Réf. : AMF, décision du 25 septembre 2019, sanction (N° Lexbase : L7520LSC)
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par Vincent Téchené
le 02 Octobre 2019
► Par décision du 25 septembre 2019, la Commission des sanctions de l’AMF a infligé à une société de gestion de portefeuille une sanction de 2 000 000 d’euros au titre de manquements relatifs à l’information communiquée aux porteurs ainsi qu’à la gestion des conflits d’intérêts. La Commission a également prononcé une sanction de 1 000 000 d’euros à l’égard d’une seconde société qui intervenait aussi bien en tant qu’agent, c’est-à-dire comme intermédiaire entre les fonds prêteurs ou cédants et diverses contreparties bancaires, qu’en mode dit «principal», c’est-à-dire en tant que contrepartie des fonds en achetant ou en empruntant les titres qu’elle cédait ou prêtait à son tour à des contreparties bancaires, pour avoir méconnu l’obligation d’agir de manière honnête, loyale et professionnelle dans l’intérêt des porteurs (AMF, décision du 25 septembre 2019, sanction N° Lexbase : L7520LSC).
Depuis 2009, plusieurs des fonds gérés par la société A (société de gestion de portefeuille) recouraient à des cessions temporaires de titres prenant la forme de prêts ou de mises en pension de titres réalisés par un intermédiaire.
Les cessions temporaires de titres sont des techniques de gestion efficace du portefeuille visant à augmenter la performance d’un fonds, au bénéfice des porteurs, sans augmenter le niveau de risque supporté par ces derniers. Le prêt de titres est le contrat par lequel une personne (le prêteur) remet à une autre (l’emprunteur) une certaine quantité de titres que ce dernier s’engage à restituer par équivalent, après en avoir disposé pendant la durée du prêt. La mise en pension de titres est l'opération par laquelle un fonds (le cédant) cède en pleine propriété à un autre fonds (le cessionnaire), moyennant un prix convenu, des titres financiers. Par cette opération le cédant s'engage irrévocablement à reprendre les titres et le cédant à les rétrocéder pour un prix et à une date convenus. Dans le cadre de ce type d’opérations, le prêteur (dans le cas d’un prêt de titres) ou le cédant (dans le cas d’une mise en pension de titres) reçoit, d’une part, une rémunération, communément appelée «loyer», et d’autre part, une garantie, appelée «collatéral», qui peut prendre la forme d’espèces ou de valeurs mobilières au titre de laquelle il verse à l’emprunteur une indemnité d’immobilisation.
La société B intervenait aussi bien en tant qu’agent, c’est-à-dire comme intermédiaire entre les fonds prêteurs ou cédants et diverses contreparties bancaires, qu’en mode dit «principal», c’est-à-dire en tant que contrepartie des fonds en achetant ou en empruntant les titres qu’elle cédait ou prêtait à son tour à des contreparties bancaires. Elle était amenée à ce titre à recevoir un collatéral espèces de la part de ces dernières, qui était placé dans les livres de l’établissement de crédit dépositaire et teneur de compte des fonds et rémunéré par celui-ci à des conditions très favorables, à savoir Eonia + minimum 12,5 points de base.
Le Collège de l’AMF faisait valoir initialement que cette rémunération du collatéral espèces, appelée «rémunération complémentaire», d’un montant total de 24,7 millions d’euros, constituait un revenu résultant de techniques de gestion efficace de portefeuille et aurait dû être, en conséquence, restituée aux porteurs des fonds. Il en déduisait plusieurs griefs, notifiés à l’établissement de crédit dépositaire, aux sociétés A et B portant, selon les cas, sur la conservation par la société B de la rémunération du collatéral en méconnaissance de l’obligation d’agir dans l’intérêt des porteurs, sur l’absence de gestion des conflits d’intérêts générés par ce versement et/ou sur l’absence d’information donnée aux porteurs à cet égard.
Lors de la séance de la Commission des sanctions, le Collège a déclaré abandonner les griefs fondés sur l’obligation d’agir dans le seul intérêt des porteurs, au motif que les textes applicables à l’époque ne permettaient pas d’établir que la rémunération du collatéral perçue par la société B devait leur revenir.
Dans sa décision la Commission en a pris acte. Elle a, en outre, écarté les deux autres griefs notifiés à l’établissement de crédit ainsi que l’un des deux manquements reprochés à la société B, faute de conflit d’intérêts caractérisé entre ces derniers et les porteurs. L’établissement de crédit dépositaire des fonds a ainsi été mis hors de cause.
Elle a, en revanche, retenu à l’égard de la société B l’existence d’un manquement à l’obligation d’agir de manière honnête, loyale et professionnelle dans l’intérêt des porteurs, ces derniers n’ayant pas été informés de la rémunération perçue par elle, et a considéré que la société A avait, d’une part, délivré une information inexacte et imprécise aux porteurs relative à ces opérations et, d’autre part, méconnu son obligation de gérer les conflits d’intérêts.
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