Le Quotidien du 27 avril 2021 : Droit rural

[Brèves] Reprise des biens de famille et régime allégé de la déclaration préalable : le bien est réputé libre au jour de l'effet du congé (rappel)

Réf. : Cass. civ. 3, 8 avril 2021, n° 20-14.069, F-D (N° Lexbase : A13564PW)

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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 26 Avril 2021

► Dans le cadre du régime allégé (au regard du contrôle des structures) de la déclaration préalable applicable pour la reprise des biens de famille,  la condition du « bien libre de location » s’apprécie à la date d’effet du congé délivré au preneur ;

La Cour de cassation confirme ici une solution jurisprudentielle concernant l’application du nouveau régime de faveur de la déclaration préalable d'exploiter tel qu’issu de la loi d’avenir pour l’agriculture du 13 octobre 2014.

Rappel du contexte. Pour rappel, il résulte de l'article L. 331-2, II, du Code rural et de la pêche maritime (N° Lexbase : L4559I4M) qu'un bailleur a le droit de reprendre un bien de famille, exploité par un fermier, dans des conditions facilitées, lorsque sont remplies un certain nombre de conditions (condition de capacité ou expérience pour exploiter ; condition de détention depuis au moins neuf ans du bien dans la famille ; condition que le bien soit libre de location). Cette dernière condition (« biens libres de location au jour de la déclaration », dans sa rédaction antérieure à la loi d’avenir du 13 octobre 2014 N° Lexbase : L4151I4I) semblait s'opposer au fait que l'on puisse utiliser ce régime de faveur face à un fermier. Or, de nombreuses cours d'appel ont considéré que cette condition devait s'apprécier non à la date de délivrance du congé, mais à la date d'effet du congé. L'article R. 331-7, dans sa rédaction antérieure au décret du 22 juin 2015, prévoyait d'ailleurs que la déclaration devait être déposée dans le mois suivant le départ du fermier.

Contestant ce régime de faveur, les fermiers pensaient avoir obtenu gain de cause avec l'adoption de la loi du 13 octobre 2014, prévoyant que « les biens doivent être libres de location » supprimant les termes qui suivaient « au jour de la déclaration », et du décret attaqué ayant supprimé à l'article R. 331-7 nouveau (N° Lexbase : L9478I8K) l'indication selon laquelle la déclaration peut être déposée dans le délai d'un mois suivant le départ du fermier. Cela n'a pas empêché les juges du fond de maintenir leur jurisprudence, alors même que les dispositions qui fondaient la solution ont été supprimées (cf. CA Angers, 21 février 2017, n° 15/02196 N° Lexbase : A5950TNP : « la suppression de cette mention n'est pas de nature à changer quoi que ce soit » ; cf. également : CA Paris, 16 mars 2017, Pôle 4, 9ème ch., n° 15/22334 N° Lexbase : A4134T8M ; CA Rennes, 5 janvier 2017, n° 16/00677 N° Lexbase : A7509SYR ; CA Dijon, 16 mars 2017, n° 15/00583 N° Lexbase : A3508T8G).

Dans un arrêt rendu le 31 mars 2017 (CE 4° et 5° ch.-r., 31 mars 2017, n° 392875, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A2070UTT), le Conseil d'État a confirmé cette jurisprudence : rien ne fait donc obstacle à ce que le bénéficiaire d'une transmission attende le départ du fermier pour déposer sa déclaration. Selon le Haut Conseil, il résulte des dispositions de l'article R. 331-7 que, lorsque la transmission des terres selon l'une des modalités prévues par le II de l'article L. 331-2 (N° Lexbase : L4559I4M) s'accompagne de la délivrance d'un congé au preneur en place, l'exploitant qui bénéficie de la transmission peut valablement déposer sa déclaration avant le départ effectif du preneur, cette déclaration ne prenant effet, dans ce cas, qu'après ce départ ; le Conseil d'État ajoutait que la suppression, par le décret attaqué, de la disposition de l'article R. 331-7 qui prévoyait qu'en cas de reprise des biens par l'effet d'un congé le bénéficiaire devait adresser sa déclaration dans le mois qui suivait le départ effectif du preneur en place, ne fait pas obstacle à ce que le bénéficiaire d'une transmission attende le départ du preneur pour déposer sa déclaration.

Décision Cour de cassation. En l’espèce, par acte du 14 juin 2008, un preneur, succédant à son père, avait pris à bail des parcelles dont les bailleurs étaient une usufruitière et son fils nu-propriétaire.

Par acte du 18 avril 2014, la bailleresse usufruitière avait délivré congé au preneur pour reprise au profit de son fils à effet au 31 octobre 2015. Par acte du 14 août 2014, le preneur avait saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en annulation du congé. La bailleresse avait demandé reconventionnellement la validation de cet acte et l’expulsion du preneur.

Pour dire que le bénéficiaire de la reprise ne remplissait pas les conditions de celle-ci et en déduire que le congé était privé d’effet, la cour d’appel de Paris avait retenu que le régime déclaratif dont se prévalait le repreneur au regard du contrôle des structures ne trouvait pas à s'appliquer à un congé aux fins de reprise, dès lors que le bien en faisant l’objet ne pouvait être considéré comme libre de location (CA Paris, 4, 9, 28 novembre 2019, n° 18/16019 N° Lexbase : A9310Z4L).

Le raisonnement des juges parisiens est censuré par la Cour suprême, au visa de l’article L. 331-2, Il, 2° du Code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction issue de la loi du 13 octobre 2014.

Dans le même sens que l’arrêt précité du Conseil d’État, la Haute juridiction relève que, par l'effet du congé délivré pour le 31 octobre 2015, terme du bail en cours, les biens devaient être considérés comme libres à cette date et que leur mise en valeur par le repreneur était subordonnée à une simple déclaration préalable.

Pour aller plus loin : cf. ÉTUDE : Droit de reprise du bailleur à ferme, Obligation pour le bénéficiaire de la reprise d'être en règle avec le contrôle des structures, in Droit rural, (dir. Ch. Lebel), Lexbase (N° Lexbase : E9144E9K).

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