicitement autorisés, interdisant ainsi tout usage commercial de ce répertoire. Cette disposition semble particulièrement judicieuse puisqu'on ne voit pas comment, à tout le moins, les établissements de crédits pourraient remplir leur obligation de vérification de la solvabilité des emprunteurs.

- Loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale

Texte d'envergure, la loi n° 2005-32 de programmation pour la cohésion sociale s'inscrit dans l'axe majeur de la politique du Gouvernement : la mobilisation pour l'emploi. Publiée au Journal officiel du 19 janvier 2005, cette loi emporte nombre de dispositions pour les demandeurs d'emploi, les chômeurs ou encore les marginaux (pour une étude sur ces points, lire Ch. Radé, Le droit du travail après la loi du 18 janvier 2005 : la cohésion sociale comme affichage, la flexibilité comme objectif, Lexbase Hebdo n° 152 du 26 janvier 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4353ABT). Plus précisément, la loi touche la législation sur le surendettement en y ajoutant trois dispositions d'inégal intérêt.

Ainsi, l'article 124 de ladite loi apporte-t-il une définition des dépenses courantes du ménage qui sont insusceptibles d'être saisies. En effet, ces dépenses doivent intégrer "le montant des dépenses de logement, de nourriture et de scolarité, dans la limite d'un plafond, selon des modalités définies par décret". L'article 125 de la nouvelle loi redéfinit le classement des créanciers puisque "les créances des bailleurs sont réglées prioritairement aux créances des établissements de crédit et aux crédits visés aux articles L. 311-1 et suivants". Enfin, l'article L. 333-4, alinéa 2, du Code de la consommation selon lequel les établissements de crédit sont tenus de déclarer à la Banque de France les incidents de paiement est complété par une disposition de la loi de cohésion sociale. Celle-ci dispose que les personnes physiques ne peuvent se voir facturer la déclaration de l'incident de paiement à la Banque de France.

- QE n° 43149 de M. Meyer Gilbert, JOANQ 06-07-2004 p. 5028, min. éco., réponse publ. 14-12-2004 p. 9976, 12e législature (N° Lexbase : L6410G48)

Le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie a été interrogé afin de rechercher les solutions nécessaires dans le cas de personnes contraintes de vendre leurs biens immobiliers en raison d'une insolvabilité temporaire. En effet, l'inscription aux fichiers de la Banque de France empêche certaines personnes de régler leur situation et ainsi d'assumer leurs dettes. L'idée avancée est alors d'éviter la vente aux enchères par un rachat temporaire du bien immobilier par une tierce structure publique. Le ministre de l'Economie n'accueille pas cette proposition, estimant que le dispositif législatif déjà en place permet de limiter les risques invoqués. En effet, et ce même si les personnes surendettés propriétaire d'un bien immobilier, ne peuvent pas bénéficier de l'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel, elles ne représentent qu'un faible pourcentage de l'ensemble des situations de surendettement. Plus avant, la procédure de rétablissement personnel, qui débouche sur un effacement total des dettes, avec ou sans liquidation des biens du débiteur, n'est réservée qu'aux cas les plus extrêmes (absence de patrimoine mobilier et immobilier, capacité contributive largement négative, etc.). Néanmoins, le ministre de l'Economie estime que les mesures nécessaires pour préserver la résidence principale du débiteur et de sa famille sont généralement mises en oeuvre par la Commission de surendettement. Par ailleurs, la Commission de surendettement peut saisir le juge de l'exécution aux fins de suspension des procédures d'exécution diligentées contre le débiteur. Enfin, le ministre d'Etat ajoute que "la vente amiable ou forcée de la résidence principale n'intervient généralement qu'en dernier recours, quand toutes les possibilités de sorite d'une situation de surendettement ont été épuisées".

  • Aspects jurisprudentiels

- Du caractère professionnel des dettes du débiteur : Cass. civ. 2, 6 janvier 2005, n° 03 -04.160 M. Jean-Paul Daublain c/ Crédit foncier de France, F-D N° Lexbase : A8700DEX.

La deuxième chambre de la Cour de cassation avait déjà affirmé dernièrement cette solution(Cass. civ. 2, 8 juillet 2004, n° 03-04.125, F-P+B N° Lexbase : A1121DDU) Ainsi, le juge de l'exécution doit appliquer ad litteram l'article L. 331-2 du Code de la consommation (N° Lexbase : L6791AB7) : en matière de surendettement, il faut statuer sur les dettes non professionnelles du débiteur. Des époux saisissent une Commission de surendettement des particuliers d'une demande de traitement de leur situation de surendettement. Les créanciers professionnels des époux forment opposition contre la décision de la Commission, celle-ci ayant déclaré recevable la demande de traitement de la situation de surendettement. Néanmoins, le juge de l'exécution accueille les recours formés par les créanciers professionnels, les dettes personnelles des époux ne pouvant être la cause de leur surendettement mais bien l'ensemble du passif professionnel de ces derniers. La Cour de cassation casse et annule le jugement au motif qu'en matière de surendettement, le juge de l'exécution doit rechercher si les dettes non professionnelles des débiteurs ne suffisaient pas à les placer en situation de surendettement.

- Bonne foi du débiteur : Cass. civ. 2, 20 janvier 2005, n° 03-20.193, M. Bernard Badini c/ Commission de surendettement des particuliers de la Haute-Garonne, F-D (N° Lexbase : A0886DGW).

Un débiteur forme un recours contre une décision de la Commission de surendettement. Cette dernière déclare irrecevable sa demande de traitement de sa situation de surendettement pour absence de bonne foi. Pour le débiteur, l'accumulation de dettes ne suffit pas pour écarter sa bonne foi comme le dispose l'article L. 331-2 du Code de la consommation (N° Lexbase : L6791AB7). Néanmoins, la Cour de cassation rejette l'argumentation de ce dernier. En effet, celui-ci ayant émis plusieurs chèques sans provision au bénéfice de différents établissements de jeux dans les semaines qui ont précédé la saisine de la commission de surendettement, en même temps qu'il multipliait les infractions routières, la Commission de surendettement ne pouvait dès lors le qualifier de débiteur de bonne foi.

Damien Mancel
SGR - Droit bancaire

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