Réf. : Cass. civ. 2, 22 octobre 2020, n° 19-15.316, FS-P+B+I (N° Lexbase : A88423Y7)
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par Alexandra Martinez-Ohayon
le 04 Novembre 2020
► La Cour de cassation vient rappeler la règle issue des dispositions de l’article 56 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1441I8U) selon laquelle l'assignation contient, à peine de nullité, l'objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit, pour préciser que, lors d’une action engagée en paiement de dommages-intérêts et en réparation d'un préjudice résultant d'un manquement par une banque portant sur son obligation de vigilance ; les caractéristiques des investissements ne constituent pas des moyens en fait nécessaire ; la cour d’appel retenant pour l’examen des conditions de validité des actes introductifs d’instance cette exigence, porte une appréciation sur la force probante d’allégations.
Faits et procédure. Dans cette affaire, 138 investisseurs ont assigné devant le tribunal de grande instance deux banques en responsabilité, en vue d’obtenir leur condamnation in solidum à leur payer à chacun une certaine somme correspondant au montant de leur investissement, diminué le cas échéant des reversements de la société auprès de laquelle ils ont investis. Ils reprochent à cette dernière d’avoir détourné leurs investissements de leur objet. Ils invoquent des manquements commis à leur encontre, du fait de l’obligation de vigilance dans la surveillance des comptes, ouverts dans les livres des défenderesses.
Le pourvoi. Les demandeurs au pourvoi font grief à l’arrêt rendu le 10 décembre 2018, par la cour d'appel de Paris (CA Paris, 10 décembre 2018, n° 17/08416 N° Lexbase : A9404YPY), d’avoir violé l'article 56 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L9287LT7), et excédé ses pouvoirs en annulant les assignations délivrées aux défenderesses.
Dans un premier temps, les intéressés énoncent que l’assignation doit contenir « à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice, l'objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit » et que dans le cas où le juge est saisi d’une exception de nullité portant sur l’absence d’indications des moyens de fait, doit examiner ce vice de forme et apprécier la pertinence des moyens et la portée des éléments produits à l’appui tant de l’assignation que des conclusions qui la complète. En l’espèce, la cour d’appel, pour ordonner l’annulation des actes introductifs d’instance a retenu que les demandeurs n’apportaient pas de précisions suffisantes sur les caractéristiques des investissements effectués, ainsi que des explications sur le chiffrage de leurs préjudices, tant dans les assignations, que dans leurs conclusions récapitulatives.
Dans un second temps, les demandeurs énoncent le même principe, rajoutant que dans le cas d’une action en responsabilité opposant des investisseurs à une banque pour défaut de son obligation de vigilance, l’assignation doit contenir comme moyen de fait, les éléments portant sur l’explication de la faute commise et le préjudice subi, le lien de causalité. Dans le cas d’espèce, les requérants avaient soutenu que les banques auraient dû relever une anomalie du fait des mouvements du compte de la société dans laquelle ils avaient investi, et que l’absence de réaction en présence d’une activité illicite depuis l’origine avait permis à cette société d’exercer son activité plusieurs années. Bien plus, ils expliquent que leurs préjudices correspondent à la perte de leurs investissements déduction faite des remboursements perçus, et qu’il ne leur appartenait pas d’expliquer les caractéristiques des investissements effectués. En l’espèce, la cour d’appel avait relevé que les demandeurs n’avaient pas apporté de précisions suffisantes sur les caractéristiques des investissements dans leurs assignations et conclusions récapitulatives et que cette absence d'explication ne permettait pas aux défendeurs de répondre utilement.
Réponse de la Cour. Après avoir énoncé la solution précitée, la Cour suprême balaye le raisonnement des juges d’appel, du fait que les investisseurs agissaient en paiement de dommages et intérêts en réparation d’un préjudice résultant d’un manquement des banques à leur obligation de vigilance dans la surveillance de fonds argués de détournement. Dès lors, les caractéristiques des investissements ne constituaient pas des moyens en fait nécessaires à la défense des banques, au sens de l’article 56 du Code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 98-1231 du 28 décembre 1998.
Solution. Le raisonnement est censuré par la Cour suprême qui casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt d’appel.
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