Réf. : CE 2° et 7° ch.-r., 29 novembre 2019, n° 410689, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0444Z49)
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N1452BYG
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par Yann Le Foll
le 04 Décembre 2019
► Si l'ouvrage public est irrégulièrement implanté et si une régularisation appropriée est impossible, le juge doit prendre en considération, d'une part les inconvénients que la présence de l'ouvrage entraîne pour les divers intérêts publics ou privés en présence, notamment, le cas échéant, pour le propriétaire du terrain d'assiette de l'ouvrage, d'autre part, les conséquences de la démolition pour l'intérêt général, et d'apprécier, en rapprochant ces éléments, si la démolition n'entraîne pas une atteinte excessive à l'intérêt général.
Ainsi statue le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 29 novembre 2019 (CE 2° et 7° ch.-r., 29 novembre 2019, n° 410689, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A0444Z49).
Rappel. En 2018, la Cour de cassation a indiqué que la disproportion manifeste entre l'atteinte à la vie privée et familiale et au domicile par rapport aux impératifs d'intérêt général des législations urbanistique et environnementale qui résulterait de la démolition ne saurait être utilement invoquée quand la construction litigieuse est située en zone inondable avec fort aléa (Cass. crim., 16 janvier 2018, n° 17-81.884, F-P+B N° Lexbase : A8659XAX). Plus récemment, elle a estimé que l’action en démolition menée par une commune ne nécessite pas une démonstration d'un préjudice causé par les constructions édifiées sans permis de construire (Cass. civ. 3, 16 mai 2019, n° 17-31.757, FS-P+B+I N° Lexbase : A4718ZBD).
Faits. Les deux bâtiments temporaires ont été autorisés pour une durée de quatre ans et devaient être démontés au terme cette durée. Ces ouvrages ayant été maintenus sans autorisation au-delà de ce délai, ils sont irrégulièrement implantés. En outre, le ministre chargé de la Culture n'a donné son accord à la construction des bâtiments, au titre de la protection des monuments historiques et des sites, qu'en raison de leur caractère provisoire, limité à quatre ans. En outre, eu égard à l'atteinte qu'ils portent au caractère et à l'intérêt des monuments historiques et du site dans lequel ils sont implantés, un permis de construire ne saurait être délivré en vue de l'édification de tels bâtiments sans méconnaître les dispositions du règlement du plan local d'urbanisme de la ville de Paris. Par suite, l'implantation, irrégulière, des ouvrages litigieux ne peut être régularisée.
Par ailleurs, il résulte de l'instruction que le maintien de ces bâtiments préfabriqués en acier et en verre installés entre le palais des études et le jardin de l'hôtel de Chimay de l'École nationale supérieure des Beaux-Arts, classée au titre des monuments historiques, porte une atteinte substantielle à l'intérêt et au caractère de leur site d'implantation et de leur environnement proche et présente, ainsi, un inconvénient majeur pour l'intérêt public qui s'attache à la préservation du patrimoine. En outre, il n'est pas établi que, plus de dix-huit ans après l'installation des bâtiments provisoires, les travaux qui les avaient justifiés n'auraient pas pu être menés à bien ; il résulte au contraire de l'instruction que l'Etat et les établissements d'enseignement supérieurs ont décidé et engagé plusieurs programmes de travaux au cours de la quinzaine d'années ayant suivi la date à laquelle ces bâtiments devaient être démontés.
Solution. Dès lors, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la démolition des ouvrages litigieux ne saurait être regardée comme entraînant une atteinte excessive à l'intérêt général (cf. l'Ouvrage "Droit de l'urbanisme" N° Lexbase : E4942E78).
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