Le Quotidien du 8 mars 2021 : Contrats et obligations

[Brèves] Précisions sur la résolution unilatérale pour manquement grave, sous l’empire du droit antérieur à l’ordonnance du 10 février 2016

Réf. : Cass. com, 17 février 2021, n° 19-19.993, F-D (N° Lexbase : A61244HB)

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[Brèves] Précisions sur la résolution unilatérale pour manquement grave, sous l’empire du droit antérieur à l’ordonnance du 10 février 2016. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/65484545-brevesprecisionssurlaresolutionunilateralepourmanquementgravesouslempiredudroitanteri
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par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)

le 05 Mars 2021

► La rupture unilatérale du contrat en raison de la gravité du comportement du débiteur et l’octroi d’un délai de préavis par l’auteur de la rupture ne sont pas incompatibles ;
► les motifs de la résolution unilatérale peuvent émaner de correspondances entre les parties préalablement à la rupture.

Faits et procédure. Si la résolution par notification est aujourd’hui consacrée par l’article 1226 du Code civil (N° Lexbase : L0937KZQ), nombreuses sont encore les hypothèses régies par le régime jurisprudentiel dégagé avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 10 février 2016. Tel était d’ailleurs le cas des faits ayant donné lieu à l’arrêt du 17 février 2016. En l’espèce, un contrat de prestations de logistique, transport et distribution de produits avait été conclu pour une durée déterminée et prévoyait un renouvellement tacite, sauf dénonciation moyennant le respect d’un préavis d’usage. Peu de temps avant l’échéance du terme du contrat, le créancier mit un terme à la relation contractuelle, mais il octroya un délai de préavis à son cocontractant, de sorte que la rupture des relations prenait effet après le renouvellement du contrat. La cour d’appel considéra la rupture comme étant abusive, au motif (i) que les manquements, à les supposer établis, ne lui sont pas apparus suffisamment graves pour rompre le contrat sans préavis et (ii) que la lettre notifiant la rupture n’évoquait pas d’éventuels manquements graves de la société débitrice (CA Angers, 9 avril 2019, n° 18/01062 N° Lexbase : A8158Y8N).

Solution. L’arrêt est cassé au visa des anciens articles 1134 (N° Lexbase : L1234ABC) et 1184 (N° Lexbase : L1286ABA) du Code civil.

S’agissant, en premier lieu, de l’articulation entre résolution unilatérale et octroi d’un délai de préavis par le créancier. La Cour de cassation affirme que « le caractère grave du manquement d’une partie à ses obligations contractuelles, de nature à justifier la résiliation unilatérale du contrat, peut être retenu malgré l’octroi par l’auteur de celle-ci à son cocontractant d’un délai de préavis ». Deux remarques s’imposent. Il faut, d’abord, constater que l’arrêt s’inscrit dans la lignée des solutions dégagées par le passé : seul est visé la gravité du « comportement » (v. entre autres Cass. civ. 1, 13 octobre 1998, n° 96-21.485, Tocqueville N° Lexbase : A9121ARA) alors que, désormais, l’article 1226 du Code civil (N° Lexbase : L0937KZQ) vise « la gravité de l’inexécution » (sur les implications de l’évolution v. L. Andreu et N. Thomassin, Cours de droit des obligations, Gualino, 5e éd., 2020, n° 730). Ensuite, et surtout, est affirmé l’absence d’incompatibilité entre la résolution unilatérale et l’octroi d’un délai de préavis.

S’agissant, en second lieu, de motifs justifiant la rupture pour manquement grave. Reproche est fait à la cour d’appel de ne pas avoir recherché, comme elle y était invitée, « si les motifs sous-jacents de la rupture relatifs à l’importance du taux de casse ne se déduisaient pas des correspondances échangées entre les (cocontractants) préalablement à la rupture ». Il faut dès lors en déduire que, sous l’empire du droit antérieur à l’ordonnance du 10 février 2016, les motifs de la rupture n’avaient pas à être mentionnés dans la notification elle-même. La solution sera amenée à disparaître, car désormais l’alinéa 3 de l’article 1226 du Code civil dispose que « lorsque l’inexécution persiste (en dépit de la mise en demeure), le créancier notifie au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent » (sur lequel v. A. Bénabent, Droit des obligations, LGDJ, 18e éd., 2019, n° 391).

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