Réf. : Cass. civ. 3, 23 septembre 2020, n° 19-18.031, FS-P+B+I (N° Lexbase : A51053UM)
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N4662BYC
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par Manon Rouanne
le 30 Septembre 2020
► Si, en vertu de l’article L. 222-2 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique (N° Lexbase : L2889KIT), la cession amiable consentie après déclaration d’utilité publique produit un effet identique à celui de l’ordonnance d’expropriation qui est l’extinction, par elle-même et à sa date, de tous droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés, il n’en demeure pas moins que cette cession est l’objet d’un contrat de vente de droit privé, de sorte que l’acheteur est recevable à mettre en œuvre, à l’encontre du vendeur, les actions spécifiques du droit de la vente fondées sur la garantie contre les vices cachés ainsi que sur les manquements de ce dernier à ses obligations d’information et de délivrance conforme.
Faits. En l’espèce, trois parcelles de terrain nécessaires à la réalisation de travaux d’extension d’une ligne de tramway ont, après avoir été déclarées d’utilité publique, fait l’objet d’un contrat de vente conclu entre leur vendeur et la communauté urbaine de Bordeaux. A la suite de la signature de l’acte authentique, l’acheteur, se plaignant d’une pollution du sol d’origine industrielle, a engagé, à l’encontre du vendeur, une action fondée sur la garantie contre les vices cachés ainsi qu’une action en responsabilité pour manquement de son cocontractant à ses obligations d’information et de délivrance conforme.
La cour d’appel a rejeté les demandes de l’acheteur au motif que, la cession amiable après déclaration d’utilité publique produisant les mêmes effets que l’ordonnance d’expropriation, les dispositions spécifiques au contrat de vente ne s’appliquaient pas l’occurrence, de sorte que l’acquéreur ne pouvait invoquer, au soutien de ses prétentions indemnitaires, la garantie des vices cachés ou le manquement de son cocontractant à ses obligations d’information et de délivrance conforme.
S’opposant à la position adoptée par les juges du fond, l’acheteur a, alors, formé un pourvoi en cassation en soutenant que, bien qu’une cession amiable intervenue après la déclaration d’utilité publique produise le même effet que l’ordonnance d’expropriation, à savoir l’extinction des droits réels et personnels existant sur l’immeuble en cause, elle n’en reste pas moins un contrat de vente de droit privé qui peut être annulé, rescindé ou résolu dans les conditions de droit commun. En conséquence, le demandeur au pourvoi a allégué, devant la Haute cour, son droit d’agir à l’encontre du vendeur sur le fondement d’actions relatives au droit de la vente.
Décision. Rejoignant l’argumentaire développé par le demandeur, la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel en rappelant que, bien que consentie après déclaration d’utilité publique, de sorte, qu’en vertu de l’article L. 222-2 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, elle a pour effet, à l’instar de celui d’une ordonnance d’expropriation, d’éteindre, par elle-même et à sa date, tout droit réel ou personnel existant sur les biens cédés, la cession amiable a été, néanmoins, l’objet d’un contrat de vente de droit privé (dans le même sens, v. not., Cass. civ. 3, 26 octobre 1971, n° 70-10.962 N° Lexbase : A1061CKI). Aussi, le juge du droit affirme, sur le fondement de la force obligatoire des conventions, que l’acheteur était, dès lors, fondé à engager, à l’encontre du vendeur, une action en garantie contre les vices cachés ainsi qu’une action en responsabilité pour manquement du débiteur à ses obligations d’information et de délivrance conforme.
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